SOURCE - Le Courrier de Floride - 6 décembre 2015
L’abbé Marc Vernoy, 50 ans, originaire de Pont-Audemer en Normandie, est supérieur de la Fraternité Saint Pie X pour la Floride. Fraternité composée de plus de 600 prêtres, elle est néanmoins le point de ralliement d’un très grand nombre de pratiquants attachés à la messe tridentine (qui a pour principale singularité d’être une messe en grande partie en latin).Tous ses prêtres portent la traditionnelle soutane noire (ou blanche quand il fait très chaud). L’abbé Vernoy a été prêtre en France durant 10 ans, mais il en est également à sa 10ème année à l’étranger, au grès des mutations (imposées par la hiérarchie) : Inde, Sri Lanka, Philippines, puis supérieur de la Fraternité pour toute l’Afrique, avant de prendre la direction de la Floride où il supervise depuis Sanford (Orlando) sept lieux de cultes (à Miami, Fort Myers, etc…) et une école. Il est le seul prêtre français à exercer en Floride. – Site web : www.sspxflorida.com
L’abbé Marc Vernoy, 50 ans, originaire de Pont-Audemer en Normandie, est supérieur de la Fraternité Saint Pie X pour la Floride. Fraternité composée de plus de 600 prêtres, elle est néanmoins le point de ralliement d’un très grand nombre de pratiquants attachés à la messe tridentine (qui a pour principale singularité d’être une messe en grande partie en latin).Tous ses prêtres portent la traditionnelle soutane noire (ou blanche quand il fait très chaud). L’abbé Vernoy a été prêtre en France durant 10 ans, mais il en est également à sa 10ème année à l’étranger, au grès des mutations (imposées par la hiérarchie) : Inde, Sri Lanka, Philippines, puis supérieur de la Fraternité pour toute l’Afrique, avant de prendre la direction de la Floride où il supervise depuis Sanford (Orlando) sept lieux de cultes (à Miami, Fort Myers, etc…) et une école. Il est le seul prêtre français à exercer en Floride. – Site web : www.sspxflorida.com
LE COURRIER DE FLORIDE : Après ces expériences sur divers continents, où est-il le plus facile d’être prêtre catholique et de porter la soutane?
A vrai dire, je ne me pose jamais la question de la facilité ou de la difficulté du ministère. Nous ne savons pas pour combien de temps nous sommes nommés ici ou là et la grande règle pour être heureux est de donner le maximum, de s’adapter à la vie locale pour la vivre pleinement. Ceci dit, il est fondamental de toujours se souvenir d’où nous venons et de nous rappeler qui nous sommes. Notre vie de communauté est une aide nécessaire pour nous garantir un minimum de stabilité et pour nous ressourcer auprès de Dieu, afin de toujours garder la cap sur le Ciel.
J’entame ma sixième année en Floride, j’y suis très heureux à tous points de vue. Quant au port de la soutane, elle nous rappelle constamment qui nous sommes et annonce la présence de Dieu dans la société, elle est un excellent outil d’apostolat. Il m’arrive de confesser et de bénir dans les magasins, dans les aéroports, en avion, dans les stations-service. Je n’ai jamais nulle part rencontré de réelle difficulté, il n’y a que dans l’ambiance morose de Paris où l’on peut parfois être pris pour un extra-terrestre.
Le CDF : Mais les Etats-Unis sont tout de même une terre plutôt bienveillante pour les religieux ?
Les Etats-Unis sont un immense pays où le religieux n’est pas reçu partout de la même manière. L’accueil floridien est excellent, on y trouve un réel intérêt pour la vie spirituelle. En cinq ans, notre paroisse d’Orlando a vu sa congrégation grossir de plus de 150%. Les nouveaux paroissiens sont essentiellement de jeunes familles. C’est une grande joie pour le prêtre.
Le CDF : Le pape François a eu le désir, notamment avec le récent synode ou encore avec ses déclarations lors de son voyage aux USA, de défendre les « pêcheurs », notamment les divorcés remariés ou les homosexuels, en faisant « évoluer l’Eglise » à leur sujet. Vous êtes-vous senti visé quand le pape a contesté l’esprit «pharisien» des catholiques qui défendrait trop la loi au détriment de la charité?
Cette approche est celle du Christ, qui est venu pour les pécheurs, c’est une approche missionnaire et notre Fraternité est une congrégation missionnaire fondée par un des plus grands missionnaires d’Afrique au XXème siècle, Mgr Marcel Lefebvre. Il est malheureux de voir la loi et la charité, la justice et la miséricorde présentées comme opposées par les médias, alors qu’elles sont parfaitement unies dans la vie catholique. L’Évangile est la Loi d’Amour, parce que Dieu est tel. Mais c’est une loi objective qui transcende le temps et l’espace et s’adresse au cœur de chacun. Nous vivons dans un monde où l’on ne sait plus aimer, parce qu’on a désappris à aimer, nous rencontrons des âmes souffrantes qui ont perdu la capacité d’aimer parce qu’elles confondent le plaisir jusqu’à l’addiction, jusqu’à l’esclavage et l’amour qui est un don. La tendance nombriliste rend malheureux. Il faut réapprendre à s’oublier soi-même, à vivre dans la réalité où Dieu demeure et à continuer à parler vrai au sujet du péché, c’est là la première et fondamentale miséricorde.
Le Christ reproche très vivement aux Pharisiens d’altérer sa parole, en multipliant les exceptions à la loi et en imposant leurs arrangements. « Vous anéantissez la Parole de Dieu, en vous donnant des préceptes qui sont des commandements d’hommes. » (Marc 7, 13). Contre les Pharisiens qui dénaturaient le mariage par la répudiation et le divorce, le Christ restaure la sainteté et la simplicité du mariage où l’on trouve le véritable amour dans le don et aussi dans le sacrifice. Pour avoir défendu le sacrement de mariage, saint Jean-Baptiste, saint Thomas More, saint John Fisher ont été décapités.
Le Christ aime le pécheur, mais hait son péché, cette vérité est à la fois juste et miséricordieuse.
Le CDF : Qu’est-ce qui est le plus difficile lors d’une longue expatriation ? Qu’est ce qui manque le plus de la France?
Le prêtre n’est jamais véritablement expatrié, il n’est pas accueilli comme un étranger. Cela rend l’adaptation assez rapide et plutôt facile. Jusqu’à la moitié du XXème siècle, bien des missionnaires ne rentraient jamais en France. Notre règle de vie permet de garder notre identité, parce qu’il ne faut pas oublier d’où nous venons et qui nous sommes, c’est une richesse incommensurable et un gage d’équilibre.
Je suis heureux de pouvoir rentrer une fois par an pour visiter famille et amis, mais j’avoue volontiers ma faiblesse ; je suis partagé : d’une part amertume et morosité en France sont très pesantes. La vie ici aux Etats-Unis est meilleure de ce point de vue ! Cependant si mes supérieurs me demandaient de contribuer à aider mon pays, je saurais sacrifier ce « confort américain », et j’en serai content.
Pour ce qui me manque le plus, c’est certainement la vie culturelle, la vraie.