A trois semaines de la venue en France de Benoit XVI voici notre document d'Archives n° 12 : le Dossier remis en mains propres au Cardinal Ratzinger en avril 1999 par les membres du bureau d'Oremus. |
22 août 2008 - lettre 137 de paixliturgique.com |
A trois semaines de la venue en France de Benoit XVI voici notre document d'Archives n° 12 : le Dossier remis en mains propres au Cardinal Ratzinger en avril 1999 par les membres du bureau d'Oremus. Lettre 137 - 22 août 2008 En avril 1999, des fidèles de l'Association Oremus ont eu l'immense privilège de rencontrer une nouvelle fois le Cardinal Josef Ratzinger - alors Préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi - dans le cadre d'un entretien privé. Lors de cette rencontre lui furent remis et commenté un dossier de synthèse des activités d' Oremus, une synthèse de la situation des fidèles français attachés à la messe traditionnelle désireux de vivre en parfaite communion avec leurs évêques et un résumé de la situation, déjà catastrophique en 1999, des fidèles du diocèse de Nanterre attachés à la liturgie traditionnelle . A l'issue de cette rencontre, le Cardinal Ratzinger fit part aux membres de cette délégation de tous ses encouragements et les invita à persévérer dans leurs demandes d'application du Motu Proprio - à l'époque Ecclesia Dei de 1988 -auprès de leurs évêques. Voici le document : DOSSIER REMIS A SON EMINENCE LE CARDINAL JOSEF RATZINGER I -PRESENTATION DE L'ASSOCIATION OREMUS ET DE LA SITUATION DE LA LITURGIE TRADITIONELLE EN FRANCE 1 – La situation liturgique en France après 1988 Il n’est pas nécessaire de rappeler dans les détails que depuis les années 60 s’est développé en France un profond malaise à la suite de la mise en place des réformes liturgiques successives. Celles-ci aboutirent au début des années 70 à une véritable fronde dont Monseigneur Marcel Lefebvre devint rapidement le porte-drapeau. Il est à noter que si le nombre de ceux qui s’engagèrent d’une manière militante dans ce qui devint rapidement une «rébellion» contre les différentes réformes fut relativement réduit, il est clair cependant qu’ils exprimaient publiquement le point de vue d’un très grand nombre de catholiques français qui ne comprenaient plus les orientations de l’Eglise notamment en matière liturgique. Il est probable qu’il faut chercher dans cette grave crise l’une des explications à la baisse extrêmement importante de la pratique religieuse qui s’est produite en France depuis les années 60. Entre 1974 et 1988, la situation devint tout à fait dramatique car un nombre croissant de fidèles français se sentirent rejetés de leur Eglise. Il s’en est suivi des durcissements spirituels et intellectuels qui mettront de longues années à disparaître. Plus grave encore, au cours de cette période, eu égard à la difficulté de la situation, de nombreux fidèles se sont habitués à ne plus avoir de liens réguliers avec leurs autorités ecclésiastiques légitimes et pire encore, à voir dans celles-ci des autorités malveillantes à leur endroit, ce qui bien sûr ne pouvait pas générer un authentique climat de charité fraternelle. Après ces années extrêmement difficiles, la publication en 1988 du motu proprio Ecclesia Dei adflicta fut considéré par beaucoup de catholiques français comme la preuve évidente du désir des autorités de l’Eglise de dissiper le conflit et de revenir à la paix. Dans plusieurs diocèses les évêques et leur clergé ont agi effectivement avec bienveillance, appliquant avec générosité ces mesures qui permettaient à des catholiques de plus en plus à l’écart de l’institution ecclésiastique de retrouver leur place dans une communauté à nouveau pleinement catholique. Dans la plupart des diocèses où ces décisions furent prises, les bienfaits se sont petit à petit concrétisés par un rétablissement du dialogue et un retour — même si elle n’est pas encore parfaite — à la paix. Malheureusement, dans de très nombreux diocèses français les fidèles, malgré leur demande souvent