SOURCE - Joseph de Belfont - AFS - 13 mai 2012
Mystêres et vérités cachées du troisième secret de Fatima
Monsieur,
Dans un récent numéro d'Aletheia (n° 183 du 1er avril 2012), vous avez fait une critique sévère de mon livre Mystères et vérités cachées du troisième secret. Je suis surpris par votre analyse. Vous tirez une conclusion catégorique en vous appuyant sur des éléments secondaires, dont, de plus, la plupart sont invérifiés. La seule objection recevable concerne une erreur matérielle à propos du livre d'Antonio Socci. En effet, la lettre de remerciement du pape à cet auteur n'a pas été mise en préface du livre comme je l'ai cru un moment suite à une information incomplète. J'explique en annexe comment est arrivée cette erreur.
Mais a part cela, toutes vos objections me paraissent sans fondement. Voici brièvement les réponses que je peux apporter aux plus importantes. Vous trouverez en annexe une réponse plus détaillée pour chacune d'elles.
Vous affirmez que mon livre est émaillé d'outrances. Mais vous n'en citez qu'une. Et il se trouve que ce n'est pas une outrance, mais le constat d'un simple fait, reconnu par de nombreux auteurs.
Vous me reprochez d'avoir dit que le mot "enfer" ne figure jamais dans les documents du concile Vatican II, car, selon vous, il l'a été dans Lumen Gentium. J'ai vérifié : le mot "enfer" ne figure ni dans Lumen Gentium, ni dans aucun autre document conciliaire, dans la version française comme dans la version latine. Si vous n'êtes pas de cet avis, pouvez-vous donner la référence précise du paragraphe de Lumen Gentium contenant "enfer" ou "infernus" ?
De la même façon, je maintiens que les mots "rosaire" et "chapelet" ne se trouvent pas dans les actes du concile. Vous contestez cette affirmation en disant que Lumen Gentium recommande de « recourir aux formes variées de piété envers la Mère de Dieu ». Mais cette expression n'est nullement une incitation claire à la récitation quotidienne du chapelet, ce d'autant plus que la commission chargée du chapitre sur la Vierge Marie a refusé de prendre en compte une demande des pères conciliaires de distinguer le chapelet parmi les diverses pratiques de piété.
Vous me reprochez de ne pas avoir utilisé le livre de Carlos Evaristo qui est un faux manifeste. Lui-même l'a reconnu. Et les preuves que c'est un faux sont telles que plus personne, pas même le Vatican, n'utilise le témoignage de Carlos Evaristo.
Vous dites que je n'ai pas utilisé les travaux du père Alonso alors que je cite son dernier ouvrage La vérité sur le secret de Fatima plus d'une trentaine de fois et que je fais référence à six autres de ses ouvrages.
Je ne m'étends pas plus : vous trouverez en annexe une réponse détaillée à toutes vos critiques.
Mais le plus surprenant dans votre article est que vous vous en prenez exclusivement à des points de détail. Vous n'abordez jamais la question de fond, ni ne répondez à aucune des questions que je soulève. Pourtant, s'il est une chose qui émaille mon livre, ce sont les questions en suspens. Car les textes diffusés le 26 juin 2000 et les interventions du cardinal Bertone depuis cette date posent un nombre de questions considérable. N'avez-vous aucune réponse à y apporter ? Pour ma part, j'ai essayé d'y apporter des réponses cohérentes avec les éléments dont je disposais. Pas une seule fois, vous n'avez essayé de répondre à une de ces questions en y apportant d'autres arguments que ceux que j'exposais. Que les réponses que je propose ne vous plaisent pas ou vous dérangent, soit. Mais, si ces questions ne se posent pas, dans ce cas il faudrait dire pourquoi. Et si elles se posent, quelles réponses proposez-vous d'y apporter ?
Au lieu de cela, vous ne faites que répéter la position du Vatican : la consécration a été faite ; tout a été révélé ; Fatima appartient désormais du passé ; seul reste l'appel à la prière et à la pénitence ; soeur Lucie a tout confirmé. C'est un peu court ! Sur un sujet pareil, on ne peut laisser sans réponse les nombreuses questions en suspens.
Pourquoi les cahiers spirituels de soeur Lucie, notamment ceux des années 1943 et 1944, n'ont-ils toujours pas été publiés ? N'ont-ils rien à nous apprendre ? Pourquoi le cardinal Bertone s'est-il tant de fois contredit ? Pourquoi, en montrant une enveloppe ayant soi-disant contenu le secret, a-t-il montre une enveloppe avec trois cachets de cire, alors que Monseigneur Venancio a dit que l'enveloppe avait quatre cachets de cire, un à chaque coin ? Pourquoi le dossier du Vatican s'appuie-t-il sur la lettre a M. Noelker qui est un faux manifeste ?
