SOURCE - Edouard de Mareschal - Le Figaro - 11 avril 2016
L'analyse de l'ordinateur d'un des kamikazes des attentats du 22 mars à Bruxelles a révélé que l'Institut Civitas était sur la liste des djihadistes. L'association traditionaliste fait régulièrement parler d'elle en dénonçant ce qu'elle considère comme des attaques christianophobes.
L'analyse de l'ordinateur d'un des kamikazes des attentats du 22 mars à Bruxelles a révélé que l'Institut Civitas était sur la liste des djihadistes. L'association traditionaliste fait régulièrement parler d'elle en dénonçant ce qu'elle considère comme des attaques christianophobes.
La perquisition de l'appartement des auteurs de l'attaque de Bruxelles pourrait s'avérer capitale pour l'avancement de l'enquête. L'attentat du 22 mars semble n'être qu'une réaction précipitée à l'arrestation de plusieurs de leurs complices les jours précédents, dont Salah Abdeslam. Les terroristes envisageaient d'autres attaques en Belgique, mais aussi en France, où plusieurs sites avaient été isolés. Parmi eux, le centre commercial de la Défense, mais aussi l'Institut Civitas, association catholique traditionaliste proche de la Fraternité Saint-Pie X. «On n'a pas eu de confirmation, mais plusieurs médias ont écrit que Civitas figurait sur une liste assez longue de cibles potentielles», explique le porte-parole de l'Institut, François-Xavier Peron. L'association a pris contact avec le commissariat d'Argenteuil, où ils sont domiciliés, sans que celui-ci ne puisse leur confirmer l'information.
Pas de protection policière
Civitas ne s'inquiète pas outre-mesure que son nom apparaisse sur une liste de cibles potentielles pour des attaques terroristes. «Notre siège social est sans grand intérêt. S'ils ont fait des repérages, ils ont rapidement dû se rendre compte que ce n'était pas en nous ciblant qu'ils allaient faire des dizaines de morts», poursuit François-Xavier Peron. Pour lui, d'autres cibles à forte affluence comme le centre commercial de la Défense sont à prendre bien plus au sérieux. D'ailleurs, François-Xavier Peron précise que l'association n'est plus sous protection policière «depuis des mois». Civitas a déjà été la cible d'une alerte à la bombe, mais pas de menaces sérieuses de la part de groupes terroristes islamistes. «Notre dernier colloque, qui s'est tenu le 19 mars à Paris, n'a pas fait l'objet d'une attention particulière de la police», précise-t-il, avant de conclure: «De toute façon, une protection policière ne semble pas dissuader les terroristes, on l'a bien vu avec Charlie Hebdo.»
Pourquoi cette association aurait-t-elle particulièrement retenu l'attention des terroristes? «Si je voulais répondre un peu sur le ton de la plaisanterie, je dirais que cela signifie que nous incarnons, pour l'opinion publique, l'emblème de la véritable chrétienté», réagit son président Alain Escada dans les colonnes du quotidien Présent. La médiatisation de certaines actions a peut-être donné à Civitas «plus d'audience et d'importance aux yeux des islamistes que d'autres mouvements», poursuit-il.L'association catholique traditionaliste est en perte de vitesse, mais elle a revendiqué jusqu'à 60.000 personnes dans ses défilés en marge de la Manif pour tous. La structure fait régulièrement parler d'elle dans ses campagnes contre ce qu'elle considère comme des attaques christianophobes. En avril 2011, à Avignon, Civitas avait organisé la mobilisation contre le «Piss Christ», une photographie d'un crucifix baignant dans un verre d'urine. Trois jours après une manifestation qui avait rassemblé entre 500 et 1500 personnes, deux individus non identifiés s'étaient introduits dans le musée et avaient détruit l'oeuvre à coups de marteau. La même année, Civitas se mobilisait à Paris contre «Golgota Picnic», une pièce de théâtre qui se voulait une «déconstruction de la personne et du message du Christ».
L'association est aujourd'hui dans le collimateur de Bercy, qui lui a retiré son titre d'«organisme d'intérêt général». Elle ne peut donc plus délivrer de reçus fiscaux aux donateurs pour bénéficier d'une déduction d'impôts à hauteur de 66% du montant versé. La décision a été prise avec effet rétroactif, précise son président Alain Escada qui dénonce une décision politique. «Les 55.000 euros que l'Etat nous réclame vont mettre nos caisses à plat et nous dépouiller de nos moyens de fonctionnement.», a-t-il fait savoir dans un communiqué diffusé fin janvier. Depuis, Civitas dit avoir reçu des dons de «plusieurs milliers d'euros en provenance de toute la France» qui ont «renfloué les caisses de l'association».