Le Saint-Père « veut conserver les immenses trésors spirituels, culturels et esthétiques liés à l’ancienne liturgie. » On sait que le Cardinal Castrillon Hoyos s’est exprimé, ces dernières semaines de mai, devant toute l’assemblée des évêques de l’Amérique du sud. Il leur a tenu des paroles très importantes leur annonçant l’intention du Souverain Pontife de rétablir dans ses droits et sur les autels de la chrétienté la messe dite de saint Pie V, jamais abolie, tous ses trésors et d’établir, pour en faciliter le retour et l’heureux développement, une sorte de dicastère propre ayant cette finalité. Il s’est prononcé très clairement sur ces deux sujets. Jugez vous-même ! Le Saint-Père « veut conserver les immenses trésors spirituels, culturels et esthétiques liés à l’ancienne liturgie ». Il « veut mettre à la disposition de l’Eglise tous les trésors de la liturgie latine qui, pendant des siècles, a nourri la vie spirituelle de tant de générations de fidèles catholiques ». Le Cardinal poursuit: « Pour ces raisons, le Saint-Père a l’intention d’étendre à toute l’Eglise latine la possibilité de célébrer la Sainte Messe et les Sacrements selon les livres liturgiques promulgués par le Bienheureux Jean XXIII en 1962. Il existe aujourd’hui pour cette liturgie, qui n’a jamais été abolie et qui, comme nous l’avons dit, est considérée comme un trésor, un intérêt nouveau et renouvelé, et c’est aussi pour cette raison que le Saint-Père pense que le temps est venu de faciliter, comme le voulait la première Commission cardinalice en 1986, l’accès à cette liturgie, en faisant d’elle une forme extraordinaire de l’unique rite romain ». C’est clair ! Le Saint-Père « veut conserver les immenses trésors spirituels, culturels et esthétiques liés à l’ancienne liturgie. »
A cette fin, il pense à la création d’une sorte de dicastère romain. A cette fin et pour présider à cet heureux événement, le Cardinal rappelle l’intention du pape de créer un dicastère romain. La Commission Ecclesia Dei créée en 1988, après les sacres faits par Mgr Lefebvre, changerait en quelque sorte de finalité. Elle n’aurait plus seulement pour raison de gérer les problèmes des prêtres et fidèles ayant quitté Mgr Lefebvre, en 1988, pour rester dans « l’unité ecclésiale » ( !), ni non plus de gérer seulement les problèmes du retour de la FSSPX au « port » ecclésial ( !), souci permanent de la hiérarchie catholique, mais, d’une façon beaucoup plus positive aujourd’hui, « il étend(rait) en outre son service à la satisfaction des justes aspirations de tous ceux qui, en raison d’une sensibilité particulière, sans avoir eu de liens avec les deux groupes précités, désirent maintenir vivante la liturgie latine antérieure dans la célébration de l’Eucharistie et des autres sacrements ». Il le répète de nouveau : « Le Saint-Père, qui fut pendant quelques années membre de cette Commission (Ecclesia Dei), veut qu’elle se transforme en un organisme du Saint-Siège ayant pour finalité propre et distincte de conserver et de maintenir la valeur de la liturgie latine traditionnelle. Mais il faut affirmer en pleine clarté qu’il ne s’agit pas d’un retour en arrière, d’un retour aux temps antérieurs à la réforme de 1970. Il s’agit au contraire d’une offre généreuse du Vicaire du Christ qui, comme expression de sa volonté pastorale, veut mettre à la disposition de l’Eglise tous les trésors de la liturgie latine qui, pendant des siècles, a nourri la vie spirituelle de tant de générations de fidèles catholiques ». Comme me le disait un ami, c’est une sorte d’ « Occidentale » que le Pape veut créer, un peu comme l’ « Orientale », qui existe à Rome pour les églises uniates…Peut-être ! Mgr Lefebvre souhaitait cela. (cf. Regard sur le monde n° 131) On comprend toute l’importance des propos du Cardinal.