Je pourrais ainsi multiplier les questions. Vous ne répondez à aucune. Malgré une argumentation aussi inconsistante, vous concluez que mon livre est mauvais.
Entièrement mauvais ?
Qu'y a-t-il donc de mauvais dans la première partie qui n'est qu'une synthèse du message de Fatima ? Deux amis prêtres l'ont trouvée très intéressante et auraient voulu que je l'édite sans rien de plus en l'appelant "Précis sur le message de Fatima".
Qu'y a-t-il de mauvais dans la deuxième partie qui recense l'attitude des papes vis-à-vis de Fatima ? Certes, j'y montre que les consécrations faites n'ont pas respecté les demandes de Notre-Dame. Mais sur le reste, qu'avez-vous à redire ? Où sont les bévues, les ignorances historiques ?
Quant à la troisième partie qui est une analyse du dossier fait par le Vatican, où sont les erreurs et les négligences ?
Enfin, la quatrième partie, n'est-elle pas logique ? Vous pouvez ne pas partager les conclusions à laquelle elle conduit. Mais où sont les erreurs de raisonnement ou les faits erronés ? Vous ne présentez même pas la démarche entreprise qui analyse les trois hypothèses en présence et est, à ma connaissance, la première du genre.
Plus généralement, tous les rappels sur la dévotion au Coeur Immaculé de Marie, sur la nécessité de faire des sacrifices pour la conversion des pécheurs, de prier pour le Saint-Père sont-ils mauvais ? Car le véritable objet du livre, vous l'aurez sûrement remarqué, était d'utiliser la polémique autour du troisième secret comme un moyen pour reparler de cette dévotion, en souligner l'importance et rappeler l'urgence de la mettre en pratique.
Que vous ne soyez pas d'accord avec moi sur les conclusions, c'est parfaitement votre droit et personne ne peut vous le reprocher. Mais pourquoi utiliser l'invective et le mépris pour présenter mon travail ? Pourquoi ne pas avoir cherche plutôt une discussion honnête sur les points de désaccord ? Moi-même, je ne suis pas complètement d'accord avec les positions du père Gruner, d'Antonio Socci, de Christopher Ferrara, du frère François de Marie des Anges, et de bien d'autres encore. Pourtant, je reconnais la qualité de leurs analyses, la très grande pertinence de leurs arguments, et il ne me viendrait pas à l'esprit de dire que leurs livres sont mauvais.
S'il n'y avait le signalement de mon erreur sur le livre d'Antonio Socci, j'en viendrais à regretter que vous n'ayez pas suivi le conseil que je donne dans ''introduction, page 10 :
Nous nous permettons de suggérer à celui qui serait d'ores et déjà fermement convaincu que le troisième secret a été intégralement diffusé et que toute réflexion sur ce sujet est non seulement inutile mais va a l'encontre de la vérité, d'interrompre ici sa lecture ; car cette étude ne lui apportera vraisemblablement qu'agacements et irritations, et nous lui conseillons plutôt de réciter son chapelet pendant le temps qu'il aurait consacré à sa lecture ; de la sorte, il ne perdra pas son temps et attirera sur nous tous, convaincus ou non, les grâces promises par la Sainte Vierge.
J. de BELFONT
-----Annexe
Réponses aux critiques du n°183 d'Aletheia
La présentation du livre et de son auteur
Vous commencez par affirmer : « Le titre suscite immédiatement la curiosité, mais a un côté racoleur ». Quelques phrases plus loin, vous le qualifiez de « sensationnaliste ». En
quoi le titre est-il racoleur ou sensationnaliste ? Quel autre titre
auriez-vous jugé plus approprié ? Ce titre synthétise simplement le
contenu de mon étude. En effet, il reste encore bien des mystères autour
du troisième secret ; et bien des vérités incluses dans les deux
premiers sont, de nos jours, soigneusement oubliées, voire cachées. Si
quelque chose a un caractère sensationnaliste, ce sont toutes les
déclarations du Vatican depuis le début de l'année 2000. Que cette
caractéristique retombe sur un livre qui en fait l'étude, il est
impossible de l'éviter. Mais en soi, le titre n'a rien de
sensationnaliste.
Vous dites ensuite : « L'auteur, qui signe d'un pseudonyme, est un parfait inconnu. » La
phrase est en gras dans l'article montrant qu'à vos yeux, ce point est
important. Comment pouvez-vous savoir que l'auteur est un inconnu
puisque vous ne savez pas qui c'est ? Tout au plus pouvez-vous dire que
le pseudonyme utilise n'a jamais été employé jusqu'a présent et qu'on ne
peut donc pas connaître l'identité de l'auteur. Serait-ce que vous
récusez l'emploi d'un pseudonyme ? Pourtant, de grands auteurs ont
procédé ainsi, comme Jean Madiran par exemple. Et quand bien même j'en
serais à mon premier ouvrage, et donc encore un inconnu, en quoi cela
mériterait-il de le souligner par l'expression «parfait inconnu »?
