SOURCE - Père Basile Valuet - La Nef n°220 - novembre 2010
Mgr Gherardini, ancien professeur d’ecclésiologie et d’œcuménisme à l’Université pontificale du Latran, a publié un essai critique sur le concile Vatican II (1) que nous avions rapidement recensé en juin dernier. Ce livre étant parfois cité comme une « référence », il nous a paru utile d’en présenter une analyse plus approfondie.
Une occasion de repréciser certains points du débat entre la Fraternité Sacerdotale Saint-Pie X et le Saint-Siège nous est fournie par le livre de Mgr Gherardini sur Vatican II. Insistant à bon droit sur la nécessité que l’Église enseigne le donné révélé, immuable, la nouveauté ne pouvant se trouver que dans la manière, le livre supplie le Saint-Père de se prononcer solennellement sur les enseignements de Vatican II. Mais hélas ! il zigzague entre deux thèses difficilement conciliables.
1.Voici d’abord la bonne thèse : « Le cheval de Troie n’a pas vraiment consisté dans les documents conciliaires eux-mêmes ; ce sont plutôt certaines idées que des groupes de pression réussirent à faire entrer dans l’aula conciliaire, qui entraînèrent la maturation progressive d’une ligne qui a déterminé ensuite la culture postconciliaire » (p. 21). Dans cette optique (acceptable), on sait gré à l’auteur d’abord de reconnaître la légitimité de Vatican II, et sa doctrine, laquelle « devra toujours être religieusement accueillie comme un enseignement conciliaire » (p. 54), et (théoriquement) de reporter ses critiques plutôt sur la formulation de Vatican II. Par conséquent, il déclare l’ensemble des publications anti-conciliaires du Courrier de Rome « vicié par l’esprit polémique qui les inspire et qui, par ce fait même, les disqualifie » (p. 28), et considère comme un « délire » le refus d’obéir aux papes postérieurs à Pie XII.
L’auteur a en outre raison de se plaindre d’une excessive « célébration » de Vatican II, considéré trop souvent comme un terminus a quo absolu, occultant les documents antérieurs. Il épingle avec justesse une longue liste d’erreurs véhiculées après 1965. De même, en matière liturgique, les réformes postconciliaires sont allées au-delà des orientations de Sacrosanctum concilium (SC), voire contre elles, et la normativité de SC était un peu floue, d’où des interprétations abusives.
2.La mauvaise thèse, c’est que, puisque Vatican II (c’est vrai) n’a pas enseigné de manière définitive donc infailliblement de nouveaux points, l’on ne serait pas tenu (en droit) d’accepter les aspects nouveaux de ses doctrines, lesquels seraient (en fait) incompatibles avec la Tradition, donc dépourvus de l’assistance du Saint-Esprit. Or cette thèse constitue la toile de fond de tout le livre, malgré le « parapluie » de la bonne thèse susmentionnée.
Répondons-y dès l’abord. En droit, même le magistère non définitif (dit aussi « authentique ») exige que nous y adhérions, et d’ailleurs non seulement extérieurement, mais encore par un assentiment interne de notre intelligence et de notre volonté. Donc, par exemple, lorsque Pie XII, dans son allocution du 29 septembre 1949, condamne la fécondation artificielle humaine, il faut y adhérer. De même, lorsque Vatican II condamne la violation du droit à la liberté religieuse.
En fait, l’auteur ne démontre pas la présence effective d’erreurs dans le magistère contemporain. Examinons d’abord ses accusations contre les principaux documents conciliaires.
Ainsi, la Constitution dogmatique sur l’Église, Lumen gentium (LG) serait responsable d’une grande partie de la « confusion exégético-théologique actuelle ». Pourtant, même Mgr Lefebvre avait déclaré que LG ne posait aucun problème (2). D’autre part, comment l’auteur peut-il ne pas comprendre que le pape uni à tous les évêques (et non seulement le pape seul) dispose d’un « pouvoir plénier, suprême et universel » sur toute l’Église ?
