Compte-rendu du colloque à Rome sur le motu proprio |
2008-09-21 - L'étranger - leforumcatholique.org |
Je viens de faire retour de Rome, où j'ai participé à cette rencontre qui a soulevé (grâce surtout à l'allocution de Mgr. Perl et à l'impromptu du card. Castrillòn) l'intérêt de la presse italienne toute entière et de la blogosphère catholique dans le monde. D'abord, laissez-moi dire que je suis étonné par le haut niveau et l'importance de ce congrès qui - et cela est le plus incroyable - a été organisée (au coeur du Vatican et avec la participation de tant de personnalités) par un simple "groupe stable" de province. Une dizaine de jeunes (20-30 ans) d'Acireale (petite ville sicilienne), toujours harcelés par leur évêque et par le clergé local (le père dominicain Vincenzo Nuara, qui leur célébrait la Messe, a été muté ailleurs), ont réussi tout cela. Un grand mérite est évidemment de ce père Nuara (42 ans), dont tout le monde a admiré la capacité d'organisateur et de modérateur du colloque, avec des mots toujours mesurés et gentils mais sans aucune concession à la "langue de bois". Il a aussi tenu une rubrique radio sur cette rencontre, avec des interview entre autres au prof. Hauke et à l'abbé Bux de la Congrégation pour la doctrine de la Foi: si vous voulez l’écouter (en italien, évidemment), voici le LIEN Je ne peux pas vous faire la description de tout ce qui s'est passé; ni d'ailleurs mon incertaine connaissance de votre langue le conseille. Mais je vais référer quelques mots sur ce que Mgr. Perl et le Cardinal ont dit, en marge de ce que les journaux en ont référé. Commençons par le cardinal. Il faut préciser que sa présence n'était pas prévue. Il avait été invité, évidemment, mais il avait décliné. Puis, pendant les travaux, il est arrivé, en simple clergymen noir, et il a été reçu par les organisateurs ravis et surpris à la fois. On lui a demandé ensuite de dire deux mots et il a fait ce discours, dont on parle tant, absolument non préparé. D'abord il a bien parlé de la nécessité d'adoration, respect et sacralité (par exemple l'agenouillement, la communion dans la bouche); puis il a fait sa digression sur les excès des tradis. Les journaux n’ont pas dit que le discours concernait principalement la Frat. St. Pie X, qui a été nommé juste après cette phrase: “Savez-vous qui crée le plus de problèmes à l’Ecclesia Dei? Ceux qui disent aimer la tradition, car ils sont insatiables”. Et ensuite: “Par exemple, la Frat. St. Pie X...”. Après, la critique s'est élargie à ceux des tradis (en général, non plus seulement la St. Pie X) qui sont incontentables, qui font de la messe un champ de bataille et qui, quand le pape donne la communion à genoux, s'écrient: c'est nous qui avons raison. Ils ne savent pas, il a ajouté, le mal qu'ils font (sous entendu: à la cause d'une nécessaire restauration liturgique) Or, évidemment le dialogue avec la FSSPX est dans l'impasse et le cardinal en souffre beaucoup. Mais cette violence verbale peut avoir de bonnes conséquences, qui sait? D'abord, une secousse peut faire bousculer quelque chose (=après ce discours, le cardinal s'est longuement et discrètement entretenu avec un abbé de la fraternité, présent au colloque). Et si ce ne sera pas ainsi, si le dialogue s'estompe, au moins l'Ecclesia Dei aura-t-elle plus de temps pour se dédier à son "core business", moins agréable et prestigieux des relations "écuméniques" avec la FSSPX, mais ô combien nécessaire: faire sentir que cette commission existe aux centaines d'évêques qui se moquent d'elle et du Pape. A ce propos, Mgr Perl (qui avait parlé en premier, avant l'arrivé du cardinal) nous avait invité à la patience, en précisant qu'ils sont submergés par les courriers et les requêtes, et qu'on peut pas avoir tout et tout de suite, que le motu proprio est là seulement depuis un an, etc. Au même