Vous poursuivez : « Son ambition n'est pas mince : il prétend faire une démonstration d'une logique imparable ». Honnêtement, je n'ai jamais exprimé cette ambition. J'ai simplement dit : « Dans notre monde rationalisé à outrance, il est nécessaire de présenter une démonstration d'une logique imparable. » C'est
une remarque de bon sens que j'ai placée là pour expliquer la démarche
un peu scolaire que j'ai adoptée. Mais elle ne signifie pas que je suis
arrivé à une démonstration imparable. Au contraire, en fin d'ouvrage, je
dis bien (p. 396) : « Nous ne prétendons pas que tout soit absolument irréprochable dans notre étude. Malgré le soin apporté à vérifier toutes les sources, certaines erreurs ou inexactitudes ont pu se glisser ici ou là. »
Vous dénigrez ensuite le plan adopté en disant : «Il fait mine de ne pas tirer de suite les conclusions de sa recherche... ». Que
reprochez-vous à cette démarche ? Quel auteur n'aurait pas procédé
ainsi ? J'ai simplement décrit le cheminement par lequel je suis passé,
ce qui me parait une démarche parfaitement honnête. J'ai exposé mon
raisonnement, lequel conduit à une conclusion. Je n'ai pas choisi
d'emblée de prouver que le secret officiel était un faux. D'ailleurs, je
ne le prouve pas complètement puisqu'il reste de nombreuses zones
d'ombre. Je me suis gardé d'imposer ma solution et dans le dernier
chapitre, j'ai laisse la porte ouverte à la discussion.
Les critiques faites sur le livre
Vous dites ensuite que je prétends « contester la validité de ce que Jean-Paul II a accompli en 1984 ». Ce
raccourci déforme ce que j'ai dit. Je constate des faits qui, mis bout a
bout, conduisent à la conclusion que, pour toutes les consécrations
faites par Pie XII, Paul VI ou Jean-Paul II, toutes les conditions
demandées par la Sainte Vierge n'ont pas été remplies. Je rappelle que
le Ciel a demandé deux consécrations. A Fatima, puis à Tuy, la Sainte
Vierge a demandé la consécration de la Russie ; quelque temps après, voyant que la consécration n'était pas faite, Notre Seigneur a demandé la consécration du monde avec une mention spéciale de la Russie. J'affirme
simplement qu'aucune des consécrations faites jusqu'a présent n'a
rempli les conditions demandées par la Sainte Vierge, mais qu'en
revanche, toutes correspondaient aux demandes de Notre Seigneur. Je ne
conteste pas l'efficacité de ces consécrations : je constate que les
fruits obtenus correspondent aux promesses de Notre Seigneur. Notre-Dame
promettait la conversion de la Russie, laquelle n'a toujours pas eu
lieu. Notre Seigneur promettait l'écourtement de la guerre, ce qui s'est
bien réalisé. Vous pouvez parfaitement n'être pas d'accord avec ce
raisonnement, mais vous ne donnez aucun élément pour le contrer.
Vous faites ensuite le constat suivant : « On passera sur les affirmations outrancières qui émaillent son livre. (...) Les bévues, les ignorances et les négligences relatives à Fatima sont nombreuses et graves. On n'en relèvera que quelques-unes. Elles discréditent le propos même du livre. » Il aurait été difficile d'émettre une critique plus sévère.
En ce qui concerne mes affirmations que vous qualifiez d' "outrancières", vous dites qu'elles « émaillent » mon texte, mais vous n'en citez qu'une. J'ai écrit : « Si la crise a commence bien avant 1960, elle s 'est surtout développée à partir de 1958, avec l'arrivée sur le siège de Pierre de papes à l'esprit moderniste et avec la réhabilitation officielle par le concile Vatican II des auteurs et des idées modernistes.» Il
n'y a la aucune affirmation outrancière de ma part : je constate
simplement un fait. Et je ne suis pas le seul à le faire. D'excellents
auteurs l'ont fait bien avant moi : Louis Salleron, Jean Madiran, l'abbé
Luc Lefebvre, le père Joseph de Sainte Marie, etc. Tous ont montré que
Jean XXIII, Paul VI et Jean-Paul II avaient un tour d'esprit moderniste.