réitérée, ont conservé l’impression que leurs autorités ecclésiastiques légitimes ne souhaitaient pas cette réconciliation, pire encore, qu’elles semblaient préférer les laisser continuer à fréquenter des communautés de plus en plus étrangères à l’Eglise plutôt que de les voir réintégrer leurs communautés diocésaines. Dans ce contexte, de nombreux laïcs familiers du milieu attaché à la liturgie traditionnelle prirent conscience que la situation devenait extrêmement critique, notamment en raison de la difficulté à instaurer un authentique dialogue, indispensable à la réconciliation, et constatèrent même bien souvent que tout dialogue ou contact était impossible. Il est donc apparu à un groupe de laïcs catholiques profondément engagés dans la vie militante qu’il était urgent d’agir afin que se restaure un dialogue nécessaire pour que cesse le scandale du développement, dans l’indifférence générale, d’un schisme qui concerne non seulement les fidèles qui ont préféré continuer de suivre les prêtres de la Fraternité Saint-Pie X, mais aussi de nombreux autres laïcs qui, tout en souhaitant rester attachés à l’Eglise, s’en éloignent dans les faits bien souvent ne serait-ce que parce qu’ils n’ont plus d’occasion de la rencontrer et de fréquenter ses autorités légitimes et son clergé. C’est dans ce contexte que fut décidée au début des annés 90 la création de l’association Oremus. 2 - L’association Oremus L’association Oremus a été créée en 1993 par un groupe d’une vingtaine de familles catholiques qui militaient depuis de nombreuses années à la tête de différents mouvements catholiques appartenant à la sphère traditionaliste. Ces laïcs avaient établi petit à petit le constat suivant : — là où les autorités diocésaines agissaient avec bienveillance en appliquant généreusement le motu proprio, les liens de la communion ecclésiale se restauraient et la paix se rétablissait ; — dans les diocèses où les privilèges du motu proprio n’étaient pas octroyés s’opérait un durcissement des esprits, même chez les fidèles les plus attachés à l’Eglise et les plus réservés face aux positions de la Fraternité Saint-Pie X, au point qu’en de nombreux endroits ces fidèles, tout en le regrettant, en sont revenus à une pratique religieuse dans les prieurés de cette fraternité sacerdotale ; — il n’existait pratiquement pas en France ,de véritable dialogue entre les autorités épiscopales et les fidèles désireux de la réconciliation qui restaient attachés à la liturgie traditionnelle ; — les ecclésiastiques attachés à la liturgie traditionnelle n’étaient pas toujours les mieux placés, eu égard à leur devoir naturel de réserve, pour tenter de rétablir des liens avec des autorités locales qui n’étaient pas toujours très favorables à ce rétablissement. C’est dans ce contexte que fut décidée, en janvier 1993 , la création de l’association Oremus 3 - Objectifs d'Oremus L’association Oremus s’est fixé pour objectif de concourir à la restauration, partout où il est absent, d’un dialogue entre les fidèles attachés à la liturgie traditionnelle et leurs autorités légitimes. L’association Oremus a conscience que la restauration de ce dialogue est une entreprise difficile car bien souvent des traditionalistes eux-mêmes ont pu être la cause de sa rupture par leurs attitudes ou leurs propos. Cependant il nous semble que dans la perspective d’un retour à l’unité et à la sérénité tout doit être entrepris pour que soit restauré un dialogue qui est la condition élémentaire d’un rétablissement de la paix dans les diocèses. L’association Oremus veut affirmer clairement que son vœu n’est pas de voir appliquer un droit absolu ni même, comme quelques-uns ont pu le craindre, que la liturgie traditionnelle remplace les formes liturgiques actuelles. L’association Oremus souhaite seulement que soit octroyé par les autorités légitimes de tous les diocèses de France le privilège de la célébration de la liturgie traditionnelle, de sorte que les catholiques attachés à celle-ci puissent vivre