Pour discuter Nostra aetate (sur les religions), Mgr Gherardini refuse que le Dieu des chrétiens soit la même réalité que le Dieu des Juifs ou des musulmans, ce qui est une donnée traditionnelle (de saint Justin à nos jours, en passant par Suarez…), même si, bien évidemment, ce qu’on dit (sans parler du culte) de cette réalité qu’est le Dieu Créateur est fort différent, sur des points d’importance capitale, comme la Trinité, l’Amour de Dieu et envers Dieu, etc. L’auteur croit que Dignitatis humanae (DH) considère « la présence simultanée du vrai et du faux comme un bien à protéger ». Cela l’amène à opposer deux Magistères (antérieur et postérieur à Vatican II). Or le bien que DH veut protéger, c’est la capacité d’adhérer librement à la vérité selon sa conscience. Si certains en profitent pour adhérer au faux ou ne pas suivre leur conscience, ils abusent de leur droit à la liberté religieuse. Toutefois, l’abus n’enlève pas l’usage, donc ils sont aussi protégés par le droit, indirectement, et dans de justes limites, tout comme celui qui omet la charité en ne faisant pas l’aumône abuse de son droit de propriété, mais ne perd pas son droit, tant qu’il ne va pas contre la justice.
Selon Mgr Gherardini, Gaudium et Spes contredirait saint Thomas en affirmant que l’homme est « la seule créature sur terre que Dieu a voulue pour elle-même » (n. 24). Pourtant d’après le Docteur Angélique : « seule la nature intellectuelle est voulue pour elle-même dans l’univers ; et les autres le sont pour elle » (3). L’auteur omet la doctrine (enseignée par le Saint-Office en 1949) du baptême de désir implicite pour ceux qui, sans faute, ignorent la vraie religion.
Il prétend faussement que selon Unitatis redintegratio (UR) l’Église aurait perdu son unité. Mais UR 4 déclare : « Cette unité […] subsiste de façon inamissible dans l’Église catholique », passage omis par Mgr Gherardini, tout comme ceux où UR et le magistère subséquent maintiennent que seule l’Église catholique du Christ possède la plénitude des moyens de salut, et que c’est en elle que doivent être réincorporés tous les frères séparés (UR 3, § 5). Il reproche encore à contresens aux « Réponses » de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi publiées le 10 juillet 2007 d’avoir confirmé « l’impression que l’Église catholique et l’Église du Christ ne seraient pas une unique et identique réalité ». Or ce document visait au contraire à réaffirmer « la pleine identité de l’Église du Christ avec l’Église catholique » (Réponse 3), car « le Concile a voulu exprimer l’identité de l’Église du Christ avec l’Église catholique » (note 4).
Réévaluer le Concile ?
Plus généralement, ce théologien en appelle à une « œuvre de révision et de réévaluation [du Concile] […] par une solide équipe de spécialistes ». Or plusieurs spécialistes et le magistère postconciliaire (4) s’y sont déjà appliqués, pratiquant une solide herméneutique de la continuité !
Mgr Gherardini donne l’impression de recevoir de façon sélective le dit magistère. Ainsi, il passe sous silence les interventions de Paul VI et Jean-Paul II rappelant l’autorité de Vatican II (5). Il attaque la « Déclaration conjointe sur la justification », accord sur certains points précis signé entre le Saint-Siège et la Fédération Luthérienne Mondiale le 31 octobre 1999, et rangé par l’auteur parmi les « consensus fous », alors que même Benoît XVI a invité (avec succès) les méthodistes à y adhérer eux aussi.
Autre contestation plutôt téméraire d’un fait dogmatique, l’auteur (comme déjà dans le numéro de sa revue Divinitas d’octobre 2004) s’oppose à la validité de l’anaphore (prière eucharistique) assyrienne d’Addaï et Mari, reconnue pourtant par Jean-Paul II (2001), décision louée par Benoît XVI (2007).