Certes, ils ne l'avaient pas tous au même degré, ni sur les mêmes
points. Mais Itinéraires, La Pensée Catholique, Permanence - (au
moins du temps de Jean Ousset), - toutes ces revues ont très souvent
montré le caractère moderniste d'une grande partie des actes ou textes
en provenance du Vatican depuis l'élection de Jean XXIII au pontificat, à
tel point que le père Joseph de Sainte Marie n'a pas hésité à écrire : «
De nos jours, et c'est l' un des signes les plus
manifestes du caractère extraordinairement anormal de la situation
actuelle de l'Eglise, c'est très fréquemment que des actes venant du
"Saint Siège" exigent de nous prudence et discernement. » (Lettre du père Joseph de sainte Marie du 27 juillet 1977 publiée dans le n° 173 (juillet 1977) du Courrier de Rome)
Votre
remarque sur mes soi-disant outrances parait d'autant moins fondée que
j'ai fait relire mon étude par plusieurs ecclésiastiques avant de
décider de la publier. Les cinq à m'avoir répondu m'ont vivement
encouragé à le faire. Avec deux d'entre eux, j'ai travaillé des heures
pour éliminer toutes les inexactitudes, imprécisions ou exagérations.
Aucun d'entre eux n'a relevé d'outrances dans le texte définitif. Et
depuis la parution du livre, trois autres prêtres m'ont fait part de
leur enthousiasme pour mon livre. Aucun ne m'a dit que j'avais été
outrancier. Votre appréciation touche donc aussi directement ces
prêtres. Si vous connaissiez leur nom, vous ne diriez sûrement pas
qu'ils sont outranciers.
Quant aux « bévues, ignorances et négligences nombreuses et graves », analysons celles que vous présentez.
Vous
mettez, à juste titre, le doigt sur une erreur matérielle.
Effectivement, j'ai écrit que le livre du cardinal Bertone et celui
d'Antonio Socci avaient été préfacés par Benoît XVI. Malgré toutes les
recherches que j'ai pu faire dans l'importante documentation que j'ai
réunie sur Fatima, je n'ai pas réussi à retrouver le texte où j'avais
puisé cette réflexion. Apres vérification, il est exact qu'il n'y a pas
de préface de Benoît XVI dans le livre d'Antonio Socci. Mais ce dernier a
reçu une lettre de Benoît XVI le remerciant de l'esprit avec lequel il
avait rédigé son livre. Voici ce que dit Antonio Socci dans une lettre
ouverte au cardinal Bertone : « Je garde pour moi la lettre
concernant mon livre que Benoît XVI m'écrivit pour me remercier "des
sentiments qui l'ont inspiré" » (Lettre reproduite dans Sous la bannière n°133
de sept/oct. 2007). Comme à l'époque je n'avais pas encore pu me
procurer le livre d'Antonio Socci, en lisant sa lettre, j'ai pense
qu'elle faisait office de préface. Je vous concède qu'il y a là une
erreur et je veillerai à ce qu'elle soit corrigée si par hasard
l'éditeur souhaitait faire une deuxième édition de mon livre. Mais,
préface ou lettre de remerciement, cela ne change pas le fond de la
remarque: il est étonnant que Benoît XVI ait préfacé le livre du
cardinal Bertone et ait remercié Antonio Socci pour son livre et les
sentiments qui l'ont inspiré. C'est la seule erreur que vous signalez.
Or, j'ai fait environ six cent citations. S'il n'y a qu'une erreur sur
six cent citations, je trouve que c'est déjà un beau résultat.
Vous écrivez ensuite : « Il nous dit que le mot enfer "n'est jamais employé" (p. 358) dans les textes promulgués par Vatican II. C'est faux, il l'est dans le texte latin de Lumen Gentium. » Petite remarque en passant : s'il l'est dans le texte latin, il l'est aussi dans le texte français ; sinon, ce serait poser a priori que la traduction n'est pas fidèle.
Je viens de relire complètement Lumen Gentium : je
n'y ai pas trouve le mot "enfer". J'ai également consulté le texte
latin : je n'y ai pas trouve le mot "infernus". J'ai alors cherche dans
tous les textes du concile Vatican II, me disant que vous aviez
peut-être confondu avec un autre texte : je n'ai jamais trouve le mot
"enfer". J'ai enfin consulte l'index analytique de la collection des
textes conciliaires édités par le Cerf : le mot "enfer" (infernum) y
figure bien (tome II-2, page 2379), mais il ne mentionne aucun renvoi vers l'un quelconque des textes de Vatican II.