La lettre du Cardinal Castrillon Hoyos du 7 mai 2001 à Mgr Fellay. Comme on peut l’imaginer, ce discours du cardinal nous remplit de joie, nous fait bondir d’allégresse, nous fait chanter d’actions de grâces. Nous exprimons ici au Cardinal toute notre reconnaissance. Car nous apprécions la nouveauté par rapport à sa lettre du 7 mai 2001 à Mgr Fellay où il refusait de reconnaître ce droit de la messe tridentine pour l’Eglise universelle. Les choses changent, évoluent en matière liturgique… Dans cette lettre, il écrivait en effet: « En ce qui concerne la première condition : la liberté pour tous de la Messe de saint Pie V, un certain nombre de cardinaux, évêques et fidèles jugent qu’une telle permission ne doit pas être concédée. Ce n’est pas que le rite sacré précédent ne mérite pas tout le respect ou qu’on méconnaisse sa solidité théologique, ni sa beauté et son apport à la sanctification pendant des siècles et dans l’Eglise mais parce que cette permission pourrait créer une confusion dans les esprits de beaucoup de personnes qui la comprendraient comme une dépréciation de la valeur de la sainte Messe que célèbre l’Eglise aujourd’hui ». Il poursuivait : « Il est clair que, dans les statuts de votre réinsertion, on offre toutes les garanties pour que les membres de la Fraternité sacerdotale Saint Pie X et tous ceux qui ont un attrait spécial pour cette noble tradition liturgique puissent la célébrer librement dans vos églises et lieux de culte. On peut également la célébrer dans les autres églises avec la permission des ordinaires diocésains ». Quel changement d’attitude de la part de l’autorité ecclésiastique vis-à-vis de la messe tridentine entre 2001 et 2007. En 2001, la messe tridentine restait à usage interne, privatim. « dans vos églises ». En 2007, son droit doit être déclaré pour l’Eglise universelle. Notre joie est profonde.
Mais une critique demeure…Elle est fondamentale Toutefois nous sommes obligé de dire au Cardinal que nous ne partageons pas toutes les affirmations qu’il prononça devant les évêques d’Amérique du Sud. Nous ne pouvons pas nous réjouir de cette phrase qu’il prononça: « La récupération de cette richesse ( de la messe dite de saint Pie V) s’unit à celle, non moins précieuse, de la liturgie actuelle de l’Eglise ». Là, le Cardinal donne un jugement de valeur sur la Nouvelle Messe, sur la « liturgie actuelle de l’Eglise ». Il y voit une « richesse ». Il y voit un bien « précieux » pour l’Eglise. Et c’est pourquoi la grande idée du Cardinal Castrillon Hoyos est de demander qu’on ne « contrapose » pas les deux liturgies. Il l’exprimait déjà dans son homélie qu’il faisait dans la Cathédrale de Chartres, lors du pèlerinage de Notre Dame de Chrétienté. « Il ne faut pas contraposer les deux rites. Il sont substantiellement identiques ». Il nous le répétait alors qu’il recevait en audience privée les séminaristes du Séminaire Saint Vincent de Paul, et leurs maîtres à Rome, le 7 février 2007 en me regardant fixement, un peu sévèrement. Il m’est difficile de suivre cette affirmation malgré l’estime que je porte au Cardinal. Non point que je sois opposé aux propitiations faites au pape Jean-Paul II par « la commission cardinalice de 1986 » et en particulier à cette proposition : « Pour chaque messe célébrée en langue latine, avec ou sans fidèles présents, le célébrant a le droit de choisir librement entre le missel de Paul VI (1970) et celui de Jean XXIII (1962). » - et qui pourrait bien être reprise dans le Motu Proprio annoncé. J’y suis bien évidemment favorable. Car elle me donne le droit de dire la messe de saint Pie V. Avec ce droit reconnu – enfin - cesse cette guerre liturgique tellement dommageable à l’Eglise, aux familles et aux prêtres. De plus - quant à la messe de Paul VI - il ne m’appartient pas de la faire disparaître ou de l’améliorer. La Liturgie est dans les mains de la hiérarchie. On sait que Benoît XVI veut la corriger. Il n’a cessé de parler de la « réforme de la Réforme ». C’est lui qui en a lancée l’idée. C’est bien qu’elle ne lui donne pas en tous points satisfaction… Malgré cette insatisfaction qu’il a exprimé dans bien de ses livres, il la laisse encore célébrer alors qu’il est devenu le Pape et qu’il a sur l’Eglise tout