31 mai 2013

[Édouard Garancher - Famille Chrétienne] Parier avec Pascal ?

SOURCE - Édouard Garancher - Famille Chrétienne - 31 mai 2013

«Pesons le gain et la perte, en prenant croix que Dieu est. Estimons ces deux cas : si vous gagnez, vous gagnez tout ; si vous perdez, vous ne perdez rien. Gagez donc qu’il est, sans hésiter!» Le fameux pari de Pascal, auquel l’abbé de Tanoüarn consacre son récent livre, fascine comme il peut agacer. Peu de textes ont été aussi féconds en interprétations erronées. Le Dieu des chrétiens, objet d’une gageure : il fallait, pour avoir cette audace, toute l’originalité du profil pascalien.
 
Le moraliste de Port-Royal est d’abord, en effet, un mathématicien. À 12 ans, il redécouvre par lui-même les propriétés du triangle d’Euclide. À 19, il invente la première machine à calculer de l’Histoire, la Pascaline. Dans son avidité de recherches, il se passionne, par la suite, pour les probabilités. Nous sommes en 1654, quelques mois avant le début de la rédaction des Pensées. Ce problème ne présente pas seulement un intérêt scientifique. La question va très vite le tarabuster : l’espérance mathématique tient-elle de l’espérance théologale autre chose que la minceur d’une homonymie ? La première peut-elle être une image, un comparant pour saisir la seconde ?
Le possible devient réel
L’originalité de l’abbé de Tanoüarn consiste à prendre au sérieux, sur le plan spirituel, la démarche de Pascal. Il corrige ainsi deux idées reçues. La première, celle de Voltaire, voudrait faire du pari un calcul sordide, ramenant l’aventure de la foi aux dimensions misérables de l’arithmétique. Faut-il manquer d’amour, pense-t-on en substance, pour miser sur Dieu à partir d’une comptabilité des gains et des pertes, comme on pose ses jetons sur une table de casino ! En réalité, le pari est le contraire d’un calcul. Qu’avons-nous en présence ? L’infini figure Dieu, le néant son absence. On ne peut pas plus ajouter une unité à l’infini que faire du néant un multiplicateur : les opérations s’annulent en présence de ces deux symboles. Pascal ne cherche pas à nous initier aux subtilités probabilistes : il pense que l’idée d’infini, soit-il numérique, recèle en creux l’intuition de Dieu. Il n’ambitionne pas de nous convaincre rationnellement, mais de nous faire céder à la douceur violente d’un vertige : dès lors que nous sommes en face de l’infini, même incertain, il serait déraisonnable de ne pas opter pour lui. Quelque chose en nous ne nous laisse pas le choix.
 
Le deuxième contresens est une illusion d’optique. Parce que le pari se dénouera à notre mort, nous imaginons que Pascal nous parle de l’autre monde. Rien de plus réducteur : le pari prend son efficacité dans l’instant même où nous adhérons à Dieu. Les libertins craignent de sacrifier leurs passions au chatoiement d’un mirage. Que vous arrivera-t-il ?, leur demande notre auteur. « Vous serez fidèle, honnête, humble, reconnaissant, bienfaisant, sincère, ami véritable.  » La démarche de conversion n’est pas seulement un choix en faveur de l’infini de Dieu, mais une première expérience de cet infini. « Le possible devient réel », écrit Tanoüarn : le croyant s’aperçoit qu’il possède déjà ce qu’il espère.
 
Alors, est-ce un grand danger, comme disait Simone Weil, d’aimer Dieu comme un joueur aime le jeu ? L’affaire n’est pas entendue. Il existe des jeux de providence comme des jeux de hasard. La dimension ludique est inséparable de la vie. Pascal le sait bien, devenu scientifique par loisir, en s’amusant à résoudre les problèmes. L’abbé de Tanoüarn nous le décrit, souriant et grave, enjoué et réfléchi. La spiritualité n’échappe pas à la règle, à condition de prendre son risque, d’engager toute sa vie, sans lésine. C’est la chandelle qui doit valoir le jeu.
 
Au fond du pari, on découvre ainsi une sensibilité mystique du renoncement à soi où l’on attendait un esprit spéculateur : c’est la belle clé de lecture que nous propose ce livre. 

[Lettre aux Amis et Bienfaiteurs du séminaire St-Curé-d'Ars] Entretien avec M. l'abbé Patrick Troadec

SOURCE - Lettre aux Amis et Bienfaiteurs du séminaire St-Curé-d'Ars - 31 mai 2013

Qui dispense la formation aux séminaristes et aux frères ?
Abbé Troadec - A Flavigny, nous sommes quatre prêtres. Monsieur l'abbé LAURENÇON donne les cours d'Écriture Sainte, Monsieur l'abbé GODARD enseigne la liturgie et Monsieur l'abbé BERTHE la patrologie. Quant à moi, je donne les cours de spiritualité et des actes du magistère. Pour le latin, les séminaristes sont répartis en trois niveaux, avec pour enseignants Monsieur l'abbé LAURENÇON, Monsieur l'abbé BERTHE et le Frère Cyrille-Marie. Les cours de chant grégorien sont donnés par Frère Benoît.
Chaque année, vous recevez une nouvelle promotion. Sont-elles toutes semblables ?
Les promotions se ressemblent dans le sens où l'on retrouve chaque année la même fraîcheur, la même générosité, le même enthousiasme, fruits du don premier que le séminariste a fait de sa vie à Dieu. La première année est un petit peu comme la période des fiançailles avec le bon Dieu. Cependant, il y a chaque année une note dominante. Par exemple, cette année, c'est le nombre d'étrangers en proportion du nombre de Français. Au début de l'année, nous avions 8 étrangers sur les 19 nouveaux séminaristes et frères. L'année précédente, c'était le nombre de convertis qui était relativement important.
Avez-vous constaté des différences entre les jeunes gens qui entrent au séminaire aujourd'hui et ceux que vous avez connus en arrivant à Flavigny il y a 17 ans ?
Les séminaristes d'aujourd'hui sont aussi pieux, généreux et réceptifs que ceux que j'ai connus à mes débuts. Cependant, certaines caractéristiques de la jeunesse, propres à leur époque, marquent une partie d'entre eux. Ainsi, il y a quinze ans, je parlais de séminaristes à la mentalité « fast-food », c'est-à-dire recherchant dans le domaine intellectuel une nourriture prédigérée. Ils avaient plus de mal à aborder des sujets spéculatifs que la génération précédente. Cinq ans plus tard, des séminaristes ont manifesté une tendance au « zapping », due à des difficultés de concentration. Par exemple, il est plus difficile aujourd'hui de choisir en lecture de table un livre de 400 pages qu'il y a dix ans, ou encore de donner une longue série de conférences sur un même thème.

Il y a deux ans, certains séminaristes ont manifesté une tournure d'esprit liée à mon avis à l'usage assidu d'Internet. Vivant à l'ère de « clic », ils ont appris à chercher des réponses à leurs questions sur Google. Résultat : des séminaristes, dès leur entrée au séminaire, souhaiteraient des réponses toutes faites à des questions d'ordre philosophique, théologique ou touchant la crise de l'Église, alors qu'ils n'ont pas encore le bagage intellectuel suffisant pour les comprendre. De plus, ils n'ont pas toujours le sens des nuances. L'ordinateur est binaire, mais la réalité est plus complexe. Dès que l'on parle de Dieu et des mystères de la religion, on utilise des termes analogiques et non des termes univoques.

Ainsi, l'usage abusif d'Internet rend plus difficile pour certains séminaristes l'acquisition de la science philosophique et théologique. À cela s'ajoute la crise d'autorité qui touche aujourd'hui non seulement la société civile mais l'Église elle-même. La perte du sens de l'autorité peut également être préjudiciable pour la formation de certains séminaristes.

Heureusement, ces faiblesses sont loin de toucher l'ensemble des séminaristes, et elles peuvent s'estomper, voire disparaître avec le temps par la formation dispensée au séminaire, et surtout par le contact intime que le séminariste entretient avec Notre Seigneur Jésus-Christ.
Préférez-vous que les jeunes gens entrent tout de suite au séminaire après le bac ou qu'ils fassent des études supérieures ?
Il n'y a pas ici, à mon avis, de réponse toute faite. La vocation peut être comparée à un fruit. Elle mûrit progressivement. Il y a donc deux écueils à éviter : celui de le cueillir trop tôt et celui de le cueillir trop tard.

Lorsqu'un jeune homme est issu d'une bonne famille et a été formé dans une école foncièrement catholique, il n'est pas rare qu'il ait dès la sortie des études secondaires la maturité suffisante pour entrer au séminaire, malgré son jeune âge. Cependant ce n'est pas le cas de tous. Dans certains cas, la vocation n'est pas suffisamment assurée ; d'autres fois, c'est la vertu qui n'est pas encore enracinée, ou le bagage intellectuel qui est insuffisant ; ou encore le jeune homme a un esprit collégien… Bref, de nombreux motifs peuvent me conduire à faire attendre un candidat.

Il arrive aussi que malgré certains manques, j'invite le candidat à entrer au séminaire dès la fin de ses études secondaires lorsque je vois que le monde pourra mettre en péril sa vocation ou encore lorsqu'un défaut sera plus facilement corrigé au séminaire que dans le monde.

J'ajoute que les séminaristes français issus du milieu de la Fraternité qui entrent au séminaire dès la fin de leur scolarité y bénéficient de la présence de jeunes gens plus âgés, de convertis et d'étrangers, ce qui est pour eux source d'enrichissement.
N'est-ce pas fastidieux de redonner l'esprit sacerdotal à chaque promotion, puisque les séminaristes de Flavigny n'ont pas sous les yeux l'exemple de leurs aînés ?
En 1996, d'aucuns pensaient que c'était une gageure de réduire le nombre d'années de séminaire à Flavigny de trois à une. En réalité, les premières années ont été plus laborieuses que les suivantes en raison de mon inexpérience et du petit nombre de personnes encadrant les séminaristes : nous n'étions que trois prêtres et un seul frère profès. Mais depuis quelques années, l'acquisition du savoir est grandement facilitée par l'augmentation du nombre de frères. Ces derniers assurent la direction de la chorale, le rôle d'organiste, l'encadrement de la sacristie et ils permettent la transmission de l'esprit et des coutumes de la maison en vivant constamment près des séminaristes. Les frères sont un bel exemple pour les séminaristes par leur fidélité au règlement du séminaire, par leurs compétences dans l'exercice de leurs charges et par leur bon esprit. Au-delà de leurs tâches matérielles, ils communiquent aux séminaristes l'esprit religieux, ce qui est très important pour les séminaristes de première année, celle-ci étant une sorte de noviciat. Mgr LEFEBVRE, qui était religieux, a voulu donner aux membres de la Fraternité un esprit religieux.
Comment expliquez-vous que vous ayez toujours autant de vocations malgré la fondation depuis 25 ans d'autres communautés traditionnelles qui célèbrent la messe selon le rite de saint Pie V ?
Nous accueillons à Flavigny des jeunes gens qui pour la plupart viennent de nos bonnes familles et ont reçu une excellente éducation dans des écoles foncièrement catholiques. C'est le vivier principal du Séminaire.