Il est vrai que, dans Lumen Gentium n°48,
se trouvent les deux expressions suivantes : "feu éternel" (ignem
aeternum) et "ténèbres extérieures" (tenebras exteriores). Voici la
phrase où elles figurent : « Il nous faut veiller constamment pour que nous méritions d'entrer avec lui aux noces et d'être comptés
au nombre des bénis, et non pas de recevoir l'ordre, comme des
serviteurs mauvais et paresseux, d'aller dans le feu éternel, dans les
ténèbres extérieures où "il y aura des pleurs et des grincements de
dents" ». Mais, je maintiens que le mot "enfer" ne figure
dans aucun des textes de Vatican II, alors que la Sainte Vierge l'a
utilise trois fois au cours des apparitions du 13 juillet et du 19 août
1917: « Vous avez vu l'enfer où vont les âmes des pauvres pécheurs »
; « O mon Jésus, pardonnez-nous. Préservez-nous du feu de l'enfer » ;
«Beaucoup dames vont en enfer parce qu'elles n'ont personne qui se
sacrifie et prie pour elles ».
En citant une de mes phrases « le chapelet dont la récitation quotidienne a été demandée par la Sainte Vierge a chacune de ces apparitions, n'eut même pas droit à un rappel », vous commentez : « C'est faux, dans Vatican II, il y a une recommandation a recourir aux "formes variées de pitié envers la Mère de Dieu" (Lumen Gentium, 66)» La
encore, vous jouez sur les mots. Tout d'abord, ce n'est pas une
recommandation qui figure au numéro 66, mais une simple approbation
(approbavit). De plus, recourir aux formes variées de piété n'est pas
équivalent à recommander la récitation quotidienne du chapelet. A
Fatima, la Sainte Vierge n'a pas dit : «Recourez tous les jours aux formes variées de piété à mon égard»!
D'autre
part, lors de la troisième session du concile Vatican II, le cardinal
Cerejeira, s'appuyant sur la demande de cent treize évêques, demanda par
écrit de modifier le n° 67 de Lumen Gentium de la façon suivante : « Qu'aux mots "les pratiques et exercices de piété" soit ajouté : "parmi lesquels se distingue le rosaire"». La commission chargée de préparer le chapitre sur la Vierge Marie jugea que « le concile ne devait pas désigner de dévotion en particulier ». Le
concile a donc délibérément refusé de distinguer le rosaire parmi les
différentes formes de piété envers la Sainte Vierge. Aussi, je maintiens
que, non seulement les mots "rosaire" et "chapelet" ne figurent dans
aucun des textes officiels du concile, mais surtout qu'aucun d'eux
n'incite de façon précise à leur récitation, alors que soeur Lucie n'a
cessé, sa vie durant, d'affirmer que c'était un des points essentiels du
message de Fatima.
Au
passage, vous affirmez que, par honnêteté, j'aurais du mentionner que
Jean XXIII et Paul VI ont fait chacun une encyclique sur le rosaire, ce
qui est exact mais hors sujet : l'objet du chapitre en question était
d'analyser les textes conciliaires et non pas la pensée des papes sur le
sujet.
Vous me reprochez ensuite de ne pas avoir utilisé le livre de Carlos Evaristo que vous qualifiez de source essentielle : « Le défaut d'information, voire la désinformation, est encore plus patente pour une source essentielle. » Ce
point mérite un petit développement. Si je n'ai pas jugé utile de faire
référence a ce texte, c'est parce qu'il est, pour le moins, très
controversé ; il est insuffisamment fiable pour qu'on puisse s'appuyer
dessus. Christopher Ferrara le montre très bien dans le numéro 76 du Fatima Crusader paru au printemps 2004 :
(début de citation ) Devant l'importance grandissante de critiques faites publiquement à propos des révélations absurdes attribuées à soeur Lucie dans la transcription de 1992, Evaristo fut contraint de reconnaître que c'était un faux. Dans un fax adresse le 23 novembre 1992 au secrétariat de l'oeuvre du père Gruner, Evaristo confessa :
« L'entretien n'a pas été enregistré. Aucune note n'a été prise. Mais si j'ai probablement une mauvaise mémoire, cette reconstitution de ce qui fut dit n'a pas véritablement été faite par moi. Je l'ai seulement tapée. »
Comme il est noté dans le dernier numéro du Remnant, le seul autre témoin parlant portugais a avoir assisté à la conversation, le père François Pacheco, avoua ce qui suit au secrétariat du père Gruner : « J'étais le traducteur officiel de cet entretien qui a duré deux heures. J'affirme catégoriquement que le livre intitule « Deux heures avec soeur Lucie » publié par Carlos Evaristo contient des mensonges et des demi-vérités et qu'il n'est pas fiable. Quand j'ai eu pour la première fois une copie du livre, en janvier 1993, j'ai immédiatement contacté Carlos Evaristo et je lui ai personnellement dit de ne pas publier ce livre à cause des énormes mensonges qu'il y a inséré. J'espère que cela mettra fin à la confusion.»