pouvoir. Je veux bien la « cœxistence » pacifique des deux rites sur le plan pratique. Je veux surtout le rétablissement du droit de la messe antique. Son « abolition » dans l’Eglise était une véritable injustice. Il faut que justice soit faite. Le pape le veut, semble le vouloir. Approche, en effet, le jour où le droit de la messe de « toujours » sera reconnu… La « commission cardinalice de 1986 » le reconnaissait déjà. C’est son aspect éminemment positif. Le cardinal Castrillon Hoyos nous rappelle, dans son discours au Brésil, que « le Saint-Père pense que le temps est venu de faciliter, comme le voulait la première Commission cardinalice en 1986, l’accès à cette liturgie, en faisant d’elle une forme extraordinaire de l’unique rite romain ». Deo Gratias. (A moins que la puissance moderniste soit trop forte…si forte que…Il ne faudrait pas que les membres du Bon Pasteur l’oublie ! ) Mais je ne peux pas pour autant accepter sa proposition : « « La récupération de cette richesse ( de la messe dite de saint Pie V) s’unit à celle, non moins précieuse, de la liturgie actuelle de l’Eglise ». Non ! Je ne peux accepter cette proposition parce que je ne la crois pas juste. Je ne crois pas que cette réforme liturgique soit même fidèle aux principes rappelés par le document « Sacro Sanctum Concilium de Vatican II.
La thèse du Cardinal Stickler. C’est la thèse du cardinal Stikler. Il le disait dans sa conférence en Autriche en 1997 .Elle fut donnée à « l’ Internationalen théologischen Sommerakademie 1997 des linzer Priesterkreises ». Elle fut publiée, d’abord, en allemand par Franz Breid – Die heilige liturgie – Ennsthaler, puis en français par le CIEL, en 2000, dans une petite brochure intitulée : « Témoignage d’un expert au Concile ». La conférence a pour titre en français « Souvenirs et expériences d’un expert de la Commission conciliaire sur la liturgie ». Le cardinal Stickler se présente tout d’abord. Ce n’est pas le dernier personnage de l’Eglise. « J’ai été professeur de droit canonique et d’histoire du droit ecclésiastique à l’Université salésienne, fondée en 1940, puis pendant 8 ans, de 1958 à 1966, recteur de cette université. En cette qualité, j’ai bientôt été nommé consulteur de la Congrégation Romaine pour les Séminaires et les Universités, puis, depuis les travaux antépréparatoires jusqu'à la mise en œuvre des décisions du Concile, membre de la commission dirigée par ce dicastère romain. En outre, j’ai été nommé expert de la commission pour le clergé, et plus spécifiquement pour les problèmes relatifs aux droits patrimoniaux : il s’agissait surtout de débarrasser le Droit canon du système des bénéfices. « Peu avant le concile, le cardinal Laraona, dont j’avais été élève pendant mes études de droit canon et de droit ecclésiastique au Latran et qui avait été nommé président de la Commission conciliaire pour la liturgie, me fit venir chez lui et m’annonça qu’il m’avait proposé comme expert de cette commission. Je lui objectais que j’avais déjà beaucoup à faire en tant qu’expert de deux autres commissions, surtout celles des séminaires et universités. Pourtant il maintint sa proposition en faisant remarquer que, considérant l’importance canonique des prescriptions relatives à la liturgie, il fallait également inclure des canonistes dans cette commission. C’est par cette fonction non recherchée que j’ai ensuite vécu le Concile Vatican II depuis ses débuts puisque, comme on le sait, la liturgie fut le premier sujet inscrit à l’ordre du jour. Je fus ensuite affecté à la sous-commission qui devait rédiger les modifications apportées aux trois premiers chapitres et aussi préparer l’ultime formulation des textes qui devaient être soumis, pour discussion et approbation, à la commission réunie en plénière avant d’être présentés dans l’aula conciliaire. Cette sous-commission se composait de trois évêques : Mgr Callewaert, archevêque de Gand, qui en était le président, Mgr Enciso Viana, de Majorque et, si je ne me trompe, Mgr Pichler, de Banjaluka (Yougoslavie), ainsi que de trois experts Mgr Martimort, le père Martinez de Antoniana, clarétin espagnol, et moi-même. Vous comprendrez aisément que, dans le cadre de ces travaux, on pouvait se faire une idée exacte de ce que