Enfin, selon l’auteur, Vatican II aurait offert aux partisans d’une herméneutique de rupture (nommés de manière ambiguë « le postconcile ») comme un point d’ancrage, et serait matériellement – ou indirectement – et non formellement et directement – responsable de la crise postconciliaire. Ce n’est pas exclu en droit, si on l’entend de l’imperfection des formulations (à prouver). Mais ce livre va bien au-delà. S’il interpelle utilement les néo-modernistes, il laisse donc mal à l’aise, et risque d’ébranler sans fondement la confiance des fidèles dans le magistère.
Quant à la préface de Mgr Ranjith, elle propose, à la suite du pape (22 décembre 2005), une herméneutique de la réforme dans la continuité, dont, paradoxalement, Mgr Gherardini doute qu’elle soit possible, sauf à l’entendre comme l’élimination de ce qui ne lui paraît pas en continuité avec la Tradition dans le magistère actuel, position rejetée par Jean-Paul II le 2 juillet 1988 dans le motu proprio Ecclesia Dei.
*Docteur en théologie.
(1) Brunero Gherardini, Le Concile Œcuménique Vatican II. Un débat à ouvrir, Frigento, Casa Mariana Editrice, 2009, 264 pages, 15 e.
(2) Fideliter, n° 57, p. 4.
(3) Contra gentes, III, 112.
(4) Cf. Mysterium Ecclesiae, Redemptoris missio, Catéchisme de l’Église catholique, Ut unum sint, Dominus Jesus, etc.
(5) Cf. 7/12/1965 ; 12/01/1966 ; 21/09/1966 ; 24/05/1976 ; 11/10/1976 ; 23/12/1982 ; 20/07/1983 ; 2/07/1988, etc.
N.B. – Une version plus longue, plus argumentée et plus « scientifique » (avec toutes les références) est consultable sur le site de La Nef : www.lanef.net
Mgr Gherardini, ancien professeur d’ecclésiologie et d’œcuménisme à l’Université pontificale du Latran, a publié un essai critique sur le concile Vatican II (1) que nous avions rapidement recensé en juin dernier. Ce livre étant parfois cité comme une « référence », il nous a paru utile d’en présenter une analyse plus approfondie.
Une occasion de repréciser certains points du débat entre la Fraternité Sacerdotale Saint-Pie X et le Saint-Siège nous est fournie par le livre de Mgr Gherardini sur Vatican II. Insistant à bon droit sur la nécessité que l’Église enseigne le donné révélé, immuable, la nouveauté ne pouvant se trouver que dans la manière, le livre supplie le Saint-Père de se prononcer solennellement sur les enseignements de Vatican II. Mais hélas ! il zigzague entre deux thèses difficilement conciliables.
1.Voici d’abord la bonne thèse : « Le cheval de Troie n’a pas vraiment consisté dans les documents conciliaires eux-mêmes ; ce sont plutôt certaines idées que des groupes de pression réussirent à faire entrer dans l’aula conciliaire, qui entraînèrent la maturation progressive d’une ligne qui a déterminé ensuite la culture postconciliaire » (p. 21). Dans cette optique (acceptable), on sait gré à l’auteur d’abord de reconnaître la légitimité de Vatican II, et sa doctrine, laquelle « devra toujours être religieusement accueillie comme un enseignement conciliaire » (p. 54), et (théoriquement) de reporter ses critiques plutôt sur la formulation de Vatican II. Par conséquent, il déclare l’ensemble des publications anti-conciliaires du Courrier de Rome « vicié par l’esprit polémique qui les inspire et qui, par ce fait même, les disqualifie » (p. 28), et considère comme un « délire » le refus d’obéir aux papes postérieurs à Pie XII.
