31 octobre 2016

[Abbé J de Pluvié, fsspx - Fideliter] « Qui suis-je pour juger ? » « Mais, le pape, Très Saint-Père ! »

SOURCE - Abbé J de Pluvié, fsspx - Fideliter - septembre-octobre 2016

« Si une personne est gay et cherche le Seigneur avec bonne volonté, qui suis-je pour la juger ? » Tournée en boucle comme un « tube » par les fossoyeurs de la morale catholique, cette courte interrogation du pape François (lors de son retour des Journées mondiales de la jeunesse à Rio le 29 juillet 2013) conduit finalement à remettre en cause une des opérations humaines les plus élémentaires : le jugement moral.

Car dès lors que le chef suprême de l'Église n'est pas habilité à juger des pratiques contrenature d'un homosexuel qui, surtout s'il cherche Dieu, devrait tout simplement les abandonner, quel individu pourra se permettre de porter des jugements sur autrui ? Si un homme est terroriste, s'il est pédophile, et s'il cherche le Seigneur, qui suisje pour juger ? À la rigueur, allons jusqu'à l'ultime conséquence de cette réflexion pontificale : si même quelqu'un ne cherche pas le Seigneur, qui suis-je pour juger ?

Faudra-t-il laisser toute sentence morale à Notre-Seigneur Jésus-Christ ? Pour répondre à cette question, que chacun se demande : qui suis-je ? Un homme, un être doué de raison dont le jugement me permettra de me conduire vers le bien, vers mon salut, et si je suis responsable d'autrui (parent, dirigeant, chef au sein d'une société civile ou ecclésiastique), de faire régner la paix et la justice, de corriger mes subordonnés avec prudence dans le domaine qui m'incombe, ou d'enrayer la propagation du mal.

Certaines recommandations de l'Écriture sainte sembleraient cependant corroborer la retenue du pape qui reprend d'ailleurs presque mot pour mot une réflexion de saint Jacques : « Mais qui es-tu, toi qui juges le prochain ? » (Jc 4, 13) Notre- Seigneur dit aussi : « Ne jugez point afin que vous ne soyez pas jugés. » (Mt 7, 1) Dans l'une de ses paraboles, le Christ reproche à demi-mot au pharisien de se faire l'inquisiteur de la vie morale du publicain. Mais il n'est pas besoin d'avoir suivi de hautes études pour comprendre que les passages cités stigmatisent seulement le jugement téméraire, malveillant ou sans fondement sérieux. Les accusations hâtives et divulguées inconsidérément demeurent une tare malheureusement trop fréquente de la nature humaine, même en milieu chrétien. Si les paroles oiseuses nous seront reprochées, que dire des réquisitoires sans pitié envers les autres ? Ce que Notre-Seigneur condamne, c'est de « juger selon l'apparence » (Jn 7, 24), de « juger selon la chair » (Jn 8, 15).

D'autres paroles de l'Écriture demandent au contraire le jugement : « Jugez selon la justice. » (Jn 7, 24) Dans ses paraboles, Notre-Seigneur Jésus- Christ réclame un discernement : Lazare et le mauvais riche, le levain des pharisiens, l'obole de la veuve, l'arbre qui se juge à ses fruits. Saint Jacques nous encourage à la correction fraternelle : « Mes frères, si quelqu'un d'entre vous s'égare loin de la vérité, et qu'un autre l'y ramène, qu'il sache que celui qui ramène un pécheur de la voie où il s'égare, sauvera son âme de la mort, et couvrira une multitude de péchés. » (Jc 5, 19-20)

Comment donc corriger le prochain, avec charité s'entend, si un certain jugement ne se formule pas à son encontre ? Comment éduquer et diriger droitement un enfant si son responsable doit suspendre le jugement sur son agir ? Comment faire régner la paix et la justice si l'autorité compétente devait en toutes circonstances s'enquérir du for interne pour donner une ligne de conduite ou condamner les actions évidemment mauvaises ? Bien sûr, connaissant la faiblesse humaine que supportent aussi bien le pécheur que son juge, le prochain doit faire preuve d'indulgence parce qu'il est lui-même pécheur et que, la plupart du temps, il ne connaît pas tous les motifs de l'action. L'autorité doit également exercer la clémence afin de « ne pas éteindre la mèche qui fume encore ».

Mais, le « qui suis-je pour juger ? » jette le trouble dans les rangs catholiques et réjouit les ennemis de l'Église parce que, loin d'enrayer le scandale, il le propage à sa manière.

Dans son commentaire de la Somme Théologique de saint Thomas sur la correction fraternelle, le père Noble nous éclaire sur la prudence (et aussi la justice) du chef qui doit savoir distinguer : « Ne serait pas un chef prudent qui ne ferait pas l'exact partage entre les fautes secrètes et sans préjudice pour le bien commun et les délits publics qui, par leur scandale ou par leur nocivité, portent atteinte à ce même bien commun. »

L'exclamation d'un fidèle résumera à merveille notre sujet : « Qui suis-je pour juger ? » « Mais, le pape, Très Saint- Père ! »

Abbé Jehan de Pluvié, prêtre de la Fraternité Sacerdotale Saint-Pie X

[Fideliter (FSSPX)] Les diaconesses : du mythe à la réalité

SOURCE - Fideliter (FSSPX) - Octobre 2016

"Le ministère des diaconesses n'avait rien de
sacerdotal, de même leur ordination n'avait

rien de sacramentel" (Chanoine Forget in
Dictionnaire de théologie catholique), mais
les temps changent et la revendication de
femmes-prêtres [Voir photo ci-dessus] dans
l'Eglise catholique n'est plus loin depuis que
le cardinal Walter Kasper s'est saisi du dossier....
«Je vous recommande Phoebé, notre soeur, qui est diaconesse de l'Église de Cenchrée… » (Rm 16, 1). Ce passage de saint Paul est avancé par de nombreux progressistes, féministes en tête, pour demander l'extension du diaconat masculin aux femmes. Lors du synode sur la famille en 2014, Mgr Paul-André Durocher proposait un « processus qui pourrait éventuellement ouvrir aux femmes l'accès au diaconat permanent ». Et pas plus tard que le 12 mai dernier, les responsables de l'UISG, l'Union internationale des supérieures générales, réunies à Rome en assemblée plénière, ont posé la question suivante au pape : « Dans l'Église, il existe le service du diaconat permanent, mais il n'est ouvert qu'aux hommes, mariés ou non. Qu'est-ce qui empêche l'Église d'inclure les femmes parmi les diacres permanents, juste comme cela se passait dans l'Église primitive ?»

Qu'étaient ces diaconesses ? Le chanoine Jacques Forget (1852-1933), théologien et orientaliste belge, professeur à l'Université catholique de Louvain, a bien résumé la question dans un article fort détaillé du Dictionnaire de théologie catholique. L'existence des diaconesses est bel et bien avérée. Après saint Paul, c'est Pline le jeune, gouverneur romain de la province de Bithynie, qui écrit vers l'an III à Trajan qu'il a soumis à la torture deux chrétiennes diaconesses.

Il s'agissait de femmes vierges ou veuves, officiellement chargées d'une fonction d'assistance au clergé. Deux textes, la Didascalie (III° siècle) et les Constitutions apostoliques (fin du IV°) nous renseignent sur les missions confiées aux diaconesses, dans les églises latine et grecque : prendre soin des pauvres et des malades de leur sexe ; être présentes lors de l'entretien particulier d'une femme avec l'évêque, un prêtre ou un diacre ; aider les femmes à se préparer au baptême en leur inculquant les éléments de la doctrine ; se charger des constatations corporelles indispensables en cas de procédure judiciaire ; garder la porte par laquelle les femmes devaient entrer à l'église, en assurant l'ordre dans l'assemblée féminine ; enfin, prêter leur concours à l'évêque dans l'administration du baptême des femmes, le baptême des adultes ayant lieu par immersion.

Saint Épiphane (310-403), évêque de Salamine dans l'île de Chypre, ajoute : « Les diaconesses sont destinées à sauvegarder la décence qui s'impose à l'égard du sexe féminin, (…) en intervenant chaque fois qu'il y a lieu de découvrir le corps d'autres femmes, afin que ces nudités ne soient pas exposées aux regards des hommes qui accomplissent les saintes cérémonies » (Haer. 79, 3).

Cependant, les postulantes étaient constituées diaconesses par une imposition des mains ou « ordination », selon les Constitutions apostoliques qui en précisent la manière et la formule !

Le chanoine Forget nous rassure : « De même que le ministère des diaconesses n'avait rien de sacerdotal, de même leur ordination n'avait rien de sacramentel. Jamais, dans les textes, le rite de leur initiation n'est présenté ni comme divinement établi ni, à plus forte raison, comme possédant de ce chef une vertu sanctificatrice, une causalité instrumentale pour produire la grâce et imprimer un caractère indélébile. L'Église, en restreignant de bonne heure et en finissant par supprimer l'ordre et l'office des diaconesses, a bien montré qu'elle les tenait pour une création ecclésiastique, essentiellement modifiable suivant les circonstances. » Les diaconesses disparaissent en Occident à partir du VI° siècle, notamment avec la suppression du baptême par immersion dans l'Église latine.

« Les diaconesses dont il est fait mention dans la tradition de l'Église ancienne ne peuvent pas être assimilées purement et simplement aux diacres », concluait en 2003 la commission théologique internationale diligentée par Jean-Paul II.

Pourtant, le pape François, à la demande des supérieures de l'UISG, a créé le 2 août dernier une commission chargée d'étudier la question du diaconat permanent féminin dans l'Église.

Après le synode sur la famille, une nouvelle boîte de Pandore est ainsi ouverte. Moderniste patenté ayant l'oreille du pape, le cardinal Walter Kasper a déclaré dans La Repubblica dès le 13 mai : « Je pense qu'il va y avoir maintenant un débat féroce. Sur ce sujet, l'Église est divisée en deux », la revendication de femmes-prêtres n'étant pas loin.

