SOURCE - Le Nouvel Obs - 6 décembre 2008
EXTRAIT
[...] La messe se déroule à l'époque en studio, rue Cognacq-Jay, sur un autel portable dépliant ! Aujourd'hui, elle est retransmise 58 fois par an, en direct d'une église chaque fois différente, avec un souci de diversité, entre paroisses rurales et urbaines, entre mouvements d'action catholique et communautés monastiques. Avec une place pour la messe en latin, désormais autorisée par le pape Benoît XVI ? La question ne se résume pas à l'usage du latin, mais plutôt à la liturgie (règles fixant le déroulement des actes du culte). Or «les téléspectateurs, dans leur quasi-totalité, souhaitent suivre la messe selon le rite ordinaire - selon saint Paul VI -, celui qui a été établi par le concile Vatican II : face au peuple, et dans la langue du pays», précise Emmanuel Bonnet, responsable de l'unité des programmes «messes télévisées». [...]
[...] La messe se déroule à l'époque en studio, rue Cognacq-Jay, sur un autel portable dépliant ! Aujourd'hui, elle est retransmise 58 fois par an, en direct d'une église chaque fois différente, avec un souci de diversité, entre paroisses rurales et urbaines, entre mouvements d'action catholique et communautés monastiques. Avec une place pour la messe en latin, désormais autorisée par le pape Benoît XVI ? La question ne se résume pas à l'usage du latin, mais plutôt à la liturgie (règles fixant le déroulement des actes du culte). Or «les téléspectateurs, dans leur quasi-totalité, souhaitent suivre la messe selon le rite ordinaire - selon saint Paul VI -, celui qui a été établi par le concile Vatican II : face au peuple, et dans la langue du pays», précise Emmanuel Bonnet, responsable de l'unité des programmes «messes télévisées». [...]
Le jour du Seigneur
Durée : 30 minutes
Sous-titrage malentendant (Antiope).
En 16:9
Le sujet
Pour fêter son 60e anniversaire, «Le Jour du Seigneur» présente une collection de quatre documentaires pour célébrer le temps de l'Avent. Chaque volet évoquera un des quatre temps forts de ces soixante dernières années : 1948, 1968, 1998, 2008.
Durée : 30 minutes
Sous-titrage malentendant (Antiope).
En 16:9
Le sujet
Pour fêter son 60e anniversaire, «Le Jour du Seigneur» présente une collection de quatre documentaires pour célébrer le temps de l'Avent. Chaque volet évoquera un des quatre temps forts de ces soixante dernières années : 1948, 1968, 1998, 2008.
La critique
La plus vieille émission télé de la création. Soixante ans - soit dix de moins que la moyenne d'âge de ses téléspectateurs - que «le Jour du Seigneur» occupe la petite lucarne. Une longévité qui lui vaudrait d'apparaître dans «le Guinness des records», avancent ceux qui travaillent à sa conception. Péché d'orgueil ? Nulle trace dudit programme dans le livre de référence, entre la plus vieille émission de cuisine (1960) et de variétés (1962)... C'est pourtant dès 1948 que l'acte fondateur de l'émission religieuse catholique est posé, telle la première pierre d'une église. La télé n'en est qu'à ses balbutiements. On dénombre tout au plus 5 000 postes à Paris, une chaîne unique, seize heures d'antenne.
Le père Raymond Pichard, un dominicain, assiste à une conférence du secrétaire d'Etat à l'Information François Mitterrand consacrée à ces techniques nouvelles. Le prêtre a une révélation : il faudrait diffuser la messe de minuit ! «On cherchait des programmes pour donner envie aux gens d'acheter des appareils afin d'étendre le marché, note le père Arnaud de Coral, producteur de l'émission via le Comité français de Radio-Télévision (CFRT). La République française laïque n'était pas mécontente. Cette émission a donc participé au lancement de la télévision en France !» Des caméras pénètrent dans le saint des saints de la cathédrale Notre-Dame de Paris, pour une retransmission en direct. C'est un défi technique. Que la caméra tourne est déjà un miracle. Il faut miser plus haut encore : aller voir le pape Pie XII en personne, à Rome. «Nous attendons de la télévision des conséquences de la plus haute portée, par la révélation toujours plus éclatante de la vérité aux intelligences loyales», clame le Saint-Père. Dès 1949, l'émission devient hebdomadaire. Le Comité français de Radio-Télévision (CFRT) est créé dans la foulée. Placé sous la houlette des évêques de France, il produira, jusqu'à aujourd'hui encore, l'émission religieuse. A sa tête, toujours un dominicain, dont l'ordre est connu pour son ouverture sur l'extérieur.
