29 novembre 2013

[Credidimus Caritati] Il y a 108 ans naissait Mgr Marcel Lefebvre

SOURCE - Credidimus Caritati - 29 novembre 2013

Marcel Lefebvre et sa sœur Bernadette

Le 29 novembre 1905, rue Leverrier à Tourcoing, naissait Marcel Lefebvre, fils de René Lefebvre, filateur, et de Gabrielle Watine. Sa sœur Christiane confia au Père Marziac les souvenirs qu'elle avait retenu de leur mère.
«Oserais-je parler sans trembler des "intuitions" de Madame Lefebvre quand elle mettait au monde un enfant ? Elle ne les embrassait jamais avant qu'ils ne soient revenus de l'église après le baptême. Louise, la servante, lui portait le bébé qu'elle embrassait et elle exprimait alors sa pensée. 
«Pour le premier, René, né le 22 janvier 1903, elle désirait un prêtre et tandis qu'elle le portait, elle promit de communier tous les jours. Ce petit René, à l'âge de cinq ans écrivit une lettre au pape Pie X qui venait de promulguer une encyclique sur la communion des enfants. Il reçut un télégramme de Sa Sainteté, l'autorisant à communier. Il devint prêtre et fut missionnaire au Gabon pendant près de quarante ans. 
«Pour la seconde, Jeanne, elle éprouva dès le début de la grossesse le besoin de réparation pour les péchés du monde par la prière. La fille qui naquit devint religieuse Réparatrice. 
«Pendant qu'elle portait le troisième, Marcel, fortifiée de la lecture qu'elle faisait de la vie de sainte Monique, elle faisait l'édification de tous par sa patience et sa douceur, qu'elle puisait dans la prière et l'assistance quotidienne à la Messe. Après le baptême de Marcel, en l'embrassant le bébé pour la première fois, Madame Lefebvre s'exprima ainsi : "Celui-ci aura un grand rôle à jouer dans la Sainte Eglise, à Rome, auprès du Saint-Père". C'était un 29 novembre 1905 ! 
«Le quatrième enfant fut Bernadette. Pendant la grossesse, la maman éprouva le besoin de faire ses oraisons sur l'agonie de Notre Seigneur. Embrassant l'enfant après le baptême, elle dit : "Elle sera un signe de contradiction". Ce fut bien ce qui arriva, puisque pendant toute sa vie de religieuse elle eut à lutter, à l'image de son frère évêque (elle appartenait à la même congrégation que lui) contre l'autodéstruction de l'Eglise - que ce soit au Gabon, à Rome, ou bien à Saint-Michel-en-Brenne où elle dirige actuellement les religieuses de la Fraternité Saint-Pie X. 
«Pendant la grossesse du cinquième enfant, elle lut la vie de sainte Thérèse d'Avila, réformatrice du Carmel. A la naissance de Christiane, en 1908, elle prédit qu'elle deviendrait carmélite. Celle-ci est aujourd'hui la Mère prieure du carmel de Quiévrain en Belgique, fondée le jour de la fête de sainte Thérèse le 15 octobre 1978. »
Père Jean-Jacques Marziac, Monseigneur Marcel Lefebvre, soleil levant ou couchant?, Paris, N.E.L., 1979, pp. 55-56.

28 novembre 2013

[Padre Christian Bouchacourt, fsspx] "Cette année, nous aurons la plus grande ordination sacerdotale depuis 25 ans"

SOURCE - Padre Christian Bouchacourt, fsspx - District d'Amérique du Sud - Lettre aux Amis et Bienfaiteurs n°10 - décembre 2013

Chers Amis et Bienfaiteurs,

Notre lettre de Patagonie et d'ailleurs a 10 ans ! Comment vous remercier tous de la générosité et de la charité que vous nous avez manifestées tout au long de cette décennie ? Un grand nombre d'entre vous, depuis le premier numéro, nous apporte une aide fidèle et généreuse qui nous est bien précieuse, et vous êtes aujourd'hui plus d'un millier à nous soutenir. Les prêtres du district se joignent à moi pour vous dire un fervent : « muchas gracias » ! En effet, durant ces dix années, vous nous avez aidés à rénover des prieurés et des chapelles, construire des écoles, améliorer le quotidien de plusieurs prieurés qui le nécessitaient. Que Dieu récompense tant de charité et de fidélité par d'abondantes bénédictions et grâces sur vous-mêmes et tous ceux qui vous sont chers.

Tout au long de cette année 2013 qui se termine, malgré la dure crise économique qui frappe la France et les pays d'Europe, votre générosité n'a pas faibli et nous pouvons rendre grâce à la Providence qui a béni nos oeuvres et spécialement nos quatre écoles qui accueillent presque 700 élèves, sans compter les 150 élèves des Révérendes Mères dominicaines de Brignoles installées à Anisacate (Argentine). Vous avez été aussi nombreux à parrainer certains de nos petits élèves qui ont pu, au cours de l'année, vous donner de leurs nouvelles. Comme je vous l'avais annoncé dans la lettre précédente, les dominicaines préparent la fondation d'une nouvelle école à La Reja en Argentine, toute proche de notre pensionnat. S'il plaît à Dieu, les portes de cette école secondaire de filles ouvriront en mars prochain.

Votre générosité a permis d'aider à l'agrandissement de notre école de Mendoza qui nécessitait une classe supplémentaire et une salle des professeurs. Le chantier devrait être terminé aux alentours de Noël. L'école sainte Philomène d'Australie nous a offert des bancs pour la nouvelle chapelle de l'école de notre Mission en République Dominicaine tandis que grâce à vous nous avons pu acheter de nouvelles batteries pour faire fonctionner le générateur électrique de cette école alors que les anciennes avaient rendu l'âme. De plus, toujours grâce à vous, deux salles de classe ont pu être terminées à l'école del Niño Jesus à la Reja.

Le 3 novembre dernier, la nouvelle église de Santiago du Chili a été consacrée par S.E. Monseigneur de Galarreta. Très bien située, elle connaît déjà un beau rayonnement dans la capitale chilienne. La générosité de nos fidèles a été admirable pour financer l'aménagement intérieur de l'ensemble.

Le succès que connaissent nos écoles et les exigences que l'administration scolaire nous demande d'observer nous font prévoir des travaux que peut-être, grâce à vous, nous pourrons réaliser. Pour notre école secondaire de garçons de La Reja, deux salles de classes font encore défaut. De plus, compte tenu de l'augmentation du nombre de nos pensionnaires qui n'ont pas de petit appétit, il faut prévoir une rénovation de fond en comble de notre cuisine qui se trouve dans un état déplorable. Le réfectoire doit être agrandi, deux bureaux pour les prêtres doivent être construits ainsi qu'une salle des professeurs.

Le grand projet de cette année 2014 est la construction de la maison de retraite spirituelle que je vous annonçais dans la lettre précédente. Elle sera située à La Reja, derrière notre pensionnat et proche du séminaire. Les plans sont terminés et notre architecte nous a annoncé que le premier coup de pioche serait donné à la fin du mois de décembre 2013. Le chantier ira ensuite au rythme de nos finances, c'est-à-dire de celui de saint Joseph, des Âmes du Purgatoire et… de vous-mêmes qui êtes le canal de leur bonté envers nous. Il faut encore trouver plus de 60% de la somme nécessaire pour financer ce projet. Nous attendons tous avec impatience le jour où nous pourrons y organiser des retraites tout au long de l'année. Cette maison permettra aussi aux séminaristes qui se préparent à recevoir les ordres sacrés de s'y recueillir, hors du séminaire, dans une maison retirée et silencieuse. Elle sera mise sous la protection du Padre Pio qui a réconcilié tant d'âmes avec Dieu. Je voudrais remercier d'une manière toute spéciale les bienfaiteurs suisses qui nous ont manifesté une magnifique charité lors de la quête du Carême 2013.

Chers amis, il est merveilleux de constater combien le Bon Dieu nous protège au milieu de la tempête qui secoue le monde et l'Eglise. Cette année, nous aurons la plus grande ordination sacerdotale depuis 25 ans. En effet, neuf diacres vont recevoir l'onction sacerdotale au mois de décembre 2013. Plusieurs d'entre eux pourront exercer leur apostolat dans notre district. Vous imaginez l'impatience avec laquelle ils sont attendus! Des jeunes gens venus de tous les horizons frappent à la porte de notre séminaire, tandis que de nouvelles familles se rapprochent de nos prieurés. A chaque fois ce sont de petits miracles de la grâce qui conduisent ces personnes jusqu'à nous. Nous devons tous être bien persuadés que Dieu continue d'agir dans notre monde qui court vers l'apostasie. « Là où le péché abonde, la grâce surabonde » (Rom. V, 20). Cela est une belle source d'espérance !

La situation économique, comme partout, reste bien inquiétante. C'est peut-être en Argentine, où se trouve le siège du district, que la situation est la plus précaire. L'inflation de 35% continue de miner l'économie du pays et nos finances, tandis que la foi laisse la place à un vague sentiment religieux dont l'Eglise conciliaire est gravement responsable. L'élection du Cardinal Bergoglio au siège de Saint Pierre a créé un réel mouvement de ferveur dans le pays. Cette année, le premier dimanche d'octobre dernier, pas moins de deux millions et demi de pélerins vinrent honorer Nuestra Señora de Luján patronne de l'Argentine ! Mais cet élan est plus émotionnel que profond. L'ignorance religieuse ne cesse de s'étendre tandis que la pratique religieuse continue à fondre comme neige au soleil et que les vocations religieuses et sacerdotales suivent le même chemin. Et pourtant, dans les campagnes, il reste encore une belle ferveur. La dévotion mariale demeure ancrée dans les coeurs et c'est probablement ce qui sauvera ce continent. Nos prieurés, nos chapelles et nos écoles attirent les âmes désorientées, fortifient les familles et sanctifient tous ceux qui veulent travailler à la restauration du Règne social du Christ- Roi et sauver leurs âmes. Comme il est beau et réconfortant de voir ces familles nombreuses, chaque dimanche, venir accomplir leur devoir dominical avec piété.

Nous devons absolument continuer à développer cet élan missionnaire pour étendre la Tradition catholique que nous a transmise notre fondateur Mgr Lefebvre. C'est pourquoi, cette année, notre abbé Daniel Maret va aller s'établir dans le diocèse de Campos où il célébrera la messe tous les dimanches. Une communauté de plus de 300 fidèles est restée fidèle à la Tradition contre vents et marées. Ils ont construit une belle église et tout un ensemble paroissial où le prêtre peut résider et prêcher des retraites. Demain, si Dieu le veut, il faudra ouvrir un prieuré à Lima au Pérou où nous avons déjà une belle maison située au coeur de la capitale. Une communauté de plus de 60 fidèles, visitée une fois par mois depuis l'Argentine, nous attend avec impatience. Au Nord de l'Argentine, à Corrientes tout près de la frontière Paraguayenne, une communauté de 80 âmes nous attend aussi. Comme vous le voyez, les perspectives ne manquent pas, mais il faut aller au rythme de la Providence. Priez pour que les vocations se lèvent afin que nous puissions porter la foi là où nous sommes appelés.