[Abbé Arnaud Devillers, fssp - Christophe Geffroy - La Nef] Des chrétiens fervents

SOURCE - Abbé Arnaud Devillers, fssp - Christophe Geffroy - La Nef - octobre 2016

L’abbé Arnaud Devillers, ancien supérieur de la Fraternité Saint-Pierre aux États-Unis, ancien supérieur général (2000-2006), est aujourd’hui curé de la paroisse Sainte-Rose de Lima à Quincy dans l’Illinois. Il connaît bien les catholiques américains dont il nous parle ici.
La Nef – Vous êtes le curé d’une paroisse du Middle West : comment un Français s’est-il retrouvé dans un lieu si improbable ?
Abbé Arnaud Devillers – Mon premier contact avec le Middle West américain remonte à 1985 ; c’est mon premier apostolat. Lorsque la Fraternité Saint-Pierre est fondée, je la rejoins en mai 1989. Je passe ensuite deux ans en Allemagne, au séminaire international de Wigratzbad, y enseignant la théologie. 
      
En septembre 1991, je suis envoyé par mes supérieurs pour développer la Fraternité Saint-Pierre aux États-Unis. Nous n’étions alors que deux prêtres. Après quelques mois à Manhattan (New York City), je rejoins mon collègue à Dallas en janvier 1992. Tant à New York qu’à Dallas, je voyage beaucoup pour faire connaître la Fraternité Saint-Pierre en particulier auprès des évêques. C’est une tâche ardue et les résultats se font attendre. Au début de l’année 1992, je suis quelque peu découragé. Sur les conseils d’un prêtre de rite ukrainien, je demande à nos amis et bienfaiteurs de faire une neuvaine à l’Immaculée Conception et à saint Michel Archange. Marie est patronne des États-Unis sous ce vocable. 
     
Son effet ne se fait pas attendre. À peine deux mois se passent qu’en avril 1992, nous recevons deux invitations d’évêques. Au mois de novembre 1992, je m’installe dans le diocèse de Scranton, dont l’évêque, Mgr Timlin, nous sera toujours d’un soutien sans faille. En juin 2000, nous sommes présents dans plus d’une vingtaine de diocèses avec déjà presque une quarantaine de prêtres.
     
De juillet 2000 à novembre 2008, je suis successivement en Allemagne, en Suisse et en Italie. En 2008, mes supérieurs me renvoient dans le Middle West, dans une petite ville de 40 000 habitants, Quincy, sur les bords du Mississipi. L’évêque nous confie une belle église construite en 1912 mais fermée depuis 2005. Un peu plus de 120 familles pratiquent régulièrement dans notre paroisse. La paroisse (depuis 1896) et l’église (depuis 1912) sont sous le patronage principal de sainte Rose de Lima, la première sainte des Amériques, morte en août 1617. 
Comment caractériseriez-vous les catholiques américains ?
Les catholiques américains en général sont sans doute plus pratiquants et plus fervents que les Français. Il n’est pas rare, notamment dans le Middle West, de trouver des diocèses avec des taux de pratique proche de 50 %. La paroisse américaine est très vivante. Les fidèles se rencontrent non seulement après les messes dominicales mais pour toutes sortes d’activités : banques alimentaires, repas pour les pauvres, boutiques d’habillement d’occasion, repas paroissiaux, pique-niques, enfants de Marie, tiers ordres, catéchisme... Par exemple, chaque année, pour la saint Patrick (17 mars), nous nourrissons plus d’un millier de personnes dans une atmosphère décontractée et familiale.
     
Les catholiques immigrants ont constitué pendant longtemps la classe ouvrière. Ils étaient souvent victimes d’ostracisme par la bourgeoisie protestante. Le Ku Klux Klan, par exemple, n’était pas seulement anti-noir mais aussi anticatholique. Ce n’est que dans la seconde partie du XXe siècle que les catholiques ont été considérés comme citoyens à part entière, en particulier avec l’élection de J.F. Kennedy. Aujourd’hui les catholiques sont de toutes les classes sociales. Par exemple, les candidats républicain et démocrate à la vice-présidence sont catholiques. Cinq des huit juges de la Cour suprême le sont également.

Vous avez été six ans supérieur général de la Fraternité Saint-Pierre : quel regard portez-vous sur cette expérience ?Lorsque je fus nommé supérieur général en 2000, la Fraternité traversait une crise. Ma mission était de ramener la paix. Certains l’ont décrite comme une mission impossible. J’ai essayé de calmer les esprits. Les nouvelles fondations religieuses connaissent souvent des crises analogues. La crise n’avait pas empêché la Fraternité de croître et de s’étendre. Mon successeur, M. l’abbé John Berg, supérieur général depuis dix ans, semble avoir les choses en main. 
     
La crise de l’époque était surtout franco-française. Elle n’affectait guère l’Amérique du Nord. Cela explique peut-être pourquoi aujourd’hui plus d’un tiers des prêtres et diacres et 40 % des séminaristes sont de nationalité américaine (50 % avec le Canada et le Mexique). Autrefois c’était la nationalité française qui était majoritaire. Les divisions affaiblissent.
Les évêques américains sont-ils intervenus dans la campagne présidentielle ?
Les évêques américains ne peuvent soutenir un candidat politique sans risquer de faire perdre à l’Église catholique non seulement certains avantages fiscaux mais également des subventions importantes pour leur action caritative, comme les banques alimentaires et l’aide aux réfugiés. La Conférence des évêques, cependant, à mis au point des règles précises pour aider les catholiques à faire leur choix. La question de l’avortement prime sur toutes les autres. On doit voter pour le candidat pro-life s’il y en a un. Dans la course à la Maison Blanche cette année, seul le candidat républicain Donald Trump est pro-vie. La conclusion semble s’imposer. La question se complique un peu du fait de la personnalité flamboyante de Trump, de certaines déclarations inquiétantes et de ses prises de position sans nuances. Le grand enjeu de cette élection n’est pas seulement la présidence du pays, mais l’orientation de la Cour suprême de justice. Depuis la mort d’Antonin Scalia, il manque un juge et il sera nommé par le prochain président.
     
Historiquement les catholiques votaient pour le parti démocrate, le parti des minorités. Certains catholiques votent toujours pour des démocrates, favorables à l’avortement, à force d’habitude bien qu’ils n’y soient pas eux-mêmes favorables… 
Comment analysez-vous la situation économique et sociale des Américains, percevez-vous notamment la paupérisation des classes moyennes et l’exaspération contre le « système » qui ont fait le succès de Bernie Sanders et Donald Trump ?
Ma paroisse se trouve dans la partie ancienne et pauvre de la ville. Je suis appelé à venir en aide à des familles en situation difficile. Depuis hut ans que je suis ici, les banques alimentaires nourrissent de plus en plus de familles chaque année. Les écoles publiques doivent commencer la journée scolaire en donnant un petit-déjeuner gratuit, sans parler du déjeuner et ce même pendant les vacances scolaires ! La situation des pauvres a empiré sous la présidence d’Obama. Cela devient une charge de plus en plus lourde pour les petites entreprises et les travailleurs, en particulier ceux sans qualification. Il y a de plus en plus de gens qui ont une mentalité d’assistés et qui pensent que tout leur est dû. 
Aux États-Unis, les chrétiens pro-vie sont très organisés et pèsent sur la vie politique : est-ce un aspect perceptible au niveau d’une paroisse comme la vôtre ? 
Notre paroisse est trop petite pour organiser ses propres activités, mais nos paroissiens participent volontiers aux activités pro-vie à tous les niveaux : ville, diocèse, État, nation. Les avortements ici se font rarement à l’hôpital mais dans des cliniques spécialisées. Il n’y en a pas à Quincy. Cependant, il y a une organisation pro-vie au niveau de la circonscription qui s’occupe d’informer les gens sur cette question ; elle intervient dans les établissements scolaires et au niveau politique local. Des organisations s’occupent d’aider et d’informer les femmes et jeunes filles enceintes en difficulté et facilitent l’adoption. Au niveau diocésain, il y a des prières publiques près des cliniques d’avortements. Chaque année, il y a la grande manifestation de Washington et le diocèse organise des bus pour s’y rendre. Lorsque l’État de l’Illinois a adopté le « mariage » homosexuel, notre évêque a organisé une cérémonie de réparation au cours de laquelle il y avait une prière d’exorcisme. Les fidèles se mobilisent lorsqu’une loi se profile, soit au niveau de l’État, soit au niveau national, en contactant les élus, souvent avec succès. Il faut savoir que tant l’avortement que le « mariage gay » ont été imposés par voie juridique et non par voie électorale.

[Charles Benoît - DICI] En direct des Etats-Unis : Derniers jours avant la bénédiction du nouveau séminaire

SOURCE - Charles Benoît - DICI - 31 octobre 2016

Un soleil rouge vif se couche derrière les Blue Ridge Mountains. Les murs du nouveau séminaire de Virginie prennent un ton soudain plus ocre. Si les pierres ont une âme, elles ont ici une âme de feu. Comme ceux qu’elles abritent.

Ce soir, fête du Christ Roi, l’abbé Yves le Roux, directeur du séminaire, concepteur et fondateur de cette nouvelle œuvre, a laissé à son neveu, jeune prêtre venu de France le visiter, le soin de présider les vêpres dominicales. Le symbole est fort : ce n’est pas une simple affaire de famille, c’est le signe tangible que le rite traditionnel ne connaît pas de frontières. Et que la relève est en route. Le rite immuable se déroule dans cette contrée où, il y a encore quatre ans, on ne rencontrait que des ours, des loups et des pumas. Autour des défrichements, la forêt est d’une incroyable densité : elle permet de mesurer l’immensité du travail accompli par ces bâtisseurs.