à son rythme sans avoir à poursuivre leurs relations avec les prieurés de la Fraternité Saint-Pie X et en étant assurés de la bienveillance de leur pasteur et de leur communion publique avec lui. L’association Oremus qui ne désire pas agir au niveau de chaque diocèse espère seulement pouvoir concourir en dehors de toute polémique à un rétablissement indispensable de la confiance tant de la part des fidèles catholiques encore inquiets des attitudes de leur hiérarchie que des autorités légitimes. II - LA SITUATION EN FRANCE EN 1999 Pour la clarté de ce dossier, il nous a semblé utile de présenter notre vision de la situation actuelle des fidèles de France attachés à la liturgie traditionnelle. Pour y parvenir nous nous proposons de développer trois aspects principaux : 1 - Qui sont les fidèles attachés en France à la liturgie traditionnelle ? Du fait de leur grand nombre, les catholiques français attachés à la liturgie traditionnelle ne constituent pas un ensemble homogène et monolithique mais expriment plutôt toute une gamme d’attitudes et de sensibilités. En simplifiant d’une manière schématique, l’on pourrait distinguer parmi ces fidèles les quatre catégories suivantes : a) les fidèles qui, pour des raisons diverses, ont refusé, généralement à cause de leurs outrances, les réformes liturgiques qui se sont mises en place en France depuis les années 60. Ces fidèles sont aujourd’hui bien évidemment les plus âgés et ne constituent pas une proportion importante de l’ensemble des catholiques français attachés à la liturgie traditionnelle ; b) les fidèles qui ont suivi, à partir de 1970, les associations et mouvements proches de Monseigneur Lefebvre. Il est à noter que de nombreuses personnes ont renoué avec leur foi catholique à l’occasion de tous ces événements. C’est ainsi qu’un grand nombre de catholiques français sont toujours attachés à la foi catholique à travers sa liturgie traditionnelle. Cette catégorie beaucoup plus importante numériquement que la précédente regroupe des fidèles de tous âges et de toutes conditions ; c) aux deux catégories précédentes, il faut ajouter les familles — généralement nombreuses — qui se sont développées au sein du mouvement traditionaliste et qui sont restées le plus souvent attachées fidèlement à la liturgie traditionnelle. Cette catégorie composée essentiellement de jeunes de moins de trente ans est de loin la plus importante. Elle est donc constituée de jeunes hommes et de jeunes filles qui, bien qu’ils soient nés pour la plupart après les réformes liturgiques, restent très attachés aux valeurs de la liturgie traditionnelle, bien que cela ne soit pas le fruit d’une quelconque nostalgie ; d) enfin, il est indéniable que se développe en France un fort mouvement, notamment parmi les jeunes, d’attraction vers les formes traditionnelles de la liturgie. Cette attraction se fonde d’une manière positive sur les valeurs du silence, du sacré, de l’adoration et de la piété. Cette catégorie de fidèles se recrute le plus souvent chez des convertis qui redécouvrent à travers cette liturgie une foi qu’ils avaient perdue ou dont ils s’étaient séparés depuis longtemps. Il est difficile de mesurer avec précision le nombre total des fidèles français qui sont aujourd’hui attachés à la liturgie traditionnelle. Cependant, en se fondant sur un certain nombre d’éléments (adhérents à des associations ou des mouvements attachés à la liturgie traditionnelle, abonnés à des revues, participants à des pèlerinages, fidèles de chapelles ou de lieux de culte, signataires de pétitions en faveur de la messe traditionnelle...), il est légitime d’estimer que le nombre des familles attachées à la liturgie traditionnelle est supérieur à 150 000, ce qui implique que 500 000 personnes (hommes, femmes et enfants) au moins sont aujourd’hui en France fortement attachées à cette liturgie. 