Aussi, plus que jamais, je confie à vos prières notre apostolat, nos prêtres, nos frères et nos religieuses qui oeuvrent pour faire connaitre, fortifier et étendre la Tradition catholique et je me permets une nouvelle fois de faire appel à votre générosité pour soutenir nos oeuvres, qui sans vous ne pourraient se maintenir et se développer. Que Dieu récompense tous les sacrifices que vous faites et ferez pour nous et que la Bienheureuse Vierge Marie vous protège tous. Soyez assurés, chers amis et bienfaiteurs, que chaque jour, à l'heure de la messe et du chapelet, dans chacune de nos communautés, nos prières reconnaissantes montent vers le Ciel à toutes vos intentions. Que Dieu vous bénisse !

Padre Christian Bouchacourt, Supérieur de District d'Amérique du Sud

26 novembre 2013

[Austremoine] Les 25 ans de la Fraternité Sacerdotale Saint-Pierre

SOURCE - Austremoine - 26 novembre 2013

A l’occasion des 25 ans de la Fraternité Sacerdotale Saint-Pierre, le pape François, par l’intermédiaire du nonce apostolique Mgr Ventura, a envoyé une lettre très symptomatique de l’état d’esprit des autorités romaines.

Tout y est.

Il est particulièrement intéressant de regarder les termes utilisés dans cette lettre qui reprennent exactement ceux utilisés pour justifier la condamnation de Mgr Lefebvre lors des sacres. Tout comme le motu proprio Ecclesia Dei, de triste mémoire, il est fait état tout d’abord de la base théologique sensée justifier de l’évolution de l’Eglise tout en se refusant à considérer une rupture : c’est le concept de Tradition vivante.
Ce nouveau concept de la Tradition vise à faire du magistère actuel non pas une partie intégrante de ce qui a toujours été cru et enseigné mais une expression actualisée et pourquoi pas nouvelle ayant pour référentiel les circonstances du temps présents. C’est ainsi que la Tradition vivante peut comporter à leur sens des contradictions sans que cela ne pose problème, car les circonstances ayant changées, le magistère s’adapte à l’évolution du monde. C’est ainsi que l’on en viendra à parler de dogmes évolutifs. Naturellement une telle conception de la Tradition n’est pas du tout conforme à l’enseignement de l’Eglise, Tradition qui reste inchangée à travers les âges.

C’est donc en acceptant cette Tradition vivante que les membres de la FSSP sont invités à vive leur « sensibilité » en conformité avec le concile Vatican II. Il en découle nécessairement deux choses :
  • le « choix » de la messe tridentine est simplement une question de sensibilité par rapport à la messe nouvelle de Paul VI, ce qui implique de facto la reconnaissance de la légitimité du Novus Ordo comme étant l’expression d’une autre sensibilité et non d’une autre Lex Credendi dont elle est la nouvelle Lex Orandi.
  • Le concile Vatican II est la norme et l’unique norme dont tous les autres aspects, même ceux relevant éventuellement de ce que l’on pourrait appeler la Tradition, doivent se conformer. Ce qui implique de facto la reconnaissance de la doctrine du Concile et des réformes qui en sont issues.
Cette courte lettre nous permet donc de confirmer s’il en était besoin que la façon dont Rome aborde la Tradition n’a pas changée et que l’herméneutique de la réforme telle que voulue par Benoit XVI n’était en réalité pas nouvelle : ce qui justifia les sacres et fut le mobile de la condamnation de Mgr Lefebvre est toujours autant d’actualité. On ne peut accepter ce Concile tout entier empoissonné, ni ses réformes et ni ses « Saints ».
Austremoine

[Abbé Henry Wuilloud, fsspx - District de Suisse] Lorsque Salomon ordonna la dédicace du majestueux temple...

SOURCE - Abbé Henry Wuilloud, fsspx - District de Suisse - Circulaire 86 - Décembre 2013

Bien chers fidèles,

Lorsque Salomon ordonna la dédicace du majestueux temple qu’il avait fait construire sur le mont Moriah à Jérusalem, il se passa un fait bien étonnant. Nous pouvons lire dans le IIe livre des Chroniques : « La maison de Yahweh fut remplie d’une nuée. Les prêtres ne purent pas y rester, à cause de la nuée ; car la gloire de Yahweh remplissait la maison de Dieu. Alors Salomon dit : Yahweh veut habiter dans l’obscurité ! Et moi, j’ai bâti une maison qui sera votre demeure, et un lieu où vous résiderez à jamais.»[1]

Le Dieu de lumière, plus brillant que mille soleils, veut habiter dans l’obscurité. Il a fait des ténèbres le lieu de sa retraite, nous dit un psaume[2] : comme si le bon Dieu ne voulait pas nous éblouir, ou comme s’Il voulait passer inaperçu. N’est-ce pas cela qui se déroule aujourd’hui dans son Eglise, où Il semble comme avoir disparu dans la pénombre des lendemains conciliaires? Bien sûr, le bon Dieu est là! mais il est difficile de mieux préciser…

Mais pourquoi donc Dieu aime-t-Il se dissimuler? Nous fait-Il perdre pied ? Nous aimerions voir et toucher, mais le Seigneur se dérobe : Ne me touche pas, dit-Il à sainte Marie-Madeleine. Nous qui devrions Le connaître, nous ne Le comprenons pas… Et pourtant Il agit presque toujours ainsi. N’est-ce pas un Dieu caché que nous recevons habituellement durant les saints Mystères ? Ô quel mystère pour la raison qu’un Dieu si puissant se donne sous de si faibles dehors ! Pensons-nous vraiment qu’Il va s’y prendre autrement dans son Eglise ? Non, Il est là et Il agit, mais dans un silence impressionnant et une opacité déconcertante.

Nous qui nous disons chrétiens, donc au Christ, nous nous troublons rapidement ; et pourtant devant l’agir de notre Dieu, on devrait simplement s’exclamer : ah, là on Le reconnaît bien, c’est tout Lui cela !

Cette affirmation est bien actuelle : dans l’Eglise qui gît blessée des innombrables coups qu’elle subit depuis des décennies, où reste le Médecin des âmes, où s’est retirée la Tête du Corps mystique ? On trouve déjà de telles interrogations dans l’Ancien Testament, chez le prophète Malachie qui peste contre les prêtres infidèles : « Vous avez fait souffrir le Seigneur par vos discours, et vous avez dit : En quoi l’avons-nous fait souffrir ? En ce que vous dites : Quiconque fait le mal est bon aux yeux du Seigneur : tels sont ceux qui lui plaisent. Certes s’il en est ainsi, où est le Dieu de la justice ? »[3] Oui, où êtes-vous, Seigneur ? Usquequo… jusqu’où laisserez-vous aller cette débandade effrayante ? Où est la corde qui freinera cette chute désolante ? Le bon Dieu est silencieux, Il laisse faire… à nous de laisser opérer sa Sagesse.

Voyons comment dans l’Evangile, Jésus manifeste sa puissance comme pour mieux la réduire ensuite. A Capharnaüm où plusieurs centaines de disciples retrouvent le Sauveur après son fameux miracle de la multiplication des pains, Jésus les a épatés : oui, un tel Seigneur, c’est exactement celui dont ils avaient besoin. Le problème est que les vues de Dieu rejoignent rarement celles des hommes : « Vous me cherchez, non parce que vous avez vu des prodiges, mais parce que vous avez mangé des pains et que vous avez été rassasiés. »[4] Mais en fait, le Seigneur a autre chose à nous proposer : « Si vous ne mangez la chair du Fils de l’homme et si vous ne buvez son sang, vous n’aurez point la vie en vous. (…) Ma chair est véritablement une nourriture et mon sang véritablement un breuvage. »[5] Alors beaucoup de ses disciples se retirèrent et ne marchèrent plus avec lui, remarque laconiquement l’Evangile.

Bien chers fidèles, dans la Fraternité, chaque année, des prêtres et des fidèles en désaccord avec la ligne suivie par la Fraternité ne veulent plus marcher avec elle. A ce sujet, il me semble que l’on pourrait faire tirer un parallèle avec ce même passage évangélique. Le discours de la Fraternité qui jusqu’à l’évidence a gardé et transmis un dépôt immense et magnifique, tout d’un coup ne plaît plus à certains. Son discours agace et révulse : « Ces paroles sont dures et qui peut les écouter ? »[6] et ces prêtres et fidèles partent sous d’autres cieux. Et si la Fraternité venait à nous dire : Vous aussi, voulez-vous vous retirer ? Ne pourrions-nous pas nous exprimer comme saint Pierre (sans donner bien sûr la même valeur aux deux destinataires de la réponse) : « Seigneur, à qui irions-nous ? Vous avez les paroles de la vie éternelle, nous l’avons vu et nous l’avons reconnu ; vous êtes le Christ, Fils de Dieu » ; même si votre manière d’agir nous surprend, nous n’avons personne d’autre vers qui nous tourner. Oui, nous bénéficions de grâces incomparables dans cette famille de la Tradition, mais nous y portons aussi des croix, les deux étant indissociables.

Saint Jean Chrysostome a analysé les départs des disciples du Christ. Tout d’abord, dit-il, ils se disputent entre eux. « Les Juifs disputent entre eux », car ils font un sujet de discussion des dogmes de la foi. Et c’est en vain que Jésus affirme avec encore plus de force : « En vérité, je vous le dis ». On s’arrête rarement sur la route ! Après la dispute, vient le doute téméraire : « Comment ? » Comment cela peut-il se faire que celui-ci nous donne sa chair à manger ? Après avoir douté, les disciples condamnent, puis enfin ils consomment leur crime en se retirant : « Ce discours est dur, qui pourrait le supporter?»

Permettez-moi d’appliquer ces paliers à ceux qui quittent la Fraternité. Ce n’est pas les personnes qu’il m’importe de juger, mais plutôt un comportement qu’il s’agit d’analyser.

D’abord la dispute ne se porte pas sur le dogme, mais sur l’autorité. Depuis que "Le Rhin s’est jeté dans le Tibre", les catholiques voulant rester fidèles se sont senti la responsabilité de tout juger par eux-mêmes. Puisqu’on a failli se faire avoir par les modernistes, on a pris l’habitude de se méfier de toute autorité. L’autorité navigue donc difficilement dans cette tempête, et chaque matelot se sent en veine de présenter son opinion. Et il le fait autour de la table, au téléphone, au clavier, un peu partout sauf devant ses chefs.

Chers amis, cela fait quarante ans passés que, dans nos milieux, on critique à tort ou à raison l’autorité. Cela a laissé des traces profondes, dont nous subissons les conséquences. Car ainsi la porte est grand ouverte pour le doute ; on soupçonne facilement : tel détenteur de l’autorité n’est-il pas franc-maçon ? sinon moderniste, comme un loup sous une pelisse de brebis ? En tous les cas, c’est évident, comme il y a anguille sous roche, il y aura aussi trahison en approche. Je pourrais vous citer des pages d’affirmations grotesques qui paraissent pourtant tellement vraies. Et ayant bien taraudé les certitudes des autres fidèles, ils partent le ton haut, pour bien faire résonner partout qu’eux-mêmes resteront indéfectiblement attachés au combat de la foi.