Ce soir, au fond de la chapelle provisoire, un établi et une grosse scie circulaire : les outils témoignent des travaux encore en cours. Tout n’est pas fini pour la journée de vendredi où doit avoir lieu l’inauguration des lieux. Le cloître est un champ de labour, les fils électriques pendent encore ici ou là : le directeur nous fait l’amitié d’une visite privée de l’ensemble des installations. Privilège rare. Son sourire ne cache pas les soucis de dernière minute : “Le diable s’est vraiment déchaîné ces derniers jours, commente-t-il, nous avons rencontré des difficultés à chaque pas. C’est bien la preuve que nous avançons dans la bonne direction”. Les histoires de fondation d’œuvres religieuses sont toujours marquées de ces réflexions qui montrent le saint abandon à la Providence : en Virginie, l’Histoire se répète. Vendredi tout doit être prêt : le permis d’habiter signé, le cloître gazonné, les ajustements de lambris posés, les outils rangés et… la poussière nettoyée. Le miracle aura-t-il lieu ? DICI s’en fera l’écho dès le lendemain.

Les images, mieux que les mots, rendent compte de ce qui se passe ici. Des Sœurs vont venir s’installer à proximité, des familles aussi, bientôt, et sans doute, à terme, une école. On comprend que les chantiers sont loin d’être terminés, d’autant que la grande église est encore au stade du projet. Tout ceci nécessite du temps et des moyens : la générosité des fidèles américains est grande. Et leur foi en l’avenir, en l’avenir divin, n’a pas de limite. Quelle leçon pour notre vieux continent…

Ce soir, au fond de la chapelle, les outils témoignent que nous sommes revenus au temps des bâtisseurs.

Charles Benoît
Dillwyn, 31 octobre 2016

30 octobre 2016

[Abbé Xavier Beauvais, fsspx - L'Acampado] Lettre ouverte de Louis Veuillot au pape François

SOURCE - Abbé Xavier Beauvais, fsspx - L'Acampado - octobre 2016

Question posée par un journaliste au Pape François, le 27 juin 2016:

«Vous irez en octobre en suède pour commémorer les 500 ans de la réforme. Pensez-vous que ce soit le moment juste (…) pour reconnaître les dons et aussi peut-être pour lever l’excommunication de Luther?»

Le Pape répond :

"Je crois que les intentions de Luther n'étaient pas erronées. C'était un réformateur. Peut-être certaines de ses méthodes n'étaient pas justes, mais dans ce temps-là, si nous lisons l 'Histoire de Pastor - un allemand luthérien converti au catholicisme - nous voyons que l'Église n'est vraiment pas un modèle à imiter : corruption, mondanité,attachement à l'argent et au pouvoir. C'est pour cela qu'il a protesté, il était intelligent et il a fait un pas en avant en justifiant pourquoi il le faisait. Aujourd'hui protestants et catholiques, nous sommes d'accord sur la doctrine de la justification : sur ce point si important il ne s'était pas trompé. Il a fait un médicament pour l'Église, ensuite ce médicament s'est consolidé en un état de choses, en une discipline, en une manière de faire, de croire. Et puis il y avait Zwingli, Calvin et derrière eux il y avait le principe « cuius regio eius religio». Nous devons nous mettre dans l'histoire de ce temps-là, ce n'est pas facile de comprendre. Puis les choses ont été de l'avant, ce document sur la justification est un des plus riches".

Devant ces propos effarants, ahurissants, insultants envers l’Église, du Pape François, j’ai donc contacté Louis Veuillot, qui, avec la bénédiction de son ami le Pape Pie IX, a bien voulu me laisser transcrire quelques éléments suffisants pour ouvrir l’intelligence, les yeux et le cœur du Pape. Puissent ces propos, avec nos prières, lui obtenir une véritable conversion et renoncer à ce que certains jugent déjà comme la « canonisation» de Luther.

Dans de fortes études sur le protestantisme, Louis Veuillot met en lumière le fait que Luther a ouvert la voie qu'ont suivie tour à tour, Voltaire, Robespierre et Proudhon.

Il y a démontré qu'en émancipant la raison humaine, Luther a été pour ses adeptes une cause immédiate de déchéance intellectuelle et morale. il y démontre que l'émancipation de la raison est devenue le principe des aberrations philosophiques et politiques des temps modernes, non moins que la source des désordres sociaux de l'époque contemporaine.
Il a été une cause immédiate de déchéance intellectuelle et morale.
« Pour pervertir l'homme, il suffisait de le séparer de l'élément divin, c'est-à-dire de le réduire à ses propres forces».

Luther a opéré un prodige plus effrayant, celui « de créer un chrétien qui en présence de l'Eglise, dépositaire et interprète de la vérité de Dieu, proclamât la souveraineté de sa propre raison».

« En proclamant le droit du libre examen, en soumettant la raison de Dieu à la raison souveraine de l'homme, en donnant à chaque individu la faculté, ou plutôt en lui imposant l'obligation de se créer à lui-même sa religion dans les limites de la Bible, Luther a nié la présence sur la terre, de l'autorité divine et par là, il a donné aussitôt l'existence à des religions purement humaines. Puisque la raison a conquis la part de Dieu dans la direction morale de l'humanité, elle doit rester seule maîtresse des croyances, des doctrines, des lois, des moeurs. et aussi a-t-elle revendiqué et exercé ce droit de sa victoire. Dès lors, plus de tradition, plus d'infaillibilité, plus de vérité absolue, plus de droit divin, plus de lien d'unité dans la foi, en d'autres termes, plus de foi».

Que fait cette raison émancipée ?

« Elle passe tout droit à l'indépendance absolue, et cette indépendance se courbe avec une indifférence honteuse sous n'importe quelle dictature, pour sombrer dans l'indifférence et le mépris de toute religion.»

« Le protestantisme « accroît alors la portion animale de l'humanité en y faisant redescendre tous ceux que la connaissance et l'amour de Dieu élevaient jadis à la vie spirituelle».
L’émancipation de la raison humaine par Luther, principe des aberrations philosophiques des temps modernes.
Veuillot constate que « La raison émancipée, c'est-à-dire incrédule, n'a fait autre chose, depuis sa victoire, que travailler à détruire ce que la raison soumise, c'est-à-dire croyante, avait édifié après de longs siècles et de puissants travaux» …

Résultat, explique Veuillot :

il a produit des milliers de sectes religieuses ; il a introduit le désordre dans la conscience.

Un siècle et demi après que Luther eut écarté la philosophie de la « voie large et lumineuse» que suivait la raison catholique, le protestant Leibnitz lui-même n'avait besoin que de considérer « la marche nouvelle et les tendances fatalistes de l'esprit philosophique» pour annoncer cent ans après à l’avance les révolutions dont l'Europe allait être ébranlée.

Epouvanté, il écrivait dès l'année 1670 :

« Puissent tous les savants réunir leurs forces pour terrasser le monstre de l'athéisme et ne pas laisser davantage croître un mal d'où l'on ne peut attendre que l'anarchie universelle».

Hélas, commente Veuillot: «Le mal plus grand et plus terrible qu'on ne le voyait, envahit les sciences politiques.»
L'émancipation de la raison humaine par Luther, principe des aberrations politiques des temps modernes.
« La raison individuelle, souveraine en religion, en philosophie, le devint donc en politique. Après s'être fait, de son plein gré, une religion, unephilosophie, l'individu veut se faire un gouvernement suivant les idées et les goûts qui l'ont guidé dans le choix du reste. En même temps que la notion de Dieu périt dans la conscience et dans l'esprit, la notion de l'autorité, fille du ciel, s'efface, laissant le champ libre aux combats des intérêts individuels, armés les uns contre les autres de toute la force et de tout l'entêtement de l'égoïsme».

« Soustrait aux droits de Dieu, l'homme tombe immédiatement sous le joug de l'homme. Dans ce morcellement, et dans cette contrefaçon de l'autorité, la société,qui était une famille dégénère en un pêle-mêle de tribus dont le plus ardent désir est de s'anéantir réciproquement. Vivante image des sectes du protestantisme et des écoles de philosophie. Même principe, même résultat!»

Louis Veuillot tire cette conséquence que « la politique de la raison souveraine se réduit au maniement de la foule», or « on agite la foule par la passion, par l'erreur, par la crainte, et de cette fermentation se dégage une force qui peut tout, mais qui passe vite et qui par elle-même ne crée rien ; irrésistible comme la vapeur, subtile et stérile comme elle».

C'est ainsi que « la souveraineté de la raison, en détruisant la notion de l'autorité, remplace l'autorité par le despotisme, l'obéissance par la servilité, la liberté par l'esclavage».

Louis Veuillot démontre ensuite, l'histoire en main, que « Dieu n'a rien plus soigneusement enseigné à l'homme que le respect de l'autorité [ ... ] le principe protestant, introduit dans la politique, mine sans cesse cette autorité, par des coups sous lesquels la société elle-même doit périr.L'autorité a en soi quelque chose de si légitime, de si nécessaire, de si divin que rien ne peut l'ébranler sérieusement, sauf elle-même. Tant qu'elle remplit sa mission, tant qu'elle fait son devoir, elle croit fermement à son droit, et elle résiste aux plus redoutables ; épreuves, appuyée sur la conscience publique. Mais l'autorité conspire contre elle-même et se trahit lorsqu'elle se sépare de Dieu. Premièrement, elle se retire ainsi la protection de Celui par qui les rois régnaient ; secondement, elle ne peut se séparer de Dieu sans entreprendre contre les droits de Dieu ; et tout ce qu'elle fait en ce sens tourne nécessairement contre le bien du peuple. Car le droit de Dieu dans ce monde, c'est là véritablement le bien et l'apanage, l'unique bien, l'unique apanage des faibles et des petits.

Après avoir amené l'autorité à se surcharger de pouvoir, le protestantisme, ou si l'on aime mieux, l'esprit protestant l'a corrompu en le séparant de Dieu, en lui ôtant la crainte de Dieu, en l'obligeant à faire entreprise sur entreprise contre les droits de Dieu.»

