19 avril 2013

[Abbé Laisney, fsspx] Réponse à l’abbé Chazal

SOURCE - Abbé Laisney, fsspx - version française de l'original anglais - 19 avril 2013


Cher Monsieur l’abbé,
 
Depuis quand tenez-vous que l’accusé est présumé fautif, et doive démontrer son innocence ? N’est-ce pas plutôt l’accusateur qui a le devoir de prouver le bien-fondé de son accusation ? C’est vous qui accusez Mgr Fellay d’être libéral ; c’est à vous de le prouver ! Vous raisonnez donc tout à l’envers en écrivant : « Vous commencez par dire que nous n'avons pas réussi à démontrer que Mgr Fellay est dans l'erreur... Bien, mais prouvez-le ! »
 
Puis vous continuez en disant que vous ne faites que citer Mgr Fellay. Là encore se trouve un grand défaut : les citations que vous donnez sont peut-être imparfaites, même fautives, mais c’est mal de votre part de les interpréter de la manière la plus mauvaise possible, ignorant et les circonstances et le contexte. N’avez-vous jamais lu St Thomas dans sa Somme Théologique ?
Le doute doit-il être interprété favorablement? Il vaut mieux se tromper souvent en ayant bonne opinion d'un homme mauvais, que de faire très rarement erreur en ayant mauvaise opinion d'un homme vertueux; dans ce dernier cas, on commet une injustice envers le prochain; mais non pas dans le premier. (IIaIIaequ. 60 a.4 ad 1m)
Donc l’habitude d’interpréter défavorablement les paroles du prochain est un grand vice. St Thomas donne le cas où :
quelqu'un est mal disposé envers son prochain; or, lorsqu'un homme en méprise ou en déteste un autre, qu'il s'irrite contre lui ou qu'il l'envie, de légers signes suffisent pour qu'il le juge coupable; car chacun croit facilement ce qu'il désire. (Ibid. a. 3)
Il est malheureusement évident qu’une telle « mauvaise disposition » envers les « autorités de la FSSPX » sous-tend vos écrits et ceux de vos compagnons. Une telle disposition n’est pas vertueuse.
Pour montrer à quel point vos prétendues citations de Mgr Fellay sont vicieuses, il suffit de vérifier la citation dans votre lettre. Vous écrivez ceci :
Le double langage de Menzingen est un processus en progression et bien documenté, basé sur l'idée que Vatican II et la nouvelle messe peuvent être améliorés et qu'on ne peut pas demander au Nouvel Ordo de les condamner. (Interview du 15 février à Nouvelles de France).
Sans guillemets le lecteur ne sait pas exactement si Mgr Fellay a vraiment dit dans l’interview « Vatican II et la nouvelle messe peuvent être améliorés. » Mais c’est insinué ; de telles insinuations font déjà preuve de malice.  De plus ce passage prétend que Mgr Fellay aurait dit : « on ne peut pas demander au Nouvel Ordo de les condamner. » Mais si l’on se reporte à l’original de l’interview, on trouve que Mgr Fellay a dit : « nous ne nous attendons pas à ce que Rome condamne Vatican II avant longtemps. » Ces deux derniers mots changent complètement le sens de la phrase ! Oui, nous demandons que Rome condamne les erreurs de Vatican II et la nouvelle messe, mais avec les pieds sur terre nous ne nous attendons pas à ce que cela arrive bientôt. Enlever les deux derniers mots (et changer « s’attendre à » en « demander ») fausse complètement la pensée de Mgr Fellay : ce n’est pas honnête.
 
J’ai l’habitude de dire : « ne vous fiez pas aux modernistes lorsqu’ils citent les Pères de l’Eglise : vérifiez la citation ! » Maintenant je dois ajouter : « ne vous fiez pas à l’abbé Chazal et ses pareils lorsqu’ils citent quelqu’un, spécialement les autorités de la FSSPX. Vérifiez la citation ! » Votre manière malhonnête de tordre les paroles des autres, coupant les mots essentiels, me fait perdre toute confiance dans votre honnêteté intellectuelle.
 