temps, il a fait cet aperçu géographique sur l'application du motu proprio: ni trop mal ni trop bien en France et États Unis, difficultés en Italie où les évêques, à quelques exceptions près, l'ont enrayé et de même en Allemagne, où on aime toujours ordonnancer tout et donc aussi le motu proprio, avec des règles de la commission épiscopale très strictes et burocratiques. Peu d'intérêt en Espagne et, encore moins, en Afrique et Asie "où il n'y a jamais eu un profond attachement au rit en latin" Or, tout le monde au colloque connaissait déjà cette attitude de l’épiscopat. Mais le fait qu’un haut fonctionnaire de la Curie ait dit officiellement cette vérité (maintes fois niée par des personnalités de l'Église), a fait l'intérêt de tous les journaux. En Italie on n'est pas habitués du tout, à différence peut-être de la France, à une rébellion d'évêques envers le Pape. Et j’ajouterai que cette proclamation est bien plus importante des appel à la patience e de l'étrange discours du cardinal, car nous donne, à nous catholiques en première ligne dans cette "guerre civile" de désobéissance épiscopale, une arme puissante. Je m'explique. Si par exemple nous, c'est à dire notre "groupe stable", avions appelé les journaux il y a une semaine pour leur dire: l'évêque nous interdit la messe en latin et il n'obéit pas au Pape; personne ne nous aurait pris au sérieux. Nous aurions même perdu des amis. Un évêque qui va contre le Pape? Du jamais vu (de ce coté des Alpes)! Il vous interdit une messe? Lui, qui se plaint souvent que les églises se vident? Et pourquoi et à quel but cette interdiction? (et ça, je ne le comprendrai jamais moi-même, donc figurez-vous un lecteur quelconque!). Bref: on aurait passé pour des fanatiques un peu "dérangés". Mais maintenant on peut s'appuyer sur les mots de Mgr. Perl et expliquer: voyez-vous qu'à la tête de notre diocèse il y a un de ces pasteurs dont se plaint le Vatican, qui refusent d'appliquer la volonté du Pape et ne veulent pas nous "faire sentir chez nous dans l'Eglise", comme l'a pourtant demandé le Pape à Lourdes. Et un article pareil dans la presse fait du mal, croyez-moi, à des gens qui sont habitués au respect servile et même à l'adulation la plus flatteuse. Je conclue, donc. Il est vrai que l'Ecclesia Dei nous a invité au calme et à la modération (même si beaucoup des paroles plus fortes du cardinal ne concernent pas l’ensemble des tradis, étant pour la FSSPX). Il doit y avoir eu des dérapages qui vont contre nos intérêts et donnent des arguments aux adversaires, qu'il faut à tout prix éviter (mais je pense quand-même que le Cardinal a voulu remarquer la paille dans notre oeil, car excédé par l'attitude de la FSSPX, mais oubliant la poutre dans les yeux épiscopaux). Et puis, il faut éviter d'écrire à la PCED pour toute chose, comme pour la couleur des chasubles... Mais le message est surtout que c'est à nous de faire le travail de pression: la Commission veut rester derrière et intervenir discrètement (je sais avec certitude qu’il y un dossier pour chaque diocèse qui “pose problème”: et ça pourrait avoir son poids pour évaluer un évêque et sa carrière). Les critères sont clairs: 1) D'abord et toujours, la charité, le respect et la courtoisie envers les évêques, qui souvent ont peur de nous seulement car ne nous connaissent pas. 2) Encore: beaucoup de patience et de compréhension. Parfois (mais pas trop souvent...) les difficultés sont réelles, comme le manque de prêtres. 2) Si l'évêque est intransigeant (et j'en connais...), que tout le monde le sache et qu'il prenne ouvertement la responsabilité de sa désobéissance. Et donc, publicité de son refus injustifié, bien que dans la vérité et le respect de sa personne et de sa charge. Veuillez pardonner la longueur de ce message. L'Etranger |
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