2 - Situation actuelle des fidèles attachés à la liturgie traditionnelle Les fidèles français attachés à la liturgie traditionnelle se divisent actuellement en trois groupes que l’on pourrait définir de la manière suivante : a) des fidèles qui sont restés encore aujourd’hui attachés à la Fraternité sacerdotale Saint-Pie X et à ses satellites. Il est à noter que ces fidèles sont pris en main par une structure très développée, animée par plus de cent prêtres qui quadrillent un réseau de plusieurs centaines d’associations et de prieurés. Au sein de cette communauté la prédication sacerdotale exhorte en permanence à la défiance envers les évêques diocésains et le Magistère. Ainsi sont critiqués publiquement le nouveau catéchisme, l’enclyclique Splendor veritatis ou l’encyclique Evangelium vitae. Pour ces fidèles, la défense de la messe traditionnelle constitue un véritable «étendard» qui réunit tous ceux qui s’opposent aux évêques et aux autorités romaines. Il est clair que les prises de position de ces groupements et associations sont sans doute largement à l’origine de l’attitude de défiance de nombreux évêques qui peuvent craindre qu’en octroyant le privilège de la messe traditionnelle, c’est en fait ce courant hostile à la hiérarchie et au Magistère authentique qu’ils seraient amenés à soutenir. b) des fidèles qui, attachés à la liturgie traditionnelle, souhaitent fortement suivre l’Eglise et leurs évêques. Ils constituent un groupe très nombreux de fidèles qui sont aujourd’hui attachés à la liturgie traditionnelle. Hier comme aujourd’hui, ils sont particulièrement liés au Siège de Pierre et se sont manifestés en grand nombre lors des différentes venues du pape en France. Aujourd’hui encore ils se sentent particulièrement mobilisés pour l’organisation et l’animation des journées mondiales de la jeunesse qui se dérouleront à Paris en août 1997. Pour ces hommes et femmes, leur attachement à la liturgie traditionnelle est parfaitement compatible avec leur fidélité aux autorités diocésaines et leur insertion dans la communauté ecclésiale. Cependant, ces fidèles ont souvent l’impression d’être «les mal aimés» d’un clergé qui se méfie d’eux et qui, dans de nombreux diocèses, refuse de les reconnaître comme pleinement catholiques et n’accède pas à leur demande de se voir accorder le privilège de la liturgie traditionnelle. Le résultat fâcheux de cette situation peut être qu’ici ou là certains d’entre eux, par obligation pratique, soient tentés de conserver des liens de liturgie avec la Fraternité Saint-Pie X et soient donc ainsi soumis à une prédication qui n’est plus bienveillante envers l’Eglise. Une autre conséquence tout aussi dramatique est qu’un certain nombre de ces fidèles s’estimant abandonnés par leurs pasteurs finissent par cesser toute pratique religieuse. c) les fidèles hésitants. A côté des deux groupes de fidèles que nous avons présentés précédemment, nous pouvons distinguer un nombre extrêmement important de catholiques français qui ont cessé toute pratique religieuse et qui sont restés attachés aux formes traditionnelles de la liturgie, mais qui ne souhaitent pas suivre la Fraternité Saint-Pie X dans sa dérive schismatique tout en ne pouvant bénéficier d’une liturgie conforme à leurs attentes spirituelles ; de ce fait, ils se replient de plus en plus nombreux en dehors de la communauté ecclésiale. 3 - La célébration de la liturgie traditionnelle dans les diocèses de France La France métropolitaine est aujourd’hui divisée en 93 diocèses. Leur attitude vis-à-vis de la célébration de la liturgie traditionnelle peut varier considérablement pour chacun d’entre eux. Ainsi pouvons-nous distinguer assez clairement trois catégories de diocèses, eu égard à cette question. a) les diocèses dans lesquels est célébrée régulièrement pour les fidèles la liturgie traditionnelle. Ces diocèses, heureusement de plus en plus nombreux, sont encore minoritaires puisqu’ils ne constituent encore qu’un groupe de 45 diocèses. Dans ceux-ci les fidèles peuvent vivre au rythme de la liturgie traditionnelle, dans un cadre approprié, en communion avec leur évêque diocésain. Mieux