Evaristo a creusé sa propre tombe encore plus profondément avec son pamphlet de 1993 intitule Tout a commencé par deux heures avec soeur Lucie, dans lequel il republia la même transcription de 1992 avec le commentaire suivant : « Ceci n'est pas une traduction littérale. C'est une traduction conceptuelle. Le langage utilise dans ce document est fait avec le portugais parlé actuel.» (fin de citation)
Le pere Kramer confirme le fait dans son livre La Bataille finale du démon (page 225) :
(début de citation ) 11 octobre 1992 - Un entretien contestable avec soeur Lucie est organisé par le père Pacheco, le cardinal Padiyara, Monseigneur Michaelappa et un chauffeur, Carlos Evaristo. Plus tard, Evaristo publia une version faussée de la rencontre qu'il reconnaît "reconstituée". Entre autres falsifications, l'entrevue contient une déclaration de soeur Lucie selon laquelle Mikhail Gorbatchev s'est agenouillé devant le Saint-Père et lui a demandé pardon de ses péchés. Cette déclaration est dénoncée par le porte parole du pape, Joaquin Navarro-Valls, comme fabriquée de toutes pièces. Le père Pacheco publie une réfutation de la "rencontre" simulée. (...) Aujourd'hui, la rencontre totalement discréditée d'Evaristo n'est plus mentionnée comme "preuve" de l'affirmation prétendue de soeur Lucie sur le fait de la consécration. (fin de citation)
Et,
en effet, le livre de Carlos Evaristo rapporte la pensée de soeur Lucie
de façon totalement erronée. Certains propos ne peuvent en aucun cas
lui être attribués. Par exemple : « Le pape Paul V1 aussi, avait
fait une consécration à Rome, à la fermeture du concile Vatican H, avec
tous les évêques du monde présents » (page 57). « Notre-Dame n'a jamais demandé que la Russie soit spécifiquement mentionnée par son nom. » (page 59). « Le troisième secret n'est pas fait pour être révélé » (page 64). « L'enfer
est une réalité. C'est un feu surnaturel et non physique qui ne peut
être comparé au feu qui brule, feu de bois ou de charbon. (...) Dieu ne
condamne personne à l'enfer » (pages 68 et 69). Toutes ces
affirmations et bien d'autres encore condamnent définitivement ce livre.
Car, si soeur Lucie a bien dit tout cela, alors elle a menti pendant
cinquante ans en disant exactement le contraire auparavant. Depuis le
moment où soeur Lucie a mis par écrit le troisième secret jusqu'a cet
entretien, soeur Lucie a toujours dit que la Sainte Vierge avait demandé
la consécration de la Russie et uniquement de la Russie, que le secret
devait être révélé au plus tard en 1960, que des âmes étaient en enfer,
que les consécrations ne correspondaient pas aux demandes de Notre-Dame.
Pour la Russie par exemple, voici les paroles de Notre-Dame telles que soeur Lucie les a toujours rapportées :
(début de citation ) Pour l'empêcher, je viendrai demander la consécration de la Russie à mon Coeur Immaculé et la communion réparatrice des premiers samedis du mois. Si l'on écoute mes demandes, la Russie se convertira et l'on aura la paix. Sinon elle répandra ses erreurs a travers le monde. (...) A la fin, mon Coeur Immaculé triomphera. Le Saint-Père me consacrera la Russie qui se convertira. (Apparition du 13 juillet 1917 à Fatima)
Le moment est venu où Dieu demande au Saint-Père de faire, en union avec tous les évêques du monde, la consécration de la Russie à mon Coeur Immaculé. Il promet de la sauver par ce moyen. (Apparition du 13 juin 1929 à Tuy) (fin de citation)
Ces
deux extraits des apparitions de Fatima figurent intégralement dans la
lettre du 24 octobre 1940 adressée par soeur Lucie au pape Pie XII. De plus, par deux fois, le 29 mai 1930 et le 12 juin1930, soeur Lucie écrivit au père Gonçalves :
(début de citation) Le bon Dieu promet de mettre fin à la persécution en Russie, si le Saint-Père daigne faire, et ordonne aux évêques du monde catholique de faire également, un acte solennel et public de réparation et de consécration de la Russie aux très Saints Coeurs de Jésus et de Marie, Sa Sainteté promettant, moyennant la fin de cette persécution, d'approuver et de recommander la pratique de la dévotion réparatrice, indiquée ci-dessus. (fin de citation)
Rapportant un dialogue avec Notre Seigneur en 1936, elle confia à son confesseur :
(début de citation) D'une manière intime, j'ai parlé à Notre Seigneur de ce sujet, et, il y a peu de temps, je lui demandais pourquoi il ne convertirait pas la Russie sans que sa Sainteté fasse cette consécration ?