Cependant, nous avons un nombre non négligeable de jeunes gens qui frappent à notre porte et proviennent d'horizons très divers. Internet est à ce propos un moyen aujourd'hui très courant pour se faire connaître de personnes provenant de milieux étrangers à la Tradition. Quand on leur demande pourquoi ils ont choisi la Fraternité Saint-Pie X, ces jeunes gens nous répondent qu'ils ont constaté que si la Tradition est encore aujourd'hui vivante dans l'Église, c'est grâce à Mgr LEFEBVRE. Aussi ils se tournent spontanément vers la Fraternité qu'il a fondée. Un autre argument avancé souvent par eux pour justifier leur choix, c'est la cohérence qu'ils voient dans la Fraternité entre le discours et la pratique. Ils voient que la Fraternité non seulement bénéficie de la liturgie traditionnelle, mais enseigne intégralement la doctrine catholique et combat les erreurs modernes présentes aujourd'hui jusque dans l'Église. Par ailleurs, ils comprennent que l'obéissance aux autorités légitimes est subordonnée à l'enseignement intégral de la foi catholique. Voilà pourquoi ils ne se laissent pas impressionner par les censures qui ont touché les membres de la Fraternité à partir de 1976. De plus, la liberté accordée en 2007 par le Motu proprio du pape Benoît XVI de célébrer la messe tridentine, qui avait été interdite dans les faits pendant près de 40 ans, la levée du décret d'excommunication des quatre évêques sacrés par Mgr LEFEBVRE en 2009, tout cela contribue à rassurer les plus timorés. Ils se disent que l'heure viendra où Rome reconnaîtra la Fraternité pour ce qu'elle est, à savoir une oeuvre d'Église qui n'a d'autre ambition que de communiquer aux âmes la foi transmise de façon inchangée pendant vingt siècles et de protéger les fidèles des erreurs modernes qui se sont infiltrées à l'intérieur même de l'Église depuis le concile Vatican II.
Quels conseils donneriez-vous aux parents pour favoriser l'éclosion d'une vocation dans leur foyer ?
Le prêtre est essentiellement le ministre de la messe. Or la messe est à la fois la prière par excellence et le sacrifice de Notre-Seigneur renouvelé sur nos autels : la piété et le dévouement jusqu'au sacrifice sont donc les deux principales dispositions à développer chez les enfants.

À cela, j'ajoute une vigilance particulière des parents dans l'acquisition de la pureté chez leurs enfants. Vu les sollicitations multiples au péché, que ce soit dans la rue par l'indécence des modes, que ce soit au cinéma ou au théâtre par les mauvais spectacles, que ce soit chez soi par le biais de la télévision, des DVD ou d'Internet, il est aujourd'hui plus que nécessaire de fortifier et de protéger la vertu de nos jeunes. L'impureté, en même temps qu'elle fait perdre l'innocence, assène à la vocation un coup qui peut être mortel.

Enfin, je rappellerai que si la grâce perfectionne la nature, elle la présuppose. Aussi, que les parents travaillent à acquérir dans leur foyer un bel équilibre tant au plan naturel que surnaturel. C'est ce qui assurera chez leurs enfants cette même harmonie, gage des plus belles vocations et source de beaux foyers catholiques.

Voilà en quelques mots, bien chers amis et bienfaiteurs, une présentation rapide du Séminaire Saint-Curé-d'Ars. Mes confrères prêtres, les séminaristes et les frères se joignent à moi pour vous dire notre reconnaissance pour votre aide spirituelle et matérielle.

Abbé Patrick Troadec, Directeur,

Le 31 mai 2013, en la fête de Marie Reine

30 mai 2013

[Les Amis du Monastère - F. Louis-Marie, osb, abbé du Barroux] Béni ou maudit

SOURCE - Les Amis du Monastère - F. Louis-Marie, osb, abbé du Barroux - 30 mai 2013

Bienheureux les pauvres en esprit ! Oui, bienheureux ceux qui se savent pauvres de lumière et sentent le besoin d’être instruits par la vérité qui vient d’en haut, ils ne prétendent pas la fabriquer à coup de fausses lois. Bienheureux ceux qui cherchent la loi inscrite dans la nature humaine et le cosmos. Bienheureux, car le royaume des cieux leur sera donné par la lumière qui divinise ! Maudits au contraire les riches en esprit qui se prennent pour des dieux, car qui s’exalte sera humilié.

Bienheureux les doux ! Oui, bienheureux ceux qui agissent en respectant la nature des choses. Ils cherchent l’harmonie entre le ciel et la terre, entre l’âme et le corps, entre l’homme et la femme. Bienheureux celui qui, respectant l’altérité féconde, participe au mystère de l’unité. Bienheureux sont-ils car ils posséderont la terre de leur corps, de leur famille et de leur cité. Maudits au contraire les dictateurs qui forcent la nature à main levée. Qui sème la violence récoltera le chaos.

Bienheureux ceux qui pleurent ! Oui, bienheureux ceux qui voient le mal en face et qui en sont émus jusqu’au fond de leur conscience. Ils sont capables de dire « non » avec force et sont capables de prendre des coups. Bienheureux ceux qui pleurent à cause des gaz lacrymogènes, car ils seront consolés par la suavité de la mission accomplie et par ces paroles de Dieu : « Entre dans la joie de ton Maître ! » Maudits les insensibles au bien et au mal, surtout quand il touche les plus petits, car tous les sophismes ne suffiront pas à calmer le feu éternel de leur conscience.

Bienheureux ceux qui ont faim et soif de justice, ceux qui travaillent à défendre les droits fondamentaux, tout particulièrement ceux des plus faibles : les embryons, les enfants et les vieillards. Ils veulent, comme saint Benoît, que cette justice soit inscrite dans la loi. Oui, bienheureux, car ils recevront une juste récompense qui dépasse tout ce qui est monté au cœur de l’homme. Et maudits ceux qui construisent la cité sur le sable mouvant des passions désordonnées. Ils recevront le châtiment de leurs propres actions et de toutes leurs conséquences.

Bienheureux les miséricordieux, ceux qui aiment leur frère et haïssent les vices. Ils prennent sur eux le péché du monde à l’imitation de Jésus-Christ. Bienheureux les Veilleurs qui chantent l’espérance dans les ténèbres, car il leur sera fait miséricorde pour eux et pour le monde. 

Maudits ceux qui prônent la loi du plus fort, car viendra un beaucoup plus fort qu’eux.

Bienheureux les cœurs purs. Oui, bienheureux ceux qui ont du bon sens, qui possèdent ce que le pape Jean-Paul II appelait la grammaire universelle de la morale. Ils laissent passer dans leur vie et dans leurs actes la lumière de la loi supérieure. Bienheureux car ils verront Dieu, Lumière éternelle et béatifiante. Maudits les cœurs tordus et opaques, car ils seront plongés dans les ténèbres extérieures.

Bienheureux les pacifiques ! Oui, bienheureux ceux qui donnent au monde la paix construite sur la base de la filiation et non sur un prétendu droit à l’enfant. Bienheureux, car ils seront appelés fils de Dieu et ils entreront dans la grande fraternité des saints. Maudits ceux qui profanent ce lien, car ils finiront dans la solitude éternelle.

Bienheureux, enfin, ceux qui souffrent persécution, les frappés, les insultés, les méprisés, les ignorés. Bienheureux, car le royaume des cieux leur appartient. Ils ne perdent rien de ce qui est grand, et ils jugeront le monde à la droite du Seigneur. Maudits les persécuteurs, car ils seront persécutés par les démons.

+ F . Louis-Marie, osb
abbé

29 mai 2013

[Credidimus Caritati] Mgr Lefebvre : Qu'ils trouvent chez vous une assistance compréhensive

SOURCE -  Credidimus Caritati - 29 mai 2013

La première épître de saint Paul aux Corinthiens fait penser à l’attitude de Mgr Marcel Lefebvre : « La charité ne fait rien de messéant, elle ne cherche pas son intérêt, elle ne s’emporte pas, elle ne tient pas compte du mal. Elle ne prend pas plaisir à l’injustice, mais elle trouve sa joie dans la vérité. Elle excuse tout, elle croit tout, elle espère tout, elle endure tout. » Ces quelques mots résument l’attitude d’un prélat avenant qui a fondé sa consolation sur la foi, n’a pas lorgné sur les défauts de ses confrères, n’a jamais nourri aucune rancune ni aigreur et ne s’est pas attaché à indisposer maladroitement. Fort de ses cinquante ans d’activité missionnaire, le fondateur de la Fraternité Saint-Pie X invitait ses séminaristes à faire preuve de mansuétude et de patience envers les nouvelles recrues, malgré leurs défauts, malgré leur mauvaise formation éventuelle. Le tentateur invite-t-il à s’impatienter et à s’exaspérer sur les défauts de ceux qui n’épousent pas les canons de nos préjugés ? Nous pousse-t-il à forcer le trait sur notre voisin de banc ou sur notre prochain ? Mgr Lefebvre répond de manière simple, vivant pleinement sa devise : « Et nous, nous avons cru en la charité » :
« Si j’ai demandé à ceux qui viennent d’arriver aujourd’hui de ne pas être présents à cette conférence, c’est parce que je voulais précisément vous donner quelques conseils à leur propos. Quelles doivent être les relations que vous devez avoir avec ceux qui arrivent ? Eh bien, je pense que vous devez d’abord les accueillir le plus charitablement possible, le plus aimablement possible, vous faire leurs guides car ils sont un peu perdus dans la maison. Et, dans le règlement, il y a bien des détails qu’ils ne connaissent pas. Par conséquent, vous devez les aider, ils doivent trouver chez vous une assistance compréhensive et surtout – chose plus importante encore – avec le temps, vous les connaîtrez davantage, vous constaterez chez eux certainement ce qui s’est trouvé chez vous aussi.