Encore une fois, loin de nous de vouloir les juger. Même ceux qui ont vu le Seigneur lui-même faire des miracles, guérir d’innombrables victimes, sont partis. Alors pourquoi pas nous ?! Ce risque persistera toujours. Mais encore une fois, à qui irions-nous ? Pour nous, ajoute encore saint Jean Chrysostome, restons avec la troupe des apôtres ; elle est peu nombreuse, mais elle est fidèle. Écoutons Pierre qui, parlant au nom des chrétiens, professe la foi de tous les chrétiens : A qui irions-nous ? Vous avez les paroles de la vie éternelle. Ô Pierre ! vous avez parlé à votre maître d’une manière excellente, et c’est à cause de cela que nous, à notre tour, nous disons à ceux qui voudraient nous détacher de vous : A qui irions-nous si ce n’est à Pierre, le chef et le rocher, le pasteur des brebis et des agneaux, l’héritier des paroles de vie ?

La Fraternité a toujours su garder cette déférence envers Pierre, même lorsque celui-ci se mettait à table avec les Juifs et qu’ainsi il ne marchait pas droit selon la vérité de l’Evangile[7]. Mais le respect ne l’a pas empêchée de parler clairement et fermement. Il me semble encore capital d’ajouter qu’il faut laisser cette responsabilité de critique aux plus hautes autorités de la Fraternité, et non que chacun se l’arroge car nous avons vu ci-avant combien une telle attitude pouvait être dommageable dans nos milieux.

Que cette nouvelle année qui va nous faire entrer dans le centenaire de la mort de notre saint patron saint Pie X, nous permette de puiser dans ses enseignements sa haine de l’erreur et son amour de la sainte Eglise. Que Dieu nous vienne en aide !

Abbé Henry Wuilloud
Supérieur de District
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[1] 2 Chroniques 6/1
[2] Psaume 17/12
[3] Malachie 2/17
[4] Jean 6/26
[5] Jean 6/55
[6] Jean 6/61
[7] Galates 2/11

[Paix Liturgique] "Le pape François n'a aucun problème avec le rite traditionnel"

SOURCE - Paix Liturgique - Lettre 415 - 26 novembre 2013

«Très Saint-Père, nous sommes vos fils et nous ressentons votre proximité… Nous ne sommes pas seuls en célébrant ce rite antique qui a accompagné de magnifiques siècles de sainteté, ce rite saint dans lequel des milliers de saints ont trouvé la douce profondeur de la rencontre avec Dieu dans le silence du mystère»(cardinal Castrillón, pèlerinage Summorum Pontificum, 26 octobre 2013).
Fin octobre, de manière très remarquable, à trois reprises et à quelques jours d’intervalle, viennent d'être données des expressions convergentes de la pensée du Saint-Père vis-à-vis de la liturgie traditionnelle et de ceux qui la pratiquent. Une pensée que l'agence de presse suisse Apic/Kipa a résumé dans une dépêche dont nous avons repris le titre.
I – LE 26 OCTOBRE 2013 : MESSAGE AU PÈLERINAGE DU PEUPLE SUMMORUM PONTIFICUM À ROME
Dans son homélie lors de la messe célébrée à la Basilique Vaticane pour le pèlerinage Summorum Pontificum, le cardinal Castrillón se félicitait de la liberté de ce qu’il nomme le « rite grégorien » : « Le rite grégorien, qui en un sens a retrouvé sa vitalité avec la promulgation, il y a six ans, du Motu ProprioSummorum Pontificum, a rendu au peuple chrétien la possibilité de bénéficier des fruits spirituels qui sont attachés à sa célébration ». Il avait choisi de s’adresser au Pape en son nom et au nom des pèlerins au Saint-Père en employant le « nous ». C’était comme une réponse au message adressé par le pape.

Nous avons en effet déjà rapporté, dans notre lettre n° 411, que Mgr Pozzo, Secrétaire de la Commission Ecclesia Dei, avait lu auparavant aux pèlerins un message en italien du Saint-Père daté du même jour : « À son Éminence Révérendissime, le cardinal Darío Castrillón Hoyos, à l’occasion du pèlerinage à Rome duCœtus Internationalis Summorum Pontificum dans le cadre de l’Année de la Foi, Sa Sainteté le pape François adresse son cordial salut, souhaitant que la participation au pieux itinéraire auprès des tombes des apôtres suscite une fervente adhésion au Christ, célébré dans l’Eucharistie et dans le culte public de l’Église, et procure un élan renouvelé au témoignage évangélique. Le Souverain Pontife, invoquant les dons de l’Esprit Saint et la maternelle protection de la Mère de Dieu, adresse de tout cœur à Votre Éminence, aux prélats, aux prêtres et à tous les fidèles présents à cette sainte célébration Sa bénédiction apostolique implorée, propitiatrice de paix et de ferveur spirituelle. »

Nous faisions remarquer que cette bénédiction du pape François, sans la moindre restriction de style concernant la forme liturgique spécifique des fidèles et prêtres concernés (ils célèbrent « le culte public de l’Église » – point), signée du nouveau Secrétaire d’État, Mgr Parolin, semblait être le premier message public que ce prélat ait assumé.
II – LE 29 OCTOBRE 2013 : MESSAGE À LA FRATERNITÉ SACERDOTALE SAINT-PIERRE
Il est particulièrement intéressant de noter que ce message, en français cette fois, transmis par lettre du 29 octobre, à l’abbé Vincent Ribeton, supérieur du district de France de la FSSP, par Mgr Luigi Ventura, nonce apostolique en France, a été signalé par Radio Vatican le 13 novembre puis repris par le site officiel d'informations du Saint-Siège.

Le message, adressé à l’occasion du 25ème anniversaire de la fondation de la Fraternité Sacerdotale Saint-Pierre, estime qu’ « en célébrant les mystères sacrés selon la forme extraordinaire du rite romain [les membres de la Fraternité Saint-Pierre] contribuent, dans la fidélité à la tradition vivante de l’Église, à une meilleure compréhension et mise en œuvre du concile Vatican II ». Le Pape exhorte les membres de cet institut, « selon leur charisme propre, à prendre une part active à la mission de l’Église dans le monde d’aujourd’hui par le témoignage d’une vie sainte, d’une foi ferme et d’une charité inventive et généreuse ». Et il précise que les fondateurs « dans un grand esprit d’obéissance et d’espérance se sont tournés avec confiance vers le successeur de Pierre afin d’offrir aux fidèles attachés au Missel de 1962 la possibilité de vivre leur foi dans la pleine communion de l’Église ».
III – LE 31 OCTOBRE : AUDIENCE DU SAINT-PÈRE AU CARDINAL CASTRILLON, ANCIEN PRÉSIDENT DE LA COMMISSION ECCLESIA DEI
Le cardinal Castrillón Hoyos avait sollicité cette audience pour faire part au Saint-Père des inquiétudes que de nombreuses personnes attachées à la forme extraordinaire avaient manifestées au cardinal depuis l’élection du pape François. Intervenant quelques jours plus tard devant les membres de la Fédération internationale Una Voce (FIUV), réunis à Rome pour une assemblée générale, il a relaté ainsi cette audience (voir ici) : « J’ai récemment rencontré le pape François et il m’a dit qu’il n’avait aucun problème avec l’ancien rite, et qu’il n’en avait pas davantage avec des groupes de laïcs et des associations comme la vôtre qui le promeuvent ». En outre, répondant aux questions de membres d’Una Voce sur l’affaire des Franciscains de l’Immaculée, et en précisant qu’il n’avait pas été question de cela dans l’entretien, le Cardinal a estimé, pour sa part, que le Pape avait été poussé à interdire l’usage du Novus Ordo dans cette communauté religieuse uniquement en raison des dissensions internes et non en raison d’un quelconque jugement négatif de sa part sur la liturgie traditionnelle.
IV – LES REMARQUES DE PAIX LITURGIQUE
1/ Une brève analyse des contextes s’impose. Les deux premiers documents, qui ont transité par une ou plusieurs instances curiales (rédaction ou visa au niveau d’un Secrétaire de Congrégation, passage en Secrétairerie d’État), bénéficient forcément de l'agrément du Pape. Le premier message, en italien, vaut essentiellement par le fait qu’il y a eu un message, ce qui, pour ce type de manifestation n’est pas nécessairement acquis. Le second, rédigé en français, par un rédacteur connaissant le dossier, vise de manière transparente, au-delà de la FSSP, la FSSPX (« meilleure compréhension et mise en œuvre du concile Vatican II… offrir aux fidèles attachés au Missel de 1962 la possibilité de vivre leur foi dans la pleine communion de l’Église… »).

Dans l’entretien du Pape accordé aux revues culturelles jésuites (publié en français dans le numéro d'octobre de la revue Études mais réalisé en août 2013), on pouvait lire des propos semblant marquer une distance certaine entre François et la portion du peuple catholique attaché à la liturgie traditionnelle : « La manière de lire l’Évangile en l’actualisant, qui fut propre au Concile, est absolument irréversible. Il y a ensuite des questions particulières comme la liturgie selon le Vetus Ordo. Je pense que le choix du pape Benoît fut prudentiel, lié à l’aide de personnes qui avaient cette sensibilité particulière. Ce qui est préoccupant, c’est le risque d’idéologisation du Vetus Ordo, son instrumentalisation ». Cela avait ému de nombreux commentateurs du monde traditionnel qui auraient pourtant dû garder en mémoire la réponse faite par le Pape lors de la visite ad limina des évêques des Pouilles en mai dernier (voir notre lettre n° 389) : à ceux-ci se plaignant de « l’œuvre de division créée au sein de l’Église par les champions de la messe dans l’ancien rite », le pape avait répondu qu’il leur fallait « être vigilants sur l’extrémisme de certains groupes traditionalistes, mais aussi s’appuyer sur la tradition et la faire vivre dans l’Église en même temps que l’innovation ».

Il n’y a pas à s’étonner d’éventuels tâtonnements selon les temps et les moments dans l'expression de la pensée du Pape. Comme toutes les paroles prononcées ou assumées par le pape François, celles sur la liturgie traditionnelle n’ont pas à être examinées et pesées à la virgule près, comme pouvaient l’être celles de Benoît XVI. François démontre au fil des mois avoir un instinct pastoral aiguisé, et il est fort probable que la conjonction d'événements importants, liés à la forme extraordinaire du rite romain, l'ait incité à se prononcer avec une clarté et dans un sens que certains n'attendaient pas.

2/ Cette mise en contexte n’est pas destinée à relativiser les trois interventions ici rapportées, mais au contraire à leur donner leur très exacte, et du coup pleine, portée. En résumé, dans un très cours laps de temps, un Pape qui, à la différence de son prédécesseur, ne porte pas d’intérêt particulier à la liturgie traditionnelle ni « aux personnes qui ont cette sensibilité », et son entourage autorisé ont donné trois signaux successifs et concordants à ces personnes, signaux dont la teneur directe ou indirecte est : le Motu Proprio ne sera pas remis en cause.

3/ À partir de là, on peut tenter de mieux comprendre la visée du Pape à travers ces indications. Ce qui est clairement exprimé, c’est non seulement le fait que ne sera pas relancée une nouvelle guerre liturgique mais que cette « sensibilité » est toujours reconnue. C’est certes moins que la volonté de Benoît XVI de donner à la célébration de la messe traditionnelle la valeur d’un témoignage des racines de la liturgie romaine. Mais, d’une certaine manière, la banalisation que le pape François consacre est plus forte, dans la mesure où il n’est pas un pape « traditionaliste ». Ainsi donc : cette messe et ceux qui la célèbrent existent. On n’y revient pas. Point.

