SOURCE - Paix Liturgique, lettre 243 - 13 août 2010
Dans le cadre de nos lettres consacrées au bilan qualitatif du Motu Proprio Summorum Pontificum, nous publions aujourd'hui les réflexions de Don Luigi Iandolo, jeune curé italien de la paroisse Santa Maria Assunta in Cielo d’Avellino (diocèse d’Avellino) sur la crise de l'Église et les bienfaits que celle-ci pourrait retirer de l'application généreuse du Motu Proprio. Né en 1979, Don Luigi a été ordonné en 2006.
I – LE DOCUMENT
Trois années se sont écoulées depuis la promulgation du motu proprio “Summorum Pontificum”, en juillet 2007, acte suprême par lequel le pape Benoît XVI a accordé la célébration de la Sainte Messe selon le Missel de Jean XXIII édité en 1962 – et jamais abrogé – comme forme “extraordinaire” de la liturgie de l'Église.
Il s'agit de la messe dite “tridentine” ou plutôt “damaso-grégorienne” en ce qu'elle remonte précisément aux papes Damase et Grégoire. Cela signifie que là où il existe ou se constitue un groupe de fidèles qui demande de bénéficier de l'ancienne tradition liturgique, le curé doit accorder la célébration de la Sainte Messe également selon le Missel romain promulgué par le Bienheureux “Papa Buono” (surnom affectueux donné par les Italiens à Jean XXIII).
Il est indéniable que, trois ans après la publication de ce controversé Motu Proprio, l'Église traverse aujourd'hui l'une des crises les plus profondes et graves de son histoire bimillénaire : sa foi, sa discipline et sa pratique religieuse sont touchées. Tout n'est pas à attribuer à l'époque et au monde modernes : chercher des responsabilités extérieures sans regarder à l'intérieur de l'Église serait plutôt déresponsabilisant. Du reste, comme l'a souligné le Saint-Père lors de son récent voyage à Fatima, les pires maux dont souffre l'Église se développent en son sein, comme si le Diable voulait la faire imploser. Quel meilleur point de départ, pour analyser cette “implosion”, que la liturgie, action à travers laquelle l'Église nous rend présent Jésus ?
On comprend bien, alors, que la crise de l'Église est intimement liée à la crise de la liturgie, comme l'a écrit en son temps le cardinal Ratzinger : “Je suis convaincu que la crise de l’Église que nous vivons aujourd’hui repose largement sur la désintégration de la liturgie, qui est parfois même conçue de telle manière – etsi Deus non daretur [comme si Dieu n’existait pas]– que son propos n’est plus du tout de signifier que Dieu existe, qu’Il s’adresse à nous et nous écoute. Mais si la liturgie ne laisse plus apparaître une communauté de foi, l'unité universelle de l'Église et de son histoire, le mystère du Christ vivant, où l'Église manifeste-t-elle donc encore sa nature spirituelle?”(*)
Le motu proprio du Saint Père offre donc la possibilité de bénéficier des trésors de la liturgie antique et de retrouver ainsi le sens, souvent perdu, du Sacré et du Mystère en redonnant à la liturgie la dignité qui lui est propre. “Il n’y a aucune contradiction entre l’une et l’autre édition du Missale Romanum. L’histoire de la liturgie est faite de croissance et de progrès, jamais de rupture. Ce qui était sacré pour les générations précédentes reste grand et sacré pour nous, et ne peut à l’improviste se retrouver totalement interdit, voire considéré comme néfaste. Il est bon pour nous tous, de conserver les richesses qui ont grandi dans la foi et dans la prière de l’Eglise, et de leur donner leur juste place“ lisons-nous dans la lettre aux évêques de Benoît XVI accompagnant le document de 2007. Il est clair, donc, que le souhait du pape est que ce trésor soit redécouvert, pour le bien des âmes avant tout, qui pourront en retirer grâce sur grâce.
