Reportage de France 2 - |
(Télématin du 31/10/2006) Script de l'interview de l'envoyé spécial à Rome Gérard Grizbec, par le présentateur Thierry Beccaro Mise en ligne par le Forum Catholique |
THIERRY BECCARO Gérard, vous m’entendez ? GERARD GRIZBEC Oui bonjour Thierry, bonjour à tous ! THIERRY BECCARO Derrière vous, il y a le Vatican et le bruit court au Vatican, Gérard, il y aurait semble-t-il un retour en grâce de la messe en latin. Le Pape pourrait signer prochainement un décret qui irait dans ce sens. GERARD GRIZBEC Oui c’est vrai vous savez, ici, il y a toute une série de révélations dans la presse italienne en particulier. On nous dit que d’ici quelques semaines, peut-être d’ici quelques mois mais pas plus, le Pape pourrait revenir sur cette messe en latin. Cela veut dire revenir d’une certaine façon à la conception qu’a eu l’Eglise de Vatican II. Vous savez, Vatican II, ici, ça a été un concile il y a un peu plus de 40 ans entre 1962 et 1965, initié par le Pape Jean XXIII, poursuivi par le Pape Paul VI, ça a été une véritable révolution dans l’Eglise. On a rompu à la fois sur des vieilles idées antisémites qui ont poursuivi l’Eglise pendant plusieurs siècles, où le peuple juif était considéré comme ayant tué le Christ et étant un peuple déicide. On a rompu avec ça sur le fond, on a rompu aussi sur la forme, sur la liturgie, sur l’organisation même de la messe. La messe était en latin, eh bien la messe est devenue dans la langue du pays et en France c’est comme ça depuis un peu plus de 40 ans, la messe est dite en français. Et puis on a rompu aussi sur l’organisation même de cette messe puisque le prêtre avant était le dos aux fidèles, eh bien depuis Vatican II le prêtre est face aux fidèles, est avec les fidèles, plus proches des fidèles dans l’Eglise au moment de la messe. On ne sait pas exactement ce qu’il y aura dans ce texte qu’on attend de la part de Benoît XVI mais ce qui est vrai c’est que maintenant il y a tout un débat ici, il y a beaucoup de rumeurs et on est allé voir quelqu’un qui connaît bien tout cela, c’est un Suisse, c’est un Cardinal Suisse, le Cardinal Cottier. Il a été le théologien de Jean-Paul II, on est allé le voir pour lui demander justement ce que ça peut changer. Je vous propose de l’écouter. CARDINAL COTTIER Finalement le responsable dans chaque diocèse, c’est l’évêque. Alors si on permettait, comme certains l’ont dit à des groupes de laïques, d’une manière autonome par rapport à l’évêque de décider oui ou non la messe en latin, ça serait par rapport à la notion même de l’Eglise et de la centralité de l’Évêque, ça ne serait pas juste, oui. Mais je ne pense pas que ça se passera de cette façon-là. JOURNALISTE Est-ce qu’on peut dire, finalement, qu’on aura la messe à la carte ? CARDINAL COTTIER C’est surtout ce qu’il faut éviter parce qu’à ce moment là la liturgie c’est la prière de l’Eglise et l’Eglise est une communion, si j’ai la messe à la carte, je cherche mon intérêt personnel, c’est du subjectivisme, et c’est ça qu’il faut absolument éviter. Et puis pour quel motif on va demander la messe en latin ? Pour des motifs esthétiques, pour des motifs de réminiscence qui vont disparaître de plus en plus parce que les gens qui ont connu la messe de Pie V, ce sont des gens de ma génération. Nous sommes en voie d’extinction si je peux dire, enfin par rapport à cette terre. THIERRY BECCARO Alors, Gérard, autre bruit qui court juste derrière vous, il semblerait que le Pape opère un rapprochement avec le courant intégriste de l’Eglise qui, semble-t-il ferait grincer des dents ici en France. GERARD GRIZBEC Oui c’est vrai parce qu’en réalité c’est un peu la même question. La messe en latin est maintenant remise au goût du jour alors même que les traditionalistes, toute une partie de l’Eglise qui était partie avec Monseigneur Lefebvre en 1970 qui a été excommunié lui et tout son courant de l’Eglise en 1988 par Jean-Paul II, eh bien maintenant il y a un rapprochement avec ces traditionalistes alors évidemment, eux veulent revenir à l’avant Vatican II et maintenant on risque de se retrouver dans une situation où on aura les deux messes, c’est ce que nous disait tout à l’heure le Cardinal Cottier, c'est-à-dire qu’on ira à la messe à la carte. Si vous êtes plutôt proche du courant traditionaliste, eh bien vous irez à la messe en latin, dans cette église au bout de la rue. Et puis si vous êtes plutôt libéral, eh bien vous irez plutôt à la messe en français de l’autre côté de la rue, donc le risque pour l’Eglise et en particulier en France parce que ce courant traditionaliste existe surtout en France, eh bien le risque c’est une division de l’Eglise d’autant que tout ce courant traditionaliste est très lié à l’extrême droite française et donc évidemment on rentre en campagne électorale en France au printemps prochain, autant dire que pour l’Eglise française, on voit d’un œil très inquiet cette décision de Benoît XVI et on a peur que ça développe finalement une crise au sein de l’Eglise. THIERRY BECCARO Merci infiniment Gérard et à très très bientôt. |
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