SOURCE - Emmanuel Berretta - Le Point - 21 avril 2010
Le quotidien d'extrême droite Minute a publié en une la photo de Mathieu Maye (un nom d'emprunt), le journaliste de Capa qui s'était infiltré au sein du groupe catholique intégriste Dies Irae ("colère de Dieu") pour les besoins du magazine de France 2, Les Inflitrés . Un reportage qui provoque, sur la Toile, de nombreuses réactions de protestation de la part des catholiques traditionalistes. Face aux menaces physiques dirigées contre lui, Mathieu Maye a pris quelques précautions, mais n'a pas demandé à Capa de protection sérieuse.
Un groupuscule qui prépare la guerre
Dans ce reportage en caméra cachée*, Mathieu Maye et son réalisateur Rémi Lange (là encore un nom d'emprunt) ont montré comment un groupe bordelais préparait une sorte de guérilla contre trois ennemis : la démocratie, les musulmans et les juifs. Fabrice Sorlin, leur porte-parole, tient un double discours : face à la caméra, cet ancien membre du Front national prétend poursuivre une action menant au bien commun dans l'intérêt général. Et de citer ses maîtres à penser : Aristote et saint Thomas d'Aquin. Mais, dans les séminaires de son groupe, le discours est tout autre : Sorlin cherche à créer des milices autonomes et locales en s'appuyant sur un livre américain, Les Carnets de Turner (interdit dans de nombreux pays), qui délivre les recettes du combat. Ce livre propose par exemple de commencer par "pendre les Noirs et les juifs dans la rue", dit le reportage.
Les acolytes de Sorlin se rejoignent dans la cave d'une église traditionaliste de Bordeaux où, avec la bénédiction des prêtres qui partagent leurs idées racistes, ils se réunissent afin de recruter leurs adeptes. La cave est ornée de drapeaux des phalanges franquistes. Le reportage montre également comment ils construisent un camp d'entraînement militaire sous la supervision d'un ancien soldat. Les propos proférés au cours de ce reportage tombent souvent sous le coup de la loi. Ainsi, cet ancien militaire déclare : "Quand on va saigner au couteau les musulmans, ça ne va pas être beau."
L'Holocauste passé sous silence
Cette association, Dies Irae (D. I.), agit également sous couvert d'autres noms - Agir propre, Les Trois Salons ou Réseau solidarité famille - en menant des actions bénévoles au service de la population. Sous ce visage bienveillant, D. I. se fait apprécier des personnes et dépose des affichettes en vue de recruter. Le reporter remonte à la source en pénétrant dans une école confessionnelle hors contrat, l'école Saint-Projet, dirigée par Me Thomas Rivière. Là, 85 élèves de 3 à 15 ans reçoivent un enseignement très particulier : le maréchal Pétain est un héros de la Seconde Guerre mondiale, tandis que de Gaulle est présenté comme un traître... Le professeur d'histoire passe sous silence l'Holocauste au motif que ses élèves en entendent suffisamment parler ailleurs. Mais le plus impressionnant, ce sont les enfants eux-mêmes qui entonnent pour s'amuser des chants antisémites...
Les parents d'élèves se sont constitués en association et ont déposé plainte , avant même la diffusion du magazine, sur la base de l'article 227-21 du Code pénal. En effet, ils allèguent que le journaliste de Capa a incité les enfants à proférer ce genre de propos haineux. "Les parents que je représente sont des catholiques sincères et, à ce titre, pour eux, l'antisémitisme est abject, explique Me Solange Doumic, leur avocate. Si leurs enfants avaient tenu de tels propos devant eux, ils auraient été très sérieusement remis en place. Les enfants sont fragiles. Dans ce contexte, le rôle de Mathieu Maye, en tant que faux éducateur, est extrêmement choquant." Me Doumic dément également tout lien entre Dies Irae et l'école Saint-Projet.
Naturellement, Capa réfute cette accusation et tient les rushs du tournage à la disposition de la justice. Mathieu Maye a infiltré cette école libre durant trois semaines en tant que "prof de mathématiques", à raison de quelques heures d'étude par semaine. "Nous avions choisi d'être très neutres vis-à-vis des enfants, quitte à jouer les candides, objecte Rémi Lange, que nous avons rencontré. Au bout de 7 minutes, les gamins nous posaient d'étranges questions en guise de provocation. L'un d'eux demandait à Mathieu s'il était facho. Concernant les scènes avec les enfants, nous avons, au contraire, coupé au montage les passages les plus choquants pour nous en tenir à ce qui nous a paru un comportement médian." Le réalisateur explique ainsi sa démarche : "Cela fait dix ans que je travaille sur l'extrême droite. Je voulais filmer ce qui se dit dans ses réunions quand les caméras sont absentes. Le vrai visage des militants d'extrême droite, c'est celui-là."
