15 mai 2015

[Paix Liturgique] A Rome, la "nouvelle messe" séduit les marcheurs pour la Vie


SOURCE - Paix Liturgique - Lettre n°490 - 15 mai 2015

Ce dimanche 10 mai 2015 avait lieu à Rome la Marche pour la Vie italienne. En dépit d’un horaire peu habituel pour une manifestation en Italie (le dimanche après-midi), l’affluence était au rendez-vous grâce à la mobilisation de la plupart des réseaux pro-vie du pays. Et nos amis italiens du CNSP n'ont pas manqué de profiter de cette occasion pour promouvoir la forme extraordinaire du rite romain.


À l’issue de la marche, le Coordinamento nazionale del Summorum Pontificum (CNSP) a en effet organisé une messe selon la liturgie traditionnelle de l'Église, en mémoire d’une figure du mouvement pro-vie italien, le journaliste Mario Palmaro, connu également pour son attachement à la messe traditionnelle. Célébrée par Monseigneur Marco Agostini, cérémoniaire pontifical, cette messe a été un succès puisque plus de 300 fidèles se sont massés dans la petite église de San Giorgio in Velabro, qui jouxte l’arc de Septime Sévère (Arco degli Argentari) entre Tibre et Palatin.

Pour beaucoup de ces militants pro-vie, cette messe selon le missel de saint Jean XXIII était une première. Comme nous avons eu déjà l’occasion de l’écrire, la liturgie traditionnelle est encore confidentielle en Italie et nombreux sont les catholiques qui ne la connaissent pas encore. Du coup, à la sortie de la cérémonie, plusieurs fidèles commentaient entre eux cette expérience, l’un d’eux expliquant à un autre : « C’est la nouvelle messe en latin, celle de Benoît XVI »...

Comme l’explique Marco Sgroi, coordinateur national du CNSP : « Cette messe a été une occasion rare d’enrichissement spirituel pour ceux qui y ont participé. Dès la fin de la marche, soit une heure avant la messe, les fidèles avaient commencé à remplir l’église, cherchant non seulement un peu de fraîcheur mais aussi un peu de silence pour se préparer à la célébration. Très vite, un confessionnal s’est improvisé dans une allée latérale (San Giorgio est une église qui ne sert pratiquement plus que pour les mariages et son mobilier est réduit au minimum) et un valeureux prêtre a confessé jusqu’à la fin de la messe, les pénitents se succédant sans discontinuer. J’ai été frappé par la ferveur de l’assemblée, y compris par celle de toutes les familles qui découvraient pour l’occasion la liturgie traditionnelle. Certains fidèles m’ont confié ensuite avoir été surpris de la facilité avec laquelle ils ont suivi cette liturgie qu’ils imaginaient pompeuse et compliquée. De tels témoignages justifient largement tous les efforts consentis pour organiser une telle cérémonie : je remercie d’ailleurs les séminaristes de l’Institut du Christ-Roi Souverain Prêtre qui ont assuré le service de l’autel et su faire face au fait que la sacristie de San Giorgio se trouve aujourd’hui dépourvue de quasiment tous les objets nécessaires à la célébration de la liturgie traditionnelle ! »
LES RÉFLEXIONS DE PAIX LITURGIQUE
1) Les vertus missionnaires de la liturgie traditionnelle ne sont plus à démontrer mais il est toujours utile de rappeler combien celle-ci peut « saisir » l’âme des fidèles qui la rencontrent pour la première fois, surtout si cette rencontre a lieu dans un contexte favorable. En ce sens, toutes les initiatives qui, grâce au Motu Proprio de Benoît XVI, permettent de proposer cette messe dans le cadre d’un pèlerinage ou d’une journée de dévotion particulière, sont à encourager.

2) L’église de San Giorgio in Velabro abrite la « confession » de saint Georges – le lieu où sont conservées les reliques du saint qui a « confessé » la Foi par ses vertus – au-dessus de laquelle se dresse le maître-autel à baldaquin. La disposition paléochrétienne du chœur fait que, comme dans beaucoup de basiliques romaines dont Saint-Pierre, le célébrant se retrouve à la fois « orienté » (face au Seigneur, à l’Orient) et face aux fidèles mais en les surplombant. À notre connaissance, or des occasions privées (mariages notamment), c’était la première fois qu’une messe traditionnelle était célébrée en cette belle église depuis la réforme liturgique.

3) Monseigneur Agostini, chaleureux et compétent cérémoniaire pontifical, fait partie des officiels de curie qui célèbrent tous les matins leur messe privée à Saint-Pierre-de-Rome selon le missel de saint Jean XXIII. Toujours disponible pour célébrer à la demande des fidèles, pour peu que le calendrier des célébrations pontificales le lui permette, il nous a confié qu’en fait c’était la première fois qu’il célébrait la messe traditionnelle « face au peuple ». Toutefois, comme il nous l’a précisé, l’expérience n’avait rien à voir avec la messe ordinaire car, outre le fait que l’autel surplombe la nef, toute l’attention du célébrant est portée sur les offrandes et le crucifix.
Les fidèles des premiers rangs, d’ailleurs, ont pu prendre conscience de ce que, comme le disait Alex Periscinoto, cité dans notre lettre 487, le prêtre ne tourne pas le dos aux fidèles lorsqu’il célèbre ad Orientem mais dialogue vraiment « face à face avec le Seigneur ».

4) Il nous plaît de souligner cette remarque d’un fidèle, qui n’est naïve qu’en apparence : « C’est la nouvelle messe en latin, celle de Benoît XVI. » Dans la perception commune, le pontificat de Benoît XVI marque une inversion de courant manifestée notamment au plan liturgique, et en particulier par le rétablissement de la liberté de la messe traditionnelle, que certains avaient voulu enterrer tout à fait illégalement. De même qu’il y a eu une messe « de Paul VI » à la fin des années 60, il y a une messe « de Benoît XVI » en ces années 2010. Bien sûr, cette messe n'est pas nouvelle mais millénaire. Toutefois, au regard de ce que représente aujourd'hui la messe de Paul VI, et du public aux cheveux grisonnants qui la caractérise, il n'est pas surprenant que quelqu'un qui la découvre dans une ambiance aussi familiale que celle d'une marche pour la vie, la perçoive comme une « nouvelle » messe.

5) Nous avons toujours soutenu que l’élan de « retour vers les fondamentaux », que Benoît XVI a marqué de son sceau mais qui existait avant lui, est irréversible. Ce retour de balancier par rapport aux années 60, ne concerne pas seulement les choses liturgiques, mais s'y fait tout particulièrement sentir. Même si le catholicisme des vieux pays de chrétienté s'étiole à vue d'œil, victime des longues crises postconciliaire et post-68, il est évident qu'il manifeste chaque jour de réels signes de résistance à la sécularisation quand ce n'est pas, carrément, de renouveau. Gageons donc que l'Église qui se profile dans nos pays aura donc toujours davantage le visage de ce « nouveau catholicisme » aussi prompt à marcher pour les principes non négociables qu'à s'agenouiller au pied de l'autel. Un catholicisme « nouveau » avec de « nouveaux prêtres » et bientôt, pourquoi pas ?, de « nouveaux évêques »…