Autre exemple de citation vicieuse : vous écrivez : « Comme vous le [=Mgr Lefebvre, merci d’avoir rajouté ce mot dans la traduction française de votre lettre, mot qui manquait dans l’original anglais] citez brillamment plus loin, une nouvelle Eglise "s'est clairement manifestée" après Vatican II. » Ce n’est pas ce que dit Mgr Lefebvre ! Voici ce qu’il disait :
Nous refusons par contre et avons toujours refusé de suivre la Rome de tendance néo-moderniste et néo-protestante qui s'est manifestée clairement dans le Concile Vatican II et après le Concile dans toutes les réformes qui en sont issues.
Qui ne voit pas que Mgr ne parle pas de « nouvelle église » mais de « tendance néo-moderniste et néo-protestante » ? C’est encore votre méthode vicieuse qui fait dire à quelqu’un  ce qu’il ne dit pas. Si Mgr Lefebvre avait pensé qu’il y avait là une autre église, il n’aurait jamais eu les relations fréquentes qu’il a eues avec le Vatican (entretiens avec Paul VI, Jean-Paul II, Cardinal Seper, Cardinal Ratzinger…)
 
Vous continuez en disant que « la régularisation est… indifférente. » Non, elle n’est pas indifférente, elle est en elle-même un bien. Parce que l’ordre est un bien, spécialement dans l’Eglise. La régularisation n’est pas la soumission au « novus ordo », mais à l’ordre canonique : c’est très différent. L’ordre hiérarchique dans l’Eglise n’est pas l’œuvre des innovateurs de Vatican II, mais a été bien établi par Notre Seigneur Jésus Christ Lui-même ; les coutumes apostoliques d’ordre ont été codifiées dans les lois antiques de l’Eglise. Personne ne peut nier la bonté de cet ordre hiérarchique sans péché.
 
En affirmant que « la régularisation est indifférente », vous rejetez la bonté de cet ordre canonique. Ergo… On dirait que vous n’avez jamais entendu Mgr Lefebvre, qui insistait tant sur l’importance pour la Fraternité St Pie X de l’approbation par Mgr Charrière, comme notre titre de noblesse : par elle nous étions vraiment une « œuvre d’Eglise », approuvée par l’Eglise. Il donnait avec justesse une grande importance à ce fait. Ce fut contre sa volonté que cet ordre canonique fut refusé à la Fraternité, lorsque le droit canon fut utilisé contre son but (en 1975, les sanctions furent contraires au droit canon, il fit appel selon le droit canon ; en 1976 les canons sur les lettres dimissoriales, établies pour garantir l’honnêteté des candidats à la prêtrise, furent utilisés pour l’empêcher d’ordonner de bons séminaristes, qui offriraient la Messe de toujours : ce fut le début de la situation non-canonique de la Fraternité). Mgr Lefebvre était tellement convaincu de la bonté d’un tel ordre canonique qu’il a signé « avec une profonde satisfaction » le protocole de 1988 malgré ses imperfections afin de le restaurer.
 
Vous essayez de vous justifier en écrivant : « se soumettre au mal par obéissance est un péché. » Mais là, vous ignorez la distinction entre la possession de l’autorité qui vient de Notre Seigneur Jésus Christ, qui est bonne en elle-même, et son exercice qui peut être un abus d’autorité. La régularisation canonique en elle-même est une soumission à l’autorité qui vient de Notre Seigneur, c’est-à-dire à sa possession ; elle n’entraîne nullement qu’on suive les commandements abusifs, c’est-à-dire l’abus de l’exercice de cette autorité. Donc une régularisation canonique n’est pas « se soumettre au mal ». Au début des années 70 il y avait de nombreux bons prêtres traditionnels, qui étaient dûment soumis à leurs supérieurs légitimes, tout en refusant de suivre les abus que ces derniers introduisaient. L’idée que la résistance aux commandements abusifs requiert le rejet de l’autorité elle-même d’où ils émanent est une grande erreur, et loin de l’exemple des saints.
 
Vous essayez encore de vous justifier en mentionnant la FSP, ICRSP, IBP et Campos. Mais nous ne devons pas condamner chez eux ce qui n’est pas mauvais en eux, mais bien plutôt ce en quoi réside précisément leur erreur. La grande erreur de la FSP ne fut pas l’amour d’une situation canonique ordonnée, mais bien plutôt de penser que sans évêque ils pourraient résister aux pressions des évêques modernistes : en effet, au moment des ordinations, si un évêque moderniste leur dit « je n’ordonnerai pas vos prêtres si vous n’enseignez pas Vatican II dans vos séminaires », que peuvent-ils dire ? Ils ont ainsi été amenés à enseigner les erreurs modernes (en particulier la thèse du Père Basile) dans leurs séminaires. Ils ont préféré une situation canonique en règle plutôt que d’avoir un évêque : leur erreur a consisté en cela.
Jusqu’à preuve du contraire, ceux qui nous ont quittés n’ont pas obtenu d’évêque ou de représentants sur la Commission Romaine, et donc ils se sont livrés, mains et pieds liés, dans les mains des progressistes. Dans de telles conditions, ils n’arriveront jamais à maintenir la Tradition. (Mgr Lefebvre, un an après les consécrations). 
Mgr Lefebvre a bien jugé qu’on avait besoin d’un évêque – de quatre – pour assurer la fidélité à la foi, à la liturgie, à la morale. C’est ce qui a fait la force de la Fraternité St Pie X après les Consécrations.
 
