SOURCE - Romano Libero - Golias - 27 octobre 2009
Alors que viennent de s’ouvrir les tractations entre le Vatican et la Fraternité St Pie X, la rumeur s’intensifie à Rome de l’intention présumée de Benoît XVI d’accorder - du moins en cas d’issue positive des pourparlers - l’habit canonique de la Prélature personnelle. Très avantageux, et accordant une véritable indépendance aux traditionalistes. Ce qu’ils désirent bien entendu.
Sur un point cependant Rome pourrait se montrer intransigeante : il ne semble décemment pas possible de désigner comme chef de la prélature, avec rang d’évêque, l’un des évêques sacrés en 1988. Non pas tant en raison de cette transgression d’alors, en définitive effacée par la levée récente de l’excommunication mais à cause des propos réitérés, encore il y a peu, au sujet du Concile Vatican II, rejeté en bloc. Y compris de la part du plus « modéré » des quatre, Mgr Bernard Fellay, un suisse de 51 ans.
Parmi les ecclesiastiques pressentis pour prendre la tête de cette prélature intégriste, certains citent le nom de l’archevêque de Colombo, Mgr Ranjith. Ce dernier, longtemps en poste à la Curie devrait d’ailleurs coiffer assez rapidement la barrette cardinalice. Il est proche des traditionalistes en matière de liturgie. Certains parlent de Mgr Raymond Burke, le préfet de la Signature Apostolique. Mais d’autres personnalités sont évoquées : un jeune évêque du Kazahkstan, Mgr Athanasius Schneider, 48 ans, défenseur lui aussi aussi de l’ancienne liturgie et pourfendeur de la communion dans la main ou l’évêque d’Albenga, Mgr Mario Oliveri, 65 ans, héritier de la vieille droite romaine. D’autres hypothèses restent possibles, y compris celle de Mgr Guido Pozzo, 58 ans, actuelle cheville ouvrière des négociations.
Mgr Fellay il est vrai, a négocié au cours de ces dernières années diverses hypothèses de réconciliation, de connivence avec le cardinal Dario Castrillon Hoyos. Dans un entretien récent à un journal chilien, il se montre le plus conciliant de son bord : « Il y a des problèmes, mais ces problèmes ne signifient pas que nous ayons perdu cette relation de soumission à l’autorité du Saint Père ». Le chef de file des traditionalistes affirme qu’il n’y a jamais eu de séparation avec Rome : « Jamais il y a eu une déclaration de schisme de la part de l’Eglise envers nous. On a parlé durant un temps de l’excommunication des évêques (de la Fraternité Saint-Pie X, ndr), mais jamais d’une séparation ».
Mais l’arrogance n’est jamais loin : pour Mgr Fellay, le problème n’est pas à chercher du côté des traditionalistes, car « nous ne sommes que quelque chose comme l’indice qu’il y a un problème au sein de l’Eglise (…), une sorte de thermomètre ». S’il y a une séparation réelle, bien que non définitive, c’est bien entre ceux qu’on appelle « progressistes » et les « conservateurs », estime-t-il. « Le pape actuel lui-même, Benoît XVI, a condamné l’opinion que le Concile Vatican II et la réforme qui lui a succédé constitueraient une rupture avec le passé, que l’Eglise devrait changer ».
Ce clin d’oeil lancé aux conservateurs du côté romain pourrait inciter ces derniers à la compréhension. Paradoxalement c’est l’éventualité de concéder à la fraternité un statut de prélature personnelle qui pourrait soulever des réticences et ralentir les négociations. On sait que l’Opus Dei, seul organisme dans l’Eglise catholique à jouir d’un tel privilège n’est pas ravi d’une telle perspective. Partager la faveur qui lui a été faite en 1983 par Jean-Paul II ne suscite guère son enthousiasme. Or, l’un des trois experts de la délégation vaticane dans les actuels pourparlers, Mgr Fernando Ocariz, 65 ans, est non seulement membre de la Prélature de l’Oeuvre et, qui plus est, le probable successeur du Prélat actuel, Mgr Echeverria, atteint par la limite d’âge, d’ici quelques mois ou même quelques semaines. Il pourrait être refroidi dans ses ardeurs réconciliatrices !