Il n'est pas question, de façon simpliste, d'une simple “messe en latin” où le célébrant “tourne le dos aux fidèles” mais plutôt d'un rite très ancien où tous sont tournés vers le Seigneur et goûtent et expérimentent une Présence silencieuse qui parle la langue du mystère même !
Ce rite nous enseigne que l'Église n'est pas un cercle idéal où l'on se regarde les uns les autres, repliés sur nous-mêmes, mais bien un peuple qui, ensemble, compact, regarde vers le Soleil qui ne se couche jamais, vers l'Orient, seule source du salut. La belle chose étant que, si l'on n'a pas de missel il se peut que l'on sorte de la messe traditionnelle sans avoir rien compris mais en ayant découvert d'avoir... tout compris ! En usant d'une langue qui n'est pas d'usage quotidien – une langue sacrée – ; en expérimentant une centralité qui n'est ni celle du prêtre ni celle de l'assemblée participante mais celle de Celui qui est Grand et à qui revient toute adoration, on découvre que la liturgie n'est pas une question de compréhension intellectuelle et linguistique mais bien plutôt d'adoration. Si la liturgie ne permet pas la rencontre avec Dieu, elle perd alors sa sacralité et échoue, ne sert plus à rien, devient une évasion inutile, une cabale, un simple théâtre ou, et toujours selon les mots du cardinal Ratzinger (Chemin de Croix 2005) : “une danse vide autour du veau d'or que nous représentons, une célébration de soi-même sans même tenir compte de Lui”.
La difficulté d'apprécier de nouveau ce trésor se comprend facilement car ce n'est ni plus ni moins que celle que l'homme d'aujourd'hui rencontre face au mystère de la Rédemption. L'homme de notre temps aime être protagoniste et est absolument convaincu de son autosuffisance. Il peut tout et n'a besoin de personne pour se sauver. Il se sauve tout seul, par ses propres forces. Ainsi tolère-t-il mal un rite dans lequel il lui est demandé de mettre de côté sa superbe et de se faire simple adorateur, à genoux, du mystère qui lui est offert. Pourtant, ce que l'on observe depuis le Motu Proprio de Benoît XVI semble aller à l'encontre de ceci : qui s'approche, sans préjugés et le cœur ouvert, de la messe traditionnelle finit par s'en éprendre. La raison est simple : le Dieu qui parle dans le silence ne s'adresse pas à l'esprit de l'homme, toujours réticent à s'ouvrir au mystère, mais frappe à son cœur, réveillant en lui la nostalgie du sacré. Et c'est proprement pour cette capacité à toucher directement le cœur que la messe tridentine attire, attire toujours plus...
Sans donner trop de poids aux chiffres, il est intéressant de lire les résultats des récents sondages sur ce sujet. En Allemagne, par exemple, seulement 7% des pratiquants refuseraient d'assister à la messe traditionnelle si elle était célébrée dans leur paroisse. Les 93% restants seraient prêts à y participer au moins de temps en temps (25% chaque semaine). Au Portugal en revanche, c'est un catholique sur trois (qu'il soit pratiquant ou non) qui voudrait la messe ancienne tous les dimanches. Proportion qui dépasse les 50% chez les personnes allant à la messe au moins une fois par mois. Et la donnée relative à l'Italie est encore plus réconfortante puisque jusqu'aux deux tiers des fidèles y désireraient la messe dans leur paroisse.
Les chiffres semblent donc vraiment encourageants et le phénomène ne doit pas être sous-évalué, surtout au moment auquel l'Église a besoin de se purifier et de tourner à l'essentiel : la prière et la pénitence, ainsi que l'a demandé le Saint Père, faisant sien le message de la Vierge à La Salette, à Fatima et lors de tant d'autres apparitions au XXème siècle. La redécouverte de la messe traditionnelle et son approfondissement peuvent vraiment nous aider à “remettre en ordre” notre relation au sacré, en nous aidant à reconnaître la primauté de Dieu et de Ses commandements, confiants dans le triomphe du Cœur Immaculé de Marie – comme annoncé à Fatima – et dans l'accomplissement du songe de Saint Jean Bosco, celui où il vit deux colonnes sauver l'Église : l'Eucharistie et l'Immaculée !