Une autre erreur de Campos fut de penser qu’ils pouvaient tenir seuls. L’union fait la force. Mgr Fellay a toujours fait attention à bien inviter Mgr Rangel pour discuter des affaires importantes, telles que les propositions du Cardinal Hoyos (réunion du 13 janvier 2001, à laquelle j’étais présent, et à laquelle Mgr Rangel envoya le futur Mgr Rifan), mais le Père Rifan fit un accord avec le Vatican sans consulter auparavant Mgr Fellay. Il ne fut pas surprenant que Rome imposa pratiquement la nécessité de se séparer de nous : laissé seul il ne fut pas capable de résister aux pressions. (Attention : ceci s’applique aussi dans l’autre direction, celle dans une vague association sacerdotale « de stricte observance » mais sans lien strict, dans laquelle on trouve déjà des sédévacantistes ouverts et des Feeneyites : le manque de lien religieux formel est une recette certaine pour un désastre ; on ne peut pas garder la foi longtemps loin de l’Eglise.)
 
L’histoire des Donatistes montre précisément ce fait : ils furent schismatiques avant de devenir hérétiques. Ainsi ce que vous avez dit au sujet des Donatistes, malheureusement, ne fait que manifester votre ignorance ! L’erreur des donatistes ne fut pas seulement au sujet de la validité des sacrements, mais aussi – et même avant – au sujet de la « communion avec les méchants » : ils ont refusé la Communion avec l’Eglise, sous prétexte qu’en communiant avec l’évêque de Carthage Cécilius, qu’ils prétendaient être mauvais, le reste de l’Eglise était « tombé ». Et St Augustin les a repris fortement et réfutés en se fondant sur le principe catholique que « dans l’Eglise la communion avec les méchants ne nuit pas aux bons, tant qu’ils ne consentent pas aux actions mauvaises. » Mais vous avez pratiquement rejeté ce principe catholique.
 
Puis vous jugez le Pape (Benoît XVI) comme hérétique, sans aucune restriction. Une chose est de montrer les paroles et actions mauvaises, comme le fait Mgr Tissier dans son étude, autre chose est de prononcer un jugement sur la personne, surtout pour un Pape. St Thomas enseigne (ibid. ad 3m) :
Ce n'est pas pareil, de juger des choses ou de juger des hommes… Dans un jugement sur des choses, on doit s'efforcer de les interpréter chacune comme elle est; mais en jugeant les personnes, on doit interpréter en bonne part, nous l'avons dit.
Qui ne voit que vous ne pratiquez pas ce qu’enseigne St Thomas ? Les sites Dici ou sspx.org mentionnent les mauvaises paroles et actions du Pape ainsi que les bonnes. Vos sites ne mentionnent que les mauvaises, et même les bonnes sont interprétées en mal (voir votre interprétation de SummorumPontificum et des Croisades du Rosaire). Il y a là un zèle amer que dénonçait Mgr Lefebvre.
 
Que vous êtes pressés de juger ! Le fait même de suspendre votre jugement semble être au-dessus de vos capacités. Vous avez déjà jugé le Pape François ! A la fin de notre vie, Notre Seigneur Jésus Christ ne nous demandera pas d’avoir eu un jugement correct sur tous les hommes, mais bien plutôt si nous avons fait notre devoir d’état. Et votre devoir, dans la Fraternité St Pie X, était d’obéir à vos supérieurs qui ne vous avaient imposé rien d’immoral, mais simplement d’aller au prieuré qui vous avait été assigné et d’y servir les fidèles qui avaient besoin de votre ministère sacerdotal. Et ce devoir vous ne l’avez pas rempli. C’est sur cela que vous serez jugé.
 
J’ai été grandement étonné de lire sous votre plume : « Dans un tel mélange où on distingue mal le blé de l'ivraie que faisons-nous ? Allons-nous au champ ? Non ! » Vraiment vous n’avez pas lu St Augustin ni St Cyprien ! Ils vous auraient répondu simplement : si vous n’êtes pas dans le champ du Seigneur, vous ne serez pas engrangé avec la moisson du Seigneur, vous n’irez pas au ciel ! Extra Ecclesiamnullasalus – hors de l’Eglise point de salut ! Votre « non » avec point d’exclamation est une affirmation manifestement schismatique ! Si nous sommes dans l’Eglise, nous sommes dans le champ du Seigneur. Ces Saints, en utilisant une autre parabole de l’Evangile, montrent bien que sur l’aire du Seigneur il y a le bon grain et les bales (Mt. 3:12) : ceux qui, refusant la compagnie avec les bales, quittent l’aire du Seigneur, prouvent par là qu’ils sont eux-mêmes des bales, car seules les bales sont enlevées par le vent de l’aire du moissonneur ! Lisez donc St Augustin ; vous l’écouterez lui peut-être plus que moi.
 