- Parce que je veux que toute mon Eglise reconnaisse cette consécration comme un triomphe du Coeur Immaculé de Marie, pour ensuite étendre son culte et placer, à côté de la dévotion à mon Divin Coeur, la dévotion à ce Coeur Immaculé.(fin de citation)
Voici également ce que rapporte William Thomas Walsh a propos de l'entretien qu'il eut avec elle le 15 juillet 1946 :
(début de citation) Soeur Marie das Dores m'expliqua clairement que Notre-Dame n'a pas demandé la consécration du monde à son Coeur Immaculé. C'est la consécration de la Russie qu'elle a demandée expressément. Elle me le répéta plusieurs fois et avec une solennité voulue :
- Ce que veut Notre-Dame, c'est que le Saint-Père et tous les évêques consacrent la Russie à son Coeur Immaculé, par une cérémonie spéciale..(fin de citation)
La même année, le père McGlynn lui parlant de « la consécration du monde », soeur Lucie l'arrêta en disant : «Non ! Pas le monde ! La Russie ! La Russie ! Notre-Dame a demandé que le Saint-Père
consacre la Russie à son Coeur Immaculé et qu'il commande aux évêques, à
tous les évêques de le faire aussi en union avec lui au même moment ».
Voici également le dialogue que le père Umberto eut avec elle le 15 août 1978 :
(début de citation)- Ma Sceur, j'aimerais vous poser une question. Si vous ne pouvez me répondre, soit ! Mais si vous pouvez répondre, je vous en serais très reconnaissant... Notre-Dame a-t-elle jamais parlé de la consécration du monde à son Coeur Immaculé ?
-Non, père Umberto, jamais ! A la Cova da Iria en 1917, Notre-Dame avait promis : «Je reviendrai demander la consécration de la Russie » En 1929, à Tuy, comme elle l'avait promis, Notre-Dame est revenue me dire que le moment était venu de demander au Saint Père la consécration de ce pays- la. (fin de citation)
Enfin, le 14 mai 1982, soeur Lucie expliqua à Mgr Hnilica que Dieu voulait « la consécration de la Russie et uniquement de la Russie, sans aucune adjonction », car « la
Russie est un immense territoire bien circonscrit, et sa conversion se
remarquera, apportant ainsi la preuve de ce qu'on peut obtenir par la
consécration au Coeur Immaculé de Marie ».
Et
il serait possible de citer encore bien d'autres témoignages. Donc, ou
soeur Lucie a menti toute sa vie et dans ce cas, son témoignage au cours
des entretiens avec Carlos Evaristo n'est pas plus fiable ; ou elle a
toujours dit la vérité, et le livre de Carlos Evaristo est un grossier
montage pour accréditer la thèse du Vatican.
De
plus, vous dites qu'il y a eu des enregistrements audio et vidéo de ces
entretiens. Si c'est exact, comment Carlos Evaristo a-t-il pu dire au
père Gruner qu'il n'y avait pas eu d'enregistrement ? Les avez-vous vus
ou entendus ? Savez-vous où il est possible de se les procurer ? Une
source qu'il n'est plus possible de consulter n'est guère utile.
Enfin,
si c'était vraiment une source essentielle, pourquoi le pape Jean-Paul
II ne s'est-il jamais appuyé dessus ? Pourquoi le dossier du Vatican et
le cardinal Bertone n'y font-ils jamais référence ?
Voila
donc la source que vous me reprochez de ne pas avoir citée ! Au
contraire, l'honnêteté et la rigueur intellectuelle demandaient de ne
pas utiliser un tel témoignage. Affirmer « Le defaut d'argument sidère » pour
ne pas avoir cité un document aussi controversé est pour le moins
exagéré. De plus, toutes les autres sources que je cite sont-elles à ce
point insignifiantes pour juger que « le défaut d'information est patent»?
Vous affirmez aussi : « Soutenir que la consécration de 1984 ne correspond pas à ce que demandait la Vierge Marie, c'est aller contre les affirmations de Soeur Lucie elle-même. Soutenir que le texte du "secret" de Fatima publie en 2000 est incomplet, falsifié, voire qu'il est un "faux", c'est accuser Soeur Lucie, Jean-Paul II, les cardinaux Ratzinger et Bertone de mensonge.»
Tout
d'abord, "soutenir" n'est pas le terme qui convient pour présenter ma
démonstration. J'expose un raisonnement qui aboutit à cette conclusion.
Mais je l'ai assortie de plusieurs réserves. Le Vatican peut démentir et
apporter toutes les preuves contraires s'il les a.