Cela a conduit finalement à « des flots de sang qui ont inondé la terre».

« Pour moi, je regrette, je l'avoue franchement, c'est qu'on n'ait pas brûlé Luther, c'est qu'il ne se soit pas trouvé quelque prince assez pieux et assez politique pour mouvoir une croisade contre les protestants».

Veuillot se prend à rappeler les « temps à la fois plus vigoureux dans le mal, plus fermes et plus sages dans le bien où il y avait peine de mort contre ceux qui promettaient la paix publique en fabriquant de fausses croyances».

« Nos pères croyaient l'hérésiarque plus dangereux que le voleur et ils avaient raison. une doctrine hérétique était une doctrine révolutionnaire. il en résultait des troubles, des séditions, des pillages, des assassinats, toutes sortes de crimes contre les particuliers et contre l'Etat. On tombait en guerre civile, on faisait alliance avec l'étranger, et la nationalité était menacée en même temps que la vie et la fortune des individus. L'hérésie qui est un très grand crime religieux était donc aussi un très grand crime politique [ ... ] l'hérésiarque, examiné et convaincupar l'Eglise était livré au bras séculier et puni de mort. Rien ne m'a jamais semblé plus naturel et plus nécessaire. Cent mille hommes périrent par suite de l'hérésie de Wyclef, celle de Jean Huss en fit périr davantage ; on ne peut mesurer ce que l'hérésie de Luther a coûté de sang [ ... ] La prompte répression des disciples de Luther, une croisade contre le protestantisme auraient épargné à l'Europe, trois siècles de discordes et de catastrophes où la France et la civilisation peuvent périr».

Un peu plus tard en 1857, Louis Veuillot affirmait que « 89 qui est le libre examen en politique, n'a pas produit moins d'écoles que le libre examen religieux, son ancêtre, n'a produit de sectes».

« Dans le protestantisme politique, comme dans le protestantisme religieux où peut être l'orthodoxie, et où peut-elle n'être pas ? Il y a ce que l'on appelle des établissements, c'est-à-dire des orthodoxies de fait et de force, mais qui ne reposent doctrinalement sur aucune base et qui ne peuvent se soutenir qu'au mépris du principe générateur de tous les protestantismes, principe unique et uniquement admis : la négation de l'autorité».
L'émancipation de la raison humaine par Luther, source de désordres sociaux de l’époque contemporaine.
Dans sa brochure « Le pape et la diplomatie» Louis Veuillot envisageant les désordres sociaux de son temps, et cherchant à démasquer «le dernier acte de la révolte du protestantisme contre l'Eglise de Dieu», révolte « contre la vérité divine» qui se couvrait du «mot» de liberté des peuples, exactement comme elle s'était couverte du «mot» de liberté des consciences au temps de Luther, révélait magistralement que l'attaque du «monstre» offrait bien «le triple caractère qu'elle avait au XVIe siècle, caractère social, caractère politique, caractère religieux».

« Luther attaque l'état social dans sa racine en ébranlant la solidité du mariage, base de la société chrétienne ; il attaque l'état politique dans sa racine par le déplacement des pouvoirs et l'abolition de la hiérarchie, développement de la société chrétienne, il attaque l'état religieux dans sa racine par l'abolition du culte extérieur, expression nécessaire du culte intérieur, couronnement de la société chrétienne. Cette triple attaque se fait au nom de la liberté:

- pour la liberté de la chair : le divorce ;
- pour la liberté de l'âme : le pontificat des princes ; culte extérieur».

or, affirme Louis Veuillot « La Révolution nous présente le développement régulier et logique de ces trois libertés protestantes».

« De même que Luther avait proclamé pontifes les rois, au nom de la liberté religieuse, de même la Révolution proclame les peuples rois au nom de la liberté de conscience politique».

« Luther disait : « Plutôt Mahomet que le Pape». C'est le cri de la Révolution». Certains « philosophes du libre examen» ont osé parler de « progrès au milieu de cette immense misère ; ils ont dit que l'humanité avait grandi, qu'elle était sortie de l'enfance, arrivée à l'âge viril, qu'ellepensait, qu'elle devait désormais marcher sans lisière, sans tutelle, maîtresse d'elle-même dans sa sagesse et dans sa liberté.»

Louis Veuillot convient qu'assurément « l'humanité a vieilli et s'est émancipée». Mais, remarque-t-il, « ce n'est pas tout de vieillir et de s'émanciper ; il faut savoir en quel sens le caractère s'est développé avec l'âge».

Pour ce qui est du progrès moral, assure Veuillot « c'est un progrès à reculons».

Abbé Xavier Beauvais, prêtre de la Fraternité Sacerdotale Saint-Pie X

[Abbé Michel Seignadou, fsspx - Le Seignadou] « La sérénité est la tradition du christianisme »

SOURCE - Le Seignadou - novembre 2016

Oublions pour un temps les misères de l’Église et, à la veille de la fête de tous les saints du ciel, et de celle des saintes âmes du purgatoire, revenons à des pensées plus belles, pour nous aider à bien vivre ce mois de novembre. Je les emprunte à ce cher et si grand Ernest Hello, que vous connaissez déjà, dans le chapitre Clartés de l’Eglise du beau recueil de fragments intitulés Regards et Lumières. Quelques extraits, trop brefs, à ne pas lire mais à méditer, à goûter et à savourer lentement.
Un des caractères les plus frappants de l'Eglise catholique, c'est l'indifférence avec laquelle elle reçoit les menaces de mort. Elle les reçoit depuis sa naissance, et tout a changé autour d'elle, et elle seule n'a pas changé.
Les ennemis de l'Eglise ont une façon de prophétiser son triomphe: c'est d'annoncer sa défaite. Leurs paroles deviennent des glaives qui se tournent contre leurs poitrines; car l'Eglise poursuit sa marche paisible d'un pas égal et assuré, répétant les paroles qu'elle a entendues des lèvres de David: Si exsurgat adversum me praelium, in hoc ego sperabo.
L'Eglise ne dit pas qu'elle espère, malgré l'attaque et la fureur de ses ennemis, mais à cause de leur attaque et à cause de leur fureur ; car ses vieux psaumes sont l'éternelle actualité de l'homme. Pour l'Eglise, pour les nations, pour les individus, ils sont la prière quotidienne, chaque jour plus neuve que la veille, et plus opportune : Propter inimicos meos dirige in conspectu tuo viam meam.
L'Eglise compte toujours la colère de ses ennemis parmi ses espérances et ses gages de triomphe : Ils crient et elle chante, et elle s'empare de leurs cris pour orner ses chants.
On affirme solennellement que sa dernière heure est arrivée. Pour elle, elle marche et elle chante. Car jamais l'Eglise ne marche sans chanter. Jamais on n'a pu l'empêcher de marcher, et jamais on n'a pu l'empêcher de chanter.
Elle chantait dans les catacombes, et elle chantait entre les mains des bourreaux.
Un fait historique qui n'a jamais été assez remarqué, c'est que les martyrs chantaient. Quelque crise que l'Eglise ait traversée, on n'a jamais pu obtenir qu'elle cessât de célébrer son éternelle vie, son éternelle victoire, et de la célébrer en chantant.
Si on voulait regarder l'histoire, on verrait que la sérénité est la tradition du christianisme. Elle y était du temps de Néron comme du temps de Charlemagne.
Le Credo lui-même se chante; il se chante essentiellement, parce qu'il n'est pas seulement l'énoncé d'une croyance; il est l'affirmation d'un amour et la promesse d'une victoire.
Dans les temps modernes, la menace morale de l'erreur a remplacé la menace matérielle de Néron : l'Eglise a opposé le même calme et la même harmonie.
L'erreur ne sait pas chanter. On ne lui prédit pas la mort, mais la mort lui arrive sans être prédite. La mort lui arrive spontanément, attirée par l'attrait du voisinage et la parenté. La mort ne se fait pas annoncer, mais elle arrive rapidement, sans façon, en voisine.
*
Je conseille beaucoup à ceux qui ne croient pas de méditer ce mot tragique : le Saint.
Qu'ils essaient de s'expliquer le Saint ! S'ils s'arrêtent avant de rencontrer Dieu, ils ne trouveront pas la raison d'être du Saint.
Essayer de s'expliquer les Saints en dehors de Dieu, ce serait admettre les rayons d'un cercle dont on nierait le centre.
La langue humaine a, dans ses profondeurs, des preuves terribles. Le nom de Saint est incommunicable. On dirait qu'il dérive du nom de Dieu. Essayez de le transporter dans le domaine du mal, et sa résistance vous révèlera sa nature. Essayez, si vous êtes Luthérien, de dire saint Luther; essayez, si vous êtes voltairien, de dire saint Voltaire (je ne puis seulement pas écrire ce mot, ma plume s'arrête) : vous ne pourrez pas prononcer cette parole monstrueuse; mais fussiez-vous voltairien, vous direz: saint Paul, et, pour éviter cette épithète qui fait corps désormais avec les noms glorieux qui sont associés à elle, pour dire : Paul, au lieu de saint Paul, il vous faudra faire un effort, et cet effort sera, même à vos yeux, ridicule.
La personne et le nom du Saint sont le domaine sacré de Dieu
La vie des Saints nous oblige à nous placer en face de Dieu et en face de l'homme. Elle nous oblige à considérer la puissance et la faiblesse. Elle nous montre à quelle gloire nous pouvons être élevés, mais elle ne nous permet pas un moment d'oublier la boue dont fut pétri le corps d'Adam, et le péché qui empoisonna ce corps, qui était sorti sans tache des mains du Créateur.
*
Un des caractères de l'Eglise catholique, c'est de penser à tout. L'oubli est chose humaine.
Un homme meurt: il s'élève sur sa tombe des cris de douleur : mais parmi ceux qui criaient, plusieurs bientôt ne pensent plus à lui, car le temps a passé.
Mais il reste un souvenir fidèle, le souvenir de l'Eglise. L'Eglise n'a pas crié sur la tombe u mort; elle a chanté. Mais quand ceux qui criaient ont oublié leurs cris, l'Eglise n'a pas oublié ses chants.
L'Eglise n'oublie rien, son vaste regard embrasse tout. Elle pense à l'enfer, elle pense à la terre, elle pense au purgatoire, elle pense au ciel.
Jamais les douleurs de ses enfants ne lui font oublier leurs joies: jamais leurs joies ne lui font oublier leurs douleurs. Elle pense à tout, prévoit tout, et tient lieu d'expérience à l'enfant qui l'écoute, comme elle tient lieu de jeunesse au vieillard qui veut la suivre. Jamais elle ne s'enfle et jamais elle ne se trouble. Elle donne à Dieu l'encens, et aux hommes le pain quotidien.
La conduite de l'Eglise vis-à-vis des morts devrait, ce me semble, inspirer à ceux qui doutent de graves réflexions.
Une mère oublierait son fils plutôt que l'Eglise.
Le dogme du purgatoire est une preuve saisissante de la vérité du catholicisme. La pratique que ce dogme inspire est une autre preuve de la même vérité. La prière pour les âmes du purgatoire est une chose sublime et magnifique, dont l'habitude seule nous empêche de nous étonner.
Cette prière monte au ciel pour des âmes inconnues qui sont dans un état à peu près inconnu, du moins à l'immense majorité de ceux qui prient. L'immense majorité de ceux qui prient n'a qu'une bien faible idée du besoin qu'on a d'elle: et cependant elle prie, car elle connaît l'existence d'un besoin quelconque.
A mesure que l'homme se rapproche de Dieu, la pensée du Purgatoire devient chez lui plus claire et plus présente. Plus l'homme s'approche de Dieu, plus il est uni aux besoins des hommes; plus son regard s'étend, plus son horizon visuel grandit, plus il est associé par celui qui sait tout aux désirs admirables de la miséricorde. Rien de plus faux que les pensées ordinaires des hommes sur le bonheur et le malheur. Peu d'hommes soupçonnent le fond de leur cœur, ils n'ont pas le temps, la vie est si pleine d'affaires !
Un des caractères les plus frappants et les moins remarqués de l'Eglise catholique, est celui-ci: Elle ne perd aucun moment.
Les secrets de l'Eternité lui révèlent l'usage du temps.
Les hommes sont absorbés par le temps et le perdent.
L'Eglise le domine et l'emploie.
Elle l'emploie parce qu'elle le domine. Elle pense au ciel, elle s'associe au grand Sanctus, et elle a, pour soulager les maux de la terre, des inventions divines, étonnantes et maternelles, qui saisissent ses ennemis, et l'indifférence même est forcée d'admirer.
Et pendant qu'elle vaque aux choses du ciel et de la terre, elle pense incessamment aux âmes du Purgatoire. Elle leur donne un des douze mois de son année.
Elle fait tout cela avec amour, et tout cela avec ordre.
Elle fait tout cela en chantant.
Elle chante l'Alléluia, elle chante le Credo, elle chante aussi le De profundis. 
Belles et saintes fêtes, vécues au rythme du chant de l’Eglise et du Cœur de sa Sainte Mère.