Les voies du Seigneur passeront par le téléviseur. Ce qui n'est pas du goût de tout le monde. Des prêtres craignent que le petit écran détourne leurs brebis de l'église. «Qu'on ne s'imagine pas qu'il suffi se de regarder en simple spectateur. Si vous ne venez pas en chair et en os dans une communauté réelle, vous êtes des voyeurs, vous êtes des spectateurs muets et indifférents. Vous n'êtes pas des chrétiens !», menace un curé en chaire, imprécateur [Cf. «Chaque dimanche... depuis soixante ans», de Jean-René Bouyer, diffusé le 25 décembre, NDLR]. «Quelle est la valeur spirituelle, la validité sacramentelle de la messe quand elle est transmise par une image ?, rappelle Arnaud de Coral. Aujourd'hui, des personnes âgées ne pouvant se rendre à la messe se posent cette question. Dans beaucoup de maisons de retraite et d'hôpitaux, la communion est donc apportée au moment de l'eucharistie télévisée.»
La messe se déroule à l'époque en studio, rue Cognacq-Jay, sur un autel portable dépliant ! Aujourd'hui, elle est retransmise 58 fois par an, en direct d'une église chaque fois différente, avec un souci de diversité, entre paroisses rurales et urbaines, entre mouvements d'action catholique et communautés monastiques. Avec une place pour la messe en latin, désormais autorisée par le pape Benoît XVI ? La question ne se résume pas à l'usage du latin, mais plutôt à la liturgie (règles fixant le déroulement des actes du culte). Or «les téléspectateurs, dans leur quasi-totalité, souhaitent suivre la messe selon le rite ordinaire - selon saint Paul VI -, celui qui a été établi par le concile Vatican II : face au peuple, et dans la langue du pays», précise Emmanuel Bonnet, responsable de l'unité des programmes «messes télévisées».
Une centaine de paroisses se portent candidates chaque année. Le choix est défi ni un an à l'avance. Un million de téléspectateurs suivent cette messe en direct chaque semaine, contre trois millions dans les années 1950 - il y avait moins de téléviseurs, mais plus de croyants... Avec un pic au moment de l'homélie. «Des catholiques vont aller dans leur paroisse le samedi, ou à une autre heure, pour pouvoir entendre d'autres prédicateurs à la télévision», remarque Arnaud de Coral. Certains regardent en différé sur internet. Une Web TV sera même lancée le 15 décembre (lejourduseigneur.com). Temps fort de cette heure et demie de programme, la messe est précédée d'un documentaire de qualité ? [voir les documentaires de Marie Viloin proposés pour cet anniversaire, dont celui consacré cette semaine à l'encyclique «Humanae Vitae» (1968) sur la contraception] et suivie de «la Minute», un retour sur un point liturgique, et de «C'est aussi de l'info», un point d'actu de neuf minutes qui porte «un regard chrétien» sur le monde. La religion à la télévision, certes, mais sur le service public ? La messe est passée sur Antenne 2 lors de la privatisation de TF1, en 1987. «Ca me paraît être un service public si l'on n'a pas une interprétation trop stricte de la laïcité. A partir du moment où l'offre est pluraliste [lire l'encadré]», estime Arnaud de Coral. Il n'empêche que le débat est soulevé à chaque réforme de l'audiovisuel. En 1999, la bataille a été mémorable. Quelque 700 000 signatures sont arrivées dans les locaux de la chaîne, pour protester contre l'éventualité d'une suppression. «Cette pétition est encore dans les mémoires. Les gens sont toujours prêts à se mobiliser, remarque Emmanuel Bonnet. Dans les paroisses, on nous demande où on en est.» Pas loin du statu quo, apparemment. Alors que le président Sarkozy exalte la «laïcité positive», une suppression pure et simple des émissions religieuses aurait été étonnante. L'angoisse est pourtant montée. «Les gens ont fantasmé. Je n'y ai jamais cru !, affirme Laure Baudouin, responsable des émissions religieuses sur France 2. Mais il était question à un moment de basculer sur une autre chaîne du service public.» France 5 ? «C'était une tentation, mais la chaîne n'a pas de couverture nationale. Et toutes ces religions sont lobbyistes. Elles sont intervenues auprès du pouvoir», poursuit-elle. «Le cardinal André Vingt-Trois et monseigneur Di Falco ont agi, précise Arnaud de Coral. Après, l'émission est établie de manière populaire, donc tout le monde se rend à cette évidence.» Selon un sondage «la Croix» de mai 2005, 82% des Français connaissent «le Jour du Seigneur». «On sait que l'homme se pose des questions de fond, estime le producteur. C'est une source spirituelle disponible.» Pour ceux qui croient au Ciel, comme pour ceux qui n'y croient pas.
La plus vieille émission télé de la création. Soixante ans - soit dix de moins que la moyenne d'âge de ses téléspectateurs - que «le Jour du Seigneur» occupe la petite lucarne. Une longévité qui lui vaudrait d'apparaître dans «le Guinness des records», avancent ceux qui travaillent à sa conception. Péché d'orgueil ? Nulle trace dudit programme dans le livre de référence, entre la plus vieille émission de cuisine (1960) et de variétés (1962)... C'est pourtant dès 1948 que l'acte fondateur de l'émission religieuse catholique est posé, telle la première pierre d'une église. La télé n'en est qu'à ses balbutiements. On dénombre tout au plus 5 000 postes à Paris, une chaîne unique, seize heures d'antenne.
Le père Raymond Pichard, un dominicain, assiste à une conférence du secrétaire d'Etat à l'Information François Mitterrand consacrée à ces techniques nouvelles. Le prêtre a une révélation : il faudrait diffuser la messe de minuit ! «On cherchait des programmes pour donner envie aux gens d'acheter des appareils afin d'étendre le marché, note le père Arnaud de Coral, producteur de l'émission via le Comité français de Radio-Télévision (CFRT). La République française laïque n'était pas mécontente. Cette émission a donc participé au lancement de la télévision en France !» Des caméras pénètrent dans le saint des saints de la cathédrale Notre-Dame de Paris, pour une retransmission en direct. C'est un défi technique. Que la caméra tourne est déjà un miracle. Il faut miser plus haut encore : aller voir le pape Pie XII en personne, à Rome. «Nous attendons de la télévision des conséquences de la plus haute portée, par la révélation toujours plus éclatante de la vérité aux intelligences loyales», clame le Saint-Père. Dès 1949, l'émission devient hebdomadaire. Le Comité français de Radio-Télévision (CFRT) est créé dans la foulée. Placé sous la houlette des évêques de France, il produira, jusqu'à aujourd'hui encore, l'émission religieuse. A sa tête, toujours un dominicain, dont l'ordre est connu pour son ouverture sur l'extérieur.
Les voies du Seigneur passeront par le téléviseur. Ce qui n'est pas du goût de tout le monde. Des prêtres craignent que le petit écran détourne leurs brebis de l'église. «Qu'on ne s'imagine pas qu'il suffi se de regarder en simple spectateur. Si vous ne venez pas en chair et en os dans une communauté réelle, vous êtes des voyeurs, vous êtes des spectateurs muets et indifférents. Vous n'êtes pas des chrétiens !», menace un curé en chaire, imprécateur [Cf. «Chaque dimanche... depuis soixante ans», de Jean-René Bouyer, diffusé le 25 décembre, NDLR]. «Quelle est la valeur spirituelle, la validité sacramentelle de la messe quand elle est transmise par une image ?, rappelle Arnaud de Coral. Aujourd'hui, des personnes âgées ne pouvant se rendre à la messe se posent cette question. Dans beaucoup de maisons de retraite et d'hôpitaux, la communion est donc apportée au moment de l'eucharistie télévisée.»