(*) Cardinal Joseph Ratzinger, Ma vie. Souvenirs (1927-1977), Fayard 1998
II – LES COMMENTAIRES DE PAIX LITURGIQUE
1) “La crise de l'Église est intimement liée à la crise de la liturgie” : cette affirmation, qui aurait été qualifiée de “lefebvriste” il y a encore peu de temps est aujourd'hui tranquillement énoncée, en s'appuyant sur les écrits mêmes du cardinal Ratzinger, devenu Benoît XVI, par des ecclésiastiques – du clergé tout ce qu’il y a de plus officiel – de plus en plus nombreux. Un clergé de 7 à 77 ans, serions-nous tentés d'écrire, vu le jeune âge de Don Luigi Iandolo, tout juste trentenaire... On remarquera d’ailleurs que Joseph Ratzinger reliait ses réflexions sur l’évolution de la liturgie à la fin des années soixante avec l’un des thèmes les plus “antimodernes” de sa pensée : la formule Etsi Deus non daretur (comme si Dieu n'existait pas) peut être considérée selon lui comme le slogan de l’arrogance moderne de la raison. Autrement dit, lorsque Joseph Ratzinger soulignait que la liturgie – dont le mouvement intrinsèque est d’être une totale soumission à Dieu – est devenue une “fabrication”, il voulait dire qu’elle entrait par cela même dans le mouvement moderne d’autosuffisance de la raison qui oublie ce qu’elle est, pure image de Dieu. Il n’est donc pas exagéré de dire que pour le Pape, il y a quelque chose d’”athée” dans la nouvelle liturgie. La citation faite par Don Luigi est ainsi choisie avec une très juste connaissance de la pensée du Saint-Père.
2) La jeunesse de l’auteur de ces lignes doit interroger toute personne de bonne volonté. En effet, une génération de prêtres n’ayant connu jusqu’à un passé récent que la forme ordinaire du rite romain se met à découvrir et par suite à aimer une forme liturgique plus ancienne qu’ils ne connaissaient pas jusqu’alors. Voilà de quoi ébranler les vieilles formules toutes faites des ennemis de la paix telles “vous êtes nostalgiques de la messe de votre enfance”, “vous voulez revenir en arrière…”, ou bien encore “cette forme liturgique n’intéresse que les personnes âgées…”. Il est temps de voir les choses en face, les principaux détracteurs du motu proprio de Benoît XVI appartiennent à une génération vieillissante de plus en plus en décalage avec l’Église du rang. D'ailleurs, les petits servants de messe de Saint Pierre de Rome expriment parfaitement bien cette évolution quand, en parlant de la messe de St-Pie-V, que l’on célèbre de plus en plus souvent dans la Basilique, ils disent "je vais servir la nouvelle Messe". Il faut dire que la messe réformée fait aujourd’hui penser esthétiquement – si l’on peut dire – à l'une de ces cités nouvelles des années 70, quarante ans après.
3) L'article de Don Luigi, par son souci pédagogique et catéchétique – justification de l'usage du latin et de l'orientation commune du célébrant et des fidèles “vers le Seigneur”, explication des attitudes de silence et d'adoration par le mystère de la Présence réelle, etc. – rejoint celui de Mons. Pope, curé de l'archidiocèse de Washington, que nous avons publié dans notre lettre 234. De Washington à Avellino, où Don Iandolo exerce son ministère, c'est l'universalité, donc la catholicité, de la forme extraordinaire du rite romain qui est ainsi soulignée.
4) Enfin, en faisant référence aux sondages internationaux commandités par Paix Liturgique, Don Luigi nous conforte dans notre politique d’information. Sans accorder aux chiffres plus de poids qu'ils n'en méritent, Don Iandolo tente néanmoins de mesurer ce que signifient les principales tendances – concordant dans le temps et dans l’espace – dégagées par ces études scientifiques réalisées par des professionnels indépendants. Que les donateurs qui nous ont permis de financer ces sondages soient encore une fois vivement remerciés.