« Il y a parmi les quarante qui sont là toute une gamme d’opinions, de manières de voir les choses ; il y en a qui n’ont aucune difficulté à s’assimiler à la maison parce qu’ils se sont trouvés dans un milieu dans lequel ils étaient déjà comme s’ils étaient au séminaire, du moins avec les mêmes pensées, les mêmes idées ; leurs parents pensaient comme eux, comme nous : il n’y a pas de difficultés, donc ils se trouvent ici dans leur milieu, sans aucun hiatus, sans aucune difficulté. Mais il faut comprendre aussi et il faut être très charitable et très compréhensif pour ceux qui n’ont pas eu ce bonheur, qui n’ont pas eu cette grâce de se trouver dans un milieu qui d’emblée s’est opposé aux réformes et qui a voulu maintenir la tradition de l’Église. Alors il y en a certainement qui auront un peu de peine à se faire au milieu, soit à cause du latin soit à cause de l’ambiance qu’ils peuvent trouver ici. Alors, aidez-les et ne les rebutez pas ! Ne soyez pas durs avec eux ou ne leur faites pas de reproches, ne les considérez pas comme des gens qui ne sont pas à leur place ici comme si vous aviez, vous, à les juger.

« Il faut donc au contraire savoir les comprendre qu’il y en a qui peuvent avoir un peu de difficultés à assimiler les idées et la manière de penser, de voir les choses comme on les voit ici. Mais vous pouvez faire beaucoup dans un sens ou dans l’autre : vous pouvez aider ceux-là à mieux assimiler les principes qui vous sont donnés ici, et vous pouvez au contraire les éloigner et peut-être un jour, je dirais, les contraindre à partir et, peut-être, par conséquent, avoir brisé une vocation soit par manque de compréhension, par manque de charité, par rudesse, par un peu d’orgueil. Alors, il faut les comprendre ! Et s’il y en a qui vous disent des choses qui vous paraissent maintenant inadmissibles et qui sont à juste titre inadmissibles, laissez-les parler ! Et, tout doucement, faites leur voir les difficultés, les objections de ce qu’ils disent et, tout doucement, les amener, leur donner, leur faire venir la lumière que vous avez et dont vous profitez ici et non pas tout de suite prendre une position ego contra : « Mais comment ? C’est inadmissible ! Mais comment pensez-vous des choses comme ça ? Mais votre place n’est pas ici ! »

« Évidemment, Qu’est-ce que vous voulez qui arrive dans la situation actuelle ? Il faut bien se dire que ce sera de plus en plus comme ça et ceux qui sortent des écoles catholiques ne savent plus rien, non seulement ne savent plus rien mais ont une foi déformée ! Alors c’est déjà une grâce pour eux de venir ici, d’être attirés et d’avoir la grâce et le courage de venir à Écône. Ils ont peut-être été très réprimandés par leur entourage, réprimandés par des prêtres : « Mais comment ? Aller à Écône ? Enfin ! On n’a pas idée de ça ! Il ne faut pas y aller ! Ce sont des gens qui sont hors de l’Église ! Vous allez chez des schismatiques, chez des hérétiques ! »

« Alors eux ont eu le courage de briser ces obstacles et de venir quand même à Écône et, quelquefois, malgré leurs parents. Alors si maintenant ils arrivent ici et qu’ils sentent un manque d’affection, un manque de compréhension, une dureté de la part du milieu dans lequel ils se trouvent, ça les rejette dans leur milieu. Au lieu de les attirer, ça les rejette et ils pourraient peut-être dire à juste titre : « Ah voilà ! C’est ça, c’est ce qu’on m’avait dit du milieu intégriste. Ce sont des gens durs, austères, qui n’ont pas de compréhension, pas de charité, ils ne font de quartiers pour rien, il est absolument impossible de parler avec eux, impossible d’avoir une conversation aimable… » Alors il ne faut pas que ce soit comme cela. Ce sont là des manières de faire qui font preuve d’un manque d’humilité et d’un manque de charité.

« Nous ne devons jamais nous enorgueillir des dons et des grâces que le bon Dieu nous a faits car ils ne viennent pas de nous, c’est le bon Dieu qui nous les a données et nous devons précisément essayer de les communiquer aux autres, essayer de faire que les autres puissent avoir les grâces et les dons que le bon Dieu nous donne ! Alors je tenais à vous dire cela parce que, depuis hier déjà, j’ai déjà pu parler avec certains de ces jeunes et je me suis très bien rendu compte que pour certains d’entre eux, déjà, les simples cérémonies auxquelles ils ont assisté les déroutent complètement. Il y en a qui n’ont jamais assisté à une cérémonie en latin, ils ne savent pas ce que c’est ! Alors évidemment vous, vous trouvez cela tout à fait normal mais certains d’entre eux n’ont jamais assisté à une cérémonie en latin, c’est un monde nouveau dans lequel ils entrent. Alors aidez-les à entrer dans ce monde nouveau, dans ce monde qu’est l’Église ! Aidez-les à entrer et n’agissez pas de telle manière qu’ils se croient obligés de partir. »
Conférence aux séminaristes d’Écône, 5 octobre 1974

28 mai 2013

[Paul Auprot - politiquemagazine.fr] Le gouvernement a ouvert la boîte de Pandore, entretien avec l'abbé de Tanoüarn

SOURCE - Paul Auprot - politiquemagazine.fr - 28 mai 2013

Entretien avec l'abbé Guillaume de Tanoüarn, directeur du Centre Saint-Paul, le dimanche 26 mai à 20 heures 35 sur l'esplanade des Invalides 
Monsieur l'abbé, peut-on connaître  votre réaction sur cette journée, sur cette manifestation ?
Partout on attendait que la tension baisse, que le combat s'achève finalement faute de combattants ; on avait essayé de dire que ce serait une journée très dangereuse à cause des extrémistes ; il n'y a eu pour l'instant aucun débordement, un peu d'excitation. Il y aura sans doute à nouveau des arrestations puisqu'ils ne savent faire que cela ; ils n'écoutent pas et ils arrêtent. C'est la stratégie du ministre de l'Intérieur ; on a vu la manière dont il a traité le cardinal Vingt Trois en personne lorsque le cardinal a été invité à donner son avis et qu'il a été moqué, au fond, par le système.  Ce système se sent fort, se sent sûr de son bon droit, mais ce soir il y a quand même un vent de liberté qui souffle et cela fait plaisir ; et ce qui est bien avec le vent, c'est qu'on ne peut pas l'arrêter, il passe à travers tout...
Est-ce le vent du Saint Esprit ?
Je ne suis pas Lamennais, je ne confonds pas le Saint Esprit et la politique, mais je crois quand même que c'est un signe qu'il y a un mystère français, un mystère de la France. Dans n'importe quel autre pays, cette loi n'a pas fait un pli, mais en France cela réveille une énergie cachée.
Vous rejoignez donc ce qu'a dit tout à l'heure Ludovine de La Rochère, Présidente de La Manif Pour Tous, lorsqu'elle a évoqué le réveil de l'âme de la France ?
Oui, c'est tout à fait cela, la France est un pays qui a une âme.
Et pour les mois à venir, quel est votre avis, faut-il continuer ce combat qui n'a pas d'oreille en face ?
Il faudra évidemment faire au moins une fois par an une manifestation de cette ampleur pour empêcher que la loi continue à faire régresser notre société, pour empêcher ce que Béatrice Bourges appelle « l'effet domino », parce le fait que l'on combatte ce soir n'est pas inutile ; nous gagnons et nous gagnerons du temps encore et encore sur ce que le pape François appelle le « plan satanique » de déshumanisation de l'homme, en fait.
Donc au-delà du Mariage pour Tous ?
Oui, car après il y a la PMA, la GPA, les lois de bioéthiques... Au fond, l'homme refuse sa nature, c'est ça le problème. Ce qui est bien c'est que c'est autour d'un petit symptôme qu'est le mariage homosexuel que tout s'est noué sans attendre des choses beaucoup plus graves qui vont venir. Et la mobilisation de ce soir est de très bon augure, parce que si les gens sont là ce soir c'est évidemment à cause de la loi Taubira, mais c'est aussi  pour l'avenir. Et ils sont attentifs, ils sont vigilants.
C'est une ouverture de la résistance, puisque ce mouvement a été appelé ainsi aujourd'hui : on l'ouvre sur toutes les menaces...
Oui, quand d'un côté on ouvre une boîte de Pandore, on voit que de l'autre côté existe une vraie vigilance... bravo pour ce que vous faites !

[DICI] Un pèlerinage inondé de grâces

SOURCE - DICI - 28 mai 2013

Bien qu’il ait lieu tous les ans à la même époque, le pèlerinage de Pentecôte procure aux fidèles chaque année ses grâces particulières. Celui de 2013, consacrée à saint Joseph, fut peut-être encore plus particulier… « Il y a trois mots pour qualifier les trois jours que nous venons de vivre : de la boue, de la boue, de la boue ! » nous dit Estelle, 23 ans, qui en est revenue exténuée. A tel point qu’elle a dû reporter un important entretien professionnel, prévu le mardi matin. « Impossible d’y aller », nous souffle-t-elle plusieurs jours plus tard, à peine remise de l’épreuve.
 
Les choses furent aussi difficiles pour André, 47 ans: «En 30 ans de pèlerinage, c’est la première fois que je découche le dimanche soir. » Pour Vincent, 18 ans, «c’était Verdun!». Avec non plus les Allemands en face, mais le démon et son arme de toujours : «la tentation!». Quelle tentation ? «La fuite. Déserter aussi vite que possible.» Emprunter le sentier qui mène à la gare la plus proche «et rentrer chez soi», retrouver la chaleur du foyer et… «des vêtements secs. Surtout des vêtements secs». Il faut dire que dès le samedi, le temps était froid et humide. «Le soir, une femme originaire de Budapest voulait absolument rentrer chez elle » raconte Christine, 42 ans. «Il était 22 h. et on lui a expliqué qu’il était un peu tard pour prendre le train et trouver un vol pour la Hongrie. Mais elle a insisté!» Au final, une famille qui habite non loin du campement s’est proposée pour l’héberger. «On l’a bien nourrie, dorlotée et après une nuit de repos, elle était à nouveau sur les routes le lendemain matin.»
 
Et c’est le dimanche que les choses sont devenues particulièrement difficiles pour tout le monde. La pluie a commencé à tomber intensément vers 16 h. et ne s’est plus arrêtée, à tel point que la messe en a été perturbée. Beaucoup de fidèles n’ont pas pu communier en raison de la pluie battante. « Il y avait une famille de Mexicains, qui passe une année en Europe, ainsi que des Espagnols des îles Baléares et Canaris, qui n’étaient pas du tout habitués à un tel froid et qui ne s’y attendaient pas vraiment », nous raconte Christine. Avec la pluie et le terrain très humide, la boue était omniprésente. Il y avait également un Philippin venu seul de son pays spécialement pour marcher trois jours durant sous une pluie battante. « Edifiant », nous avoue Estelle.
 