Entre temps, vous prétendez « rester attachés autant que possible à l'Église Catholique visible, en priant et en reconnaissant Pape(s) et évêques. » Ce sont là des paroles sans œuvre quand, au même moment, vous rassemblez sur leur tête les jugements les plus durs, interprétant leurs actions de la manière la pire possible, et refusant toute possibilité d’une régularité canonique.
 
Faites attention, cher abbé, aux fruits qui commencent à venir ! Certains de vos fidèles suivent vos actions plus que vos paroles et commencent à tomber : par exemple, une famille de Malaisie que vous aviez visitée est maintenant sédévacantiste à l’extrême, ne reconnaissant même pas la validité de votre propre ordination ; un autre fidèle a été choqué récemment de voir dans votre sacristie le nom de l’évêque local.
 
Est-ce que cela veut dire que nous voulons nous mettre dans une situation impossible ? Pas du tout ! Depuis l’an 2000, Mgr Fellay a exercé la vertu de prudence à ce sujet, et insiste encore aujourd’hui sur ces protections des œuvres de la Tradition ; après donc plus de douze ans de prudence, on peut difficilement l’accuser de manque de prudence ! Mais une chose est de rechercher les conditions d’une situation canonique où l’on puisse travailler au bien de l’Eglise sans obstacles, autre chose est de refuser systématiquement toute régularisation canonique.
 
Vous comparez une régularisation canonique à «avoir ses papiers en règle» comme si c’était une simple formalité bureaucratique. Vous passez complètement à côté de l’essentiel, qui est la communion hiérarchique, le troisième élément de l’unité de l’Eglise selon St Robert Bellarmin, sans lequel on ne peut pas être sauvé. Lisez donc St Robert Bellarmin ! Il vous faudrait apprendre la Foi de l’Eglise avant de prétende la défendre. Tant que l’irrégularité de notre situation n’est pas de notre faute, ce n’est pas un obstacle pour notre salut ; mais dès que quelqu’un refuse cette régularité elle-même, comme si c’était quelque chose de dangereux, ou une simple formalité, un tel refus est un obstacle au salut.
 
Je ne suis aucune « fausse proposition de Mgr de Noia » ; avez-vous lu dans le Remnant ma lettre ouverte à Mgr DiNoia ?
 
Vous mentionnez ensuite une « déclaration que fit Mgr Lefebvre en juin 1976 » ; or ceci n’est pas dans le sermon du 29 juin, la seule « déclaration » de Mgr Lefebvre que je connaisse en juin 1976. De plus vous parlez de « nouvelle église » d’une manière très dangereuse. Avez-vous lu mon article intitulé Plusieurs églises ? Faites attention à votre pensée à ce sujet : si vous considérez l’église conciliaire comme une structure séparée de l’Eglise Catholique vous êtes loin de la réalité, et telle n’était pas la pensée de Mgr Lefebvre (sinon il n’aurait jamais discuté avec eux). C’est une notion très dangereusement schismatique.
 
Je n’aime pas les ambiguïtés, et en ce sens je n’aime pas la déclaration du 15 avril. Mais entre une déclaration ambiguë, faible, qui a été ensuite rétractée, et « une liquidation complète », il y a une différence énorme. On pourrait dire de la même manière qu’il y avait des ambiguïtés dans le protocole du 5 mai 1988, cependant Mgr Lefebvre l’a bien signé. Et il est faux de dire qu’il l’a rétracté le lendemain : lisez donc le texte de la lettre du 6 mai, c’est la meilleure réfutation d’une telle affirmation : Mgr Lefebvre affirme qu’il l’a signé avec une grande satisfaction ! La vérité est qu’il a demandé le 6 mai la mise en pratique sans tarder de ce même protocole, demandant une date sans délai : loin de rejeter ce protocole, c’est plutôtpresser sa mise en pratique. Seulement devant les tactiques de délai, voyant le danger de Rome ne donnant pas ce qui avait été accordé dans le Protocole, à savoir la consécration d’un évêque, il décida d’aller de l’avant le 30 juin. Cette décision fut prise à la fin mai. Lisez mon livre « Monseigneur Lefebvre et le Vatican ». Tous les documents essentiels sont là.
 