Dans le cadre de nos lettres consacrées au bilan qualitatif du Motu Proprio Summorum Pontificum, nous publions aujourd'hui les réflexions de Don Luigi Iandolo, jeune curé italien de la paroisse Santa Maria Assunta in Cielo d’Avellino (diocèse d’Avellino) sur la crise de l'Église et les bienfaits que celle-ci pourrait retirer de l'application généreuse du Motu Proprio. Né en 1979, Don Luigi a été ordonné en 2006.
I – LE DOCUMENT
Trois années se sont écoulées depuis la promulgation du motu proprio “Summorum Pontificum”, en juillet 2007, acte suprême par lequel le pape Benoît XVI a accordé la célébration de la Sainte Messe selon le Missel de Jean XXIII édité en 1962 – et jamais abrogé – comme forme “extraordinaire” de la liturgie de l'Église.
Il s'agit de la messe dite “tridentine” ou plutôt “damaso-grégorienne” en ce qu'elle remonte précisément aux papes Damase et Grégoire. Cela signifie que là où il existe ou se constitue un groupe de fidèles qui demande de bénéficier de l'ancienne tradition liturgique, le curé doit accorder la célébration de la Sainte Messe également selon le Missel romain promulgué par le Bienheureux “Papa Buono” (surnom affectueux donné par les Italiens à Jean XXIII).
Il est indéniable que, trois ans après la publication de ce controversé Motu Proprio, l'Église traverse aujourd'hui l'une des crises les plus profondes et graves de son histoire bimillénaire : sa foi, sa discipline et sa pratique religieuse sont touchées. Tout n'est pas à attribuer à l'époque et au monde modernes : chercher des responsabilités extérieures sans regarder à l'intérieur de l'Église serait plutôt déresponsabilisant. Du reste, comme l'a souligné le Saint-Père lors de son récent voyage à Fatima, les pires maux dont souffre l'Église se développent en son sein, comme si le Diable voulait la faire imploser. Quel meilleur point de départ, pour analyser cette “implosion”, que la liturgie, action à travers laquelle l'Église nous rend présent Jésus ?
On comprend bien, alors, que la crise de l'Église est intimement liée à la crise de la liturgie, comme l'a écrit en son temps le cardinal Ratzinger : “Je suis convaincu que la crise de l’Église que nous vivons aujourd’hui repose largement sur la désintégration de la liturgie, qui est parfois même conçue de telle manière – etsi Deus non daretur [comme si Dieu n’existait pas]– que son propos n’est plus du tout de signifier que Dieu existe, qu’Il s’adresse à nous et nous écoute. Mais si la liturgie ne laisse plus apparaître une communauté de foi, l'unité universelle de l'Église et de son histoire, le mystère du Christ vivant, où l'Église manifeste-t-elle donc encore sa nature spirituelle?”(*)
Le motu proprio du Saint Père offre donc la possibilité de bénéficier des trésors de la liturgie antique et de retrouver ainsi le sens, souvent perdu, du Sacré et du Mystère en redonnant à la liturgie la dignité qui lui est propre. “Il n’y a aucune contradiction entre l’une et l’autre édition du Missale Romanum. L’histoire de la liturgie est faite de croissance et de progrès, jamais de rupture. Ce qui était sacré pour les générations précédentes reste grand et sacré pour nous, et ne peut à l’improviste se retrouver totalement interdit, voire considéré comme néfaste. Il est bon pour nous tous, de conserver les richesses qui ont grandi dans la foi et dans la prière de l’Eglise, et de leur donner leur juste place“ lisons-nous dans la lettre aux évêques de Benoît XVI accompagnant le document de 2007. Il est clair, donc, que le souhait du pape est que ce trésor soit redécouvert, pour le bien des âmes avant tout, qui pourront en retirer grâce sur grâce.
Il n'est pas question, de façon simpliste, d'une simple “messe en latin” où le célébrant “tourne le dos aux fidèles” mais plutôt d'un rite très ancien où tous sont tournés vers le Seigneur et goûtent et expérimentent une Présence silencieuse qui parle la langue du mystère même !