encore, dans certains de ces diocèses la bienveillance de l’évêque a permis la mise en place de plusieurs lieux de culte où est célébrée régulièrement la liturgie traditionnelle, permettant ainsi à un plus grand nombre de fidèles de bénéficier de ce privilège. Dans tous ces diocèses l’on constate d’énormes progrès vers ce que l’on pourrait appeler la «réconciliation» entre les différentes composantes de l’Eglise locale. De plus, les fidèles qui restent attachés à la liturgie traditionnelle peuvent vivre leur foi au rythme de celle-ci sans se trouver dans «l’obligation pratique» de continuer à suivre la vie liturgique des prieurés de la Fraternité Saint-Pie X. Enfin, il est évident que cette situation est particulièrement utile à la décrispation des esprits et concourt très efficacement à rétablir d’authentiques liens de charité fraternelle entre les fidèles attachés à la liturgie traditionnelle, le clergé et leurs évêques. b) les diocèses dans lesquels la liturgie traditionnelle est célébrée d’une manière occasionnelle ou particulière. Il s’agit des 11 diocèses français dans lesquels la liturgie traditionnelle n’est célébrée que d’une manière occasionnelle (par exemple un dimanche sur deux) ou bien dans des conditions qui ne sont pas propices à l’instauration d’une authentique vie chrétienne pour des familles de fidèles (par exemple les diocèses au sein desquels la liturgie traditionnelle n’est célébrée que dans des communautés monastiques). Il est à noter que, dans ces diocèses, la situation des fidèles attachés à la liturgie traditionnelle est particulièrement délicate puisque soit il ne leur est pas possible d’assister régulièrement à celle-ci, soit ils doivent, pour y participer, se mettre au rythme d’une communauté monastique ou religieuse qui n’est pas celui de familles et particulièrement d’enfants, soit enfin ils sont obligés de se rendre à la messe dans un autre diocèse, c’est-à-dire le plus souvent à une distance assez éloignée, ce qui amène malheureusement beaucoup d’entre eux à cesser toute pratique religieuse. La situation de la liturgie traditionnelle dans ces diocèses engendre chez beaucoup de fidèles le sentiment d’être exclu de la communauté ecclésiale et amplifie le sentiment de doute d’une réelle bienveillance des autorités religieuses légitimes à leur endroit, confortant ainsi un sentiment qui malheureusement s’est développé au cours des vingt dernières années chez beaucoup de fidèles. De fait, l’on constate que dans la plupart de ces diocèses les fidèles, bien souvent contre leur gré, finissent par préférer la fréquentation d’un prieuré de la Fraternité Saint-Pie X à celle de lieux de culte «officiels», mais où la liturgie traditionnelle est célébrée d’une manière trop intermittente. c) les diocèses dans lesquels la liturgie traditionnelle n’est pas célébrée en accord avec l’ordinaire du lieu. Cette situation se retrove dans 37 diocése français.La réflexion qui viendrait immédiatement à l’esprit serait de croire que la liturgie traditionnelle n’est pas célébrée dans ces diocèses car cette demande n’aurait pas été formulée par des fidèles du diocèse ; de ce fait, l’autorité diocésaine, estimant la paix liturgique établie, n’aurait pas jugé nécessaire d’accorder ce privilège. Cette remarque, toute naturelle qu’elle soit, est le plus souvent malheureusement inexacte. En effet, trois éléments viennent nous démontrer d’une manière assez claire que telle n’est pas la réalité. c1-la présence de prieurés de la Fraternité Saint-Pie X La présence de multiples prieurés de la Fraternité Saint-Pie X dans ces diocèses révèle on ne peut plus explicitement que des fidèles attachés à la liturgie traditionnelle y sont nombreux. L’on pourra bien sûr objecter que si ces fidèles ont préféré suivre la Fraternité Saint-Pie X plutôt que leurs pasteurs légitimes, cela n’est plus la faute de l’Eglise. Cependant ne pouvons-nous pas nous interroger pour savoir si ces fidèles ont eu véritablement le choix entre rester attachés