souhaitaient les Pères conciliaires ainsi que du sens réel des textes votés et adoptés par le concile ». Tout cela pour dire que son témoignage personnel sur la réforme liturgique, son jugement sur « l’édition définitive » du nouveau missel romain, peut avoir une certaine valeur. Il le dit lui-même : « Mais vous pourrez également comprendre ma stupéfaction lorsque, prenant connaissance de l’édition définitive du Nouveau Missel Romain, je fus bien obligé de constater que, sur bien des points, son contenu ne correspondait pas aux textes conciliaires qui m’étaient si familiers, que beaucoup de choses avait été changées ou élargies, ou allaient même directement au rebours des instructions données par le Concile ». Il demande alors une audience au cardinal Güt, préfet de la Congrégation des Rites : « Comme j’avais précisément vécu tout le déroulement du Concile, les discussions souvent très vives et longues et toute l’évolution des modifications jusqu’aux votes répétés qui eurent lieu jusqu'à leur adoption définitive,et que je connaissais aussi très bien les textes contenant les prescriptions détaillées pour la réalisation de la réforme souhaitée, vous pouvez vous imaginer mon étonnement, mon malaise croissant et même ma fureur devant certaines contradictions particulières, surtout considérant les conséquences nécessairement graves que l’on pouvait en attendre. C’est ainsi que je décidais d’aller voir le cardinal Gut qui, le 8 mai 1968, était devenu préfet de la Congrégation des Rites en remplacement du cardinal Larraona, qui s’était retiré le 9 janvier précédent. Je lui demandais une audience dans son logement au monastère bénédictin de l’Aventin, audience qu’il m’accorda le 19 novembre 1969. Mgr Gut me reçut très aimablement, bien qu’il fût visiblement malade et, comme l’on dit, j’ai pu déverser tout ce que j’avais sur le cœur. Il me laissa parler une demi-heure sans m’interrompre, puis il me dit qu’il partageait entièrement mes inquiétudes. Mais, ajouta-t-il, la faute n’en incombait pas à la Congrégation des Rites : en effet, toute la réforme était l’œuvre du « Consilium » constitué expressément à cette fin par le pape, dont il avait nommé le cardinal Lercaro Président et le père Bugnini Secrétaire. Dans ses travaux, ce conseil n’avait eu de comptes à rendre qu’au pape ». Inquiétudes partagées sur une réforme liturgique ! Tous deux, et le Cardinal Güt et le Cardinal Stickler n’y voient pas une « richesse », un bien « précieux » ! Elle cause en eux mille inquiétudes ! Ce préambule étant fait, le Cardinal donne le thème de sa conférence : il veut juger « de la concordance ou de la contradiction entre les dispositions conciliaires et la réforme effectivement appliquée » (p. 35) Tout au début, le cardinal nous rappelle quelques grands principes liturgiques heureusement soulignés par la Constitution Sacrosanctum Concilium . Il nous rappelle l’article 2 qui affirme que, dans la liturgie, « tout ce qui est humain doit être subordonné et soumis au divin, le visible à l’invisible, l’action à la contemplation, le présent à la cité divine future que nous recherchons ». C’est à la page 35 du livret. Qui ne serait d’accord avec ce principe…fut-il conciliaire ! Sur ce point, le jugement du cardinal tombe comme un couperet. Tout simplement, les réformateurs ont échoué en cette affaire. Il écrit vers la fin de sa conférence: « Ma conférence, mes souvenirs et expériences, je pense, ont permis d’évaluer dans quelle mesure la réforme avait satisfait aux exigences d’ordre théologique et ecclésiastique énoncées par le Concile, en d’autres termes, de voir si, dans la Liturgie - et surtout dans ce qui en constitue le centre, la Sainte Messe – ce qui est humain a véritablement été ordonné et soumis au divin, ce qui est visible à l’invisible, ce qui relève de l’action à la contemplation et ce qui est présent à la cité future que nous recherchons. Et l’on arrive à se demander si, au contraire, la nouvelle liturgie n’a pas, souvent, ordonné et soumis le divin à l’humain, le mystère invisible au visible, la contemplation à l’activisme, l’éternité future au présent humain quotidien ». (p. 64). S’il en est ainsi de la reforme liturgique , peut-on parler alors de richesse, de bien précieux…. ?