Ce rite nous enseigne que l'Église n'est pas un cercle idéal où l'on se regarde les uns les autres, repliés sur nous-mêmes, mais bien un peuple qui, ensemble, compact, regarde vers le Soleil qui ne se couche jamais, vers l'Orient, seule source du salut. La belle chose étant que, si l'on n'a pas de missel il se peut que l'on sorte de la messe traditionnelle sans avoir rien compris mais en ayant découvert d'avoir... tout compris ! En usant d'une langue qui n'est pas d'usage quotidien – une langue sacrée – ; en expérimentant une centralité qui n'est ni celle du prêtre ni celle de l'assemblée participante mais celle de Celui qui est Grand et à qui revient toute adoration, on découvre que la liturgie n'est pas une question de compréhension intellectuelle et linguistique mais bien plutôt d'adoration. Si la liturgie ne permet pas la rencontre avec Dieu, elle perd alors sa sacralité et échoue, ne sert plus à rien, devient une évasion inutile, une cabale, un simple théâtre ou, et toujours selon les mots du cardinal Ratzinger (Chemin de Croix 2005) : “une danse vide autour du veau d'or que nous représentons, une célébration de soi-même sans même tenir compte de Lui”.
La difficulté d'apprécier de nouveau ce trésor se comprend facilement car ce n'est ni plus ni moins que celle que l'homme d'aujourd'hui rencontre face au mystère de la Rédemption. L'homme de notre temps aime être protagoniste et est absolument convaincu de son autosuffisance. Il peut tout et n'a besoin de personne pour se sauver. Il se sauve tout seul, par ses propres forces. Ainsi tolère-t-il mal un rite dans lequel il lui est demandé de mettre de côté sa superbe et de se faire simple adorateur, à genoux, du mystère qui lui est offert. Pourtant, ce que l'on observe depuis le Motu Proprio de Benoît XVI semble aller à l'encontre de ceci : qui s'approche, sans préjugés et le cœur ouvert, de la messe traditionnelle finit par s'en éprendre. La raison est simple : le Dieu qui parle dans le silence ne s'adresse pas à l'esprit de l'homme, toujours réticent à s'ouvrir au mystère, mais frappe à son cœur, réveillant en lui la nostalgie du sacré. Et c'est proprement pour cette capacité à toucher directement le cœur que la messe tridentine attire, attire toujours plus...
Sans donner trop de poids aux chiffres, il est intéressant de lire les résultats des récents sondages sur ce sujet. En Allemagne, par exemple, seulement 7% des pratiquants refuseraient d'assister à la messe traditionnelle si elle était célébrée dans leur paroisse. Les 93% restants seraient prêts à y participer au moins de temps en temps (25% chaque semaine). Au Portugal en revanche, c'est un catholique sur trois (qu'il soit pratiquant ou non) qui voudrait la messe ancienne tous les dimanches. Proportion qui dépasse les 50% chez les personnes allant à la messe au moins une fois par mois. Et la donnée relative à l'Italie est encore plus réconfortante puisque jusqu'aux deux tiers des fidèles y désireraient la messe dans leur paroisse.
Les chiffres semblent donc vraiment encourageants et le phénomène ne doit pas être sous-évalué, surtout au moment auquel l'Église a besoin de se purifier et de tourner à l'essentiel : la prière et la pénitence, ainsi que l'a demandé le Saint Père, faisant sien le message de la Vierge à La Salette, à Fatima et lors de tant d'autres apparitions au XXème siècle. La redécouverte de la messe traditionnelle et son approfondissement peuvent vraiment nous aider à “remettre en ordre” notre relation au sacré, en nous aidant à reconnaître la primauté de Dieu et de Ses commandements, confiants dans le triomphe du Cœur Immaculé de Marie – comme annoncé à Fatima – et dans l'accomplissement du songe de Saint Jean Bosco, celui où il vit deux colonnes sauver l'Église : l'Eucharistie et l'Immaculée !