à l’Eglise ou continuer à suivre les prêtres de la Fraternité Saint-Pie X ? Si l’on se souvient que le motu proprio a été promulgué pour permettre aux fidèles attachés à la liturgie traditionnelle de rester dans l’Eglise, n’était-il pas nécessaire de se demander si cette opportunité leur a été réellement offerte ? c2-les demandes des fidèles L’on pourrait croire que partout où des fidèles ont exprimé, notamment en 1988, le désir de voir célébrer régulièrement la liturgie traditionnelle dans leur diocèse, ce privilège leur a été généreusement octroyé. En fait, cela n’est pas le cas et l’on pourrait indiquer plus de quinze diocèses où des demandes, quelquefois réitérées à plusieurs reprises, n’ont obtenu aucun résultat, l’évêque du lieu se refusant absolument à accorder ce privilège. Ces refus très nombreux ont eu jusqu’à ce jour deux conséquences extrêmement fâcheuses : — d’une part la conviction pour beaucoup de fidèles que certains évêques ne souhaitaient pas leur «retour» dans l’Eglise et qu’en définitive beaucoup de clercs préféraient les voir s’éloigner de l’Eglise universelle ; — d’autre part cette attitude a eu pour conséquence que de nombreux groupes de fidèles qui n’avaient pas encore entrepris de démarches auprès de leurs évêques ont jugé — injustement sans doute mais c’est un fait que l’on ne peut nier — qu’il n’était pas nécessaire de faire des demandes qui n’aboutiraient à rien... Cette situation a donc engendré trop souvent des blocages qui ont freiné voire même quelquefois interrompu le mouvement de réconciliation mis en œuvre à partir de 1988, souvent sous le prétexte étonnant que le motu proprio n’aurait été accordé que pour ceux qui auraient décidé de quitter la communauté de Mgr Lefebvre en 1988 et qu’il ne serait plus applicable à ceux qui, très nombreux, font ce choix quelques mois ou quelques années après. Rappelons néanmoins également que beaucoup, après avoir quitté la communauté de Mgr Lefebvre, n’ont malheureusement toujours pas pu obtenir la célébration de cette liturgie dans leur diocèse. c3 -l’identification des fidèles Nous évoquions précédemment le fait que nous disposions aujourd’hui de nombreux outils statistiques et informatiques qui nous permettent de connaître avec une certaine précision, pour chacun des diocèses de France, le nombre de familles qui souhaiteraient voir célébrer régulièrement la liturgie traditionnelle dans leur diocèse. Or, ces statistiques sont extrêmement «parlantes» : dans la quasi-totalité des diocèses desquels la liturgie traditionnelle est absente ou dans lesquels elle est célébrée d’une manière irrégulière, le nombre des fidèles qui désireraient que celle-ci soit célébrée régulièrement est important. A titre d’exemple, l’on pourrait citer le diocèse de Lille pour lequel ont été dénombrées plus de 1 500 familles (c’est-à-dire au moins 6 000 fidèles) favorables à la liturgie traditionnelle, alors que celle-ci n’y est pas célébrée. Nous pourrions citer encore le diocèse de Coutances dans lequel plus de 400 familles se sont exprimées en faveur de la messe traditionnelle et où celle-ci n’est pas célébrée en accord avec l’évêque du diocèse. L’on comprend pourquoi la Fraternité Saint-Pie X a installé, avec succès, trois lieux de culte dans ce diocèse depuis un an. Un autre exemple est fourni par le diocèse de Nanterre en banlieue ouest de Paris. Dans ce diocèse plus de 4 000 familles ont exprimé leur désir de voir célébrer la messe traditionnelle. Cependant, malgré de multiples démarches, celle-ci n’y est toujours pas célébrée. III - CONCLUSIONS Nous souhaiterions exprimer en conclusion les vœux que nous formulons pour l’avenir : — il est de notre devoir d’œuvrer autant que faire se peut pour que cesse une dérive schismatisante et d’exclusion dont les conséquences seraient dramatiques pour l’Eglise de France et un scandale pour notre foi catholique ; — pour éviter ce drame nous ne revendiquons aucun droit mais implorons la générosité et la bienveillance des évêques