4/ Précisons que beaucoup de ceux qui vivent leur catholicisme autour de cette messe ne se considèrent pas comme en marge de l’Église, mais plutôt « en réserve ». Il est évident que l’Église est aujourd’hui dans l’attente anxieuse d’un électrochoc salutaire. La France, à cet égard, est un observatoire crucial. Les évêques de notre pays, qui viennent d’achever l’assemblée de leur Conférence à Lourdes, constatent de réunion en réunion l’amplification d’une situation qui paraît, si on demeure en l’état, sans issue : il n’y aura plus au total que 6 000 prêtres en 2020 ; le nombre des candidats en première année de discernement dans les séminaires diocésains n’est que de 90 environ (la Communauté Saint-Martin enregistre 31 entrées et l'ensemble des communautés traditionnelles, FSSPX incluse, une quarantaine). Mais le plus inquiétant est dans la déliquescence catéchétique : le nombre des enfants catéchisés ne cesse de baisser ; leurs connaissances s’amenuisent ; un part très conséquente des catholiques qui vont à la messe sont, selon un mot grinçant, des « pratiquants non croyants ». On assiste à une liquéfaction d’un catholicisme dans lequel on sait de moins en moins ce que sont le péché, le péché originel, les fins dernières, la résurrection des corps, la nature et les effets des sacrements, la transsubstantiation eucharistique, la Résurrection, les fins du mariage, sans parler de la morale conjugale, etc. Reste au mieux une chaleureuse appartenance au Christ : comme disait jadis Mgr Lagrange, le catholicisme est devenu un vague et inconsistant jésuisme. Or, la liturgie traditionnelle s’avère un lieu plus solide du point de la transmission de la foi, de la naissance des vocations, des lois du mariage. Et, qu’on le veuille ou non, les communautés et mouvements « identitaires » qui prospèrent, avec leur liturgie plus digne, leur enseignement doctrinal plus solide, sont aiguillonnés par ce monde traditionnel, même s’il n’est pas, souvent loin de là, à la hauteur de ce qu’il devrait être.

5/ Tous ceux qui vivent leur catholicisme autour de cette messe ne peuvent que se réjouir grandement des « signaux » romains. La communion à Pierre, élément essentiel de l’être chrétien, s’exprime tout spécialement par la vie liturgique et par la célébration du Saint Sacrifice de la messe. Le choix qu’ils font de la forme traditionnelle pour vivre la lex orandi relève nécessairement pour eux de la confession de la foi. Que Rome leur dise qu’« il n’y a pas de problème » est considérable. Soulignons à cet égard un détail important : le pèlerinage Summorum Pontificum avait lieu, en quelque sorte, chez le Pape lui-même, dans sa Basilique Vaticane. L’accueil « normal » de ceux qui sont attachés à l'usus antiquior participe clairement de son désir d’instaurer la dynamique d’un catholicisme rassemblé et rassembleur. À la limite, ne risquant nullement le soupçon de « restaurationniste », il serait psychologiquement plus facile à François qu’il ne l'était pour son prédécesseur de célébrer la messe traditionnelle ou de la présider.

« Cher Saint-Père, disait le cardinal Castrillón dans son homélie du 26 octobre, nous autres pèlerins, dans votre Basilique Papale, devant l’autel de votre Chaire, nous voulons nous rassurer nous-mêmes par le fait qu’aujourd’hui, et plus que jamais, nous sentons que nous ne sommes pas seuls. Non, Très Saint-Père, nous sommes vos fils et nous ressentons votre proximité. Nous somme sous votre garde de Père très aimant. Nous sommes en compagnie de notre Sainte Mère du ciel. Nous ne sommes pas seuls en célébrant ce rite antique qui a accompagné de magnifiques siècles de sainteté, ce rite saint dans lequel des milliers de saints ont trouvé la douce profondeur de la rencontre avec Dieu dans le silence du mystère. Aujourd’hui, bien loin de nous abandonner à l’amertume de la solitude, nous nous réjouissons d’embrasser dans la Rome du Pape, de notre Pape, tous nos frères du monde. Non, nous ne sommes pas seuls!»

25 novembre 2013

[Credidimus Caritati] Mgr Lefebvre et la crise sédévacantiste de 1983

Mgr Lefebvre entouré des abbés Sanborn et Cekada - 
Tous deux quittent la FSSPX en 1983
SOURCE - Credidimus Caritati - 25 novembre 2013

En 1983, une très grave crise touche la Fraternité Saint-Pie X. Les plus anciens membres américains de la Fraternité, y compris le supérieur du district et le directeur du séminaire, s’insurgent contre le fondateur. Ils lui font des reproches en matière de doctrine et de liturgie, mais surtout sur sa position à l’égard du pape. Pour eux, le Souverain Pontife, successeur de Pierre, n’a pas plus d’autorité que le mécréant de la rue et aucune considération ne lui est due. Reconnaissant la trop grande indulgence observée jusque là, Mgr Lefebvre agit avec fermeté : Il perd un district entier, des dizaines de séminaristes et des centaines de fidèles. Il refuse énergiquement l’esprit schismatique promu par ces derniers et appelle ses prêtres à la loyauté. Il en va de la catholicité de la Fraternité Saint-Pie X.
« Beaucoup de nos confrères aux États-Unis avaient cet esprit, cet esprit sédévacantiste et je leur ai même fait signer une lettre, il y a de cela trois ou quatre ans. Je leur ai fait signer un engagement comme quoi ils ne parleraient plus ouvertement, de manière publique, contre le pape, d’une manière continuelle, pour dire qu’il n’y avait pas de pape, que ce pape est hérétique, et puis qu’ils donneraient la solution aux gens qui demandent :« Est-ce qu’il y a un pape ou est-ce qu’il n’y a pas de pape ? » ils accepteraient de donner la solution que donne la Fraternité. Alors ils ont réfléchi pendant une nuit pour savoir s’ils acceptaient ou s’ils n’acceptaient pas. Alors je leur ai dit : « Si vous n’acceptez pas, demain vous n’êtes plus dans la Fraternité ! Vous êtes hors de la Fraternité ! J’en ai assez des réclamations des fidèles, tous les fidèles me réclamant, m’envoyant des lettres : “Est-ce que c’est la position de la Fraternité qui dit qu’il n’y a pas de pape, qu’il n’y a plus de sacrements ? ”Alors que ce n’est pas notre position, qu’elle était prêchée par ces confrères. J’ai dit : J’en ai assez. “C’est fini, je veux que ça cesse ! ” Alors le lendemain ils ont signé le papier. Ils s’y sont tenus plus ou moins, du moins apparemment, mais dans le privé leur position était toujours la même, leurs sentiments étaient toujours les mêmes. Ils n’ont pas changé de sentiments. Non seulement ils n’ont pas changé de sentiments, mais au séminaire – je l’ai appris ces derniers temps –l’abbé Sanborn, directeur du séminaire, à qui je confie mes séminaristes qui sont des séminaristes qui viennent vers la Fraternité, qui ont confiance en moi, qui viennent dans notre séminaire de la Fraternité, je les confie à l’abbé Sanborn qui fait des conférences contre la liturgie qu’on fait à Ecône, pour prouver que la liturgie qu’on fait à Ecône est mauvaise ! Écoutez, alors, cela ne va plus comme cela ! J’ai été un peu tolérant, j’ai toléré un peu et je m’aperçois qu’au fond j’ai eu tort de tolérer […].
« J’ai dit : « Écoutez, je regrette beaucoup – on n’a pas eu d’éclats de voix, on ne s’est pas disputés, ça s’est passé très calmement – écoutez, moi, c’est fini ! Il y a dix ans que ça dure cette affaire-là. Je vous ai suivis, je vous connais, j’ai parlé avec vous, je vois bien que chaque fois que je venais, l’atmosphère était toujours désagréable. On sentait toujours une opposition, une dureté et une méfiance de leur part vis-à-vis de moi et vis-à-vis de la Fraternité. Ce n’était pas à l’aise du tout, toujours travaillé en arrière, un travail qui se fait en arrière, qui n’est pas conforme à l’esprit de la Fraternité. J’ai dit : « Il y a dix ans que ça dure, ça ne peut plus durer. Et maintenant vous mettez le comble à la chose avec la désobéissance à laquelle vous poussez les deux jeunes prêtres. Et maintenant, avec cette exigence, vous devenez les patrons en Amérique et puis vous exigez de nous que nous fassions ceci, que nous fassions cela. J’ai dit : - Non, c’est fini ! Je préfère tout perdre aux Etats-Unis, s’il le faut, tout l’apostolat, tout perdre et recommencer à zéro plutôt que de me trouver devant une situation comme celle-là ! Ce n’est pas possible, absolument impossible ! Faites ce que vous voudrez, mais pour nous, c’est fini, terminé ! On ne peut plus ! » […] 
« Je ne veux pas être schismatique. Or ils sont pratiquement schismatiques puisqu’ils ne reconnaissent pas le pape et ne prient pas pour le pape, qu’il n’y a aucun sacrement qui soit valide, pratiquement, et ils ne veulent pas reconnaître la liturgie de Jean XXIII qui est la liturgie tridentine. Alors ils font qu’ils disent aussi que le Pape Jean XXIII n’était pas pape. Alors où est-ce qu’on va ? Alors Pie XII, puisqu’ils n’acceptent pas non plus la liturgie de Pie XII pour la Semaine Sainte, donc Pie XII n’est pas pape non plus ? Alors où est-ce qu’on va avec tout cela ? Il n’y a plus moyen, c’est de la folie, on ne raisonne plus… Alors c’est vraiment le schisme. 
« Moi, je ne veux pas, d’une part, qu’ils entraînent tous les fidèles dans le schisme, en mon nom, au nom de la Fraternité, au nom de Monseigneur Lefebvre. Ça je ne peux pas accepter une affaire pareille. Je ne veux pas que les gens deviennent hérétiques, mais je ne veux pas non plus qu’ils deviennent schismatiques. On veut rester dans l’Eglise catholique. Et les gens le comprennent très bien. Si on avait là-bas dix prêtres pour remettre tout de suite là-bas en place, tous les gens voudraient rester avec nous, la plupart, 90%… Les gens saisissent très bien ces choses-là. Ils ne veulent pas devenir schismatiques non plus. Ils ne veulent pas se séparer du pape. Ils ne veulent pas dire qu’il n’y a pas de pape. Ils veulent bien que l’on ne soit pas d’accord avec le pape, comme nous le sommes, mais ils ne veulent pas qu’il n’y ait pas de pape. Ils n’acceptent pas cela. 
« Et alors pour cela, déjà maintenant, plusieurs groupes demandent à l’abbé Williamson et à l’abbé Petit de venir les évangéliser, enfin s’occuper d’eux. Évidemment il faudrait qu’ils soient plus nombreux. Mais c’est triste, parce que tous ces prêtres, je ne dis pas que ce sont des mauvais prêtres, mais ils se sont fourvoyés dans une espèce de pharisaïsme, une espèce de dureté, d’ailleurs de caractère, de tempérament. Les fidèles étaient vraiment dans la terreur, un peu menés à la baguette. Alors cela crée un climat qui n’est pas évangélique, pas chrétien. Ce n’est pas catholique, ce n’est pas l’esprit de l’Evangile, tout cela ! Alors les fidèles sont un peu soulagés, ceux qui viennent se sentent comme soulagés. Au séminaire maintenant il y a un esprit excellent, tranquille, calme. Le séminaire marche bien. Ils sont dans un soulagement, ils se sentaient oppressés par cette manière raide d’être menés. Tout cela est contraire au bon sens et à la foi, l’esprit de foi. Alors ce sont des moments difficiles. On dirait que le Bon Dieu veut tous les trois ans nous donner une épreuve pour nous sanctifier et puis, en même temps, pour bien remettre dans la bonne direction la Fraternité. Que nous demeurions dans la bonne direction ! Alors je vous demande de méditer sur ces choses-là, et d’être loyaux, d’être loyaux dans vos pensées, vous avez tout de même une conscience. »
Mgr Marcel Lefebvre, conférence aux séminaristes, 20 mai 1983

[Jehan De Belleville - Benedictins de l'Immaculée] Nos travaux agricoles : le poulailler, l’oliveraie et le potager.