Des Allemands étaient présents en nombre, «toujours bien organisés, avec leurs tentes bien démontées à temps, et prêts à l’heure le matin pour prendre leur place dans la colonne. C’était plus dur pour moi» concède Vincent, venu avec ses cousins. «Au moment où notre chapitre devait partir, nous commencions à peine notre petit déjeuner…» Et le soir, «on mangeait comme on pouvait. On m’a dit que les Belges ne se déplaçaient jamais sans leur friteuse sur le pèlerinage. Mais, à mon grand regret, je n’ai pas pu le vérifier.»
 
L’arrivée sur Paris s’est faite également dans une fraîcheur quasi hivernale. « J’étais soulagée d’arriver mais j’étais tellement frigorifiée ! », explique Estelle. Heureusement la Croix Rouge était là et a pu fournir des couvertures de survie aux pèlerins qui souffraient trop du froid, notamment le dimanche soir.
 
Pour André, «les plus impressionnants, c’étaient les Lituaniens». Marchaient-ils plus vite ? Priaient-ils plus intensément? «Cela, je ne peux pas vous le dire : mais ils sont venus en car… de Lituanie! Et le plus fort est qu’ils repartaient en car… en Lituanie!»
 
Et saint Joseph ? «Il m’a portée pendant ces trois jours», nous confie Estelle. «Sans lui, jamais je n’aurais pu arriver à destination» concède Vincent. «Et l’arrivée était belle!» Christine l’a bien remarqué : les étrangers «étaient ravis de passer sous la tour Eiffel!», mais surtout il faut noter que malgré l’épreuve physique, «nos jeunes chantaient toujours avec entrain à l’arrivée dans Paris. C’était beau à voir… et à entendre!»
 
O Joseph, ô gardien  fidèle de Jésus enfant comme nous,
Nous t’en supplions à genoux : sois notre appui, notre modèle.
Veille sur nous, garde nous, sauve nous !
Veille sur nous ; Joseph protège nous

[Paix Liturgique] La guerre liturgique ne sera pas rallumée: un article de 'Il Foglio' sur une réponse du pape François à propos du Motu Proprio

SOURCE - Paix Liturgique - lettre n°389 - 28 mai 2013

Dans notre souci d’information sur tout ce qui touche à la liturgie, nous sommes heureux de donner tout de suite au public français la traduction d'un article paru dans Il Foglio ce matin même (mardi 28 mai 2013), dans la presse transalpine, et qui en dit plus que mille rumeurs.
L’article d’Il Foglio commente en l’amplifiant un article de Sandro Magister sur son blog, le 25 mai : même s’il ne porte pas le même attachement que son prédécesseur à la liturgie, comme ses célébrations journalières semblent l'indiquer, il est très clair que le nouveau Pape entend ne pas faire bouger les lignes. Sa réponse à une question un peu naïve d’un évêque des Pouilles qui a voulu le piéger en lui faisant critiquer le Motu Proprio Summorum Pontificum, révèle au passage qu’il a subi de fortes pressions pour écarter le Cérémoniaire de Benoît XVI. Ce à quoi le Pape n'a pas cédé, concluant une espèce de modus vivendi tacite avec Mgr Guido Marini.

Ainsi donc, le message est clair : comme la seconde édition du pèlerinage Summorum Pontificum à Rome nous le montrait clairement (voir notre lettre précédente), la guerre liturgique ne sera pas rallumée.Tout ceci, au total, est très positif, et le pape François entend bien être le Pape de tous sans rejet ni exclusive. MERCI TRÈS SAINT PÈRE !
«PAS TOUCHE À LA MESSE TRADITIONNELLE! LE PAPE FRANÇOIS SURPREND ENCORE TOUT LE MONDE»
28 mai 2013 : Les évêques des Pouilles demandent le retrait du Motu Proprio de Ratzinger. Bergoglio dit non : l'Église a autant besoin de l'ancien que du nouveau (source : http://www.ilfoglio.it/soloqui/18390)
François et le latin
Qui pensait, avec l'arrivée sur le Siège de Pierre du jésuite sud-américain Jorge Mario Bergoglio, voir la messe en latin dans sa forme extraordinaire mise au placard pour toujours, s'est fourré le doigt dans l'œil. Il n'est pas question de toucher au Motu Proprio Summorum Pontificum de Ratzinger de 2007, et le missel de 1962 de Jean XXIII – qui est l'ultime version du missel tridentin de saint Pie V – est sain et sauf. Cette liturgie où le célébrant est tourné vers Dieu et non vers le peuple, où la balustrade sépare les bancs des fidèles du presbytère, n'est pas une vieillerie à reléguer dans un musée poussiéreux. C'est le Pape lui-même qui l'a dit il y a quelques jours, à l'occasion de sa rencontre avec les évêques des Pouilles lors de leur visite ad limina apostolorum comme le font tous les évêques tous les cinq ans.

Comme l'a écrit sur son blog le vaticaniste Sandro Magister, les évêques des Pouilles ont été les plus loquaces [à propos de leur rencontre avec le Pape] avec le clergé comme avec la presse. La semaine dernière, l'évêque de Molfetta, Luigi Martella, a raconté que François était prêt à signer d'ici la fin de l'année l'encyclique sur la Foi à laquelle Benoît XVI serait en train de mettre un point final dans le calme du monastère Ecclesia Mater. Mgr Martella a même ajouté que Bergoglio avait déjà en tête une seconde encyclique, qui serait consacrée à la pauvreté et intitulée "Beati pauperes". Ces déclarations ont obligé le Saint-Siège à démentir, rectifier et préciser, le père Lombardi invitant à ne penser qu'à « une encyclique à la fois ».
C'est ensuite l'évêque de Conversano e Monopoli, Domenico Padovano, qui a raconté au clergé de son diocèse que la priorité des évêques de la région avait été d'expliquer au Pape que la messe traditionnelle créait de graves divisions au sein de l'Église. Sous-entendu : il faut supprimer Summorum Pontificum ou, tout du moins, fortement le limiter. Sauf que François a dit non.

C'est toujours Mgr Padovano qui le dit, expliquant que le Pape leur a demandé de demeurer vigilants sur l'extrêmisme de certains groupes traditionalistes tout en les invitant à « faire trésor » de la Tradition et à créer les conditions pour que celle-ci puisse vivre avec l'innovation. À ce propos, comme l'écrit Magister, Bergoglio aurait même raconté les pressions subies après son élection pour éloigner le Maître des cérémonies pontificales, Guido Marini, décrit au Pape comme un traditionaliste à renvoyer à Gênes, la ville qu'il abandonna à contre-cœur en 2007 pour répondre à l'appel de Benoît XVI qui le voulait à Rome. Là encore, le pape François a signifié son opposition à tout bouleversement du bureau des cérémonies pontificales. Et il l'a fait pour « tirer profit de la vision traditionnelle » [de Monseigneur Marini] et permettre au doux et réservé cérémoniaire de « bénéficier de ma formation plus émancipée ».

La différence culturelle est indéniable : le jésuite qui, par tradition ignacienne, "nec rubricat nec cantat", se retrouve soudainement catapulté dans une réalité qui, au cours de ces huit dernières années, a vu patiemment et lentement remis à l'honneur des éléments liturgiques abandonnés au fil des trente ou quarante années précédentes, justifiant ainsi ceux qui voient le Concile aussi comme une rupture liturgique. Le fil conducteur des célébrations de Benoît XVI peut se résumer dans la synthèse entre solennité et sobriété : le retour des sept chandeliers et du crucifix central sur l'autel et les invitations à ne pas applaudir [durant la messe] en sont un exemple. Et puis le latin, langue de l'Église, utilisé pour les célébrations non seulement à Rome mais partout sur le globe, y compris en Afrique. En mars, beaucoup, en voyant le visage fermé de Marini lors de la première apparition de Bergoglio à la Loge des Bénédictions, sans camail ni étole, avaient annoncé sa mise à l'écart imminente. En revanche, le pape François sait bien que Rome n'est pas Buenos Aires et que la fonction pontificale requiert de maintenir un minimum d'apparat symbolique ancré dans l'histoire et la tradition millénaire de l'Église catholique. 


La continuité qui ne plaît pas à tous
La restauration survenue durant le pontificat de Benoît XVI ne plaît pas à tous, y compris à l'intérieur de la cité léonine. Monseigneur Sergio Pagano, préfet des Archives secrètes du Vatican, expliquait ainsi, le 7 mai dernier, en marge de la présentation de la constitution "Humanae salutis" convoquant le Concile, que « quand je vois aujourd'hui sur certains autels des basiliques ces sept chandeliers de bronze qui dominent la Croix, je me dis que l'on a encore compris bien peu de choses de la constitution "Sacrosanctum Concilium" sur la liturgie ». Voici pourquoi quelqu'un comme Mgr Felice Di Molfetta, évêque de Cerignola-Ascoli Satriano – qui, depuis toujours, considère la messe dans la forme extraordinaire incompatible avec le missel de Paul VI, expression ordinaire de la lex orandi de l'Église catholique de rite latin – a récemment fait savoir à ses fidèles qu'il avait vivement félicité le pape François « pour le style de ses célébrations, inspiré de la noble simplicité voulue par le Concile».


25 mai 2013

[Mgr Williamson - Commentaire Eleison] Damnation éternelle - II

SOURCE - Mgr Williamson - Commentaire Eleison - 25 mai 2013

Il est inutile de nous berner que nous autres êtres humains nous puissions sonder le mystère de la damnation d’une seule âme, encore moins celle de la majorité des hommes qui vivent et meurent, mais on peut évoquer certaines vérités qui rendent plus facile d’accepter que nous sommes en présence d’un mystère au-delà de toute possibilité de connaissance purement humaine.

La clef du mystère se trouve sûrement dans la grandeur infinie du Bon Dieu, ou son manque de toute limite. S’il est bien infini, alors l’offenser, c’est commettre une offense qui est sous un certain angle sans limites. Or la seule façon dont un être humain fini puisse souffrir infiniment, c’est que la souffrance soit sans fin dans le temps. Donc il y a une certaine proportion entre toute offense grave commise contre Dieu et un châtiment éternel.

Dans l’abstrait, il n’est pas tellement difficile pour la raison humaine de saisir l’infinité ou le manque de limites du Bon Dieu. Nous sommes entourés d’effets qui exigent une cause. Mais un enchaînement de causes ne peut continuer à l’infini, pas plus qu’une chaîne de maillons sans fin ne peut se suspendre sans crochet au plafond. Donc il doit y avoir une Cause Première, et celle-ci nous l’appelons Dieu. Mais si cette Cause Première était composée de parties, alors il aurait fallu pour les mettre ensemble un compositeur qui eût précédé la Cause Première, ce qui est contradictoire. Donc Dieu n’est d’aucune façon composé, il ne peut être que l’Existence pure et simple. Mais l’existence en tant que telle n’est pas limitée. Donc toute limite imposée à la Cause Première exigerait un être qui l’eût précédé pour la lui imposer – encore impossible. Donc l’être de la Cause Première n’a pas de limites. Dieu est l’Existence sans limites.