La messe se déroule à l'époque en studio, rue Cognacq-Jay, sur un autel portable dépliant ! Aujourd'hui, elle est retransmise 58 fois par an, en direct d'une église chaque fois différente, avec un souci de diversité, entre paroisses rurales et urbaines, entre mouvements d'action catholique et communautés monastiques. Avec une place pour la messe en latin, désormais autorisée par le pape Benoît XVI ? La question ne se résume pas à l'usage du latin, mais plutôt à la liturgie (règles fixant le déroulement des actes du culte). Or «les téléspectateurs, dans leur quasi-totalité, souhaitent suivre la messe selon le rite ordinaire - selon saint Paul VI -, celui qui a été établi par le concile Vatican II : face au peuple, et dans la langue du pays», précise Emmanuel Bonnet, responsable de l'unité des programmes «messes télévisées».
Une centaine de paroisses se portent candidates chaque année. Le choix est défi ni un an à l'avance. Un million de téléspectateurs suivent cette messe en direct chaque semaine, contre trois millions dans les années 1950 - il y avait moins de téléviseurs, mais plus de croyants... Avec un pic au moment de l'homélie. «Des catholiques vont aller dans leur paroisse le samedi, ou à une autre heure, pour pouvoir entendre d'autres prédicateurs à la télévision», remarque Arnaud de Coral. Certains regardent en différé sur internet. Une Web TV sera même lancée le 15 décembre (lejourduseigneur.com). Temps fort de cette heure et demie de programme, la messe est précédée d'un documentaire de qualité ? [voir les documentaires de Marie Viloin proposés pour cet anniversaire, dont celui consacré cette semaine à l'encyclique «Humanae Vitae» (1968) sur la contraception] et suivie de «la Minute», un retour sur un point liturgique, et de «C'est aussi de l'info», un point d'actu de neuf minutes qui porte «un regard chrétien» sur le monde. La religion à la télévision, certes, mais sur le service public ? La messe est passée sur Antenne 2 lors de la privatisation de TF1, en 1987. «Ca me paraît être un service public si l'on n'a pas une interprétation trop stricte de la laïcité. A partir du moment où l'offre est pluraliste [lire l'encadré]», estime Arnaud de Coral. Il n'empêche que le débat est soulevé à chaque réforme de l'audiovisuel. En 1999, la bataille a été mémorable. Quelque 700 000 signatures sont arrivées dans les locaux de la chaîne, pour protester contre l'éventualité d'une suppression. «Cette pétition est encore dans les mémoires. Les gens sont toujours prêts à se mobiliser, remarque Emmanuel Bonnet. Dans les paroisses, on nous demande où on en est.» Pas loin du statu quo, apparemment. Alors que le président Sarkozy exalte la «laïcité positive», une suppression pure et simple des émissions religieuses aurait été étonnante. L'angoisse est pourtant montée. «Les gens ont fantasmé. Je n'y ai jamais cru !, affirme Laure Baudouin, responsable des émissions religieuses sur France 2. Mais il était question à un moment de basculer sur une autre chaîne du service public.» France 5 ? «C'était une tentation, mais la chaîne n'a pas de couverture nationale. Et toutes ces religions sont lobbyistes. Elles sont intervenues auprès du pouvoir», poursuit-elle. «Le cardinal André Vingt-Trois et monseigneur Di Falco ont agi, précise Arnaud de Coral. Après, l'émission est établie de manière populaire, donc tout le monde se rend à cette évidence.» Selon un sondage «la Croix» de mai 2005, 82% des Français connaissent «le Jour du Seigneur». «On sait que l'homme se pose des questions de fond, estime le producteur. C'est une source spirituelle disponible.» Pour ceux qui croient au Ciel, comme pour ceux qui n'y croient pas.