L’auteur a en outre raison de se plaindre d’une excessive « célébration » de Vatican II, considéré trop souvent comme un terminus a quo absolu, occultant les documents antérieurs. Il épingle avec justesse une longue liste d’erreurs véhiculées après 1965. De même, en matière liturgique, les réformes postconciliaires sont allées au-delà des orientations de Sacrosanctum concilium (SC), voire contre elles, et la normativité de SC était un peu floue, d’où des interprétations abusives.
2.La mauvaise thèse, c’est que, puisque Vatican II (c’est vrai) n’a pas enseigné de manière définitive donc infailliblement de nouveaux points, l’on ne serait pas tenu (en droit) d’accepter les aspects nouveaux de ses doctrines, lesquels seraient (en fait) incompatibles avec la Tradition, donc dépourvus de l’assistance du Saint-Esprit. Or cette thèse constitue la toile de fond de tout le livre, malgré le « parapluie » de la bonne thèse susmentionnée.
Répondons-y dès l’abord. En droit, même le magistère non définitif (dit aussi « authentique ») exige que nous y adhérions, et d’ailleurs non seulement extérieurement, mais encore par un assentiment interne de notre intelligence et de notre volonté. Donc, par exemple, lorsque Pie XII, dans son allocution du 29 septembre 1949, condamne la fécondation artificielle humaine, il faut y adhérer. De même, lorsque Vatican II condamne la violation du droit à la liberté religieuse.
En fait, l’auteur ne démontre pas la présence effective d’erreurs dans le magistère contemporain. Examinons d’abord ses accusations contre les principaux documents conciliaires.
Ainsi, la Constitution dogmatique sur l’Église, Lumen gentium (LG) serait responsable d’une grande partie de la « confusion exégético-théologique actuelle ». Pourtant, même Mgr Lefebvre avait déclaré que LG ne posait aucun problème (2). D’autre part, comment l’auteur peut-il ne pas comprendre que le pape uni à tous les évêques (et non seulement le pape seul) dispose d’un « pouvoir plénier, suprême et universel » sur toute l’Église ?
Pour discuter Nostra aetate (sur les religions), Mgr Gherardini refuse que le Dieu des chrétiens soit la même réalité que le Dieu des Juifs ou des musulmans, ce qui est une donnée traditionnelle (de saint Justin à nos jours, en passant par Suarez…), même si, bien évidemment, ce qu’on dit (sans parler du culte) de cette réalité qu’est le Dieu Créateur est fort différent, sur des points d’importance capitale, comme la Trinité, l’Amour de Dieu et envers Dieu, etc. L’auteur croit que Dignitatis humanae (DH) considère « la présence simultanée du vrai et du faux comme un bien à protéger ». Cela l’amène à opposer deux Magistères (antérieur et postérieur à Vatican II). Or le bien que DH veut protéger, c’est la capacité d’adhérer librement à la vérité selon sa conscience. Si certains en profitent pour adhérer au faux ou ne pas suivre leur conscience, ils abusent de leur droit à la liberté religieuse. Toutefois, l’abus n’enlève pas l’usage, donc ils sont aussi protégés par le droit, indirectement, et dans de justes limites, tout comme celui qui omet la charité en ne faisant pas l’aumône abuse de son droit de propriété, mais ne perd pas son droit, tant qu’il ne va pas contre la justice.
Selon Mgr Gherardini, Gaudium et Spes contredirait saint Thomas en affirmant que l’homme est « la seule créature sur terre que Dieu a voulue pour elle-même » (n. 24). Pourtant d’après le Docteur Angélique : « seule la nature intellectuelle est voulue pour elle-même dans l’univers ; et les autres le sont pour elle » (3). L’auteur omet la doctrine (enseignée par le Saint-Office en 1949) du baptême de désir implicite pour ceux qui, sans faute, ignorent la vraie religion.