Que « Rome se rapproche de la Tradition » sous le Pape François ou non, une chose est certaine c’est que la Tête de l’Eglise est Notre Seigneur Jésus Christ. C’est en Lui que j’ai confiance, etc’est dans l’ordre qu’Il a établi que je veux être, sans compromis avec l’erreur. Quant au futur, ce que je sais, c’est qu’Il est aux commandes, c’est Lui le Chef de l’Eglise. Donc je m’efforce de faire mon devoir chaque jour, là où mes supérieurs m’envoient, même s’il n’est pas agréable.
 
Je remarque que vous esquivez complètement mon argumentation, à savoir que les motifs pour lesquels vous vous opposez à Mgr Fellay sont disproportionnellement petits en comparaison avec les motifs pour lesquels Mgr Lefebvre s’opposait au Concile, à la Nouvelle Messe et à Assise. Qu’on ait besoin de prudence, oui. Mais qu’on se rebelle comme vous le faites, non ! Une telle rébellion n’est pas du tout dans l’esprit de Mgr Lefebvre. Monseigneur n’était pas un rebelle ; sa position principale n’était pas contre les nouveautés, mais pour la fidélité. En conséquence, il n’était pas prompt à condamner ; il savait attendre. Certains auraient aimé qu’il fasse les Consécrations plus tôt. Mais il attendit jusqu’en 1988. Certains semblent avoir oublié que le 30 juin 1988 était la quatrième date qu’il s’était fixée : il avait déjà repoussé la date au moins trois fois, dans l’espoir d’obtenir une situation canonique régulière. Quel contraste avec la précipitation avec laquelle vous condamnez et le Pape et Mgr Fellay !
 
Je me demande si vous vous relisez. Vous écrivez en effet, « c'est la deuxième fois qu'on se fait imposer l'obéissance pour nous faire désobéir à Dieu. » Voyons, honnêtement, monsieur l’abbé, indiquez précisément quelle « désobéissance à Dieu » vous a été demandée ! Cette question a été posée à l’abbé Joseph Pfeiffer à St Mary’s en août dernier et il n’a pas su quoi répondre. Quel péché a vous été demandé ? On vous a peut-être demandé de renoncer à votre volonté propre, mais certainement pas de faire quelque chose d’opposé à la Volonté de Dieu.
 
Certains en effet ont tendance à prendre leur propre volonté pour celle de Dieu. Ce subjectivisme est une tendance très commune, contre laquelle il faut combattre. Si l’obéissance est un des trois Conseils Evangéliques, c’est précisément parce que c’est un remède à cette erreur trop commune, si opposée à toute vie spirituelle vraie : « Si quelqu'un veut venir à ma suite, qu'il se renonce lui-même, qu'il prenne sa croix chaque jour, et qu'il me suive » (Luc 9:23).
 
Peut-être vous a-t-on demandé de ne pas faire de déclaration publique, mais qui ne voit pas que la raison pour un tel ordre – très raisonnable – est l’intempérance même de vos déclarations ? Il n’est donc pas contre la volonté de Dieu ! Monsieur l’abbé de Cacqueray n’est certainement pas un prêtre que vous accuserez de libéralisme. Or Mgr Fellay vous a mis sous les ordres de monsieur l’abbé de Cacqueray et vous avez refusé une telle nomination ?! Est-ce que cet ordre de Mgr Fellay était une « désobéissance à Dieu » ? Certainement pas. Pourquoi avez-vous donc désobéi ? Désolé, cher abbé, votre cause est perdue, vous n’avez aucune justification pour n’avoir pas obéi.
 
Et maintenant vous prétendez établir un « corps, une armée » ! Vous êtes un petit soldat qui abandonne la position que lui avait donnée son général, devient un franc-tireur, et maintenant prétend être capable d’organiser une armée !
 
Après avoir brisé vos premiers engagements, qui vous fera confiance pour garder vos seconds ? C’est précisément la raison pour laquelle le divorce et leremariage sont mauvais ; de même pour les prêtres qui abandonnent leur premiers devoirs.
 
Votre place est de vous repentir et de revenir là où vous auriez dû aller : sous Monsieur l’abbé de Cacqueray. C’est la seule manière d’être fidèle aux engagements que vous avez faits, promesses d’obéissance à Dieu en vos supérieurs.
 
Je prierai pour vous à ces intentions, spécialement Notre Dame et Saint Joseph, dont la grande vertu fut indubitablement l’obéissance (et la prudence : il s’abstint de juger, voir Mt. 1:19-20).
 
Sincèrement vôtre en Jésus et Marie,

Abbé François Laisney