*Diffusion le 27 avril sur France 2
Le quotidien d'extrême droite Minute a publié en une la photo de Mathieu Maye (un nom d'emprunt), le journaliste de Capa qui s'était infiltré au sein du groupe catholique intégriste Dies Irae ("colère de Dieu") pour les besoins du magazine de France 2, Les Inflitrés . Un reportage qui provoque, sur la Toile, de nombreuses réactions de protestation de la part des catholiques traditionalistes. Face aux menaces physiques dirigées contre lui, Mathieu Maye a pris quelques précautions, mais n'a pas demandé à Capa de protection sérieuse.
Un groupuscule qui prépare la guerre
Dans ce reportage en caméra cachée*, Mathieu Maye et son réalisateur Rémi Lange (là encore un nom d'emprunt) ont montré comment un groupe bordelais préparait une sorte de guérilla contre trois ennemis : la démocratie, les musulmans et les juifs. Fabrice Sorlin, leur porte-parole, tient un double discours : face à la caméra, cet ancien membre du Front national prétend poursuivre une action menant au bien commun dans l'intérêt général. Et de citer ses maîtres à penser : Aristote et saint Thomas d'Aquin. Mais, dans les séminaires de son groupe, le discours est tout autre : Sorlin cherche à créer des milices autonomes et locales en s'appuyant sur un livre américain, Les Carnets de Turner (interdit dans de nombreux pays), qui délivre les recettes du combat. Ce livre propose par exemple de commencer par "pendre les Noirs et les juifs dans la rue", dit le reportage.
Les acolytes de Sorlin se rejoignent dans la cave d'une église traditionaliste de Bordeaux où, avec la bénédiction des prêtres qui partagent leurs idées racistes, ils se réunissent afin de recruter leurs adeptes. La cave est ornée de drapeaux des phalanges franquistes. Le reportage montre également comment ils construisent un camp d'entraînement militaire sous la supervision d'un ancien soldat. Les propos proférés au cours de ce reportage tombent souvent sous le coup de la loi. Ainsi, cet ancien militaire déclare : "Quand on va saigner au couteau les musulmans, ça ne va pas être beau."
L'Holocauste passé sous silence
Cette association, Dies Irae (D. I.), agit également sous couvert d'autres noms - Agir propre, Les Trois Salons ou Réseau solidarité famille - en menant des actions bénévoles au service de la population. Sous ce visage bienveillant, D. I. se fait apprécier des personnes et dépose des affichettes en vue de recruter. Le reporter remonte à la source en pénétrant dans une école confessionnelle hors contrat, l'école Saint-Projet, dirigée par Me Thomas Rivière. Là, 85 élèves de 3 à 15 ans reçoivent un enseignement très particulier : le maréchal Pétain est un héros de la Seconde Guerre mondiale, tandis que de Gaulle est présenté comme un traître... Le professeur d'histoire passe sous silence l'Holocauste au motif que ses élèves en entendent suffisamment parler ailleurs. Mais le plus impressionnant, ce sont les enfants eux-mêmes qui entonnent pour s'amuser des chants antisémites...
Les parents d'élèves se sont constitués en association et ont déposé plainte , avant même la diffusion du magazine, sur la base de l'article 227-21 du Code pénal. En effet, ils allèguent que le journaliste de Capa a incité les enfants à proférer ce genre de propos haineux. "Les parents que je représente sont des catholiques sincères et, à ce titre, pour eux, l'antisémitisme est abject, explique Me Solange Doumic, leur avocate. Si leurs enfants avaient tenu de tels propos devant eux, ils auraient été très sérieusement remis en place. Les enfants sont fragiles. Dans ce contexte, le rôle de Mathieu Maye, en tant que faux éducateur, est extrêmement choquant." Me Doumic dément également tout lien entre Dies Irae et l'école Saint-Projet.
Naturellement, Capa réfute cette accusation et tient les rushs du tournage à la disposition de la justice. Mathieu Maye a infiltré cette école libre durant trois semaines en tant que "prof de mathématiques", à raison de quelques heures d'étude par semaine. "Nous avions choisi d'être très neutres vis-à-vis des enfants, quitte à jouer les candides, objecte Rémi Lange, que nous avons rencontré. Au bout de 7 minutes, les gamins nous posaient d'étranges questions en guise de provocation. L'un d'eux demandait à Mathieu s'il était facho. Concernant les scènes avec les enfants, nous avons, au contraire, coupé au montage les passages les plus choquants pour nous en tenir à ce qui nous a paru un comportement médian." Le réalisateur explique ainsi sa démarche : "Cela fait dix ans que je travaille sur l'extrême droite. Je voulais filmer ce qui se dit dans ses réunions quand les caméras sont absentes. Le vrai visage des militants d'extrême droite, c'est celui-là."
*Diffusion le 27 avril sur France 2