Dans le concret pourtant il n’est pas si facile pour nos esprits humains de saisir l’infinité divine. Ceux-ci fonctionnent à longueur de journée à partir de créatures limitées et finies. Ce n’est qu’en dirigeant nos cœurs et esprits vers Dieu que nous manions dans notre pensée l’infini. De là vient par ailleurs cette difficulté que nous avons si souvent de prier, parce que nous ne pouvons penser à la Bonté sans fin qu’en pensant à une bonté limitée qui soit proche de nous, et en élaguant ensuite ses limites. Par exemple, Dieu est aussi beau qu’un coucher de soleil, mais infiniment plus beau.

Il s’ensuit que plus nous nous laissons accaparer par la vie quotidienne, moins nos esprits et cœurs auront de possibilité de saisir ce qui ou ce qu’est le Dieu caché derrière tous les êtres limités qui tissent notre vie quotidienne. Au contraire, plus nous appliquons nos esprits et cœurs à connaître et aimer la Bonté illimitée qui se situe nécessairement derrière toutes ces bontés limitées qui constituent notre vie de tous les jours, plus nous aurons d’accès au mystère de la bonté infinie de Dieu et au mystère qui lui correspond de l’ingratitude de tant de ses créatures humaines.

Donc pour diminuer, sans nullement sonder, le mystère de la damnation éternelle des âmes, j’ai besoin de suivre l’exemple de St Dominique, et de prier. Prier ne signifie pas ici s’illusionner que Dieu a raison alors qu’en réalité il a tort. Il signifie accéder à la vérité, à savoir que c’est lui qui a raison et moi – qui ai tort !

Les Exercices Spirituels de St Ignace aident puissamment à diriger le cœur et l’esprit vers Dieu. Il y a un Saint qui a prié plus ou moins ainsi : « O amour, vous n’êtes pas aimé. Que vous fussiez aimé ! Donnez-moi seulement de vous aimer comme il faut, et faites ensuite de moi ce que vous voudrez. »

Kyrie eleison.

23 mai 2013

[SPO] Saint-Pierre de Rome : Messe extraordinaire le 26 octobre

SOURCE - SPO - 23 mai 2013

La direction du pèlerinage Summorum Pontificum vient d’annoncer un programme prévisionnel pour les journées d’octobre, au cours desquelles il se déroulera. Comme vient de le faire Paix liturgique (lettre 388, 22 mai 2013), nous publions ce programme.

Programme du pèlerinage :
  • Jeudi 24 octobre, soirée : Vêpres solennelles de saint Raphaël et accueil des pèlerins à la Trinité-des-Pèlerins.
  • Vendredi 25 octobre, 8 heures : Chapelet à Sainte-Marie-Majeure, suivi de visites culturelles et spirituelles par groupes linguistiques.
  • Vendredi 25 octobre, 17 heures : Via Crucis dans les rues de Rome, guidée par les membres de l’Opera Familia Christi de don Riccardo Petroni, l’œuvre qui a la charge de la messe dominicale en la chapelle du Palais Altemps.
  • Vendredi 25 octobre, 19 heures : Messe pontificale à la Trinité des Pèlerins.
  • Samedi 26 octobre, à partir de 8 heures : Adoration eucharistique à San Salvatore in Lauro, suivie de la procession vers la Basilique Saint-Pierre. 11h : messe pontificale dans la Basilique Saint-Pierre, à l’autel de la Chaire.
  • Dimanche 27 octobre matin : messe pontificale pour la fête du Christ-Roi, célébrée par Mgr Rifan, administrateur apostolique de la communauté Saint-Jean-Marie-Vianney de Campos (Brésil).
Des précisions pour faciliter l’organisation du voyage des pèlerins et leur logement seront données ultérieurement.

Il est clair que si les organisateurs du pèlerinage Summorum Pontificum publient ces informations, c’est qu’ils ont obtenu confirmation des autorisations pour la célébration dans la Basilique vaticane et qu’un éminentissime célébrant a donné son accord pour l’assurer.

Ce sera un véritable triduum extraordinaire : trois messes pontificales seront ainsi célébrées à Rome, le 25 octobre (à la Trinité-des-Pèlerins), le 26 octobre (à Saint-Pierre de Rome), et le 27 octobre par Mgr Rifan, dans une basilique romaine non encore déterminée. Avec en outre une foule de messes extraordinaires célébrées durant ces jours dans la Ville par tous les prêtres qui se joindront au pèlerinage.

Paix liturgique remarque à juste titre que c’est la troisième année consécutive qu’une messe pontificale extraordinaire sera célébrée à Saint-Pierre, à l’autel de la Chaire (2011 : congrès Summorum Pontificum ; 2012 : 1er pèlerinage Summorum Pontificum ; 2013 : 2ème pèlerinage Summorum Pontificum) : cette messe pontificale en forme extraordinaire annuelle dans la Basilique du Pape devient coutumière.

Mais il faut surtout souligner, qu’en cette première année du pontificat du Pape François, cet acte liturgique dans la Basilique vaticane, selon toute vraisemblance avec un grand concours de peuple – du peuple Summorum Pontificum ! – prend une signification de continuité toute particulière. Plus que jamais, la liturgie traditionnelle est présente in medio Ecclesiae.

22 mai 2013

[Credidimus Caritati] Sermon de Mgr Lefebvre pour la Pentecôte: l’action de l’Esprit Saint en nous

SOURCE - Mgr Legebvre (17 mai 1975) via Credidimus Caritati - 22 mai 2013

Membre de la Congrégation des Pères du Saint-Esprit, Mgr Marcel Lefebvre nourrissait une grande dévotion pour la troisième personne de la Sainte Trinité. Il voyait en elle celle qui transforme les hommes. Sine tu nomine, nihil est in nomine. A l’occasion d’un sermon de la vigile de la Pentecôte, le fondateur de la Fraternité Saint-Pie X insistait en ces termes sur les fruits de l’action du Saint Esprit sur les âmes :
« Et les apôtres se sont donc réunis au Cénacle pour attendre la venue de l'Esprit Saint. Car c'est cela que Notre Seigneur voulait leur donner. Le Ciel avait disparu de leurs yeux et presque de leurs cœurs. Or c’est précisément le Ciel que Notre Seigneur voulait leur donner et leur donner par l'Esprit Saint.

« Car ce n'est pas autre chose que l'Esprit Saint dans nos cœurs : c'est le Ciel dans nos cœurs. C'est le Paradis commencé dans nos âmes. Si nous comprenons bien ce qu'est le Saint-Esprit et la grâce que le Bon Dieu nous donne par l'Esprit Saint dès le jour de notre baptême et par tous les sacrements que nous recevons et particulièrement dans la Sainte Communion, nous comprendrions que c'est le Ciel que nous recevons.

« Les apôtres ont été remplis de l'Esprit de Jésus au moment de la Pentecôte et le Ciel a donc pris possession de leurs âmes et de leurs cœurs et jamais plus ils ne sont séparés de cet Esprit Saint et de Jésus. Ils ont compris tout ce que Jésus leur avait dit. Ils ont compris ce qu'était le Ciel par rapport à la terre ; ce qu'était l'esprit par rapport à la chair ; ce qu'étaient ces biens ineffables, ces biens éternels, devant les choses temporelles. Ils ont compris. Jusque là, ils n'avaient pas compris.

« Et quelle fut l'influence du Saint-Esprit dans leurs âmes ? C'est saint Paul qui nous le décrit par deux fois. Une fois lorsqu'il énumère les différents fruits du Saint-Esprit dans nos âmes. Je ne pourrai vous les énumérer tous, mais il parle de la patience, de la bénignité, de la mansuétude, de la paix, fruits du Saint-Esprit dans les cœurs. Et il le redit lorsqu'il parle des avantages de la charité, des qualités de la charité:

Caritas patiens est, benigna est, caritas omnia suffert, omnia crédit, omnia sperat (I Co XIII, 4): « La charité est patiente, la charité souffre, la charité croit, la charité espère, la charité aime, la charité demeure toujours ». Voilà ce que saint Paul énumère et décrit de la charité, décrit de l'Esprit Saint. Et c'est cela l’Esprit Saint. C'est à cela que nous reconnaîtrons si nous avons l'Esprit Saint en nous. Si nous sommes humbles, doux, charitables, paisibles. Voilà les fruits que Notre Seigneur donne à ceux qui reçoivent le Saint-Esprit. »
Mgr Marcel Lefebvre
17 mai 1975

[Paix Liturgique] D'un pèlerinage à l'autre - Octobre 2013: Mgr Rifan avec le peuple Summorum Pontificum à Rome

SOURCE - Paix Liturgique - lettre n°388 - 22 mai 2013

Alors que les pèlerins de Chartres, saintement épuisés, rendent grâces pour les trésors spirituels reçus durant le week-end de Pentecôte, le pèlerinage du peuple Summorum Pontificum à Rome, en octobre, se prépare.

Nous nous y arrêtons cette semaine, en prenant prétexte du programme prévisionnel publié par les organisateurs, auquel nous ajoutons le contenu original d'un entretien donné la semaine dernière à la presse par le délégué général du Cœtus Internationalis Summorum Pontificum, Giuseppe Capoccia. Nous vous présentons la traduction de ces deux documents suivie de nos commentaires.

[En raison de l'actualité, la suite de notre portrait consacré à l'abbé Lourdelet et à l'Opus sacerdotale paraîtra la semaine prochaine.]
I – PROGRAMME PRÉVISIONNEL DU PÈLERINAGE DU PEUPLE SUMMORUM PONTIFICUM D’OCTOBRE 2013 À ROME
Cette année, outre la procession et la messe à Saint-Pierre, les temps forts du pèlerinage seront la Via Crucis (Chemin de Croix) dans les rues de Rome le vendredi et la messe de clôture, le dimanche de Christ-Roi, qui sera célébrée par Monseigneur Rifan, évêque de l'Administration apostolique Saint-Jean-Marie-Vianney de Campos au Brésil.

Jeudi 24 octobre, soirée : Vêpres solennelles de saint Raphaël et accueil des pèlerins à la Trinité-des-Pèlerins.

Vendredi 25 octobre, 8 heures : Chapelet à Sainte-Marie-Majeure, suivi de visites culturelles et spirituelles par groupes linguistiques.

Vendredi 25 octobre, 17 heures : Via Crucis dans les rues de Rome, guidée par les membres de l'Opera Familia Christi de don Riccardo Petroni, l'œuvre qui a la charge de la messe dominicale en la chapelle du Palais Altemps.