«Le travail est une excellente préparation à la vie intérieure.
Plus vous vous adonnerez à la vie intérieure, plus vous
aurez l’intelligence de la loi du travail». Dom Romain Banquet
SOURCE - Jehan De Belleville - Bénédictins de l'Immaculée - 25 novembre

Depuis quelques mois nous avons fait l’acquisition d’une vingtaine de jeunes poules que nous logeons provisoirement dans la partie encore étable de la «maison saint-Jean». Soignées «aux petits oignons» elles nous le rendent généreusement avec en moyenne une quinzaine d’œufs par jour. Nous espérons déplacer bientôt le troupeau dans un ancien poulailler situé à 5o mètres de là, en bordure du village.

Ce poulailler, en partie déjà restauré, est construit sur une étroite terrasse dont le mur, d’environ 15 m de long, est écroulé. Il faut également le relever. Nous espérons en la Providence pour poursuivre et achever ce nouvel habitat, où nos chers volatiles pourront pondre, couver et se balader à leur aise dans un espace bien aménagé.

Quelques terrains d’oliviers —une quarantaine d’arbres — faisaient partie de la vente de la maison saint-Jean : merveilleuse aubaine pour les moines qui trouvent dans le travail agricole une source importante d’équilibre et de santé. Nous les avons taillés au printemps dernier pour leur faire rendre la meilleure production possible. Comme le veut le dicton, c’est à la sainte Catherine que commence la récolte. Sur les collines liguriennes, il faut environ 5 à 7 kg d’olives pour obtenir 1 litre d’huile ; et cette année, chaque arbre produit environ 15 kg de fruits. Nous pouvons donc espérer obtenir 80 litres : ce serait une belle première.

Les gens du village sont heureux de nous voir reprendre le travail des oliviers dont la culture est malheureusement de plus en plus abandonnée au profit du tourisme. Tous les paysans de la région savent que ce sont les moines de Lérins qui ont implanté la culture de l’olivier en Ligurie. C’est un point d’histoire qui nous rend sympathiques et estimables à leurs yeux.

Nous avons par ailleurs un jardin potager d’environ 300 m2 qui nous a fourni cette année beaucoup de légumes : fèves, oignons, ails, échalotes, courges et courgettes, haricots verts et haricots blancs, tomates cœur de bœuf en abondance, concombres, choux brocolis, salades, radis, aubergines, poivrons verts et rouges, poireaux, etc.

23 novembre 2013

[Mgr Williamson] Foi d'abord

SOURCE - Mgr Williamson - 23 novembre 2013

La grande leçon enseignée par Mgr Lefebvre (1905-1991) aux Catholiques qui avaient des oreilles pour entendre, c’était que la Foi passe avant l’obéissance. La triste leçon que nous avons dû apprendre depuis, c’est qu’on continue de faire passer l’obéissance avant la Foi. Ce Commentaire, sans cesse aiguillonné par la confusion actuelle dans l’Église, le monde et la Fraternité St Pie X, et poussé par elle à remonter aux principes, a souvent essayé d’expliquer pourquoi la Foi doit passer avant tout.

Prenez par exemple les arguments d’un « bon » confrère qui par courriel m’a accusé récemment de mal juger l’état actuel de la Fraternité. Ma résistance à la Néo-fraternité (comme je l’appelle) il accuse : 1) d’avoir des motifs trop personnels, 2) d’oublier le bien de l’Église, 3) d’être inconsistante avec des positions que j’ai prises avant, 4) de manquer de réalisme catholique, 5) de s’opposer à l’infaillibilité de l’Église, 6) de faire de chacun son propre Pape, 7) de proposer une vision moderniste de l’Église, 8) d’être protestant, 9) de rejeter l’union avec Rome et finalement 10) d’éloigner les âmes de l’Église.

Or je ne suis pas un Mgr Lefebvre et je n’ai aucune prétention de l’être, mais je pose la question suivante : ce confrère se rend-il compte que tous ces arguments (sauf le troisième) il aurait pu les appliquer il y a quarante ans à la résistance de Mgr Lefebvre aux autorités officielles de l’Église à Rome ? Pourtant cette résistance fut 1) motivée uniquement par le besoin urgent de défendre la Foi, 2) pour le bien de l’Église, 4) d’une façon parfaitement réaliste (comme l’ont prouvé les fruits de sa Fraternité), 5) ne s’opposant point à l’infaillibilité de l’Église mais la démontrant par sa résistance même, 6) rappelant l’Église de toujours comme mesure des Papes, 7) contre toute démence du néo-modernisme, 8) contr e le renouveau du Protestantisme par le néo-modernisme, 9) pour l’union avec la Rome catholique de toujours, et finalement 10) une aide importante pour beaucoup d’âmes vraiment catholiques à garder la Foi au lieu de la perdre.

Et qu’est-ce qui a justifié cette prise de position par Mgr Lefebvre il y a quarante ans ? Qu’est-ce qui a prouvé qu’il n’était pas, malgré les apparences, un rebelle comme Luther, mais vraiment catholique et un grand serviteur de l’Église ? Sa doctrine, sa doctrine, sa doctrine ! Là où Luther a nié toute une série d’enseignements de l’Église, Mgr Lefebvre en a affirmé tous et chacun. C’est au nom de la doctrine de la Foi qu’il a tenu tête aux Papes Conciliaires et à ces autorités de l’Église qui la subvertissaient par le fond en renouvelant et en adoptant les erreurs épouvantables du modernisme.

Donc qu’est-ce qui justifie maintenant une certaine résistance aux chefs de la Fraternité ? Comment ceux qui résistent peuvent-ils prétendre être les serviteurs les plus fidèles de la Fraternité ? Par la doctrine, la doctrine, la doctrine. La Déclaration de la mi-avril de 2012 démontra une défaillance doctrinale épouvantable au sommet de la Fraternité, et cette Déclaration a beau avoir été « retirée », son contenu, loin d’avoir été rétracté, a même été défendu comme étant, par exemple, « trop subtil » pour le commun des Catholiques ! Et on ne peut pas dire que les documents officiels de la Fraternité du 14 juillet, 2012, ou du 27 juin, 2013, aient proprement rectifié le mal. La preuve en est que la politique pratique d u QG de la Fraternité n’a en rien changé. Cher confrère, la Fraternité à laquelle vous appartenez a été fondée sur le principe que la Foi passe avant l’obéissance, et maintenant vous voulez soutenir cette Fraternité en faisant passer l’obéissance apparente à cette Fraternité avant la Foi ? Étudiez les documents et observez les actions !

Kyrie eleison.

P.S. Quelqu’un a-t-il un jeu complet des traductions espagnoles ou françaises de ce Commentaire à partir du moment où elles ont commencé à paraître (vers le numéro 110)? Prière de nous le dire.

[Olivier Figueras - Présent] Entretien avec M. l’abbé Ribeton, supérieur du district de France [de la FSSP]

SOURCE - Olivier Figueras - Présent - 23 novembre 2013

25 ans de la Fraternité Saint-Pierre
Entretien avec M. l’abbé Ribeton, supérieur du district de France

«La liturgie traditionnelle est un moyen très efficace de ramener les hommes vers Dieu»
A l’occasion du 25e anniversaire de la Fraternité Saint-Pierre, et au lendemain de la messe célébrée à Paris, en l’église Saint-Sulpice, à cette occasion (Présent du 19 novembre), l’abbé Ribeton, supérieur du district de France, a accepté de répondre à nos questions.
— 25 ans : est-ce l’âge de la maturité, et comment s’exprime-t-elle ?
— Je ne sais si l’on peut parler d’âge de maturité. La Fraternité Saint-Pierre demeure une jeune communauté, de fondation récente, qui compte des prêtres souvent très jeunes. Leur moyenne d’âge est de 37 ans. C’est une force incontestable, et c’est l’un des signes de la vitalité du catholicisme traditionnel. Il nous faudrait cependant un peu plus de prêtres à cheveux blancs, car la sagesse vient avec l’expérience. Il est très important pour une communauté de pouvoir s’appuyer sur des anciens. Heureusement, nos fondateurs, qui furent ordonnés prêtres par Mgr Lefebvre avant 1988, apportent de la maturité à notre Fraternité. Ils ont vécu bien des crises et sont restés fidèles à leur sacerdoce. Ils ont gardé l’enthousiasme de leurs vingt ans et nous communiquent cette flamme. Grâce à eux, la Fraternité est restée fidèle à ses fondamentaux : tradition, romanité, thomisme.
— Vos fondateurs étaient une dizaine. Où en êtes-vous de votre développement ?
— La Fraternité Saint-Pierre compte actuellement 244 prêtres et 163 séminaristes. C’est dire qu’elle a connu une belle croissance. En moyenne, 12 prêtres de notre communauté sont ordonnés chaque année. 77 prêtres français appartiennent à la Fraternité Saint-Pierre. En France, la FSSP exerce son apostolat dans 35 diocèses. Remarquons que c’est aux Etats-Unis que notre communauté s’est développée le plus vite. Le district nord-américain dessert 42 diocèses. 24 paroisses personnelles nous ont été confiées en Amérique du Nord… 3 seulement en Europe.
— Comment expliquer ce contraste ?
— En Amérique, le Motu Proprio Summorum Pontificum a été particulièrement bien reçu. Il a été appliqué sans réserves et selon toutes ses dispositions. En France ou en Allemagne, les progrès dans la reconnaissance du plein droit de cité de la messe traditionnelle ont été considérables. Mais des blocages idéologiques demeurent parfois.
— Saint-Sulpice, c’est un peu une première parisienne. Parce que la FSSP a toujours quelque mal à paraître à Paris, si l’on excepte quelques ancrages (à commencer par la « messe du mercredi » célébrée par l’abbé Le Coq qui réunit à Saint-François-Xavier beaucoup d’étudiants). Est-ce une nouvelle ouverture ?
— Ce n’est pas un nouveau ministère confié puisque cette messe anniversaire était un événement ponctuel. Néanmoins c’est le signe d’un accueil qui sera, je l’espère, toujours plus large, et dont je tiens à remercier le cardinal Vingt-Trois. Avoir pu célébrer, grâce à la bienveillance du curé de la paroisse, dans l’église Saint-Sulpice, est une grande grâce. La présence massive de fidèles montre que les Parisiens attachés à la forme extraordinaire sont nombreux. En Ile-de-France, la Fraternité Saint-Pierre est implantée avec un apostolat stable et bien enraciné dans les diocèses de Versailles, de Créteil et de Meaux. Dans les diocèses de Paris et de Nanterre, nos prêtres agissent en lien avec les prêtres diocésains qui sont investis dans l’application du Motu proprio mais qui ont déjà de lourdes charges pastorales. L’abbé Guilhem Le Coq apporte ainsi son aide dans le cadre de la paroisse Saint-François-Xavier, sous l’autorité de son curé, Mgr Chauvet, particulièrement auprès des étudiants, ou encore pour l’aumônerie de groupes scouts. Il assure aussi des permanences de confessions à Notre-Dame-des-Victoires. A Sceaux et à Colombes, des cours de catéchisme sont donnés aux enfants grâce à l’accueil des curés qui mettent à disposition de nos prêtres leurs salles paroissiales. Tout cela est modeste, mais l’important est le bien spirituel que l’on peut procurer aux âmes. Et par ailleurs nos prêtres ne manquent pas d’apostolat… ils suffisent tout juste à la tâche. Ce qui nous est confié correspond à nos possibilités actuelles. Dans les années à venir, le district de France de la Fraternité Saint-Pierre comptera beaucoup de jeunes prêtres nouvellement ordonnés. La FSSP pourra alors proposer une aide plus active en région parisienne, comme dans d’autres régions de France où le manque de prêtres se fait sentir de plus en plus cruellement. Pour le moment, nous en sommes souvent encore à des commencements modestes, mais autre est le geste du semeur, autre celui du moissonneur.
— 25 ans après le rapport-opposition avec la FSSPX, quelle est la nature spécifique (l’identité, pourrait-on dire) du prêtre de la FSSP ?
— La Fraternité Saint-Pierre est née dans un contexte douloureux en 1988 et nos fondateurs sont effectivement des prêtres qui appartenaient d’abord à la Fraternité Saint-Pie-X. Ils avaient tout reçu de Mgr Marcel Lefebvre dans leur formation et reconnaissaient en lui un père. Aussi n’est-il pas surprenant de retrouver dans la nature propre de la Fraternité Saint-Pierre des éléments de ressemblance avec la Fraternité Saint-Pie-X.