« La réforme de la Réforme » Le cardinal Stickler fait donc un constat d’échec total ; de sorte que, lui aussi, avec le cardinal Ratzinger, aujourd’hui Benoît XVI, forme des vœux pour lancer la réforme de la Réforme. La première aurait donc échoué ? Elle est donc loin d’être une richesse….« C’est précisément parce que l’on se rend toujours plus clairement compte de la situation actuelle (ndlr. i.e : de la déconfiture de la réforme liturgique et son infidélité à la pensée conciliaire…Mais à qui la faute…) que se renforce l’espoir d’une éventuelle restauration que le cardinal Ratzinger voit dans un nouveau mouvement liturgique qui éveillera à une vie nouvelle le véritable héritage du Concile Vatican II ». Le Novus Ordo Missae ne serait donc pas, Eminence ! le plus beau fruit de la réforme conciliaire. Ce ne serait pas une si grande richesse que cela ! C’est aussi un Cardinal qui le dit…Je ne fais que répéter…Comme on dit, il faudrait peut-être que la hiérarchie unifie son discours… Le réforme liturgique et la tradition apostolique Le cardinal survole et résume encore quelques articles fondamentaux du Concile. Des rappels tout a fait évidents et traditionnels. L’article 21, l’article 23 qui affirme qu’il ne faut rien changer - en matière liturgique - « avant que ne soit élaborée une soigneuse étude théologique, historique , pastorale, en s’assurant d’un développement organique harmonieux ». Qui ne serait d’accord ! L’article 33 rappelle la finalité de la liturgie : «La liturgie est principalement le culte de la majesté de Dieu ». A la bonne heure ! Ces principes liturgiques - et d’autres encore - rappelés, le cardinal passe de nouveau à la critique de la réforme liturgique - l’œuvre conciliaire par excellence. Sans vouloir être exhaustif en cette affaire, le cardinal aborde cette critique avec énergie et fraîcheur. Sous sa plume, je retrouve l’enseignement de mes maîtres, de Mgr Lefebvre. . J’ai connu de sa bouche cet axiome : « legem credendi, lex statuit supplicandi » ou plus simplement dit : « lex orandi, les credendi ». Je retrouve dans les pages de la conférence du Cardinal Stickler, la même doctrine, la doctrine de toujours. Le cardinal écrit : « la liturgie contient et exprime la foi de façon juste et compréhensible » (p.40). De sorte que « la pérennité de la liturgie participe de la pérennité de la foi, elle contribue même à la préserver ». Et comme la foi est immuable, la liturgie qui l’exprime l’est aussi. « C’est pourquoi il n’y a jamais eu de rupture, de re-création radicale dans aucun des rites chrétiens, catholiques, y compris dans le rite romain latin » (p 40-41). L’évolution liturgique - dès lors – est lente, nécessairement organique. Ainsi « dans tous les rites, poursuit le cardinal, la liturgie est quelque chose qui s’est développée et continue de croître lentement ; partie du Christ et repris par les Apôtres, elle a été organiquement développée par leurs successeurs, en particulier par les figures les plus marquantes tels les Pères de l’Eglise, tout cela en préservant consciencieusement la substance, i.e ; le corpus de la Liturgie en tant que tel ». L’Esprit Saint est un et véridique. Ce qu’il inspire ne peut-être que un et véridique, le même à travers le temps. J’aime cette expression du cardinal. C’est clair, c’est net : « C’est pourquoi, il n’y a jamais eu de rupture, de re-création radicale…dans le rite latin romain ». Il poursuit : « Il n’y a jamais eu rupture dans le rite romain latin à l’exception de la liturgie post-conciliaire actuelle, en application de la réforme…bien que le Concile…ait toujours réaffirmé que cette réforme devait préserver absolument la tradition ». (p. 40-41)
