30 juin 2007





Messe en latin : les évêques de France au pied du mur
30 juin 2007 - Sophie de Ravinel - Le Figaro
Alors que Benoît XVI doit rendre public cette semaine le motu proprio libéralisant le rite de saint Pie V, les évêques de France prennent acte de la volonté du Pape, mais restent circonspects. « NOUS ne souhaitions pas ce document [...] Mais nous accepterons ce que le Pape demande et ferons de notre mieux pour aller dans le sens qu'il demande. » Tenus sur les ondes de Radio Vatican par l'archevêque de Toulouse et président de la commission liturgique, Mgr Robert Le Gall, ces propos illustrent la position des évêques français. Après avoir clairement manifesté leur réticence face à la libéralisation de l'ancien rite en latin ces derniers mois, ils sont désormais placés au pied du mur.
La publication du motu proprio est une question de jours, les évêques devant recevoir le document dans leur boîte aux lettres -avec un message d'explication de Benoît XVI - avant qu'il ne soit rendu public. Le climat, pourtant, est tendu. Et l'on s'attend à une levée de boucliers, au moins de la part de cette partie du clergé et des laïcs qui ont « fait » l'Église dans les années 1970. « Je regretterais que l'Église apparaisse comme un espace de vaines polémiques, anticipe avec prudence Mgr Benoît Rivière, évêque d'Autun. Loin d'un esprit de querelle, il nous faut comprendre la volonté de Benoît XVI qui souhaite tendre la main aux catholiques en rupture ou au bord de la rupture. » Inutile donc de se battre « sur des questions de ritualisme», ajoute le prélat. Mais pas question non plus de transiger à l'avenir « sur la communion nécessaire avec l'Église et son magistère ». Et donc avec les enseignements du concile Vatican II, dont une partie est mise en cause par les traditionalistes et les lefebvristes, qu'il s'agisse de la liberté religieuse, de l'œcuménisme ou de la collégialité.
«Fortes tensions»
« Je n'ai pas l'habitude de crier avant d'avoir mal ! » affirme pour sa part Mgr Michel Dubost qui, comme son homologue d'Autun, préfère pour le moment mettre en avant la volonté romaine de réconciliation et d'unité, tout en restant « très attentif» à ce que le texte va contenir. L'approche de l'évêque d'Évry se veut a priori bienveillante. Il comprend - même si le latin n'est pas vraiment sa tasse de thé - que « dans une société mondialisée, certaines personnes puissent avoir besoin de rites pour marquer leur identité » et que « l'Église est appelée à réfléchir sur cette dimension rituelle».
Mgr Dubost, lui aussi, va s'efforcer de recevoir le texte « du mieux possible », mais refuse pour l'instant de s'exprimer sur le point susceptible de créer des remous chez les évêques s'il était confirmé. Selon nos informations, il devrait revenir aux curés d'accepter, ou non, la célébration des messes tridentines dans leur paroisse, selon des modalités préalablement définies par l'évêque qui disposera d'un délai pour mettre en place le contenu du motu proprio dans son diocèse.
Moine de l'abbaye Saint-Martin de Ligugé, auteur d'un ouvrage sur le sens de ces deux liturgies (1) et enseignant en liturgie au sein de l'Institut catholique de Paris, le père François Cassingena-Trévedy redoute, sans mettre en cause la valeur de l'ancienne liturgie, l'avènement d'une logique de service « à la carte » qui serait « paradoxalement très moderne».
SOPHIE DE RAVINEL

(1)Te igitur, Editions Ad Solem