29 octobre 2016

[Mgr Williamson - Initiative St Marcel] Désintégration

SOURCE - Mgr Williamson - Initiative St Marcel - 29 octobre 2016

Certes, nous autres modernes, on est des êtres cassés,
Mais d’autant plus pourront briller des couronnes au Ciel.
Tout se disloque. Le centre ne peut tenir. / L’anarchie se déchaîne sur le monde / Comme une mer noircie de sang : partout / On noie les saints élans de l’innocence. / Les meilleurs ne croient plus à rien, les pires / Se gonflent de l’ardeur des passions mauvaises.
Ces vers célèbres du Second Coming (La Seconde Venue) , poème écrit en 1919 suite à la Première Guerre mondiale par le poète anglo-irlandais, W.B.Yeats (1865–1939), viennent à l’esprit pour essayer d’expliquer comment le mouvement de résistance à la trahison en 2012 de la Fraternité St Pie X de Mgr Lefebvre puisse être si fort en vérité et pourtant si faible en unité et nombre. Voilà presque cent ans depuis 1919, et Yeats n’était ni Catholique ni particulièrement concerné par la condition de l’Église catholique, qui de fait semblait fleurir à ce moment-là. Mais les poètes sont parfois des visionnaires, et Yeats a saisi dans ces lignes une vérité essentielle sur la civilisation européenne telle qu’elle sortait de cette Guerre qui « éteignait les lumières dans toute l’Europe », comme l’a dit le comte Grey : les nations européennes se disloquaient spirituellement dans une chute que rien n’a interrompue depuis.

Néanmoins beaucoup des Catholiques qui veulent aujourd’hui que la Foi survive sont désemparés par la faiblesse apparente de tant de prêtres formés en particulier par Mgr. Lefebvre pour résister à la trahison évidente de ses principes par ceux qui lui ont succédé, et ils cherchent une explication. Certains pensent que les prêtres de la FSSPX ne se dressent pas en public contre la fausse conciliation de la Tradition avec Vatican II parce qu’ils ont peur d’être éjectés de la Fraternité sans gîte ni couvert. Mais les prêtres doivent savoir qu’il y a des laïcs qui seraient enchantés de les recevoir. Une explication plus profonde suggérerait que les prêtres ont peur de se couper de cette Fraternité qui leur fournit et leur famille humaine et leur structure ecclésiale. Mais de même, s’ils avaient une foi assez forte ils sauraient que la Providence peut suppléer pour la famille comme pour la structure.

Par contre, si nous remettons la trahison dans le contexte de la double désintégration occasionnée par les deux Guerres mondiales, suivie à leur tour par la troisième désintégration autrement plus terrible de l’Église catholique à Vatican II (1962–1965), alors d’une part nous devons admirer l’exploit héroïque de Mgr. Lefebvre qui a réussi à rassembler tant de fragments dispersés par cette explosion-là sans précédent, mais d’autre part nous ne pouvons guère être surpris si la Fraternité explose à son tour du dedans, ou si les réfugiés de son explosion éprouvent tant de difficulté à se recomposer dehors. Tout s’est disloqué, y compris les esprits et les cœurs. A mon avis il ne survit plus assez d’intégrité et d’intégration dans les cœurs et les esprits pour que nous puissions penser à renouveler l’exploit de Mgr Lefebvre. Le monde est en chute libre de presque un demi-siècle depuis l’année 1970 où il a fondé la Fraternité.

D’où il s’ensuit non pas qu’il n’y a rien à faire, mais qu’il faut concevoir ce qu’il y a à faire moins du point de vue de l’homme et plus dans la perspective de Dieu. A la fin du monde Dieu permettra à la Foi de disparaître (Lc. XVIII, 8), mais il y aura encore quelques âmes pour croire, espérer et aimer. En 2016 il nous donne un avant-goût de cette disparition, mais les âmes devraient être à même de reconnaître qu’elles ne manquent pas encore de liberté pour croire, espérer et aimer. Et pour ce faire, elles devraient être à même de prévoir que même le plus puissant des États policiers ne peut les en empêcher. Par ailleurs, plus on fera peser les circonstances sur cette liberté, et plus sera glorieuse au Ciel la dévotion persévérante de toute âme à Dieu, à son divin Fils et à sa Très Sainte Mère, et plus seront grands les mérites de cette âme. Et surtout plus sera grande sa contribution irrésistible au bien de l’Église. Là, tout est encore loin d’être perdu, et jamais tout ne pourra se perdre. L’Église de Dieu n’est point chose purement humaine.

Kyrie eleison.

28 octobre 2016

[Le Salon Beige] La FSSPX a conclu des accords à Lourdes

SOURCE - Le Salon Beige - 28 octobre 2016

Pendant trois jours de pèlerinage (22, 23, 24 octobre 2016), les prêtres de la Fraternité sacerdotale Saint-Pie X ont pu déployer librement leur ministère à Lourdes et cela pour la 17e année consécutive. L'évêque de Tarbes et Lourdes a permis que tout soit confié à la Fraternité le temps qu'elle y exerce ses dévotions : les sanctuaires, pour y célébrer la messe, les piscines où un prêtre de la Fraternité et ses scouts accompagnés de plusieurs bénévoles pour les dames officiaient comme brancardiers, les ornements du trésor qui rehaussaient la beauté de la liturgie romaine, sans que les traditionalistes n'y perdent leur latin.
                               
Et de fait, cet apostolat est officiellement reconnu au fil des ans. Le 1er septembre de l'année dernière, le pape François a accordé aux prêtres de la Fraternité les pouvoirs pour confesser. Au mois de juin de cette année, Rome a indiqué qu'Écône ne risquait plus aucune sanction lorsqu'elle ordonnait. À Lourdes, les fils de Mgr Lefebvre bénéficient des micros sans être inquiétés et les prédicateurs de cette édition 2016 - les abbés Pierre-Marie Laurençon, ancien supérieur du district de France, Loïc Duverger, second assistant un district, le père Antoine, gardien du couvent capucin de Morgon - n'ont pas eu à faire corriger leurs prêches. Sous les auspices de la Vierge Marie, c'est dans une atmosphère normalisée que se croisent les différents catholiques. Même les plus défiants de part et d'autres sont heureux de voir d'autres catholiques prier au cours de cette période d'islamisation et de pouvoir bénéficier d'un toit, d'une sonorisation et d'une hospitalité pour leurs malades. C'est ce qui fait d'ailleurs l'un des succès du principal pèlerinage de la FSSPX et son meilleur moyen d'apostolat. Plus de 6000 fidèles ont répondu présent cette année.