Jamais de rupture…à l’exception de la liturgie post-conciliaire actuelle ! C’est donc bien à une rupture que l’on assiste avec le Nouvel Ordo Missae. Cet éloignement est une véritable rupture avec la Tradition. Le cardinal insiste : avec le Nouvel Ordo Missae, on assiste à une véritable rupture avec la Tradition, « à une véritable et radicale nouveauté ». Il l’affirme tout de go : « L’ordo Missae (est) radicalement nouveau ». Et ceci est une véritable nouveauté, la nouveauté par excellence… « alors que toutes les réformes antérieures adoptées par les papes et tout particulièrement celle entreprise sous l’impulsion du Concile de Trente et mis en œuvre par le pape Pie V et jusqu’à celles de Pie X, de Pie XII et de Jean XXIII, ne furent pas des révolutions mais uniquement des corrections qui ne touchaient pas l’essentiel, des ajustements et des enrichissements » (p. 41) C’est ce que demande, du reste, le Concile en son article 23 : « Le Concile a expressément dit, à propos de la restauration souhaitée par les pères, qu’aucune innovation ne devait être faite qui ne fut vraiment exigée par l’utilité de l’Eglise ». Non ! Nous n’avons rien de tel avec Paul VI. Nous avons un « Novus Ordo Missae ». Rien de comparable. Alors puisque cette réforme liturgique se contre distingue de la tradition, je ne vois pas en quoi et comment elle pourrait être purement et simplement une « richesse » pour l’Eglise.
Le Novus Ordo Missae et le Missel romain S’il en est ainsi, je ne vois pas, non plus, en quoi et comment on peut encore parler pour le Novus Ordo Missae de « missel romain ».
La pensée de Mgr Gamber. Mgr Gamber, dans le chapitre « Tentative de solution » de son livre « La réforme liturgique en question » parle du « ritus romanus » et du « ritus modernus » qu’il distingue fortement. Ils ne peuvent se confondre. Il écrit : « Le ritus romanus et le ritus modernus devraient être tous deux considérés comme légitimes. Ils devront cependant être nettement distingués l’un de l’autre comme deux rites indépendants, et cela, de telle manière que le missel romain utilisé jusqu’ici, ainsi que les autres livres liturgiques (rituel et pontifical), soient à nouveau imprimés et autorisés sous leur forme préconciliaire. …La forme de la messe actuellement en vigueur ne pourrait plus passer pour le rite romain au sens strict mais pour un rite particulier ad experimentum. ….Bien des problèmes pourraient être résolus dans l’Eglise par la stricte séparation entre le rite romain et la nouvelle liturgie en langue vulgaire du ritus modernus et par la possibilité ainsi offerte aux fidèles d’utiliser les deux formes de messe. Mais surtout cela diminuerait le risque d’un schisme important, les légitimes réclamations d’innombrables catholiques - près de la moitié de ceux qui pratiquent encore – en faveur de la célébration traditionnelle de la liturgie étant satisfaites, sans que soit pour autant négligé le désir des autres d’avoir une messe « actuelle »…(p. 75-78).Mais de toute façon il faudrait que le nouveau rite soit amélioré par rapport à celui qui se pratique de nos jours…Il faut qu’à l’avenir le rite plus que millénaire de la messe soit conservé dans l’Eglise catholique romaine, pas seulement pour les prêtres et les laïcs âgés, incapables de s’adapter, mais comme forme primaire de la célébration de la messe. – (et non pas comme « la forme extraordinaire de l’unique rite romain » comme le demande le Cardinal Castrillon Hoyos) . Il faut qu’il redevienne la norme de la foi et le signe de l’unité des catholiques dans le monde entier, un pôle fixe pour un temps déboussolé et en perpétuel changement »(p. 95) Voilà qui est clairement dit.
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