de France à qui nous demandons humblement qu’ils acceptent d’appliquer, ne serait-ce qu’en un lieu par diocèse, le privilège accordé par le motu proprio Ecclesia Dei adflicta, démontrant ainsi la bienveillance des pasteurs à des fidèles «traditionalistes» souvent encore désorientés, privant ainsi la Fraternité Saint-Pie X de ses principaux arguments ; — il est vrai cependant qu’une réconciliation est toujours lente à se mettre en œuvre et que c’est au cours des années à venir que nous pourrons constater les bienfaits ecclésiaux de l’attitude bienveillante des pasteurs. IV - NOTE DE SYNTHESE — Plus de trente ans après le concile Vatican II et la mise en place des différentes réformes, la question de la liturgie n’est pas encore réglée en France où de nombreux fidèles continuent à rester attachés aux formes anciennes de la liturgie ; — Le maintien de cette pluralité liturgique ne se déroule pas malheureusement dans la paix et l’unité, mais dans une situation encore polémique qu’animent de vives tensions, démontrant que les plaies ouvertes il y a trente ans ne sont pas encore refermées ; — L’octroi par l’Eglise du motu proprio Ecclesia Dei adflicta a dans beaucoup d’endroits largement contribué à la réconciliation ; malheureusement trop souvent les situations locales sont restées figées, créant un contexte extrêmement dangereux par le fait que celles-ci accentuent le fossé entre les catholiques et favorisent une dérive schismatisante, constituant un authentique scandale pour notre foi en l’Eglise, Une, Sainte et Catholique; — Pour tenter de mettre fin à ce drame, il est nécessaire que soit rétabli entre les autorités légitimes et les fidèles attachés à la liturgie traditionnelle un dialogue bienveillant, authentique et fraternel ; — Enfin, s’il n’est pas légitime que des fidèles souvent un peu maladroits réclament de leur pasteur l’application d’un droit en leur faveur, nous implorons nos évêques d’œuvrer avec bienveillance et magnanimité pour qu’ils octroient au moins un lieu de célébration régulière de la liturgie traditionnelle dans chacun de leurs diocèses, permettant ainsi de démontrer aux catholiques traditionnels la bienveillance de l’Eglise et le caractère illégitime et dangereux de continuer à suivre les positions religieuses et liturgiques de la Fraternité Saint-Pie X. Ils permettront ainsi la restauration d’authentiques liens de charité dans une Eglise où la diversité est une richesse et dont la bienveillance pour ses enfants l’emporte sur toute notion d’exclusion partisane. V - UN EXEMPLE DE SITUATION DIFFICILE : LE DIOCESE DE NANTERRE Le diocèse de Nanterre se situe à la périphérie sud-ouest de Paris. C’est un diocèse essentiellement urbain dont la population est importante (environ 1 500 000 habitants). Dans ce diocèse, les familles attachées à la liturgie traditionnelle sont très nombreuses. Par exemple, si l’on consulte la supplique au Saint-Père qui a été initiée par Dom Gérard, père-abbé de l’abbaye du Barroux, l’on pourra constater que plus de 2 000 familles de ce diocèse ont fait connaître leur désir d’y voir célébrer régulièrement la liturgie traditionnelle. Parallèlement, si l’on considère attentivement le nombre des adhérents aux mouvements locaux favorables à cette liturgie, les enfants scolarisés dans des écoles favorables à la liturgie traditionnelle, et le nombre des abonnés à des revues défendant la liturgie traditionnelle, l’on peut estimer que ce sont au moins 4 000 familles, c’est-à-dire au moins 8 000 personnes, qui se sont exprimées explicitement en faveur de la liturgie traditionnelle. Dès 1986 puis en 1988, un Groupe de fidéles a sollicité de l’évêque diocésain l’octroi dans ce diocèse du privilège accordé par l'indult puis par le motu proprio Ecclesia Dei adflicta. Ces rencontres n’ont abouti à aucun résultat. Quelques années plus tard, succesivement trois groupes de demandeurs representant chaque fois de 60 à 80 familles du diocese, avaient entrepris des démarches semblables qui n’obtinrent