SOURCE - Isabelle de Gaulmyn - La Croix - 26 novembre 2011
On avait déjà les catholiques « traditionnalistes », les catholiques « intégristes » ou encore les « fondamentalistes ». Voici désormais les « ultra-catholiques ». L’expression fait fureur depuis quelques semaines, pour désigner les catholiques qui ont manifesté ces derniers jours contre la représentation de pièces de théâtre, à Toulouse ou Paris, pièces jugées par eux « blasphématoires » (« Sur le concept du visage du fils de Dieu » et « Golgota Picnic »)
Comment s’y retrouver ? (1) Le fondamentalisme que l’on colle aussi parfois à l’islam, est plutôt une création du protestantisme anglo-saxon. D’ailleurs, le terme vient de l’anglais « fundamentals », pour désigner des points non négociables (des fondamentaux) de la Bible, notamment contre le darwinisme. Le Livre, écrit par la main de Dieu, ne se trompe jamais: le monde est bien créé en six jours. La Parole de Dieu doit être respecté à la lettre même.
En revanche, le terme « intégriste » est, lui, historiquement lié au catholicisme. Ce courant porta durant le XXe siècle la mémoire du traumatisme de la Révolution française, et refusa de tourner la page. Dans « intégrisme », il y a « intègre », et « intégral ». Les intégristes sont les tenants d’une forme d’intransigeance, qui voudrait que la doctrine de l’Eglise soit suivie « intégralement » dans la vie publique et politique, pour réaliser une sorte d’« ordre social chrétien ».
Inspiration maurassienne
Nul doute que l’institut Civitas, à l’origine des manifestations contre les pièces de théâtre ces dernières semaines, ne s’inscrive directement dans cette filiation: héritier de la « Cité catholique », d’inspiration maurassienne, rattaché à la Fraternité-Saint-Pie-X de Mgr Lefebvre. Mais il est vrai, aussi, qu’une partie de ceux qui protestaient devant les théâtres n’étaient ni des tenants d’un « ordre chrétien », ni des nostalgiques de l’époque prérévolutionnaire…
Peut-on pour autant les qualifier d’ultra-catholiques ? Pas si sur. Il est d’ailleurs amusant de noter que si l’expression « fondamentalisme » vient du protestantisme, celle « d’ultra » est empruntée au judaïsme, comme si cette inflation d’hyperboles dans le religieux n’était qu’une manifestation de plus de la mondialisation…
Dans le judaïsme, les ultra-ortodoxes sont les adeptes d’une tradition rigoureuse. Les juifs « orthodoxes », à l’inverse des « libéraux », veulent un respect strict de la tradition. Les « ultra-orthodoxes », en quelque sorte des « orthodoxes au carré », seraient des « fondamentalistes » de la tradition : ils refusent tout arrangement (« accommodement » diraient les Canadiens) avec la modernité. Ce qui les rapproche plus de l’intégrisme catholique que du fondamentalisme protestant.
La différence, au fond, c’est que « l’ultra-catholicisme » renvoit le catholique « sans rien » à une forme de vide coupable. Celui qui n’est pas « ultra », peut-il dès lors être « seulement » catholique, sans se voir traiter de « catholique mou », ou de « catholique tiède » ?…
Isabelle de Gaulmyn
(1) voir « La loi de Dieu contre la liberté des hommes » de Jean-Louis Schlegel
On avait déjà les catholiques « traditionnalistes », les catholiques « intégristes » ou encore les « fondamentalistes ». Voici désormais les « ultra-catholiques ». L’expression fait fureur depuis quelques semaines, pour désigner les catholiques qui ont manifesté ces derniers jours contre la représentation de pièces de théâtre, à Toulouse ou Paris, pièces jugées par eux « blasphématoires » (« Sur le concept du visage du fils de Dieu » et « Golgota Picnic »)
Comment s’y retrouver ? (1) Le fondamentalisme que l’on colle aussi parfois à l’islam, est plutôt une création du protestantisme anglo-saxon. D’ailleurs, le terme vient de l’anglais « fundamentals », pour désigner des points non négociables (des fondamentaux) de la Bible, notamment contre le darwinisme. Le Livre, écrit par la main de Dieu, ne se trompe jamais: le monde est bien créé en six jours. La Parole de Dieu doit être respecté à la lettre même.
En revanche, le terme « intégriste » est, lui, historiquement lié au catholicisme. Ce courant porta durant le XXe siècle la mémoire du traumatisme de la Révolution française, et refusa de tourner la page. Dans « intégrisme », il y a « intègre », et « intégral ». Les intégristes sont les tenants d’une forme d’intransigeance, qui voudrait que la doctrine de l’Eglise soit suivie « intégralement » dans la vie publique et politique, pour réaliser une sorte d’« ordre social chrétien ».
Inspiration maurassienne
Nul doute que l’institut Civitas, à l’origine des manifestations contre les pièces de théâtre ces dernières semaines, ne s’inscrive directement dans cette filiation: héritier de la « Cité catholique », d’inspiration maurassienne, rattaché à la Fraternité-Saint-Pie-X de Mgr Lefebvre. Mais il est vrai, aussi, qu’une partie de ceux qui protestaient devant les théâtres n’étaient ni des tenants d’un « ordre chrétien », ni des nostalgiques de l’époque prérévolutionnaire…
Peut-on pour autant les qualifier d’ultra-catholiques ? Pas si sur. Il est d’ailleurs amusant de noter que si l’expression « fondamentalisme » vient du protestantisme, celle « d’ultra » est empruntée au judaïsme, comme si cette inflation d’hyperboles dans le religieux n’était qu’une manifestation de plus de la mondialisation…
Dans le judaïsme, les ultra-ortodoxes sont les adeptes d’une tradition rigoureuse. Les juifs « orthodoxes », à l’inverse des « libéraux », veulent un respect strict de la tradition. Les « ultra-orthodoxes », en quelque sorte des « orthodoxes au carré », seraient des « fondamentalistes » de la tradition : ils refusent tout arrangement (« accommodement » diraient les Canadiens) avec la modernité. Ce qui les rapproche plus de l’intégrisme catholique que du fondamentalisme protestant.
La différence, au fond, c’est que « l’ultra-catholicisme » renvoit le catholique « sans rien » à une forme de vide coupable. Celui qui n’est pas « ultra », peut-il dès lors être « seulement » catholique, sans se voir traiter de « catholique mou », ou de « catholique tiède » ?…
Isabelle de Gaulmyn
(1) voir « La loi de Dieu contre la liberté des hommes » de Jean-Louis Schlegel