SOURCE - Pro Liturgia - 27 février 2007
Dans un courrier envoyé le 10 décembre 2006 à plusieurs Evêques de France, le Président de Pro Liturgia a posé la question suivante: "(...) comment expliquer - ou comprendre - que des évêques, pour x raisons sur lesquelles je n'ai pas à me prononcer, acceptent de célébrer ou de faire célébrer dignement, solennellement, fidèlement, respectueusement la messe dite "de S. Pie V", mais s'avèrent réticents dès qu'il s'agit de célébrer ou de faire célébrer en paroisses la liturgie actuelle (dite "de Paul VI") avec la même dignité, la même solennité, la même fidélité, le même respect, le même sens du sacré? Autrement dit, comment expliquer qu'il est aujourd'hui plus facile de trouver une messe célébrée intégralement comme le demande l'ancien missel, qu'une messe célébrée intégralement comme le demande le missel romain actuel? (...)" Un seul Evêque diocésain a répondu par retour de courrier; et sa réponse doit être connue tant elle a le mérite d'être courageuse. Voici ce qu'il écrit: "(...) Il me semble que vous pourriez trouver une partie de la réponse à la question que vous vous posez, précisément dans le livre "L'esprit de la Liturgie" du Cardinal Ratzinger. Mais également dans l'allocution prononcée le 26 octobre 2006 par le Cardinal Arinze, Préfet de la Congrégation pour le Culte divin et la discipline des Sacrements, à l'occasion du 50ème anniversaire de l'Institut Supérieur de liturgie à Paris."
Ces quelques lignes sont éclairantes pour plusieurs raisons:
1. L'Evêque ne rejette pas la question posée: il y répond, donnant par là la preuve que le problème liturique évoqué est bien réel.
2. L'Evêque répond en se réfèrant à deux personnalités - le Cardinal Ratzinger et le Cardinal Arinze - généralement peu citées dans le milieu épiscopal français. Cela mérite d'être signalé.
3. Enfin, l'Evêque renvoie à deux documents: un livre du Cardinal Ratzinger et une récente conférence du Cardinal Arinze. C'est là, dit-il, qu'on peut trouver "une partie de la réponse" à la question posée au sujet du problème liturgique.
Or, que disent les deux Cardinaux? Que bon nombre de problèmes actuels sont le résultat d'une mauvaise formation donnée aux prêtres, et parfois même à une totale absence de formation. Ainsi, dans "L'esprit de la Liturgie", le Cardinal Ratzinger insiste-t-il sur la nécessité d'un parcours éducatif qui devrait porter à rétablir la conscience que la liturgie est un don et non pas une démonstration des capacités humaines, étant donné que la liturgie, comme la théologie, ne vit pas tant de ce que l'on pense d'elle que de ce que l'on reçoit d'elle.
Quant au Cardinal Arinze, il dit clairement que "beaucoup d'abus, dans le domaine de la Liturgie, ont pour origine, non pas la mauvaise volonté, mais l'ignorance (...), la place indue qui est accordée à la spontanéité, ou à la créativité, ou bien une fausse idée de la liberté, ou encore cette erreur qui a pour nom "horizontalisme" et qui consiste à placer l'homme au centre de la célébration liturgique au lieu de porter son attention vers le haut, c'est-à-dire vers le Christ et ses Mystères." Et, citant le pape Jean-Paul II, le Cardinal Arinze ajoute qu' "i1 est urgent que dans les communautés paroissiales, dans les associations et dans les mouvements ecclésiaux on assure des cours appropriés de formation, afin que la Liturgie soit mieux connue dans toute la richesse de son langage et qu'elle soit vécue dans toute sa plénitude." (cf. Lettre du Pape Jean-Paul Il au Cardinal Arinze, 3 mars 2005, n. 5).
Enfin, le Préfet de la Congrégation pour le Culte divin souligne dans son discours que "la promotion de l'ars celebrandi [ne pourra se faire que grâce à] une solide base théologico-liturgique, une formation de qualité dans le domaine de la foi, et le respect du caractère propre de la Liturgie."
Le manque de formation solide des prêtres - curés, aumôniers... et même évêques! - disent les Cardinaux Ratzinger et Arinze: c'est là que se trouve la racine du mal qui ronge actuellement la liturgie et prive les fidèles qui soient un véritable reflet de la foi de l'Eglise.
Il est donc inutile d'espérer sortir du marasme actuel tant que la liturgie sera laissée entre les mains de prêtres auxquels on n'a jamais appris à faire correctement ce qu'ils ont à faire, et qui parfois même donnent l'impression de ne plus vraiment saisir le sens ni mesurer la richesse de ce qu'ils font ou devraient normalement faire.