Vendredi 25 octobre, 19 heures : Messe pontificale à la Trinité des Pèlerins.

Samedi 26 octobre, à partir de 8 heures : Adoration eucharistique à San Salvatore in Lauro, suivie de la procession vers la basilique Saint-Pierre où sera célébrée la messe pontificale à 11 heures.

Dimanche 27 octobre matin : messe pontificale pour la solennité du Christ-Roi, célébrée par Mgr Rifan, administrateur apostolique de la com
munauté Saint-Jean-Marie-Vianney de Campos (Brésil).


Les organisateurs annoncent aussi d'autres activités, dont un concert en l'église de la Trinité des Pèlerins et, sous réserve, des rencontres pour le clergé et les laïcs le samedi après-midi. Le programme complet du pèlerinage sera communiqué lors de la conférence de presse qui se tiendra le mercredi 26 juin à Rome. Grâce au soutien de l'Opera Romana Pellegrinaggi, des précisions pour faciliter l’organisation du voyage des pèlerins et leur logement seront données ultérieurement.
II – ENTRETIEN AVEC GIUSEPPE CAPOCCIA, délégué général du Coetus internationalis Summorum Pontificum [*]
Voici, en version française, l'intégralité de l'entretien donné par le délégué général du Cœtus Internationalis Summorum Pontificum, organisateur du pèlerinage à Rome, à Alessandro Speciale, de Vatican Insider.

1. Quel regard porte le peuple Summorum Pontificum sur l'élection du pape François et ses premiers mois de pontificat ?

Comme tant de catholiques, nous avons été déconcertés par la renonciation de notre bien-aimé Benoît XVI. Et, pour nous aussi, l'élection de François, grandement méconnu jusque là, a été une surprise. Nous avons donc été très attentifs, depuis, à tous ses gestes comme à toutes ses paroles. Et je dois dire que ses paroles nous ont immédiatement rassurés : il a parlé du diable qui s'agite contre nous mais ne peut rien contre la miséricorde divine ; il nous a invités à ne pas perdre confiance en l'amour de Dieu ; il nous a appelés à « sortir » de notre routine pour aller vers les périphéries de l'existence ; et nous a mis en garde contre le risque de devenir des « collectionneurs d’antiquités ou de nouveautés au lieu d’être des pasteurs pénétrés de “l’odeur de leurs brebis”, au milieu de leur propre troupeau, et des pêcheurs d’hommes ».

Chacun des sermons du pape François nous appelle à vivre avec une plus grande intensité et cohérence notre vie chrétienne. Le peuple Summorum Pontificum ne peut qu'apprécier et recevoir avec joie cet appel. En effet, c'est précisément par désir de renouveler et de soutenir notre vie spirituelle que beaucoup d'entre nous ont choisi de vivre leur propre foi au rythme de la liturgie traditionnelle. Comme l'avait bien compris Benoît XVI, nous sommes nombreux à chercher le Christ à travers une liturgie plus digne et imprégnée d'un plus grand sens du sacré. 
 
2. Que pensez-vous de son style liturgique ? Son pontificat prend-il une direction opposée à celle de Benoît XVI ?

Il serait hypocrite de nier que si, d'un côté, les paroles de François nous donnent du courage, de l'autre, certains de ses gestes nous déconcertent. Nous comprenons que certains expriment quelque malaise mais, en tant que fidèles sensibles à la tradition, donc attachés au long terme, nous voulons éviter de nous laisser piéger par l'immédiateté. Le pape actuel vient d'une culture liturgique et pastorale différente de celle qui se pratique à Rome et il faut lui laisser le temps de s'approprier la tradition liturgique pontificale.

Par ailleurs, il ne faut pas réduire la liturgie à une question de style car ce qui prime, c'est la solidité et la valeur théologiques du rite même. Enfin, il est évident que chaque pontificat a ses spécificités. Si Benoît XVI considérait la crise de la liturgie comme cause et révélateur de la crise de la Foi, il ne nous semble pas, cependant, que François manifeste le contraire. Il n'y a qu'à penser au fait que la grande publicité donnée, avec la permission du Pape lui-même, à sa messe quotidienne à Sainte-Marthe, retentit comme un appel clair à tous les catholiques, prêtres comme laïcs, à prendre conscience que seule l'Eucharistie est source d'évangélisation. 
 
2 bis. D'autres expressions du monde traditionnel sont très critiques envers le pape, à commencer par la Fraternité Saint-Pie X : qu'en dites-vous ?

Plus que de critiques véritables, au sens de critiques doctrinales, nous avons plutôt lu et entendu des incompréhensions et des inquiétudes. Souvent, il faut dire, il s'agit de réactions fondées sur de fausses informations, comme celle qui annonçait le renvoi de l'actuel cérémoniaire pontifical ou la nomination de son prédécesseur à la tête de la Congrégation pour le Culte divin ! Internet favorise malheureusement ces réactions à chaud qu'alimente une certaine ivresse à l'idée de pouvoir se faire entendre du monde entier.

En ce qui concerne la Fraternité Saint-Pie X, ses déclarations officielles nous ont semblé plutôt mesurées et prudentes. Nous ne sommes cependant pas surpris que l'un ou l'autre se soit laissé aller à des commentaires plus durs mais les motivations en sont peut-être plus à rechercher dans les rivalités internes à la Fraternité que dans une réelle défiance à l'encontre du Saint Père.

3. Comment a été accueilli le précédent pèlerinage et pourquoi recommencez-vous cette année ?

L'an dernier, nous avons voulu témoigner notre communion de Foi et notre proximité avec Benoît XVI, le Souverain Pontife qui a redonné son plein droit à la liturgie traditionnelle. Nous entendions également affirmer l'existence d'un peuple Summorum Pontificum au sein du grand troupeau catholique ; un peuple qui exprime sa joie de faire partie, à part entière, de l'Église catholique, apostolique et romaine. Notre initiative était aussi une participation convaincue à la Nouvelle évangélisation voulue par Jean-Paul II et Benoît XVI. Enfin, nous espérions aussi concourir au retour de la Fraternité Saint-Pie X dans le giron romain.

Comme il arrive souvent avec les initiatives nouvelles, certains de nos amis nous ont regardé avec méfiance tandis que le cardinal Cañizares, préfet de la Congrégation pour le Culte divin, comme le Saint-Père, nous ont démontré leur bienveillance : le premier en déclarant, avant de célébrer à Saint-Pierre, qu'il le faisait tout simplement parce que c'était “normal” ; le second en nous adressant, via le cardinal Secrétaire d'État, un message de bienvenue.

Cette année, nous souhaitons réaffirmer notre pleine disponibilité au défi de la Nouvelle évangélisation. Par bien des aspects, le peuple Summorum Pontificum ressemble aux nouveaux mouvements nés après le concile Vatican II, fruits d'une meilleure prise de conscience du rôle des laïcs dans la vie de l'Église : il attire à lui beaucoup de familles, souvent nombreuses, il est caractérisé par un grand dynamisme pastoral et est ferment de multiples vocations aussi bien religieuses que sacerdotales. Il nous semble donc essentiel que cette ressource soit mise à profit, aussi bien dans les diocèses que dans les paroisses.

4. Combien de personnes attendez-vous?

Nous espérons avoir 3000 personnes le samedi, jour de la procession et de la messe à Saint-Pierre et misons sur au moins 500 pèlerins étrangers à l'Italie venant pour les trois jours du pèlerinage. Nous aurons une idée plus précise des effectifs fin juin quand nous présenterons le programme officiel.

5. Que voulez-vous manifester au monde catholique en général par votre initiative ?

Pendant des années, les fidèles et les prêtres liés à la tradition liturgique de l'Église ont été marginalisés et traités avec mépris si ce n'est haine, ils ont été maintenus aux périphéries de l'Église et nul ne devait s'en approcher. Nous désirons contribuer à la guérison définitive des blessures provoquées durant ces années de persécution et d'injustice, et il nous semble plus opportun de le faire en nous intégrant à la dynamique nouvelle que nous propose le pape François et l'Église plutôt qu'en revendiquant. Nous souhaitons témoigner, dans la joie et en esprit de service, de l'unité de l'Église.

Dans le cadre particulier du nouveau pontificat, nous voudrions également illustrer combien la forme extraordinaire du rite romain est un outil adapté à la redécouverte de la pauvreté à laquelle nous appelle le pape François : s'agenouiller, supplier, se taire, confesser, sont quatre attitudes caractéristiques aussi bien de la messe traditionnelle que de la pauvreté spirituelle. La redécouverte de ce que saint François disait de la liturgie – n'oublions pas que c'est lui qui fit connaître le missel romain en dehors de la Cour pontificale – pourrait aider à comprendre encore mieux ce qu'est la pauvreté chrétienne, la pauvreté d'esprit qui fait de nous comme des mendiants du Christ qui vient à notre rencontre dans la liturgie et nous offre Sa splendeur, nous ouvrant les portes du Ciel où se trouve la vraie richesse. Ce n'est pas un hasard si le dernier saint à avoir célébré la messe traditionnelle toute sa vie durant a été Padre Pio, reflet fidèle de saint François.

Dans les diocèses et les paroisses, de nombreux fidèles sont en quête d'une nourriture spirituelle que la forme extraordinaire du rite romain pourrait leur offrir mais ils ne la connaissent pas et, bien souvent, n'ont même pas l'occasion de la connaître car certains pensent qu'elle est inadaptée à notre époque, qu'elle n'est pas "populaire" voire qu'elle est élitiste et un peu snob. En revanche, la nouveauté pérenne de la liturgie traditionnelle a encore beaucoup à offrir à l'Église : en ce sens, notre pèlerinage est un signe important, non seulement pour le peuple Summorum Pontificum mais aussi pour tous, surtout en ces temps de Nouvelle évangélisation..

III – LES RÉFLEXIONS DE PAIX LITURGIQUE

1) Remarquons au passage que si le pèlerinage Summorum Pontificum fait célébrer pour la deuxième fois une messe à l’autel de la Chaire, à Saint-Pierre, une messe dans la forme extraordinaire avait déjà été célébrée en 2011 à ce même autel, à l’issue du colloque sur le Motu Proprio conduit par le père Nuara, aujourd'hui officiel de la commission Ecclesia Dei. 2011, 2012, 2013 : la messe pontificale traditionnelle annuelle auprès de la Tombe de Pierre est en passe de devenir une tradition romaine. Le pèlerinage entre d’ailleurs cette année dans la programmation de l'Opera Romana Pellegrinaggi, qui offre ses services pour le bon déroulement des pèlerinages sur la tombe de l'apôtre.