Notre Supérieur général, M. l’abbé John Berg, a coutume d’expliquer que notre Fraternité repose sur trois piliers : on peut les résumer par trois mots : tradition, romanité, thomisme. Tradition, parce que nos prêtres célèbrent la liturgie romaine traditionnelle, appelée depuis Benoît XVI forme extraordinaire du rite romain. Romanité, parce que la Fraternité Saint-Pierre vit l’attachement aux traditions liturgiques et spirituelles latines dans la fidélité au Siège de Pierre, cum Petro et sub Petro. Thomisme, parce que l’enseignement dans nos séminaires s’appuie sur saint Thomas d’Aquin, Docteur commun de l’Eglise, préparant ainsi nos prêtres à la transmission de la saine doctrine. Si l’on veut être complet sur la nature de la Fraternité Saint-Pierre, il faut ajouter qu’elle est une « société de vie apostolique de droit pontifical ». Cela signifie deux choses : d’abord que nos prêtres vivent en communauté, ce qui est une force pour vivre son sacerdoce fidèlement et mener l’apostolat dans un monde sécularisé. Notre-Seigneur n’envoyait-il pas déjà ses disciples deux à deux ? Ensuite, cela signifie que la Fraternité Saint-Pierre est une communauté directement placée sous l’autorité du Saint-Siège. Le pape vient d’ailleurs de nous délivrer un message et sa bénédiction apostolique à l’occasion de notre vingt-cinquième anniversaire.
— Le district de France s’est enrichi des régions francophones de pays voisins, tels la Belgique ou le Luxembourg. Pourquoi ? N’est-ce pas trop gros ? Trop disparate aussi ?
— En fait, la partie francophone du Benelux, c’est-à-dire essentiellement la Belgique francophone, est rattachée à l’administration du district de France. Cela tient à ce que, à ce jour, ce sont des prêtres originaires de France qui y assurent l’apostolat. Lorsqu’une mission leur est confiée en Belgique, ils sont toujours des membres à part entière du district de France. Ils participent aux retraites ou sessions de nos prêtres, comme à Lourdes voici deux semaines. Cela est important pour eux, afin d’éviter un certain isolement par rapport aux confrères de la Fraternité. Le rattachement au district de France traduit donc un souci pour les prêtres, mais absolument pas un déni de la spécificité belge, qui naturellement doit être comprise et honorée.
— Quelle est la place spécifique de la FSSP au sein de ce qu’on appelle les communautés Ecclesia Dei ?
— Les communautés Ecclesia Dei ont été reconnues sur la base du Motu proprio Ecclesia Dei du 2 juillet 1988. A côté de communautés religieuses, la Fraternité Saint-Pierre est la première communauté regroupant des prêtres séculiers à en avoir bénéficié. Cela est logique puisque le Motu Proprio du 2 juillet 1988 était spécialement destiné aux prêtres et fidèles liés à Mgr Marcel Lefebvre. Notre fondation s’est faite dans la logique du protocole d’accord du 5 mai 1988 entre Mgr Lefebvre et le Saint-Siège. Notre développement depuis 1988 est resté dans cette ligne, assumant la fidélité à l’entière tradition de l’Eglise qui comporte naturellement la fidélité au Siège de Pierre. Notre spécificité liturgique a été dès 1988 reconnue. Elle est un talent reçu de l’Eglise que nous voulons faire fructifier pour la sanctification des âmes.
— La FSSP a-t-elle des perspectives à l’aurore du nouveau pontificat ?
— Le pape vient de nous appeler à faire preuve, avec notre charisme propre, avec notre spécificité, de « charité inventive » pour participer à la mission de l’Eglise dans le monde d’aujourd’hui. Cela rejoint notre souci, qui est d’être missionnaire. Le choix de la liturgie traditionnelle n’a rien à voir avec un repli frileux ou nostalgique. Il est au contraire fondé sur la conviction que cette liturgie est un moyen très efficace de ramener les hommes vers Dieu, de réorienter un monde sans boussole vers le Seigneur. Benoît XVI avait souligné la puissance de la liturgie au cours des siècles passés pour « façonner la piété des peuples ». La liturgie traditionnelle garde cette puissance de rayonnement qui conduit de nombreux jeunes à la découvrir et à l’embrasser avec émerveillement. Leur vie, notre vie peut en être transformée. Nos prêtres peuvent en témoigner, car ils n’ont pour la plupart pas connu cette liturgie dans leur enfance. Ils l’ont découverte providentiellement, à l’occasion d’une retraite, d’un pèlerinage ou en poussant la porte d’une église et s’y sont attachés. Cette lumière qui oriente les âmes vers le Christ ne doit pas être gardée sous le boisseau. Nous avons à être missionnaires avec les moyens de sanctification que nous confie l’Eglise, avec cette liturgie qui a la puissance de toucher tant d’âmes.

Par ailleurs faire preuve de « charité inventive » signifie certainement aller chercher les âmes là où elles sont, les prendre là où elles en sont, avec la miséricorde d’un bon pasteur, pour les conduire à Jésus-Christ. De ce point de vue, l’appel du pape à aller vers les « périphéries existentielles » retentit fortement en nos cœurs. Nous sommes en France revenus à une situation comparable à celle des missions. Dans une telle situation, le simple fait de porter la soutane est un excellent outil apostolique. Porter la soutane dans un monde où l’Eglise a perdu beaucoup de visibilité permet de rencontrer des âmes qui reconnaissent à son habit le prêtre, l’homme de Dieu, et qui en le voyant s’interrogent, veulent lui parler…

Nous voulons enfin que nos communautés paroissiales soient d’une ferveur contagieuse, qu’elles soient des foyers de reconquête, qu’elles soient, selon les mots de Benoît XVI, des « oasis spirituelles » où l’on vient se ressourcer, refaire ses forces. A côté de cela, nous pensons qu’un bon moyen de tout restaurer dans le Christ est de développer des œuvres comme les écoles, et plus généralement toutes les œuvres de formation de la jeunesse. C’est pourquoi, depuis quelques années, le district de France s’est résolument engagé dans cette voie. C’était celle suivie autrefois par les missionnaires dans les terres où ils apportaient l’Evangile.
Propos recueillis par Olivier Figueras
Article extrait du n° 7986 de Présent du Samedi 23 novembre 2013

22 novembre 2013

[DICI] Censuré puis retiré

SOURCE - DICI - 22 novembre 2013

Dans le précédent numéro de DICI (n°284 du 08/11/13), nous faisions état des remous romains provoqués par l’entretien que le pape François a accordé, le 1er octobre, au quotidien italien La Repubblica. Cet entretien qui était disponible sur le site Internet du Vatican, a été retiré le 15 novembre, à la demande de la Secrétairerie d’Etat. Une réponse avait déjà été censurée par L’Osservatore Romano, celle où le pape affirmait que chacun avait sa conception du bien et du mal et qu’il devait suivre sa conscience.

Au lendemain de la publication de l’entretien et devant les réactions consternées de nombreux catholiques, le P. Federico Lombardi, porte-parole du Saint-Siège, avait expliqué qu’il ne s’agissait pas d’un acte du magistère, ni d’une encyclique, mais plutôt d’une occasion pour le souverain pontife de s’exprimer « avec une grande sincérité et simplicité » (sic). Pour justifier la décision de son retrait du site du Vatican, le P. Lombardi a déclaré : « Le texte est fiable dans son sens général, mais pas dans les formulations isolées entre guillemets, n’ayant pas été révisé mot à mot ».

Il est certain que le trouble causé par cet entretien, exprimé par plusieurs vaticanistes, n’a pas été sans influence sur la décision de le retirer du site du Vatican. Mais ce retrait laisse entière la question de fond qui est de savoir si affirmer que chacun doit suivre sa conscience selon la conception qu’il se fait du bien et du mal est une affirmation relativiste, oui ou non. Faute d’une mise au point nette sur ce sujet, on risque d’entendre encore parler de « papauté informelle » (Andrea Gagliarducci, mondayvatican.com, 6 octobre) et de « message ‘liquide’ » (Pietro De Marco, Espresso, 7 octobre). « Tu es Pierre, et sur cette pierre je bâtirai mon Eglise » (Mt 16,18), telle est la fermeté qu’attendent tous les fidèles catholiques.