Les dominicaines enseignantes de Fanjeaux ont déployé là leurs nombreuses élèves et les établissements de garçons accompagnaient la liturgie par leurs polyphonies sans que le clergé diocésain ne craigne l'attraction de la liturgie grégorienne ou des traditionnelles processions. Devant cette hospitalité, l'abbé Christian Bouchacourt, supérieur du du district de France, a chaleureusement remercié l'évêque et le recteur qui permettent que la Fraternité puisse tourner chaque année les âmes vers Dieu.

Elles sont loin désormais les années de plomb - il y a une quarante ans environ - où les autorités interdisaient imperturbablement l'accès aux basiliques, lesquelles étaient finalement investies par une porte dérobée et où la messe y étaient célébrée à la lueur des lampes de poche, l'électricité étant restée sous surveillance...

À Lourdes, c'est Mgr Périer, pourtant peu favorable, qui, en 2000, a sifflé la fin des hostilités et a permis à la Fraternité de faire l'expérience de la Tradition à Lourdes. Lorsque son successeur, Mgr Brouwet, a repris le diocèse, il a indiqué qu'il ne changerait rien à ce qui avait été consenti par son prédécesseur. Les plus bagarreurs sont peut-être restés sur leur faim. Toujours est-il que le Ciel ne leur est pas tombé sur la tête. L'expérience éprouvée et réussie de Lourdes démontre que, en dépit de quelques sursauts d'une poignée de radicaux des deux côtés, et depuis le temps qu'elle est annoncée, la régularisation de la Fraternité est pleinement acquise dans les esprits.

[Riposte Catholique] Application du Motu Proprio dans le diocèse d’Autun

SOURCE - Riposte Catholique - 28 octobre 2016
Pendant nombreuses années, des prêtres de la Fraternité Saint-Pierre ont desservi des apostolats dans le diocèse d’Autun depuis Saint-Etienne ou Lyon. Depuis 2012, des prêtres résident dans le diocèse (à Cuisery tout d’abord puis aujourd’hui à Chalons) desservant : Varennes les Mâcons (2 dimanches par mois), Chalons sur Saône (tous les dimanches et en semaine) et Paray-le-Monial (2 dimanche par mois).

A partir du mois du mois de novembre, ils assureront également une messe le 1er dimanche du mois à 18h à la Cathédrale Saint-Lazare d’Autun (chapelle latérale).

Par ailleurs, en plus des messes dominicales célébrées à la Chapelle de la Citadelle de Chalons sur Sâone les dimanches et fêtes à 10h30. Les messes sont célébrées en semaine à l’église Saint-Pierre, le mardi et le jeudi à 9h, le mercredi à 12h, le vendredi à 8h30 et le samedi à 7h (les 1er et 3ème du mois) ou à 12h (les 2ème et 4ème du mois).

A Varennes les Mâcons à l’église paroissiale, les messes sont célébrées deux dimanches par mois les 2ème et 4ème dimanches du mois à 10h30 (sauf jusqu’à fin décembre 2016 aux dates suivantes : dimanche 30 octobre, mardi 1er novembre (Toussaint), mercredi 2 novembre, dimanche 13 et 20 novembre, dimanche 11 décembre).

A Paray-le-Monial, comme depuis septembre 2015, les messes sont célébrées les 1er et 3ème dimanches du mois à 10h30 à la chapelle des Dominicaines.

Fraternité Saint-Pierre (Diocèse d’Autun) – Tél. 06 66 83 42 45

[DICI] Europe : Diminution constante du nombre des prêtres, séminaristes et religieuses

SOURCE - DICI - 28 octobre 2016
Le 23 octobre 2016, à l’occasion de la Journée missionnaire mondiale, l’agence romaine Fides a présenté un panorama statistique de l’Eglise catholique dans le monde au 31 décembre 2014. A cette date, selon les chiffres du Vatican, les catholiques représentent 17,77% de la population mondiale, soit 1.272.281.000, avec une augmentation totale de 18.355 millions. L’augmentation concerne tous les continents, sauf l’Europe où le nombre total a diminué de 57.000 fidèles.

Fin 2014, il y a 415.792 prêtres, soit une très légère augmentation de 444. L’Europe subit toujours une diminution alarmante du nombre de ses prêtres (-2.564). Dans une moindre mesure, l’Amérique (-123) et l’Océanie (-86) connaissent aussi un recul. En revanche, l’Afrique (+1.089) et l’Asie (+2.128) sont en progression.

Le nombre des grands séminaristes, diocésains et religieux, a globalement diminué de 1.312 candidats au sacerdoce, sur un total de 116.939. Les augmentations concernent seulement l’Afrique (+636), tandis que le nombre des grands séminaristes diminue en Amérique (-676), en Asie (-635), en Europe (-629) et en Océanie (-8).

De façon inversement proportionnelle, le nombre des diacres permanents dans le monde a augmenté de 1.371 et arrive au total de 44.566. Les augmentations les plus fortes concernent évidemment l’Amérique (+965) et l’Europe (+311), continents auxquels s’ajoutent dans une moindre proportion l’Afrique (+25), l’Asie (+65) et l’Océanie (+5).

Le nombre des religieux non prêtres a diminué globalement, pour la deuxième année consécutive, de 694 et parvient à un total de 54.559. Les augmentations concernent l’Afrique (+331) et l’Asie (+66) alors que les diminutions touchent l’Amérique (-362), l’Europe (-653) et l’Océanie (-76).

La diminution globale du nombre de religieuses se confirme supérieure, encore cette année, à celle de l’année précédente (-10.846). Les augmentations concernent l’Afrique (+725) et l’Asie (+604), alors que les diminutions affectent l’Amérique (-4.242), l’Europe (-7.733) et l’Océanie (-200).

[DICI] Lecture : Comment gagner la Troisième Guerre mondiale ?

SOURCE - DICI - 28 octobre 2016

Sous le titre La Troisième Guerre mondiale est commencée… mais Dieu règne, l’ouvrage du R.P. Jean-Jacques Marziac montre que cette Troisième Guerre mondiale, commencée avec le concile Vatican II – comme le disait Mgr Marcel Lefebvre –, est semblable au combat de David contre Goliath, humainement perdue, mais qui sera finalement victorieuse grâce aux moyens surnaturels donnés par Dieu à ceux qui mèneront sans faiblir le bon combat de la foi. Le 7e et dernier chapitre répond à la question : «Comment gagner cette Troisième Guerre mondiale?»

Dans sa préface, le Général (2 S) Claude Denis Mouton note: «La confidence du pape Paul VI : ‘Les fumées de Satan sont entrées dans l’Eglise’ est un aveu lucide, puisque depuis la pénombre s’est substituée à la lumière et l’on peine à distinguer la vérité tant s’est développé le flou auquel beaucoup se sont accoutumés. Combien ‘moisissent dans la mort spirituelle, dans la mort éternelle’, selon la formule de Charles Péguy?» En écho, la postface de Mgr Bernard Fellay rappelle: «La grande question, la question définitive est bien celle-ci : O homme, que fais-tu de ton salut que Dieu laisse entre tes mains?»

Le R.P. Marziac ne souhaite pas faire «œuvre littéraire» mais plutôt proposer «un éclairage simple, très accessible, même pour les moins avertis, sur la crise actuelle que le monde semble n’avoir jamais connue à ce niveau». Au fil des chapitres, le missionnaire – infatigable nonagénaire – indique les livres à lire pour aller plus loin intellectuellement, et les Exercices de Saint Ignace à suivre pour aller plus haut spirituellement.

R.P. Jean-Jacques Marziac, La Troisième Guerre mondiale est commencée… mais Dieu règne, éditions A.C.C.R. Maison Saint-Joseph – 634 route du Treilhou – F-82300 Caussade. 140 pages. 15 € (+ port).

[Abbé Alain Lorans, fsspx - DICI] Ces clochers que l’on veut faire taire

SOURCE - Abbé Alain Lorans, fsspx - DICI - 28 octobre 2016

Le titre du dernier livre de Philippe de Villiers pose une question inquiétante : « Les cloches sonneront-elle encore demain ? » (Albin Michel). Certes l’auteur lance un cri d’alarme face à l’islamisation de la France, mais ce qu’il écrit de notre pays concerne tout l’Occident chrétien : « La France est en danger. Il est grand temps de donner l’alerte, de sonner l’alarme. Il faut que quelqu’un le fasse. Il faut aller réveiller le bedeau pour sonner les cloches. Pas le glas, la France n’est pas morte. Mais le tocsin, pour qu’elle ne meure pas. »

Il faut reconnaître que cette islamisation des nations chrétiennes ne pourrait se faire sans l’appui efficace d’une laïcisation méthodique de ces nations, les amenant à renier leurs racines, à rejeter la foi de leurs pères. « Révolution tranquille » au Québec, « apostasie silencieuse » en Europe, ou ce dernier fait, odieux et ridicule à la fois : dans la banlieue de Madrid, en Espagne, la municipalité de Móstoles ne veut plus entendre les cloches de l’église paroissiale dont la sonnerie atteint 84 décibels, dépassant les 55 décibels autorisés. Cette « faute grave » est sanctionnée par une amende minimale de 16.000 euros.

Les clochers ne deviennent pas subitement muets, on les bâillonne préalablement. Mais ils ne resteront pas muets, un jour ils feront entendre un autre son… A moins que les nations, se souvenant qu’elles sont chrétiennes, ne fassent leur l’oraison de la fête du Christ-Roi que l’on célèbre en ce dernier dimanche d’octobre : « Dieu tout-puissant et éternel, qui avez voulu restaurer tout dans la personne de votre Fils bien-aimé, le Roi de l’univers : accordez dans votre bonté, que toutes les familles des nations, qui vivent en désaccord à cause de la blessure du péché, se soumettent à son très doux pouvoir. »

27 octobre 2016

[Riposte Catholique] Démission de l’abbé de Mariawald (Allemagne)

SOURCE - Riposte Catholique - 27 octobre 2016

A la suite d’une visite canonique, Don Josef Vollberg, abbé de l’abbaye trappe de Mariawald (Allemagne, située entre Liège et Cologne), a remis sa démission. L’abbaye avait obtenu de Rome en 2009 de reprendre la forme traditionnelle de la liturgie trappiste. Si cette forme lui a valu un certain regain de vocations, il apparaît qu’elle avait entrainé un certain nombre de dissensions au sein de la communauté, notamment avec les moines les plus âgés. Comme il l’indique dans sa lettre, le jeune père-abbé, élu en 2006 et seulement âgé de 53 ans, préfère remettre sa démission pour éviter ‘l’explosion de la communauté’ ayant obtenu les garanties du maintien des choix liturgiques de l’abbaye. Il est nommé prieur, charge qu’il devrait continuer à assurer après la désignation d’un nouvel abbé.