2) Nous ne cachons pas que Paix liturgique apprécie grandement le fait que ce pèlerinage du peuple Summorum Pontificum soit un pèlerinage pour tous, qui s’adresse à des pèlerins individuels, prêtres, séminaristes, fidèles, des communautés comme des paroisses les plus diverses. Les organisateurs nous ont dit vouloir mettre en valeur les « paroisses spécialisées », autrement dit les paroisses personnelles pour la forme extraordinaire, en ce qu’elles montrent à toutes les autres paroisses que la forme extraordinaire, selon l’esprit et la lettre de Summorum Pontificum, a toute sa place dans le cadre pastoral normal. C’est la raison pour laquelle ils ont invité Mgr Rifan, évêque d’un « diocèse spécialisé », une administration apostolique vouée à la forme extraordinaire, comme un signe donné aux autres diocèses pour qu’ils fassent toute sa place, de manière habituelle, à la messe traditionnelle.

3) Sans présumer du concert ni des conférences du samedi après-midi, nous remarquons que le programme que nous communiquent les organisateurs est cette année plus riche, notamment avec les visites par groupe linguistique du vendredi matin et le Chemin de Croix qui, d'après nos informations, devraient prendre place sur la colline du Palatin.

4) L’entretien de Giuseppe Capoccia fait allusion avec beaucoup de finesse à une querelle née en Italie sur le thème « Les traditionalistes sont contre le pape François ». En réalité, nous avons pu observer que l’inquiétude née de la renonciation de Benoît XVI, auquel on ne saurait trop rendre grâces d'avoir initié le redressement de la liturgie romaine, a surtout touché le clergé diocésain qui œuvrait en ce sens et a craint de se retrouver isolé, ne pouvant plus dire, par exemple, à ses paroissiens : « Comme le fait le Pape, je célèbre face au Seigneur et je donne désormais la communion sur les lèvres. »

Les propos du délégué général du pèlerinage et l’existence du pèlerinage lui-même ont l’avantage de montrer que les choses peuvent et vont continuer dans la même direction. Comme le dit Giuseppe Capoccia, le nouveau Pape découvre beaucoup de choses en arrivant à Rome. À nous de lui faire filialement découvrir la réalité croissante de cette sensibilité liturgique (nous usons toujours de ce terme dans sa valeur la plus forte : expression du sens de la foi) à la fois jeune, fervente, missionnaire, féconde en vocations, colonne vertébrale de familles très chrétiennes et référence potentielle pour la rénovation de la liturgie des paroisses.
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[*] Giuseppe Capoccia, magistrat de Lecce, dans les Pouilles, a succédé à Riccardo Turrini Vita, haut fonctionnaire italien appelé par Benoît XVI comme juge auprès de la Cour d'appel du Vatican. Giuseppe Capoccia est l'un des animateurs de la Scuola Ecclesia Mater.

20 mai 2013

[Mgr de Galarreta, fsspx] "Confesser, défendre et édifier la Sainte Eglise catholique"

SOURCE - Mgr de Galarreta, fsspx - sermon à Münich - 20 mai 2013

Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit,

Très chers confirmands, très chers fidèles,

Hier, nous avons célébré la fête, le mystère de la Pentecôte, la descente du Saint-Esprit sur les apôtres, sur la Sainte Eglise, l'effusion des dons du Saint-Esprit. Or la Confirmation, le sacrement de la Confirmation est vraiment comme une Pentecôte, personnelle, individuelle, où nous recevons essentiellement les mêmes dons que les apôtres.

Il y a donc une sorte de consécration de l'âme, une sanctification, une élévation surnaturelle, avec une plénitude de vie chrétienne. Et en même temps, il y a la mission, la donation, l'inhabitation du Saint-Esprit Lui-même dans nos âmes. Nous voyons les apôtres qui sont remplis des lumières, des vérités de foi, remplis d'amour, de charité, de zèle pour Dieu et pour les âmes. Nous les voyons remplis de force, de courage. Ils sont vaillants. Voilà les effets de la Confirmation, cette participation aux perfections du Saint-Esprit. Et en même temps, nous les voyons remplis du Saint-Esprit Lui-même car ils sont le Temple et la Demeure du Saint-Esprit. L'apôtre saint Paul a ces paroles, adressées à tous les chrétiens :

« Ne savez-vous pas que vous êtes le Temple de Dieu et que le Saint-Esprit habite, demeure en vous ? Ne savez-vous pas que vous êtes Temple de Dieu, Demeure du Saint-Esprit ? » Et il ajoute : « Si quelqu'un viole le Temple de Dieu, Dieu le perdra... Dieu le détruira, car le Temple de Dieu est Saint, et vous, vous êtes ce Temple. »

Ce sont les paroles de saint Paul.

Donc, chers fidèles, à la Confirmation, il y a une plénitude de grâces de Dieu, mais il y a aussi une plénitude de cette présence, de ces dons, de cette inhabitation du Saint-Esprit dans nos âmes qui fait que nous, que vous, vous êtes beaucoup plus Temple du Dieu que cette Eglise... Beaucoup plus Temple de Dieu que cette Eglise même. Que cette plénitude du Saint-Esprit Lui-même et des dons du Saint-Esprit, vous les recevrez, chers confirmands, pour remplir un triple office, un triple rôle. Le confirmé est témoin, il doit donc professer publiquement, confesser publiquement, il est serein, donc il doit lutter, surtout il doit défendre et il est apôtre, c'est-à-dire il doit propager, il doit transmettre, il doit diffuser. Témoin, soldat, apôtre, et ces triples offices, vous les recevez essentiellement par rapport à trois choses. Par rapport à la foi, à la foi catholique, à la vraie foi, à la doctrine, à la Tradition. Par rapport à Notre-Seigneur Jésus-Christ Lui-même, et par rapport à la Sainte Eglise. Comme vous devez confesser, défendre, propager la vraie foi, vous devez confesser publiquement, défendre le droit et propager le Règne de Notre-Seigneur Jésus-Christ. Vous devez confesser, défendre et édifier la Sainte Eglise catholique. Et cette extraordinaire mission que nous recevons de Notre-Seigneur, de la Sainte Eglise. Et la Sainte Eglise, c'est pour ça que c'est l'évêque qui donne ce sacrement, pour bien mettre en valeur cet office qui a en vue le bien commun de la foi et de l'Eglise.

Il y a donc un premier combat auquel vous êtes invités, obligés, c'est le combat pour la vie chrétienne, pour la vertu chrétienne, le combat pour la vie de la grâce. Ce combat est avant tout un combat spirituel, surnaturel, et pour vous-mêmes et pour les autres. Ensuite, il y a un combat public, pour la foi, pour Notre-Seigneur, et pour l'Eglise, qui vous oblige à vous opposer , non seulement et jusqu'à un certain point, aux ennemis extérieurs, mais même et surtout aux ennemis intérieurs. C'est précisément pour défendre la vraie foi, pour défendre les droits de Notre-Seigneur Jésus-Christ qui est Dieu, pour défendre la Sainte Eglise, et les droits de la Sainte Eglise.

Aujourd'hui nous sommes obligés de nous opposer à ceux, autorités ecclésiastiques comprises, à ceux qui ont introduit les principes humanistes, les principes libéraux, philosophiques. Pluralisme philosophique, politique, juridique... tout cela s'oppose, et à la vraie foi, et aux droits de Notre-Seigneur Jésus-Christ, et aux droits de la Sainte Eglise. Et nous sommes obligés de nous opposer, nécessairement, et fermement, à cet équivalent théologique du libéralisme révolutionnaire qui est le modernisme. Le modernisme c'est une hérésie - c'est saint Pie X qui le dit, ce n'est pas moi - c'est une hérésie qui traduit dans l'ordre théologique, les erreurs laïcistes, les erreurs révolutionnaires... Liberté, égalité, fraternité... Eh bien, nous sommes obligés, tant que les autorités ecclésiastiques continuent d'adhérer à ces erreurs, tant qu'ils dirigent la Sainte Eglise à la lumière de ces erreurs, nous sommes obligés de par notre baptême, de par notre confirmation, à résister, à nous opposer, à lutter... c'est ça le combat de la foi.

C'est cela le combat de la foi. Nous ne le faisons contre personne, mais c'est parce que nous adhérons à la vraie foi, à Notre-Seigneur Jésus-Christ, Dieu, Homme, Souverain-Prêtre, Roi... C'est parce que nous défendons l'Honneur de Dieu, l'Honneur de Notre-Dame ; c'est parce que nous défendons, la Sainte Eglise, catholique, apostolique et romaine que nous sommes obligés par le fait même de nous opposer à ceux qui sont en train de détruire, démolir de fond en comble tous ces biens-là. Notre position n'est ni compliquée, ni bizarre. C'est une simple conséquence d'une foi et d'une fidélité à notre foi.

Il faut donc que nous demandions plus que jamais le secours de Notre-Dame. Un confirmé est un soldat du Christ-Roi et il est aussi un soldat de l'Immaculée, de la Vierge Marie. Et s'il y a eu un temple parfait du Saint-Esprit et de Dieu, s'il y a un Temple parfait du Saint-Esprit et de Dieu, c'est bien le Cœur de Marie. Nous honorons justement dans cette dévotion au Cœur Immaculé de Marie ce Temple parfait, ce Temple par excellence où se trouve Dieu, qui est la Demeure de Dieu, ce Temple qui est le Cœur de Marie, rempli de la Très Sainte Trinité. Et si nous allons dans ce Cœur de Marie, c'est pour nous réfugier, comme une défense, pour nous protéger. Mon Cœur sera ton refuge dit Notre-Dame à Lucie. Mon Cœur sera ton refuge.

Donc, si nous allons au Cœur de Marie, c'est pour y trouver une force, une protection, un refuge mais aussi et surtout pour y trouver Dieu, pour y trouver le Père, le Fils et le Saint-Esprit, car son Cœur est le Temple par excellence où y demeure la Très Sainte Trinité. Parce que son Cœur c'est un chemin pour aller à Dieu.

Mon Cœur sera ton refuge et le chemin qui te conduira jusqu'à Dieu.

Dans cette vie et dans l'autre vie.

Ayons donc une vraie dévotion au Cœur de Marie afin de rester bien fixés, bien appuyés sur Dieu Lui-même, et afin d'être ainsi fidèles jusqu'à la mort, à nos engagements, à l'engagement que nous faisons spécialement le jour de notre confirmation.

Mgr Alfonso de Galarreta
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Transcription [Y. B-R] via La Porte Latine
Version audio : LPL/130520

19 mai 2013

[Mgr Tissier de Mallerais, fsspx] Pèlerinage de Chartres - sermon de la Pentecôte, à Villepreux

SOURCE - Mgr Tissier de Mallerais, fsspx - transcription par Gentiloup - 19 mai 2013

Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit, ainsi soit-il.

