SOURCE - Bertrand Decaillet - Le Forum Catholique - 3 février 2013
Monseigneur Morerod, à une relation Facebook qui lui demande une explication, commente cet après-midi, 3 février :
Monseigneur Morerod, à une relation Facebook qui lui demande une explication, commente cet après-midi, 3 février :
The norms which I published are only an update decided by the Swiss Episcopal Conference in September 2011 (before I became part of it). I actually waited one more year than the other bishops of the French-Speaking part of Switzerland (Sion, Basel, Abbey of St Maurice) because I hoped the dialogue would work. After Bishop Fellay's preach 11 Nov. 2012 saying that the "new Mass" is dangerous and that the dialogue is back to 1974-1975, and his speech in New Hamburg 28 Dec. 2012 describing the Jews "ennemies of the Church", I decided to stop waiting... The difference between the use of churches by Protestant or Orthodox and the FSSPX is that the priests of the FSSPX are considered Catholics but without legitimate ministry: the effect of this situation is that they divide the Church from within, and say things I would rather not have said in Catholic Churches.Quelques remarques à chaud :
1) Il s’agit donc bien, contrairement à ce que je pensais, d’une décision personnelle de Mgr Morerod, faisant suite certes à une décision des évêques de la partie francophone de la Suisse.
Pour ma part ayant sollicité au nom de l’Association Pour la Forme Extraordinaire de la Liturgie (APFEL) une messe dans la forme extraordinaire auprès de Mgr Brunner (Sion) et Mgr Roduit (Abbé de St-Maurice) précités, après mult tractations, rencontres, tracasseries, explications…vaines, je sais combien ces deux prélats sont opposés avec violence et haine à la FSSPX, voire même à Benoît XVI lorsqu’il souhaite œuvrer au rapprochement avec elle… Monseigneur Morerod s’aligne donc sur leur décision, peut-être rallie-t-il aussi leur esprit militant.
2) Il a attendu une année (un peu moins il n’était pas encore évêque ni en charge du diocèse) parce qu’il espérait que « le dialogue » œuvrerait…
Il est curieux qu’un membre ayant pris part aux discussions doctrinales à Rome avec la FSSPX réagisse à si court terme, si effectivement il espérait (et donc n’espère plus aujourd’hui) que le dialogue œuvrerait. A fortiori lorsqu’il réagit précisément suite à la publication de la lettre de Mgr di Noia ! On notera au moins le manque d’intelligence stratégique de Mgr Morerod, voire de délicatesse vis-à-vis de la commission Ecclesia Dei et de Rome, qui, eux, ne préjugent toujours pas, semble-t-il, de l’impossibilité du « dialogue », bien au contraire - du moins c'est ce qu'ils disent.
3) Mgr Morerod décide de publier ce décret pour son diocèse ces jours-ci parce que :
a. Il a entendu Mgr Fellay dire le 11 novembre dernier que « la nouvelle messe est dangereuse ». Cette affirmation de Mgr Fellay semble décisive pour lui, il semble la découvrir. Il ne l’avait pas entendu auparavant ? Il n’avait pas envisagé de telles déclarations sur la messe moderne de la part de la FSSPX lorsqu’il pensait que le « dialogue oeuvrerait » il y a moins d'une année…
A Rome donc, les gens qui ont participé aux discussions doctrinales et dont il était, ne savent toujours pas – sauf éventuellement depuis le 11 novembre dernier - que Mgr Fellay (suite à Mgr Lefebvre et tant d'autres, dont les auteurs du Bref Examen Critique… ) considère la nouvelle messe comme dangereuse pour la Foi, et que c’est même là LA raison du refus de la FSSPX d’adopter le nouveau missel dès 1970, au moment même de son érection ? Mgr Morerod le découvre en novembre 2012.
Si c’est effectivement le cas, comme la réaction de Mgr Morerod le laisse penser, le dialogue de sourds entre Rome et Ecône est infiniment infiniment plus grave que ce que l’on pouvait penser jusqu’ici… et partant la méconnaissance du dossier « FSSPX » à Rome est, pour ainsi dire, totale – et coupable de la part d’un juge - ce point étant le premier, le plus évident, le plus souvent explicité… par la dite Fraternité.
Le « coupable » n’est donc pas connu à Rome, mais il est néanmoins jugé et condamné.
b. Mgr Morerod a entendu que, selon Mgr Fellay, le dialogue au point où il était en 74-75, soit avant la Suspens.
Là on ne voit pas très bien ce qui peut choquer Mgr Morerod, étant entendu que, tout comme lui probablement, Mgr Fellay le dit pour regretter et déplorer cette régression.
Notons néanmoins que si le point précédent est vrai, le dialogue est même bien en amont de 74-75 !
c. Mgr Morerod a entendu la conférence du 28 décembre dans laquelle Mgr Fellay évoque les juifs (le judaïsme) comme ennemis de l’Eglise.