La lettre complète de Don Josef Vollberg (en allemand)

[Abbé Philippe Laguérie, IBP - Rouge & Le Noir] «Nous possédons en France le seul séminaire international complet»

SOURCE - Abbé Philippe Laguérie, IBP - Le Rouge & Le Noir - 27 octobre 2016

L’Abbé Philippe Laguérie est le supérieur général de l’Institut du Bon Pasteur (IBP), institut qui fête ce mois-ci ses 10 ans d’existence. Il a bien voulu répondre aux questions du Rouge & Le Noir.

R&N : Vous êtes le supérieur général de l’Institut du Bon Pasteur (IBP). Quelles sont les spécificités de l’Institut et de ses statuts ? Comment les mettez-vous en œuvre ?

Abbé Philippe Laguérie : J’ai rédigé les statuts du futur Institut du Bon Pasteur au cours du printemps 2006, c’est-à-dire une année après l’accession du Cardinal Ratzinger au Trône Pontifical, mais surtout, un an avant le Motu Proprio Summorum Pontificum de Juillet 2007. C’est dire la nouveauté liturgique (et canonique) considérable qu’ils représentent. La célébration exclusive de la messe grégorienne est pour la première fois depuis 1969 reconnue en droit par le Saint Siège. Même si le Motu Proprio reconnaîtra, un an plus tard, que l’usus antiquior n’avait jamais été aboli en droit (du moins c’est affirmé), on sait qu’en fait aucune communauté n’avait joui d’un tel droit, pas même la Fraternité Saint Pie X, du temps de sa reconnaissance diocésaine, dont les statuts ne mentionnent pas même ce rite. Par ailleurs, on sait l’extrême réticence de l’épiscopat vis-à-vis de cette célébration exclusive (pourtant reconnue pour les prêtres du Bon Pasteur comme leur rite propre). Ce fut donc une avancée considérable et qui n’a aucun équivalent encore aujourd’hui…

Pareillement nos statuts reconnaissent un droit à une critique, respectueuse et constructive certes, mais bien réelle, vis-à-vis de textes magistériels qui ne seraient pas en conformité avec la Tradition Catholique. Il ne s’agit pas du Magistère solennel de l’Eglise, lequel, étant infaillible, oblige tout catholique, sans discussion possible. Mais ce Magistère-là est très rare et la plupart des papes récents n’y ont pas eu recours. En revanche, nous pouvons faire savoir et argumenter notre désaccord, comme d’insignes prélats nous en prennent maintenant l’initiative. Les propos d’avion de notre Pape, comme ses affirmations en matière écologique, ou même la doctrine totalement subjectiviste de l’état de grâce développée au chapitre VIII de « Amoris Laetitia » ne sauraient obliger en conscience un chrétien et François Ier serait le premier surpris qu’on prît cela pour du Magistère infaillible ! « In dubiis libertas », disait le grand Augustin.

Il est une troisième caractéristique des statuts de l’Institut du Bon Pasteur qui n’oblige pas moins que les deux autres : c’est la charité du Modèle et patronage qu’il s’est choisi. À commencer par les prêtres entre eux, à prolonger sur les fidèles. La charité pastorale ne saurait être chez nous une option ajoutée, comme les vitres teintées ou l’ABS ! L’Esprit de service, de générosité, d’amour fraternel est statutaire et nous oblige gravement… À l’exemple du Bon Pasteur qui donne sa vie pour ses brebis, est venu, non pour être servi, mais pour servir, et intime son ultime commandement : « Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés… » Les prêtres et séminaristes qui contreviennent à cette ordonnance statutaire doivent savoir qu’ils renient leur promesse d’incorporation ou d’ordination…

R&N : Quelles sont désormais la composition et l’implantation de l’IBP à travers le monde ?

Abbé Laguérie : L’Institut compte à ce jour, depuis cet été, 35 prêtres incardinés et en parfaite situation canonique. Il compte 42 séminaristes à la rentrée de septembre 2016.

Les prêtres sont au nombre de 16 en France (Courtalain 7, Bordeaux 3, Paris 4, Marseille 1, Rolleboise 1), 3 en Pologne (Bialystok et Varsovie), 2 en Italie (Rome), 2 en Ouganda (Kampala), 5 en Colombie (Bogota), 6 au Brésil (Sao Paulo 2, Brasilia 2, Belém 2).

R&N : Quels sont vos principaux moyens d’apostolat ?

Abbé Laguérie : Paroisses et desserte de paroisses occupent la plupart des prêtres, y compris ceux du séminaire. Autour de Courtalain (le séminaire international Saint-Vincent-de-Paul) sont desservies chaque dimanche les paroisses de Manou, au diocèse de Chartres et de Montmirail, au diocèse du Mans. Outre la paroisse personnelle de l’Institut (Saint-Eloi de Bordeaux) sont desservies le Bon Jésus de Marseille, Rolleboise au diocèse de Versailles, Les Chapelles Bourbons au diocèse de Meaux.

Nous avons une école primaire à Bordeaux (Ecole Saint-Projet). Idem en Amérique, en Ouganda et bientôt en Pologne, autour des lieux déjà cités. Nous avons une œuvre de retraite relancée récemment par M. l’abbé Aulagnier (et son site internet), des camps de vacances (Camp Saint-Vincent chaque été, organisé par les séminaristes).

R&N : Vous fêtez cette année le jubilé des 10 ans de l’Institut du Bon Pasteur. C’est, j’imagine, une grande joie de voir l’IBP s’inscrire dans la durée ? Quels sont vos souhaits d’évolution ?

Abbé Laguérie : Oui, l’Institut a soufflé cette année (le 8 septembre, jour de son érection par le Cardinal Castrillon Hoyos sur mandat du Pape) ses dix premières bougies et nous solennisons cet événement à Rome dans quelques jours grâce à nos amis de Summorum Pontificum qui ont bien voulu nous faire la part belle en cette occurrence. Dix ans, c’est très peu et beaucoup. Beaucoup parce que la fondation d’une œuvre surnaturelle comme celle-là est tellement parsemée d’embûches (du diable et de quelques autres…) que beaucoup ne franchissent même pas ce cap. Nous avons résisté par la grâce de Dieu, sans varier d’un pouce, et qu’Il en soit éternellement loué. Mais peu aussi parce c’est encore un âge d’enfant en lequel la jeunesse des jeunes (qui reste cependant l’atout principal) est encore a gérer. Toutes les fondations connaissent nécessairement ce décalage d’au moins une génération entre les fondateurs et les nouveaux venus (les séminaristes qui entrent aujourd’hui ont l’âge de mes petits-neveux !). Parfois, en considérant l’un d’entre eux, je me dis : « Ah, s’il pouvait déjà posséder ce recul de trente ou quarante années de sacerdoce ! » Je fais donc miennes les phrases du Psaume de David : « Lorsque ma force viendra à se déliter, ne m’abandonnez pas, Seigneur, jusqu’à ce que j’ai pu annoncer votre bras à cette génération qui va venir ». Quand je songe aux reproches d’une excessive inexpérience qu’on adressait sans cesse aux « jeunes » prêtres de Mgr Lefebvre… Je souris.

Le Bon Pasteur connaîtra inéluctablement son développement à la mesure de deux critères vitaux pour lui : le rythme des ordinations annuelles (de trois à cinq en ce moment) et la bienveillance épiscopale qui, à de rares exceptions près, se fait plutôt tirer l’oreille.

R&N : Le Centre Saint-Paul, malgré son emplacement en plein centre de Paris, ne dispose que d’une étroite et peu pratique chapelle. Avez-vous l’espoir d’obtenir un jour une église à Paris ?

Abbé Laguérie : Nous y travaillons, selon les opportunités de la Providence… Ce serait évidemment une grâce immense. Pour l’heure, considérons avec reconnaissance que nous possédons en France le seul séminaire international complet et l’une des (seulement) quatre paroisses personnelles.

R&N : L’IBP est attaché exclusivement à la forme extraordinaire du rite romain. Où en est désormais, selon vous, la critique sérieuse et constructive du concile Vatican II ? Observez-vous une évolution des débats au sein de l’Église ?

Abbé Laguérie : Cette critique sérieuse et constructive demeure totale et se trouve même facilitée. Le contexte ecclésial et sociétal s’y prête aisément, avouons le, quand évêques et cardinaux s’adonnent eux-mêmes à relativiser le magistère récent. Vatican II, qui fut pendant quarante ans présenté comme un super dogme (« Plus important que Nicée, » a osé le Pape Paul VI) n’intéresse plus grand monde. Le pape ne le cite presque plus et nombre de jeunes évêques semblent ne par l’avoir étudié (ou même lu ?). Il faut dire que la pastorale est comme la mode qui est la chose au monde qui se démode le plus. Qui peut encore prêter attention au document sur les communications sociales qui n’a pu évidemment évoquer la révolution mondiale du NET ?