Chers pèlerins,

Nous sommes sous la pluie, nous avons froid, mais à l'intérieur, la charité du Saint-Esprit brûle en nous! Et nous pensons à St Joseph sur les routes d’Égypte, quand après avoir compris qu'il devait être le père adoptif et légal du Fils de Dieu, il dut brusquement, pendant la nuit, quitter Bethléem pour aller en exil. Eh bien c'est un peu l'image de notre situation, bien chers fidèles, nous sommes sur les routes d'exil, pour longtemps peut-être, et nous devons prendre courage avec le Saint-Esprit en imitant la conduite, la vocation de Saint-Joseph. Quand l'Ange lui dit dans la nuit: "Joseph, prend Marie et l'Enfant et fuis en Égypte!" Eh bien immédiatement, sans discuter il partit et resta là-bas dans un pays étranger dont il ne connaissait même pas la langue et pendant un ou deux ans! Jusqu'à ce que Dieu le rappelât d’Égypte. "J'ai rappelé mon Fils d’Égypte!" Eh bien, notre situation dans l’Église, chers fidèles, nous ressemblons un peu à la Sainte Famille, nous sommes en exil et pourtant nous sommes la Sainte Famille. Voyez, la Sainte Famille de Jésus, Marie et Joseph c'était l’Église en germe! L’Église n'existait pas encore mais c'était le germe de l’Église; il y avait d'abord Jésus-Christ, le Fils de Dieu, le chef de l’Église, de son Corps mystique, il y avait le premier membre de l’Église, Marie, la Très Sainte-Vierge immaculée rachetée par avance dans le sang de Jésus-Christ, il y avait Joseph, purifié du péché originel, sans doute avant sa naissance, nous ne savons pas exactement.
"Nous portons l’Église dans l'exil!"
En tout cas la Sainte Famille représentait l'Eglise. Eh bien nous, chers fidèles, dans la Tradition, la Fraternité Saint-Pie X et les sociétés religieuses et sacerdotales amies, nous portons l'Eglise dans l'exil! L'Eglise étant officiellement occupée par les Modernistes, nous sommes réduits, portant l'Eglise en nous, à l'exil, et ça pourra durer quelques années encore, jusqu'à ce que le Seigneur nous envoie son Ange et nous dise, "Maintenant tu peux rentrer dans la terre d'Israël", officiellement. Mais nous portons quand même l'Eglise en nous! Je me souviens que Mgr Lefebvre nous avait expliqué très bien que nous avions en nous, nous dans la Tradition, les quatre notes de l'Eglise catholique, les quatre marques de l'Eglise, pour marquer bien que malgré notre situation anormale, d'exil, nous restons catholiques au cœur de l'Eglise! Nous avons en effet gardé l'unité de l'Eglise, la catholicité de l'Eglise, une, sainte, catholique et apostolique. L'unité puisque nous avons gardé la foi! L'unité de l'Eglise consiste d'abord dans la foi catholique; que tous les catholiques professent la même foi! Eh bien nous avons l'unité de l'Eglise parce que nous avons la foi de toujours! Cher fidèles, et il n'est pas question de la quitter et de nous compromettre avec l'hérésie moderniste. Ensuite: Une, Sainte! Nous avons gardé la sainteté de l'Eglise puisque vous en êtes la preuve, chères familles où le Bon Dieu choisit de ces belles vocations religieuses et sacerdotales, une vie consacrée au Bon Dieu qui est un modèle pour toute l'Eglise! Nous avons gardé la note de sainteté de l'Eglise par la grâce de Dieu, Une, Sainte, Catholique; nous avons aussi la catholicité de l'Eglise puisque la Tradition que nous représentons est répandue dans le monde entier ! Pas seulement en France, pas seulement aux Etats-Unis, représentée par son supérieur de district, pas seulement en Allemagne, représentée par de nombreux pèlerins, pas seulement... De tous les pays du monde! Vous chers pèlerins, vous êtes la preuve que la Tradition bien vivante en nous est catholique! Et enfin nous représentons l'Apostolicité de l'Eglise! L'Eglise est apostolique, nous sommes aussi apostoliques, ça veut dire que nous avons la succession apostolique par les évêques. Nous autres, nous avons reçu l'épiscopat des mains de Mgr Lefebvre d'une façon légitime, même si elle était anormale. Et par conséquent, tant que nous sommes dans l’Église et en exil nous portons en nous l’Église. Alors, chers fidèles, souvent nous demandons quelle est notre vocation? Ne serait-ce pas de chercher à Rome les bénédictions auxquelles nous aurions droit? De chercher les approbations et les reconnaissances? Certes, c'est une question que nous pourrions nous poser, mais ce n'est pas la question essentielle!
"l’Église conciliaire, cette secte qui occupe l’Église catholique"
La vraie question que nous devons nous poser, à savoir, quel témoignage nous devons donner à la foi catholique aujourd'hui dans la situation de l’Église qui souffre d'une crise terrible?.. Quel témoignage nous devons donner aujourd'hui? Et la réponse sera, le témoignage des témoins de la foi et des martyrs! Tous ces saints de l’Église, tous ces confesseurs de la foi, tous ces martyrs de l’Église sont pour nous un exemple! Voilà donc la réponse à cette question, chers fidèles! De savoir la manière la meilleure de porter ce témoignage à la face de l’Église, d'être le pinacle publiquement condamné à l'exil, eh bien, c'est un avantage parce que notre témoignage est plus éclatant d'être considérés comme une pierre de scandale par les modernistes - comme Notre Seigneur l'était, pour Hérode, à ce moment-là - n'est-ce pas un avantage pour l’Église de voir où se trouve la Tradition? Cette pierre de scandale pour les modernistes, pour ce qu'on appelle l'église conciliaire, c'est-à-dire cette secte qui occupe l’Église catholique. C'est un avantage pour nous d'être regardés comme exclus, comme en exil, chers fidèles, d'être regardés comme la pierre rejetée par les bâtisseurs et qui deviendra et qui est déjà la pierre d'angle, la pierre qui soutient l'édifice. N'est-ce pas la Tradition, la foi catholique de toujours que nous représentons ? Alors voilà les raisons pour lesquelles nous ne pleurons pas si nous ne recevons pas de Rome les informations peut-être attendues, je ne sais pas. Restons tranquillement en exil tant que le Bon Dieu voudra. Et portons ce témoignage de la foi catholique que les martyrs ont donnée.
"Restons tranquillement en exil tant que le Bon Dieu voudra."
Je parlais ce matin aux enfants de Saint-Herménégilde. C'était un jeune martyr qui avait dix-sept ans qui vivait au VIème siècle. Il était catholique mais son père était hérétique, arien. Il devait hériter du trône d'Espagne, mais son père furieux de voir que son fils était catholique lui supprima la succession au trône et le condamna à la prison, et Herménégilde - que nous fêtons le 13 avril, donc il y a un mois - était en prison depuis plusieurs mois quand la fête de Pâques approchait. Il aurait bien voulu recevoir la communion, la sainte communion pascale et son père y pensait et lui envoya un évêque lui portant Jésus Hostie! Quel bonheur pour Herménégilde de pouvoir avoir une communion pascale. Seulement voilà, l'évêque entre dans sa cellule et se présente: "Je suis l'évêque de Huesca, je suis arien et je porte la sainte communion!" Je suis arien, c'est-à-dire je suis hérétique, je ne suis pas catholique. C'était un évêque qui n'était pas catholique, chers fidèles, et qui portait la communion à Herménégilde. Que va faire Herménégilde? Qu'auriez-vous fait à sa place? Auriez-vous accepté quand même de recevoir la Sainte communion? De recevoir Jésus-Hostie? Est-ce que ça ne vaut pas la peine de faire quelques compromis, d'accepter de mains indignes, quand même, Jésus? Cet évêque célébrait validement la messe bien qu'il ne crût pas que Jésus soit Dieu, parce que c'était la religion arienne. Il ne croyait même pas que Jésus fût Dieu! Mais on pense qu'il pouvait célébrer validement la messe... Il apportait Jésus-Hostie! Eh bien en un clin d'œil, inspiré par le don du Saint-Esprit, - le Saint-Esprit que nous fêtons aujourd'hui - par le don de conseil, il a dit "Non! Je ne recevrais pas la communion de vos mains sacrilèges! Moi je suis dans les fers et je suis libre pour faire mon salut! Et vous qui êtes libre, Monseigneur, eh bien vous êtes esclave du diable parce que vous avez une foi fausse, vous n'êtes pas catholique! Et je ne recevrais pas la communion de mains sacrilèges!" Exemple pour nous, bien chers fidèles! Tous les beaux cadeaux qu'on pourrait nous offrir depuis Rome nous ne sommes pas prêts de les accepter sans examen, sans considérer les circonstances dans lesquelles ce cadeau nous serait fait. Nous exigeons de pouvoir garder notre profession de foi publique et complète, catholique; nous ne pouvons pas recevoir des cadeaux empoisonnés qui nous condamneraient à des compromis avec le modernisme. Voilà l'exemple de Saint-Herménégilde, inspiré par le Saint-Esprit.
"Non! Je ne recevrais pas la communion de vos mains sacrilèges!"
L'exemple aussi de Saint-Joseph qui resta en exil, contenant l’Église, toute l’Église entière, jusqu'à l'heure du retour en terre sainte. "J'ai rappelé mon fils d’Égypte". Dans cette attente, chers fidèles, prions bien la Très Sainte-Vierge, l’épouse du Saint-Esprit qui fut remplie de ces sept dons du Saint-Esprit dés le premier instant de sa conception. Elle qui eut le don de conseil, quand Elle reçut le message de l'Archange Gabriel lui disant qu'Elle devait devenir la Mère de Dieu! Elle a dit "oui!, fiat!" Immédiatement! Le don de conseil! Et Elle qui a eu le don de force au pied de la Croix, de rester trois heures debout devant son Fils, Dieu fait homme, agonisant sur la Croix, sous ses yeux! Restée ferme comme la Mère du souverain prêtre, la mère de la Victime, la victime divine pour nos péchés. Eh bien demandons à la Très Sainte Vierge de nous remplir de ces sept dons du Saint-Esprit, spécialement par son intercession, spécialement le don de conseil qui dictera notre conduite, divinement et le don de force, de savoir dire non quand il faut dire non, parce que la force consiste davantage à résister au mal qu'à attaquer l'ennemi. Restons bien fermes, unis dans l'unique foi catholique, chers fidèles, sous le patronage de Saint-Joseph auquel nous allons renouveler tout-à-l'heure la consécration de la Fraternité Saint-Pie X. Ainsi soit-il!

Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit, ainsi soit-il!
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Les sous-titres ont été ajoutés par la Rédaction