Là on ne peut qu’être surpris qu’un théologien – semble-t-il réputé - comme Mgr Morerod n’entende pas la formule en son sens théologique, mais la réduise de manière un peu bébête et "journalistique" à une provocation du politiquement incorrect. Si Mgr Morerod – tout comme la conférence épiscopale canadienne – a jamais lu saint Paul il a parfaitement compris le propos de Mgr Fellay et son sens. Mais si d’aventure il n’avait pas lu s. Paul, il pourrait à ce jour encore se référer aux précisions qui – suite au scandale des faibles pour lequel les journalistes ont un instinct prononcé (mais ils n’en n’ont, semble-t-il, pas l’exclusive) - ont été apportée par DICI, organe de communication officiel de la FSSPX, qui, en son n°268 en dates du 18-01-2013, précise la pensée de Mgr Fellay pour qui y aurait entendu une assertion primaire :
Mais peut-être Mgr Morerod ne peut accepter cette vision théologique… qui est précisément celle de la Tradition de l’Eglise. Auquel cas, il serait là à nouveau étonnant qu’il le découvre fin 2012… alors qu’il à participé auparavant au discussions doctrinales.« Le mot ‘ennemis’ utilisé ici par Mgr Fellay est évidemment un terme religieux qui renvoie à toute association ou mouvement religieux qui s’oppose à la mission de l’Eglise catholique et à ses efforts pour l’accomplir : le salut des âmes. Ce contexte religieux s’appuie sur les paroles de N.S. Jésus-Christ, telles qu’elles sont rapportées dans les saints Evangiles : ‘Qui n'est pas avec moi est contre moi, et qui n'amasse pas avec moi disperse.’ (Mt. 12,30). En faisant référence aux juifs, le com¬mentaire de Mgr Fellay visait les responsables d’organisations juives, et non le peuple juif, comme l’ont laissé entendre les journalistes ».
4) Enfin il donne la raison d’une préférence aux non-catholiques » quant à l’éventuelle mise à disposition d’une église, plutôt qu’aux catholiques sanctionnés : ces derniers divisant l’Eglise, et leur discours n’ayant pas lieu d’être dans une église catholique, tandis que celui des non-catholiques aurait lieu d’y être. Logique, non ?
La casuistique ici est curieuse. Mais essayons avec sincérité de comprendre. On peut en effet comprendre, d’un point de vue pastoral et prudentiel, que pour éviter le scandale (si l’on considère bien sûr que le discours de la FSSPX est entaché d’erreurs et préjudiciable aux âmes) qu’on empêche ainsi des catholiques (sincères et éventuellement fragiles, influençables) d’entendre ce discours dans des églises catholiques, et d’être induit en erreur en entendant celles-ci sous le toit où habituellement la saine doctrine catholique est enseignée. Soit ! Et même parfaitement d’accord ! Mais on ne voit pas comment d’autres erreurs, en revanches, voire plus grave, des hérésies, voire plus grave encore le culte non-catholique, seraient moins nocifs parce que formellement non-catholiques, et par là acceptable sous un toit catholique . Même d’un point de vue purement pédagogique, le danger n’est-il pas encore plus grand de créer la confusion chez les fidèles. Sauf à penser à l’envers, c’est tordre un peu fort le simple bon sens.
Et puis la pédagogie et le scandale (on dirait aujourd’hui la communication) ne sont pas tout. Une église est un lieu consacré. Comment un non catholique y serait plus à sa place en tant que non-catholique, qu’un catholique turbulent. Qu’au moins si l’on interdit le catholique en délicatesse avec l’autorité, on interdise a fortiori le non-catholique en déclicatesse avec le dogme et porteur d’un culte hérétique.
On ne voit pas surtout comment ces erreurs non-catholiques ne seraient pas sujettes à diviser également (sinon plus encore) l’Eglise, dans la mesure où l’Unité catholique repose précisément sur le dogme – que, soi dit en passant, la FSSPX n’a jamais remis en cause, jusqu’à démonstration du contraire.
Lorsque Mgr Brunner, en revanche s’oppose à une ordination sur son territoire diocésain parce qu’elle émane de la communauté Eucharistein – jugée subjectivement par lui trop à droite – il ne divise pas ? C’est un exemple, parmi mille de cette Eglise suisse, si unie, plus : si Une !
La logique ici n’est pas théologique, ni même ecclésiale, elle est une casuistique de manœuvre dont la conclusion (et des année de pratique, il faut bien le reconnaitre…) permet habilement d’exclure les indésirés tandis que de continuer d’accueillir ceux qui servent la cause de l’œcuménisme sentimental.
A moins que Mgr Morerod ne s’inscrive lui-même dans l’herméneutique de la rupture, auquel cas « catholique » désignerait ici une structure administrative, mais non l’Eglise de Jésus-Christ, ce qui du coup rendrait son argument assez logique il est vrai.
Bref on eut pu espérer mieux du dernier arrivé (de Rome !) à la CES. On aura donc déchanté assez rapidement, moins d’une année, pour reprendre ses termes.