[DICI] Argentine : Réactions à une célébration interreligieuse dans la cathédrale de Buenos Aires


SOURCE - DICI - 22 novembre 2013

Le 12 novembre 2013, à l’occasion de la commémoration de la Nuit de Cristal (9-10 novembre 1938), l’archevêque de Buenos Aires, Mgr Mario Poli, et le rabbin Abraham Skorka ont présidé une cérémonie interreligieuse dans la cathédrale de Buenos Aires. Une cinquantaine de catholiques attachés à la Tradition ont récité le chapelet avant que ne commence cette rencontre, l’un d’entre eux a utilisé un micro de la cathédrale pour dénoncer la tenue d’une cérémonie interreligieuse dans une cathédrale catholique. En réaction, certains des participants se sont opposés aux traditionalistes, leur crachant même au visage. Ces derniers se sont retirés dans le calme, en chantant le Salve Regina. Mgr Poli a alors adressé ces paroles à l’assistance : « Chers frères juifs, sentez-vous chez vous ici, car c’est ce que souhaitent les chrétiens en dépit de ces signes d’intolérance. Votre présence ne désacralise pas le temple de Dieu. Nous continuerons dans la paix ce que le pape François a toujours promu, encouragé et tellement apprécié. » (Mgr Poli faisait allusion au fait que le cardinal Bergoglio avait organisé, lui aussi, en novembre 2012 une cérémonie interreligieuse pour la commémoration de la Nuit de Cristal dans la cathédrale de Buenos Aires, avec le rabbin Alejandro Avruj de la communauté Massorti NCI-Emmanuel. NDLR)

La Fraternité Saint-Pie X fait sienne la condamnation par le pape Pie XI du national-socialisme, du racisme et du paganisme dans l’encyclique Mit brennender Sorge (14 mars 1937). Dans un communiqué de presse l’abbé Christian Bouchacourt, supérieur du district d’Amérique du sud, rappelle également la doctrine traditionnelle de l’Eglise catholique sur les cérémonies interreligieuses, en citant l’encyclique de Pie XI Mortalium animos (6 janvier 1928) : « Convaincus qu’il est très rare de rencontrer des hommes dépourvus de tout sens religieux, on les voit nourrir l’espoir qu’il serait possible d’amener sans difficulté les peuples, malgré leurs divergences religieuses, à une entente fraternelle sur la profession de certaines doctrines considérées comme un fondement commun de vie spirituelle. C’est pourquoi, ils se mettent à tenir des congrès, des réunions, des conférences, fréquentés par un nombre appréciable d’auditeurs, et, à leurs discussions, ils invitent tous les hommes indistinctement, les infidèles de tout genre comme les fidèles du Christ, et même ceux qui, par malheur, se sont séparés du Christ ou qui, avec âpreté et obstination, nient la divinité de sa nature et de sa mission.

« De telles entreprises ne peuvent, en aucune manière, être approuvées par les catholiques, puisqu’elles s’appuient sur la théorie erronée que les religions sont toutes plus ou moins bonnes et louables, en ce sens que toutes également, bien que de manières différentes, manifestent et signifient le sentiment naturel et inné qui nous porte vers Dieu et nous pousse à reconnaître avec respect sa puissance. En vérité, les partisans de cette théorie s’égarent en pleine erreur, mais de plus, en pervertissant la notion de la vraie religion ils la répudient, et ils versent par étapes dans le naturalisme et l’athéisme. La conclusion est claire : se solidariser avec les partisans et les propagateurs de pareilles doctrines, c’est s’éloigner complètement de la religion divinement révélée. »

Et l’abbé Bouchacourt de conclure cette citation : « Sans aucune forme de ressentiment à l’égard de toute autre communauté religieuse, la Fraternité Saint-Pie X adhère à cette doctrine immuable et désapprouve fermement l’organisation de toute cérémonie interreligieuse dans toutes les églises catholiques. »

Répondant aux questions de quelques journalistes, le supérieur du district d’Amérique du sud a fait remarquer : « Les fidèles qui ont ainsi protesté ont le droit de se sentir outragés, lorsqu’un rabbin préside une cérémonie dans une cathédrale catholique. Nous reconnaissons l’autorité du pape, mais il n’est pas infaillible en tout ce qu’il fait, et sur ce point il fait des choses que nous ne pouvons accepter. Cette protestation ne venait pas d’une volonté de rebelles, mais de fidèles montrant leur attachement à une église catholique qui a été construite pour la foi catholique. Une messe n’est pas célébrée dans une synagogue ni une mosquée, les musulmans ne l’accepteraient pas. De la même façon, nous catholiques ne pouvons accepter qu’une autre foi soit pratiquée dans nos églises. Ces églises ont été bâties pour le culte catholique, et l’Eglise condamne ceux qui permettent aux autres religions de célébrer leur culte dans des églises catholiques… Cette réaction est celle de fidèles qui ont été scandalisés… Dans le passé, les papes ont toujours condamné ce type de rencontres interreligieuses qui constituent une violation d’un lieu de culte catholique. »

(Source : FSSPX/Amérique du sud – DICI n°285 du 22/11/13)

20 novembre 2013

[Le Salon Beige] Attaque d'une église à Paris : la question du député Bompard

SOURCE - Le Salon Beige - 20 novembre 2013

Attaque d'une église à Paris : la question du député Bompard, déposée à l'assemblée:
"M. Jacques Bompard attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur l'attaque de l'Eglise de Saint Nicolas du Chardonnet le 17 novembre dernier. Celle-ci a été commise pendant une messe dominicale hautement symbolique pour les fidèles et par ailleurs constitutive de l'identité française depuis des milliers d'années.Des projectiles ont été jetés alors que de jeunes enfants se trouvaient dans l'assemblée. Les médias n'ont pas jugé utile de souligner l'évènement mais nombre de catholiques s'attendent à une réaction du ministère qui ne vient pas. Cette agression s'est déroulée dans un climat de christianophobie délétère qui tend nombre de croyants alors que des journalistes et autres personnages publics se sont fendus de déclarations notoirement haineuses sans jamais avoir été inquiétés par la justice. Par ailleurs de nombreux cimetières et lieux de cultes chrétiens sont pris pour cible par des groupes extrémistes sur le motif de la haine de l'Autre et de l'intolérance. Il n'est pas normal que les chrétiens de France se sentent retranchés du reste de la communauté nationale. Ils ont le sentiment de ne pas bénéficier de la même protection et de la même sollicitude des autorités que les autres communautés religieuses quand leurs lieux de culte sont attaqués ou leur foi mise à l'Index. Monsieur Jacques Bompard demande à M. le ministre de l'intérieur si son intérêt est circonscrit aux synagogues et aux mosquées ou s'il compte enfin prendre la mesure de la christianophobie ambiante qui règne en France."

19 novembre 2013

[Paix Liturgique] De l'actualité de la Fête du Christ, Roi de l'Univers

SOURCE - Paix Liturgique - Lettre 414 - 19 novembre 2013

Tu Rex gloriae Christe ! « C’est vous, ô Christ, le Roi de gloire », Te Deum
Ce dimanche 24 novembre, à 10h30, le pape François célébrera place Saint-Pierre, à Rome, la Messe de clôture de l'Année de la Foi. Cette cérémonie, voulue par Benoît XVI, coïncidera avec la fête du Christ, Roi de l’Univers. Cette coïncidence n'en est en réalité pas une car Benoît XVI savait bien ce qu'il faisait en associant cette fête de la royauté, spirituelle mais aussi sociale, de Notre-Seigneur Jésus-Christ à cette année de préparation à la nouvelle évangélisation. C'est en tout cas ce qu'explique le Père Michel Viotdans son dernier ouvrage, paru le mois dernier aux éditions Via Romana (1).

Fondateur de l'association « Écouter avec l'Église », dont la vocation est l'explication, l'illustration et la défense du Magistère pontifical, le Père Viot a en effet jugé important de donner à cette fête de la royauté du Christ un éclairage particulier cette année. Il n'est pas le seul car c'est aussi en fêtant le Christ-Roi que s'est conclu le tout récent pèlerinage du peuple Summorum Pontificum à Rome.

Nous souhaitons cette semaine nous arrêter sur ces deux initiatives qui s'inscrivent toutes deux dans la même démarche de catholicité décomplexée, missionnaire et soucieuse de cet « enrichissement mutuel » à laquelle invite le Motu Proprio de Benoît XVI.
I – L'INITIATIVE DU PÈRE VIOT
Dimanche 24 novembre, à 11h30, en l'église Saint-François-Xavier, à Paris, le curé de la paroisse, Mgr Patrick Chauvet, à l'instar de tous les curés célébrant de par le vaste monde dans la forme ordinaire du rite romain, fêtera le Christ, Roi de l'Univers. Cette cérémonie, pour laquelle Mgr Chauvet sera entouré de Mgr Dominique Le Tourneau et du Père Michel Viot, fera non seulement écho à celle que conclura au même moment le pape François, place Saint-Pierre, mais aussi à celle que l'abbé de Tanoüarn a présidé, selon la forme extraordinaire du rite romain, le dimanche 27 octobre, devant une centaine de fidèles, en la même église Saint-François-Xavier.

Pour inciter les catholiques à bien saisir l'importance de la fête du Christ-Roi, comme elle s'appelait lors de son institution par Pie XI en 1925, le Père Viot a en effet souhaité accompagner la publication de sa brochure d'une initiative de catéchèse liturgique hautement symbolique : la célébration, dans la même paroisse, de la même fête liturgique selon les deux calendriers romains, l'ancien et le réformé. Ces deux célébrations, à un mois d'intervalle, puisque le « Christ-Roi » est fixé dans l'Ordo traditionnel au dernier dimanche avant la Toussaint tandis que le « Christ, Roi de l'univers » marque la fin de l'année liturgique dans le nouvel Ordo, seront appuyées par un colloque qui se tiendra toujours en la paroisse Saint-François-Xavier, l'après-midi du 24 novembre.

Outre la fidélité au Magistère romain et, en particulier, à l'enseignement de Benoît XVI, l'initiative du Père Viot est motivée par un souci pédagogique et catéchétique de grande urgence : offrir aux catholiques une réflexion sur la signification et l'importance de la célébration de la royauté de Notre-Seigneur à l'heure des provocations laïcistes du gouvernement actuel. En outre, comme elle est caractérisée par le rapprochement des deux formes liturgiques du rite romain, cet « enrichissement mutuel » au service de la « paix liturgique » que nous désirons si ardemment, nous ne pouvons que l'appuyer et encourager nos lecteurs à s'y associer.

Dans son ouvrage, dont la préface est signée de l'évêque de Bayonne, Lescar et Oloron, Mgr Marc Aillet, le Père Viot rappelle les origines historiques de l'instauration par Pie XI de la fête du Christ-Roi à travers l'encyclique Quas Primas. S'il ne cache pas que les modifications apportées par le concile Vatican II aient pu sembler vouloir redimensionner l'importance de cette fête, « un peu comme si son accomplissement parfait reporté à la fin des temps nous autorisait à tempérer l'ardeur qu'il aurait fallu mettre dans leur application immédiate » (page 56), le Père Viot estime toutefois que Vatican II a « complété Quas Primassans l'abroger, ce qui n'était d'ailleurs pas en son pouvoir » (p. 60). Et l'auteur de prêcher l’union sacrée de tous les catholiques contre le laïcisme d’aujourd’hui qui démultiplie les conséquences de l’abandon de la loi naturelle par les états modernes.

Cette invitation du Père Viot à ne pas se rallier au monde laïciste, a trouvé un parallèle dans l’homélie matinale du pape François, ce 18 novembre. Commentant un passage du Livre des Maccabées, le pape a dénoncé avec force et clarté ceux qui veulent, au nom de « la pensée unique » et dans un esprit de « progressisme adolescent », négocier « la fidélité au Dieu toujours fidèle ». « C’est ce qu’on appelle l’apostasie », a remarqué le Pape. « Ce n’est pas qu’ils sont en train de négocier certaines valeurs, non, ils négocient carrément l’essentiel, à savoir la fidélité au Seigneur ». « On connaît la suite de l’histoire, a poursuivi le Pape, les condamnations à mort, les sacrifices humains ». Et de préciser : « Vous pensez peut-être qu’aujourd’hui on ne les pratique pas, ces sacrifices humains ? Eh bien, tout au contraire, on en pratique tellement, tellement. Il existe même des lois pour les protéger».