Il prétend faussement que selon Unitatis redintegratio (UR) l’Église aurait perdu son unité. Mais UR 4 déclare : « Cette unité […] subsiste de façon inamissible dans l’Église catholique », passage omis par Mgr Gherardini, tout comme ceux où UR et le magistère subséquent maintiennent que seule l’Église catholique du Christ possède la plénitude des moyens de salut, et que c’est en elle que doivent être réincorporés tous les frères séparés (UR 3, § 5). Il reproche encore à contresens aux « Réponses » de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi publiées le 10 juillet 2007 d’avoir confirmé « l’impression que l’Église catholique et l’Église du Christ ne seraient pas une unique et identique réalité ». Or ce document visait au contraire à réaffirmer « la pleine identité de l’Église du Christ avec l’Église catholique » (Réponse 3), car « le Concile a voulu exprimer l’identité de l’Église du Christ avec l’Église catholique » (note 4).
Réévaluer le Concile ?
Plus généralement, ce théologien en appelle à une « œuvre de révision et de réévaluation [du Concile] […] par une solide équipe de spécialistes ». Or plusieurs spécialistes et le magistère postconciliaire (4) s’y sont déjà appliqués, pratiquant une solide herméneutique de la continuité !
Mgr Gherardini donne l’impression de recevoir de façon sélective le dit magistère. Ainsi, il passe sous silence les interventions de Paul VI et Jean-Paul II rappelant l’autorité de Vatican II (5). Il attaque la « Déclaration conjointe sur la justification », accord sur certains points précis signé entre le Saint-Siège et la Fédération Luthérienne Mondiale le 31 octobre 1999, et rangé par l’auteur parmi les « consensus fous », alors que même Benoît XVI a invité (avec succès) les méthodistes à y adhérer eux aussi.
Autre contestation plutôt téméraire d’un fait dogmatique, l’auteur (comme déjà dans le numéro de sa revue Divinitas d’octobre 2004) s’oppose à la validité de l’anaphore (prière eucharistique) assyrienne d’Addaï et Mari, reconnue pourtant par Jean-Paul II (2001), décision louée par Benoît XVI (2007).
Enfin, selon l’auteur, Vatican II aurait offert aux partisans d’une herméneutique de rupture (nommés de manière ambiguë « le postconcile ») comme un point d’ancrage, et serait matériellement – ou indirectement – et non formellement et directement – responsable de la crise postconciliaire. Ce n’est pas exclu en droit, si on l’entend de l’imperfection des formulations (à prouver). Mais ce livre va bien au-delà. S’il interpelle utilement les néo-modernistes, il laisse donc mal à l’aise, et risque d’ébranler sans fondement la confiance des fidèles dans le magistère.
Quant à la préface de Mgr Ranjith, elle propose, à la suite du pape (22 décembre 2005), une herméneutique de la réforme dans la continuité, dont, paradoxalement, Mgr Gherardini doute qu’elle soit possible, sauf à l’entendre comme l’élimination de ce qui ne lui paraît pas en continuité avec la Tradition dans le magistère actuel, position rejetée par Jean-Paul II le 2 juillet 1988 dans le motu proprio Ecclesia Dei.
*Docteur en théologie.
(1) Brunero Gherardini, Le Concile Œcuménique Vatican II. Un débat à ouvrir, Frigento, Casa Mariana Editrice, 2009, 264 pages, 15 e.
(2) Fideliter, n° 57, p. 4.
(3) Contra gentes, III, 112.
(4) Cf. Mysterium Ecclesiae, Redemptoris missio, Catéchisme de l’Église catholique, Ut unum sint, Dominus Jesus, etc.
(5) Cf. 7/12/1965 ; 12/01/1966 ; 21/09/1966 ; 24/05/1976 ; 11/10/1976 ; 23/12/1982 ; 20/07/1983 ; 2/07/1988, etc.
N.B. – Une version plus longue, plus argumentée et plus « scientifique » (avec toutes les références) est consultable sur le site de La Nef : www.lanef.net