Il y a tout juste un an, se célébrait l’inauguration de la présence de Sainte-Germaine – la plus ancienne communauté parisienne célébrant la liturgie traditionnelle – rue Jean Goujon à Paris, dans la très belle chapelle Notre-Dame de Consolation, mémorial dédié aux victimes de l’incendie du Bazar de la Charité, le 4 mai 1897. A l’occasion de cet anniversaire, le prieur, l’abbé Grégoire Celier, fait le point pour Présent.Monsieur l’abbé, pourriez-vous tout d’abord rappeler comment votre communauté a pu s’installer dans ces lieux ?
La chapelle Sainte-Germaine, que je dirigeais, étouffait depuis quarante
ans dans un local de fortune situé au fond d’une cour d’immeuble. L’Association
du Mémorial du Bazar de la Charité cherchait de son côté une congrégation
susceptible d’assurer la pérennité matérielle et spirituelle de ce bâtiment,
classé Monument historique depuis 1982. Diverses rencontres ont permis de
finaliser un accord.
Architecturalement, c’est un
monument magnifique. Pouvez-vous nous en dire plus ?
Cette chapelle a été bâtie par Albert Guilbert, architecte en chef des
Bâtiments civils et Palais nationaux, qui a reçu pour cette œuvre la Médaille d’or
de l’Exposition de 1900, dans un style néo-baroque d’une remarquable cohérence.
Le même architecte a d’ailleurs construit, à une cinquantaine de mètres, dans
un style oriental, la cathédrale de l’Eglise apostolique arménienne.
Louis Auguste Hiolin a réalisé la décoration sculpturale intérieure ;
Henri Carot, qui a notamment travaillé avec Maurice Denis, les vitraux ;
Albert Maignan, de l’Institut de France, la peinture à fresque de la coupole :
l’ensemble de la chapelle porte ainsi l’âme à la prière, l’élévation, à la paix
du cœur. C’est une joie profonde, toujours renouvelée, de mener une vie
paroissiale dans un lieu « où souffle l’esprit ».
Au bout d’un an, la communauté s’est-elle
étoffée ? Quel apostolat réalisez-vous dans le quartier ?
En fait, nous nous sommes surtout appliqués à nous installer : l’emménagement
d’une paroisse toute entière n’est pas une mince affaire. Songez que nous avons
eu besoin de treize camions de déménagement ! Nous n’avons pas encore
vraiment eu le temps d’aller à la rencontre des gens du quartier. Nous nous
sommes contentés de faire vivre cette chapelle et d’accueillir ceux qui y
venaient spontanément. Mais cette première phase s’achève et nous allons
pouvoir enfin envisager un travail d’évangélisation extérieur.
Pour cette première année, nous comptions donc sur les paroissiens de
Sainte-Germaine. En fait, la communauté a déjà grossi de façon visible :
nous faisons le plein à toutes les messes du dimanche, et même au-delà. Et, ce
qui est à noter, ces nouveaux sont en grande partie des jeunes : grands
adolescents, jeunes adultes, nouveaux foyers. Parmi les causes de cet afflux,
il faut noter en particulier la facilité pour se garer (il s’agit d’un quartier
de bureaux, donc vide le dimanche).
Vous accueillez donc plus de
monde. Cependant la chapelle n’est pas très grande…
En fait, nous bénéficions au même endroit de deux lieux de culte
indépendants. Actuellement, la messe de 9 heures est célébrée au
rez-de-chaussée, dans la crypte qui a été réalisée par nos prédécesseurs
italiens : cette crypte est presque deux fois plus grande que la chapelle
elle-même. Les messes de 10 h 15, de 11 h 45 et de 18 h 30 sont elles,
célébrées dans la chapelle au premier étage. Si le nombre de fidèles continue à
grandir, nous aurons deux solutions : soit descendre dans la crypte une ou
plusieurs des messes actuellement célébrées à la chapelle ; soit, mieux
encore, ajouter une ou plusieurs messes dans la crypte, en conservant
parallèlement les messes à la chapelle. Avec plus de prêtres (nous ne sommes
que deux, pour le moment), nous pourrions proposer jusqu’à dix messes le
dimanche matin. Nous serions ainsi en mesure d’accueillir près de 2 000 paroissiens
par dimanche, et ceci sans bousculade ni gêne réciproque.
Vous avez parlé de prédécesseurs
italiens…
Nous sommes la troisième congrégation dans cette chapelle. De 1900 à
1952, ce furent les Sœurs Auxiliatrices du Purgatoire qui en eurent la charge, afin
de prier pour les victimes de l’incendie. De 1952 à 2012, la chapelle
Notre-Dame de Consolation a abrité la chapelle italienne de Paris – ce qui
explique (petite information « pipole ») que Carla Bruni y ait fait
sa première communion. Et, désormais, c’est la Fraternité Saint-Pie X.
Dans un tel lieu de beauté et d’histoire,
on peut supposer que le nombre de baptêmes et de mariages a monté en flèche ?
Effectivement, nous avons nettement plus de baptêmes et de mariages qu’à
Sainte-Germaine, dont l’environnement n’était pas enthousiasmant. Mais ce qui a
explosé, ce sont les fiançailles. Une belle chapelle, pas trop grande et
accessible, est le lieu rêvé pour cela. Il faut noter en sus que nous disposons
de salles pour un buffet après une cérémonie.
Ces mêmes salles nous permettent d’accueillir des récollections, des
conférences religieuses, des concerts de charité. C’est une activité qui monte en
puissance et qui représentera bientôt un élément important de notre apostolat.
Enfin, parce que nous bénéficions de chambres libres, nous proposons
un « accueil ecclésiastique » pour les prêtres de la Fraternité
Saint-Pie X et des congrégations amies qui passent par Paris. Ils peuvent ainsi
séjourner dans un environnement tranquille et adapté à leurs besoins.
Où en êtes-vous des travaux
projetés ?
Après les travaux relatifs à notre installation, nous avons lancé le
processus de restauration de la chapelle : la rénovation de la deuxième
partie de la toiture de la coupole (la première partie, avec la Vierge, a été
assurée par l’Association du Mémorial) ; le ravalement de la façade ;
le nettoyage de l’intérieur. Ces travaux doivent être réalisés sous le contrôle
d’architectes agréés et par des entreprises spécialisées, puisque nous nous
trouvons dans un bâtiment classé.
Ce projet va mobiliser nos énergies et nos finances pour les
prochaines années. Mais cela ne nous empêchera pas, avec la grâce de Dieu, de
rayonner le Christ au cœur de Paris et de sa banlieue : avant d’être des
bâtisseurs, nous sommes des prêtres au service des âmes et de l’Église
catholique.
Propos recueillis par Anne Le Pape
Chapelle Notre-Dame de Consolation, 23, rue Jean Goujon, 75 008
Paris.
Tél. : 01 43 80 46 93.