(*) Cardinal Joseph Ratzinger, Ma vie. Souvenirs (1927-1977), Fayard 1998
II – LES COMMENTAIRES DE PAIX LITURGIQUE
1) “La crise de l'Église est intimement liée à la crise de la liturgie” : cette affirmation, qui aurait été qualifiée de “lefebvriste” il y a encore peu de temps est aujourd'hui tranquillement énoncée, en s'appuyant sur les écrits mêmes du cardinal Ratzinger, devenu Benoît XVI, par des ecclésiastiques – du clergé tout ce qu’il y a de plus officiel – de plus en plus nombreux. Un clergé de 7 à 77 ans, serions-nous tentés d'écrire, vu le jeune âge de Don Luigi Iandolo, tout juste trentenaire... On remarquera d’ailleurs que Joseph Ratzinger reliait ses réflexions sur l’évolution de la liturgie à la fin des années soixante avec l’un des thèmes les plus “antimodernes” de sa pensée : la formule Etsi Deus non daretur (comme si Dieu n'existait pas) peut être considérée selon lui comme le slogan de l’arrogance moderne de la raison. Autrement dit, lorsque Joseph Ratzinger soulignait que la liturgie – dont le mouvement intrinsèque est d’être une totale soumission à Dieu – est devenue une “fabrication”, il voulait dire qu’elle entrait par cela même dans le mouvement moderne d’autosuffisance de la raison qui oublie ce qu’elle est, pure image de Dieu. Il n’est donc pas exagéré de dire que pour le Pape, il y a quelque chose d’”athée” dans la nouvelle liturgie. La citation faite par Don Luigi est ainsi choisie avec une très juste connaissance de la pensée du Saint-Père.
2) La jeunesse de l’auteur de ces lignes doit interroger toute personne de bonne volonté. En effet, une génération de prêtres n’ayant connu jusqu’à un passé récent que la forme ordinaire du rite romain se met à découvrir et par suite à aimer une forme liturgique plus ancienne qu’ils ne connaissaient pas jusqu’alors. Voilà de quoi ébranler les vieilles formules toutes faites des ennemis de la paix telles “vous êtes nostalgiques de la messe de votre enfance”, “vous voulez revenir en arrière…”, ou bien encore “cette forme liturgique n’intéresse que les personnes âgées…”. Il est temps de voir les choses en face, les principaux détracteurs du motu proprio de Benoît XVI appartiennent à une génération vieillissante de plus en plus en décalage avec l’Église du rang. D'ailleurs, les petits servants de messe de Saint Pierre de Rome expriment parfaitement bien cette évolution quand, en parlant de la messe de St-Pie-V, que l’on célèbre de plus en plus souvent dans la Basilique, ils disent "je vais servir la nouvelle Messe". Il faut dire que la messe réformée fait aujourd’hui penser esthétiquement – si l’on peut dire – à l'une de ces cités nouvelles des années 70, quarante ans après.
3) L'article de Don Luigi, par son souci pédagogique et catéchétique – justification de l'usage du latin et de l'orientation commune du célébrant et des fidèles “vers le Seigneur”, explication des attitudes de silence et d'adoration par le mystère de la Présence réelle, etc. – rejoint celui de Mons. Pope, curé de l'archidiocèse de Washington, que nous avons publié dans notre lettre 234. De Washington à Avellino, où Don Iandolo exerce son ministère, c'est l'universalité, donc la catholicité, de la forme extraordinaire du rite romain qui est ainsi soulignée.
4) Enfin, en faisant référence aux sondages internationaux commandités par Paix Liturgique, Don Luigi nous conforte dans notre politique d’information. Sans accorder aux chiffres plus de poids qu'ils n'en méritent, Don Iandolo tente néanmoins de mesurer ce que signifient les principales tendances – concordant dans le temps et dans l’espace – dégagées par ces études scientifiques réalisées par des professionnels indépendants. Que les donateurs qui nous ont permis de financer ces sondages soient encore une fois vivement remerciés.