Certes le Concile Vatican II contient en germe les erreurs qui nous accablent. Mais la saison s’est furieusement avancée et les graines d’hier sont aujourd’hui des arbres défeuillés aux fruits amers. Ces fruits n’infectent plus seulement la praxis de l’Eglise mais bien sa doctrine la plus fondamentale. Touchant le mariage, le passage récent à une praxis de type orthodoxe affecte évidemment les fondements du droit surnaturel tels qu’enseignés par l’Évangile. Le passage aussi d’un jugement objectif sur l’état de péché à une appréciation purement subjective de « mon » état de grâce constitue une révolution complète de la morale catholique. C’est évidemment la conséquence directe de l’universelle médiation de la conscience telle qu’enseignée par Vatican II…

Dernier exemple d’une brûlante actualité, hélas. Alors que pendant mille ans les papes avaient dénoncé le péril islamique et même organisé eux-mêmes la défense de la chrétienté contre ce péril extrême, le concile Vatican II (Nostra Aetate §3) a littéralement émasculé les intelligences et démobilisé les énergies. « L’Eglise regarde aussi avec estime les musulmans qui adorent le Dieu unique, vivant et subsistant, miséricordieux et tout-puissant, créateur du ciel et de la terre, qui a parlé aux hommes » (Mahomet sans doute ?). « Le Saint Concile les exhorte tous (chrétien et musulmans) à oublier le passé et à s’efforcer sincèrement à la compréhension mutuelle, ainsi qu’à protéger et à promouvoir ensemble, pour tous les hommes, la justice sociale, les valeurs morales, la paix et la liberté ». Quelle réussite !

Encore et toujours cette pastorale à deux balles qui est un déni de la réalité. Chacun sent déjà dans l’air l’odeur de poudre et de sang qui régnait déjà dans les rues fastueuses de Constantinople au début du XVè siècle, avant le désastre de 1453. Les politiques d’alors étaient aussi inconscients que les nôtres et n’ont pas bougé. Mais au moins avaient-ils des papes, des évêques et même un concile (Florence) qui leur prédisaient le désastre. Où sont les Urbain, les Innocent, les Pie… ?

Le concile n’intéresse plus personne mais ses fruits les plus funestes sont encore… devant nous. La chrétienté est en train de creuser sa tombe sur les ruines de la théologie catholique. Raison de plus pour faire de bons prêtres, nombreux et saints ; car Dieu a toujours des solutions inattendues et… le dernier mot !

26 octobre 2016

[Paix Liturgique] La messe l'été, c'est bien, toute l'année, c'est mieux !

 SOURCE - Paix Liturgique - lettre N°566 - 26 octobre 2016

C’est tous les dimanches que le noyau conséquent des fidèles attachés à la forme traditionnelle demeurant dans la région d’Arcachon toute l’année souhaite obtenir l’application du motu proprio Summorum Pontificum. En effet, depuis l’été 2010, une messe selon la forme extraordinaire du rite romain est dite seulement quelques dimanches d’été à Arcachon, le curé de l’époque, le Père Queyroy, ayant accepté de répondre à la demande des estivants. Mais cela ne suffit plus à répondre aux besoins des fidèles.
  
I – HISTORIQUE DE LA DEMANDE D’ARCACHON

Constituée en août 2009, pour soutenir « la forme extraordinaire du rite latin romain, sur le territoire du Bassin d’Arcachon entre Biganos et Cazaux », l’association Sancte Benedicte prend immédiatement contact avec le curé d’Arcachon de l’époque, le Père Queyroy, pour lui demander l’application du motu proprio de Benoît XVI.

Le quotidien local, Sud-Ouest, s’intéresse à cette demande et donne la parole, le 22 décembre 2009, aussi bien à la présidente de l’association qu’au curé qui explique : « Je ne suis pas fermé. Mais il faut que je connaisse ce groupe. Et s’il y a des messes en latin, je les célébrerai. »

De fait, M. le curé décide d’organiser une rencontre le samedi 16 janvier 2010. Comme le précise l’invitation à cette réunion ouverte à tous et destinée à « étudier la demande afin de statuer ensuite avec les équipes d’animation pastorale et les conseils pastoraux », trois points sont à l’ordre du jour : « 1. Présentation de quelques points de repère sur l’Église, et le motu proprio de Benoit XVI par le curé d’Arcachon. 2. Écoute respectueuse des uns et des autres : les demandeurs d’une messe en latin disent qui ils sont et expriment leurs motivations ; les autres participants disent qui ils sont, et expriment leur point de vue. 3. Dialogue en vue du discernement. »

À l’issue de cette rencontre, qui montre que certains des laïcs engagés dans la pastorale locale sont fortement opposés au retour de la liturgie traditionnelle dans la paroisse, les demandeurs sont partagés sur l’issue de leur démarche. De fait, le temps passe avant que ne parvienne la réponse du curé. Elle arrive à la fin du printemps et est positive puisque le curé fait savoir qu’il accepte de répondre à la demande, du moins entre juillet et août. Arcachon passe de 11 000 habitants l’hiver à près de 100 000 personnes l’été et cela justifie amplement l’offre de la forme extraordinaire.

Le 11 juillet 2010, une première messe est donc célébrée en la basilique Notre-Dame, sous l’objectif d’une caméra de France 3 qui rend compte honnêtement de l’événement. Le Père Queyroy, ordonné avant la réforme liturgique, célèbre lui-même, attaché, comme il le confie à Sud-Ouest, qu’il «  vaut mieux œuvrer pour l’unité de l’Église que de s’affronter ».

En dépit de l’arrivée d’un nouveau curé en 2011, peu ouvert au motu proprio, cette célébration estivale a été renouvelée chaque année, en particulier grâce au Père Queyroy qui, bien qu’en retraite, a accepté de continuer à l’assurer.

II – VERS UNE CÉLÉBRATION TOUTE L’ANNÉE ?

Alors qu’à l’origine de la demande il y avait moitié d’Arcachonnais et moitié d’estivants réguliers (ce que n’avaient pas manqué de relever les opposants à la demande), le groupe stable de fidèles est aujourd’hui composé aux 4/5 de personnes vivant toute l’année à Arcachon. Arcachon est en effet une ville dont le cadre et le climat attirent les retraités, y compris par conséquent ceux attachés à la forme extraordinaire du rite romain. Du coup, des estivants de 2010 sont devenus en 2016 des résidents permanents. C’est cette croissance du noyau dur de fidèles qui justifie aujourd’hui la formulation d’une demande d’application continue du motu proprio dans la ville.

Toutes les familles intéressées par cette demande peuvent prendre contact avec les demandeurs via courrier électronique : summorumpontificumarcachon (at) gmail.com

III – LES RÉFLEXIONS DE PAIX LITURGIQUE

1) De Guérande à Bormes-les-Mimosas, de nombreuses célébrations estivales ont été accordées depuis le motu proprio de 2007. Souvent, elles ont été permises par la présence de prêtres en vacances ou par l’afflux de tribus de familles attachées à la liturgie traditionnelle. Parfois, elles ont été le fait de curés désireux d’enrichir la vie liturgique de leur paroisse. Toutes se renouvellent d’année en année et certaines, comme aux Sables d’Olonne notamment, sont devenues de vraies applications hebdomadaires du texte de Benoît XVI. Les messes traditionnelles régulières les plus proches d’Arcachon étant celles de Bordeaux – 65 km, 1 heure de route l’hiver et 2 heures l’été –, la demande des fidèles d’Arcachon est donc parfaitement légitime.

2) Jusqu’à la fin des années 80, le Moulleau, l’un des quartiers les plus prisés d’Arcachon, avait encore sa paroisse. Celle-ci a été pendant près de 40 ans le fief de l’abbé Robert Marcou, curé qui conserva jusqu’à la mort l’usage du latin et le port de la soutane. Rappelé à Dieu en l’an 2000, à l’âge de 100 ans, l’abbé Marcou – à l’origine de la construction de l’église Saint-Louis des Abatilles – fut pour de nombreux fidèles un soutien précieux dans les années postconciliaires.

3) Il est possible que le nouveau curé d’Arcachon, qui n’a pas de sympathie particulière pour l’enrichissement mutuel des deux formes du rite romain, réponde aux demandeurs qu’il n’a pas de solution à leur offrir. La paroisse ne compte pas de vicaire et, mis à part le Père Queyroy, aucun autre prêtre retraité n’a montré de disposition pour la forme extraordinaire. Conscients de cette situation, les demandeurs accepteraient que, dans un premier temps, la célébration ne soit étendue qu’aux vacances scolaires. Cela serait en effet un premier pas significatif vers une meilleure intégration de la communauté Summorum Pontificum dans la vie paroissiale arcachonnaise. Il existe néanmoins une autre option, qui ne dépend pas que du curé, celle de faire appel, avec l’accord du cardinal Ricard, archevêque de Bordeaux, particulièrement bienveillant, aux prêtres des instituts Ecclesia Dei présents dans le diocèse : la Fraternité Saint-Pierre, l'Institut du Christ-Roi et l’Institut du Bon Pasteur. Et bientôt, sans doute, de la Prélature Saint-Pie-X...

4) Le pourcentage des catholiques pratiquants qui parcourent chaque dimanche des kilomètres pour y assister ne représente que 6% de l'ensemble des pratiquants. Toutefois, nos sondages ont clairement montré (voir notre brochure Neuf sondages pour l’histoire, Les dossiers d’Oremus – Paix liturgique, présentée cette semaine à Rome), que si la forme extraordinaire était célébrée régulièrement dans les paroisses, près de 20% des fidèles y assisteraient chaque semaine, soit 1 sur 5. Cette proportion double (2 fidèles sur 5) si l'on considère ceux qui se déclarent prêts à y assister une fois par mois. Ces fidèles « extraordinaires » représentent en outre une frange de pratiquants peu touchée par le déclin continu qui affecte les assemblées paroissiales ordinaires et de laquelle sort près d'une vocation sacerdotale sur 5 (voir nos enquêtes annuelles sur les ordinations en France). Progressivement, l’argument du manque de personnel ecclésiastique, opposé – souvent de bonne foi il est vrai – aux demandeurs de messes extraordinaires, va donc immanquablement perdre de sa pertinence. La messe traditionnelle, qu’on le veuille ou non, va devenir un gage de survie et un signe visible de paix.