Mais,
avant 1989, soeur Lucie elle-même a dit plusieurs fois que la
consécration n'avait pas été faite. Dans mon livre, je cite une douzaine
de témoignages. Dire que la consécration a été faite, c'est donc aussi
accuser soeur Lucie de mensonge, au moins jusqu'en 1989. Enfin, Antonio
Socci, Christopher Ferrara et le père Gruner affirment que le secret
révélé par le Vatican n'est pas complet. Faut-il en conclure qu'eux
aussi accusent le pape et soeur Lucie de mensonge ?
Vous me reprochez ensuite de dire que les 24 volumes Historia critiqua de Fatima du père Alonso ont été interdits de publication ; pour vous : « il est faux de dire que ses travaux ont été "enterrés" ». C'est pourtant la plus stricte vérité. Le frère François de Marie des Anges, dans Jean-Paul 1e, le pape du secret, à la page 257, dit : « Mgr Alberto Cosme do Amaral ajourna en 1975 la publication du l'oeuvre du père Alonso en faisant approuver sa décision par une commission de professeurs d'universités portugaises. (soulignement de J. de Belfont) » Et le père Paul Kramer, dans son livre La bataille finale du démon, dit la même chose, notamment à la page 216:
(dbut de citation) 1975 - Les 24 volumes du père Alonso de 800 pages chacun sont prêts pour la publication. Cette oeuvre monumentale sur le message de Fatima comprend au moins 5.396 documents. Les presses sont littéralement stoppées par le nouvel évêque de Fatima, Monseigneur do Amaral, empêchant les dix ans de recherche du père Alonso d'atteindre le public. Deux des 24 volumes seront finalement publiés (en 1992 et 1999 respectivement) mais seulement sous forme d'édition expurgée. (fin de citation)
Il
serait fort étonnant que ces deux auteurs se soient trompés, surtout
quand on connaît le soin que tous deux apportent à leurs recherches sur
Fatima. Quoi qu'il en soit, avec les moyens modernes de reproduction,
les 24 volumes du père Alonso auraient été très précieux pour la cause,
sûrement beaucoup plus précieux que les deux ouvrages que vous me
reprochez de ne pas avoir cités et qui ne remplaceront jamais toutes les
lettres de Lucie rassemblées par le père Alonso.
Vous dites ensuite que je suis « encore une fois mal informé » parce
que j'ignorerais la douzaine d'autres ouvrages publiés par le père
Alonso. Je sais parfaitement que le père Alonso a publié tous ces
ouvrages. Le frère Michel de la Sainte Trinité les a pratiquement tous
étudiés et les a largement cités. Il ne m'a pas semble utile de
reprendre de fond en comble tous les travaux du frère Michel et de citer
tous les ouvrages du père Alonso. Quoi qu'il en soit, je cite plus de
trente fois son dernier ouvrage La vérité sur le secret de Fatima dans lequel il synthétise tous ses travaux et je fais référence à six autres de ses ouvrages.
En
conclusion, comment pouvez-vous en déduire que je suis mal informé ? Où
est le défaut d'information ? Où sont les bévues ? Où sont les
négligences ? Quels sont les points que j'ai ignorés ? Les appréciations
graves que vous émettez sur mon livre, auraient mérité une
justification plus étayée.
Vous
affirmez, en fin d'article, qu'en matière d'apparition, c'est au pape
de trancher. Mais quand le commentaire théologique du dossier du Vatican
affirme que, à Lourdes comme à Fatima, la Sainte Vierge n'est pas
réellement apparue aux petits voyants, mais que ceux-ci n'ont eu que des
visions intérieures, doit-on l'accepter sans broncher et tenir les
témoignages de toutes les personnes présentes comme nulles et non
avenues ? Peut-on sérieusement considérer le père Dhanis comme seul
expert de Fatima alors qu'il nie la réalité du miracle du soleil et
affirme que soeur Lucie n'est qu'une pieuse affabulatrice ? Dans la
lettre précédemment citée, après avoir recommande la prudence à propos
des actes émanant du Saint Siège, le père Joseph de Sainte-Marie
ajoutait : « S'il est des cas où seuls des théologiens
solidement formés peuvent se prononcer (...), il est, par contre,
d'autres cas, et ils sont nombreux, où la connaissance du catéchisme et
le bon sens chrétien suffisent. » N'est-il pas pertinent ici de suivre son conseil ?
Pour finir, vous déduisez de tout cela que « j'accrédite l'idée qu'il y a complot, conspiration ou, au moins, fourberie ». Cette
affirmation n'a pas de sens. Un élève qui pose des questions à son
professeur à l'issue d'une démonstration qu'il n'a pas entièrement
comprise ou par laquelle il n'a pas été convaincu, peut-il être taxé de
complotiste ?