Laurent Dandrieu, Rédacteur en chef adjoint Culture
Depuis le début de “l’affaire des excommunications”, je ne peux m’empêcher de penser qu’en cette polémique, le diable porte Pierre : à savoir que les déclarations scandaleuses de Mgr Williamson – peut-être faites avec l’intention de saborder le processus de réconciliation entre Rome et les lefebvristes, et en tout cas opportunément diffusées avec cette arrière-pensée – pourraient avoir pour conséquence paradoxale de le faciliter : certes Rome va être contrainte en la matière à plus de lenteur que prévu, le temps de laisser retomber l’agitation médiatique, mais enfin celle-ci affaiblit considérablement le “camp du refus” au sein de la Fraternité Saint-Pie X. Et lorsque le temps des négociations pratiques et des discussions doctrinales sera venu, les lefebvristes devraient s’en trouver beaucoup plus accommodants, tant cette affaire les place en position de faiblesse (il n’y a d’ailleurs qu’à voir le ton très humble des dernières prises de position de Mgr Fellay, ton auquel il ne nous avait pas toujours habitués). D’autant que d’autre part, ces déclarations intempestives de Mgr Williamson ont contraint les lefebvristes à des clarifications qui devraient contribuer à dissiper, à terme, les amalgames qui les ont longtemps empêchés d’être audibles. Impression confirmée mardi dernier, sur le plateau de la Chaine histoire où je participais à l’enregistrement d’un débat sur ce sujet organisé par Michel Field (visible sur internet à l’adresse suivante : histoire.fr). J’ai été surpris d’y constater, en effet, que l’hostilité ambiante vis-à-vis de la Fraternité Saint-Pie X y était bien moindre que ce à quoi je m’attendais. Comme si, par son extrêmisme, Mgr Williamson avait presque fait basculer le reste de la Fraternité, qui a rejeté ses propos et clairement condamné toute forme d’antisémitisme, dans le camp des gens “fréquentables”.
Comme quoi il faut toujours se méfier des coups tordus, dont les rebonds peuvent être forts différents de ce que l’on en espérait. |