Avant ces propos du Saint-Père, l’invitation du Père Viot à « découvrir le sens profond de la royauté sociale du Christ », selon les mots de Mgr Aillet dans son avant-propos, avait été parfaitement illustrée par la journée de clôture du pèlerinage du peuple Summorum Pontificum à Rome, le 27 octobre dernier, jour de la fête du Christ-Roi dans le calendrier traditionnel.
II – À ROME, LE PEUPLE SUMMORUM PONTIFICUM FÊTE LE CHRIST-ROI
Lors de la conférence de presse de lancement du pèlerinage en juin dernier, l'abbé Claude Barthe, aumônier du pèlerinage, avait annoncé que sa clôture officielle interviendrait non pas le samedi 26 octobre à l'issue de la messe en la basilique Saint-Pierre, mais « seulement le dimanche 27 octobre, par la solennité du Christ-Roi, célébrée par un évêque venu du bout du monde, Mgr Rifan, ordinaire de l’Administration apostolique de Campos (Brésil) ». Ce choix témoignait du désir des organisateurs de marquer leur unité spirituelle avec l'Année de la Foi dont la conclusion a pour objet d'être en pratique « un commencement, un nouveau départ en mission ». Or, expliquait l'abbé Barthe, « la toujours jeune et fervente liturgie traditionnelle, qui s’étend désormais paisiblement chaque jour dans le monde entier, apporte son souffle spirituel très spécifique à la nouvelle évangélisation. Très attrayante pour les jeunes catholiques qui la découvrent, en raison de sa puissante force d’identité et d’expression du sacré, elle représente d’ailleurs en elle-même, comme l’expérience le prouve, un moyen privilégié de catéchèse à propos de la présence réelle, du sacerdoce, du sacrifice eucharistique ».

Ce dimanche 27 octobre 2013, en la basilique romaine de Sainte-Marie-de-la-Minerve, l'expérience a été confirmée. Mieux même, elle a été parfaitement illustrée et revendiquée par le célébrant, Mgr Rifan, qui a livré un sermon vigoureux, particulièrement apprécié des fidèles, de toutes nationalités. Rappelant l'offensive laïciste qui frappe l'Europe, Mgr Rifan a expliqué, rendant grâces à Pie XI, que la célébration solennelle du Christ-Roi était l'une des meilleures réponses spirituelles, sans présumer des réponses « sociales » nécessaires, que les catholiques pouvaient y apporter, y compris au quotidien, par l'affirmation de la présence réelle de Notre Seigneur, magnifiée particulièrement dans la forme extraordinaire du rite romain qui, à cet effet, peut et doit jouer un grand rôle dans la nouvelle évangélisation.

L'homélie de l'évêque brésilien a eu d'autant plus d'effet que le service liturgique, assuré par l'Institut du Christ-Roi Souverain Prêtre (la Providence et les organisateurs avaient bien fait les choses !), était d'une saisissante mais déjà très efficace jeunesse, et que les Pères dominicains qui ont la charge de la basilique avaient fait la surprise, aux pèlerins comme aux organisateurs, de permettre que la Sainte Messe soit célébrée à l’autel majeur, sur la châsse de sainte Catherine de Sienne, patronne de l’Italie. Un privilège d'autant plus rare que l'autel face au peuple avait été pour l'occasion retiré. Un petit miracle dans lequel nous voulons voir un clin d'œil du Ciel aux pèlerins pour le zèle et la ferveur démontrés durant tout le pèlerinage.
« Adveniat regnum tuum ! »
(1) Dieu et l'État – Signification de la fête du Christ-Roi, éditions Via Romana, 2013,
80 pages, 9 euros.

18 novembre 2013

[Alexandre Ballario - Golias] Wisques : une OPA bien dirigée

SOURCE - Alexandre Ballario - Golias - 18 novembre 2013
L’abbaye Saint-Paul-de-Wisques (Pas-de-Calais), abbaye-fille de Solesmes, a vu débarquer le 10 octobre 2013, treize Frères de Fontgombault.

Les Bénédictins de Fontgombault (Indre), traditionalistes et adeptes du rite tridentin, sont réputés pour pencher du côté du Front national. Une véritable OPA à Wisques qui a provoqué le départ de plusieurs moines présents jusque-là dans l’abbaye. Ils ont trouvé refuge dans d’autres monastères de la famille de Solesmes. Alors que certains annoncent la résurrection de Saint-Paul-de-Wisques grâce à ses nouveaux occupants, on peut regretter le développement d’un tel mouvement conservateur et saluer le choix des moines qui ont préféré partir.

16 novembre 2013

[Ennemond - Le Forum Catholique] A propos de [...] la lettre des prétendus 37

SOURCE - Ennemond - Le Forum Catholique - 15 novembre 2013
Si des mesures disciplinaires sont prises au sein de la FSSPX, c'est que « quelques prêtres se sont laissés effectivement aller à des menées anonymes et gravement subversives contre l’autorité de la Fraternité » (cf. communiqué de l'abbé de Cacqueray du 7 mars 2013).

Lorsque des prêtres, qui sont censés enseigner la vérité - c'est-à-dire le vrai - sont finalement confondus en train de préparer et diffuser des lettres de corbeau pour semer le trouble dans les esprits, les supérieurs ne peuvent en conscience que s'inquiéter des dispositions avec lesquels sont célébrés les saints mystères. Lorsque ces attitudes sont assumées et justifiées, il n'est pas étonnant que des décisions de précaution soient prises. C'est dans cet esprit, soucieux des fidèles et du Sacrement qu'ont, je pense, agi les abbés Wuilloud, Petrucci et Quilton. Comparer ce genre de posture incriminée à l'attitude du fondateur de la FSSPX est particulièrement inapproprié. Les lettres anonymes ou les pétitions agressives, tout cela Mgr Lefebvre les jetait à la corbeille. Il ne s'abaissait pas à ces bassesses. Interrogez ceux qui l'ont côtoyé de près.

Par ailleurs, comme des chiffres fantaisistes circulent dans les commentaires, précisons ceci :

- Avant de parler de lettre des « trente-sept » prêtres du district de France, il est utile de rappeler que son supérieur, l'abbé de Cacqueray, « après avoir pris le temps de procéder à des vérifications », a parlé d'affabulation à propos de ce chiffre.

- Après la parution de cette lettre et la découverte de l'action de trois membres de la Fraternité, aucune exclusion n'a été notifiée à ses rédacteurs. Une exclusion aurait été simple étant donné les faits incriminés. Les supérieurs ont donné une nouvelle chance, même si leur clémence n'est guère reconnue par les esprits passionnés. Seul l'un des trois a préféré ne pas saisir cette chance en désobéissant à ses supérieurs et a abandonné de fait la Fraternité en ne rejoignant pas son affectation. Ce chiffre de dix ne correspond pas à la réalité. Néanmoins, depuis deux ans et demi, la FSSPX a dû déplorer une vingtaine de départs (volontaires ou forcés). Toutefois, ce n'est pas une première. A la veille d'une exclusion de grande ampleur au sein d'un district, le fondateur s'était pourtant exclamé : « S’il en reste trois, eh bien ils resteront trois qui resteront fidèles. »

Enfin, devant des actes subversifs, interdits à des fidèles, a fortiori des prêtres, il était normal que les supérieurs rétablissent la justice. Il en va de l'honneur des centaines de prêtres, de frères, de sœurs et oblates de la Fraternité, dont l'image est abîmée par quelques agissements et par des étalages publics dont on ne soupçonne pas l'effet dévastateur. Or ces âmes religieuses vivent dans le silence qui fait l'apanage des saints et dans l'obéissance vécu au quotidien. C'est là leur oblation de chaque jour. Là est la véritable Fraternité, non dans quelques coups de claviers acerbes et agités qui sont l'écume de ces crises qui disparaissent avec le temps.

« On dirait que le Bon Dieu veut tous les trois ans nous donner une épreuve pour nous sanctifier et puis, en même temps, pour bien remettre dans la bonne direction la Fraternité. » (Mgr Marcel Lefebvre)

[Credidimus Caritati] Mgr Marcel Lefebvre : A l’intérieur, la mer ne bouge pas

SOURCE - Credidimus Caritati - 16 novembre 2013

Les témoins de la cérémonie des sacres de 1988 ont témoigné du fait que le fondateur de la FSSPX avait débuté de manière très sereine la fameuse journée du 30 juin. Toute sa vie a consisté à ne pas trop s’émouvoir des événements qu’il vivait, ni des pressions qu’il subissait. Des avanies, des défections, des humiliations, il en a connu. Il ne s’en est pas tourmenté. Bien des évêques, autour de lui, ont flanché et ont abandonné. Les esprits peuvent s’agiter et même se passionner. Qu’importe. Mgr Lefebvre invite à toujours rester debout et à persévérer dans le calme et la détermination.
« Il ne faut pas que nous ayons une instabilité constante dans notre vie spirituelle. C’est anormal. Un chrétien, un vrai chrétien, un chrétien qui a la foi ne devrait pas être instable dans sa vie spirituelle, ne devrait pas être un jour dans l’euphorie, le lendemain dans le découragement, dans l’inquiétude, dans l’angoisse, dans la tristesse, et puis tout à coup dans la joie. Ce n’est pas une vie chrétienne normale. 
« Une vie chrétienne normale, qui est vraiment fondée en Notre Seigneur Jésus-Christ, en sa divinité, dans toutes les vertus que Notre Seigneur Jésus-Christ nous enseigne, devrait être une vie stable, une vie profonde, pour laquelle, je dirais, les événement qui pourraient éventuellement secouer un peu sa vie spirituelle et sa vie surnaturelle, ne sont que des événements de surface comme les vagues de la mer. La mer ne bouge pas à l’intérieur. Les sous-marins qui sont à l’intérieur de l’eau sont toujours dans la tranquillité. Il n’y a pas de vagues là-dessous. Mais évidemment, au fur et à mesure que l’on remonte à la surface, on commence à sentir les vagues, même la tempête éventuellement. Et bien, ça ne devrait pas changer notre intérieur. Même si il y a quelques vagues de surface, même si il y a quelques événements de surface, ça devrait rester stable. 
« Et ça, c’est une chose, malheureusement, qui existe même encore aujourd’hui. Quelquefois j’ai un peu de peine de sentir que même parmi ceux qui sont passés par ici, il y en a quelques-uns qui sont comme ça un peu secoués profondément et qui seraient tentés quelquefois de se laisser aller à des décisions qui sont anormales. […] On doit s’attacher à Notre Seigneur de toute son âme et, par conséquent se détacher des autres choses, ne pas être attachés à sa famille, aux siens, à sa patrie, à tout ce qui est secondaire par rapport à Notre Seigneur Jésus-Christ, même si on nous demande de quitter notre patrie pour aller évangéliser une autre nation. C’est toujours Notre Seigneur, c’est toujours l’Évangile, c’est toujours le règne de Notre Seigneur Jésus-Christ. Le fait de changer de région, le fait de changer d’espaces, qu’est-ce que ça peut faire ? Au contraire. 
« Peut-être justement qu’une foi profonde dans la divinité de Notre Seigneur Jésus-Christ nous met nécessairement dans l’humilité. C’est la première conséquence de l’adoration de Notre Seigneur Jésus-Christ. C’est pour cela que notre Sainte Messe est si belle, parce qu’elle constamment une manifestation de l’adoration de Notre Seigneur Jésus-Christ. »
Mgr Marcel Lefebvre, conférence du 8 juin 1978