aucun résultat ... Depuis bientôt un an, deux jeunes femmes, Christine de Cacqueray et Irène de Lestang, ont tenté de renouveler un dialogue avec leur évêque en sollicitant de sa bienveillance une audience. Près d’un an après leurs premières démarches, aucune audience ne leur a été accordée et la situation est toujours bloquée. Si aucune rencontre n’est possible, comment ces fidèles peuvent-ils s’adresser à leur pasteur légitime ? Quelles objections sont formulées par le clergé du diocèse de Nanterre pour faire perdurer une situation d’exclusion ? a) les fidèles du diocèse attachés à la liturgie traditionnelle sont dispersés, il ne serait donc pas «commode» de trouver un lieu qui permettrait de les rassembler ; b) il serait préférable que ces fidèles fréquentent des lieux de cultes traditionnels soit dans les diocèses voisins de Paris ou de Versailles puisque des lieux existent à moins de 50 km ; c) le motu proprio Ecclesia Dei afflicta ne concernerait pas des fidèles qui n’appartiendraient pas à la Fraternité Saint-Pie X aujourd’hui ou même qui l’auraient quittée en 1988. Que répondre à ces objections ? a) s’il est vrai que les fidèles du diocèse de Nanterre attachés à la liturgie traditionnelle sont dispersés, un noyau important (plusieurs centaines de familles) est localisé dans un périmètre très circonscrit (Neuilly - Boulogne) ; b) plus encore, les fidèles du diocèse de Nanterre attachés à la liturgie traditionnelle souhaiteraient pouvoir bénéficier d’un lieu de culte qui démontrerait au vu et au su de tous la bienveillance de leur évêque et la réalité de leur communion avec lui ; c) enfin, même si le motu proprio a été promulgué en 1988 en faveur des fidèles qui désiraient quitter le groupe de ceux qui avaient suivi Mgr Lefebvre, il est clair qu’ils sont encore très nombreux aujourd’hui à fréquenter la Fraternité Saint-Pie X et qu’il nous est difficile de tenter de les orienter vers une authentique réconciliation si aucune structure n’est en mesure de les accueillir et de leur démontrer clairement la bienveillance de leur ordinaire à leur égard. De plus, de nombreux fidèles ayant quitté la Fraternité Saint-Pie X en 1988 n’ont toujours pas bénéficié de l’application «large et généreuse du motu proprio» voulue par le Saint-Père. REFLEXIONS DE PAIX LITURGIQUE 1- Ce dossier nous montre que celui qui est devenu le Pape Benoit XVI a toujours été très au courant de la situation réelle des catholiques français qui désiraient vivre leur foi catholique au rythme de la liturgie tridentine. Certes, il est de bon ton, chez les ennemis de la Paix qui combattent l'application pratique du Motu Proprio de dire encore aujourd'hui "j'ai le soutien du Nonce, j'ai le soutien du Pape..." nous savons que cela n'est pas exact et que le Saint Père est très bien informé au sujet de l'apartheid liturgique que la plupart des évêques de France ont mis en place ces trente dernières années. 2 - Certains comme nous serons " étonnés" de constater que la situation - Toujours malheureusement actuelle - dans le diocèse de Nanterre est " ancienne", ce qui nous permet de dire que dans ce diocèse, comme nous le disions à propos de celui de Reims dans notre lettre " 133" le " blocage" n'est pas du aux actions des fidéles ou de groupes agissants en faveur de la Paix Liturgique mais bien à une position idéologique d'ostracisme et l'exclusion aux racines profondes et anciennes comme l'a excellemment démontré l'abbé Claude Barthe dans son dossier sur les nominations épiscopales ( Lettres de Paix liturgique n° 122,123,124 et 125 consultables comme toutes nos lettres sur www.paixliturgique.com 3 - Nous espérons qu'à l'occasion de sa venue en France, le Saint Père œuvre avec bonté pour apaiser ce regrettable dossier et permette aux catholiques qui le souhaitent de participer naturellement et activement à la vie de leurs paroisses et de leurs diocèses comme le prévoit le Motu Proprio du 7 juillet 2007. |
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