20 juillet 2017

[Pierre Labat - Rivarol] Rome et la Fraternité Saint-Pie X : le jeu de l’oie

SOURCE - Pierre Labat - Rivarol - 20 juillet 2017

Le feuilleton des relations de Rome et de la Fraternité Saint-Pie X n’en finit pas d’agiter Tradiland. Jusqu’ici François avait multiplié les gestes apparemment favorables aux traditionalistes. Le dernier en date donne les règles pour que les mariages bénis par la Fraternité Saint- Pie X jouissent d’une «juridiction officielle». Mgr Bernard Fellay, actuel supérieur de cette Fraternité, s’en était réjoui publiquement. Ses prêtres n’étaient pas du même avis. L’évêque suisse avait dû faire face à la fronde des doyens du district de France qui, dans une lettre lue à leurs fidèles le 7 mai 2017, ont rejeté les dispositions prévues. Une pétition s’y opposant avait recueilli près de 700 signatures en quelques semaines. Les nombreux commentaires des signataires montraient l’exaspération des fidèles face aux intrigues de l’équipe de Menzingen. Pour tenter de sauver sa négociation et son autorité, Mgr Fellay a frappé les prêtres récalcitrants de sanctions très dures. L’abbé de La Rocque, prieur de Saint-Nicolas- du-Chardonnet, a ainsi été expédié dans l’île de Mindanao aux Philippines qui est agitée à la fois par l’indépendantisme musulman et par la guérilla marxiste et maoïste. Le groupe Abou Sayyaf de l’Etat Islamique, spécialisé dans les enlèvements, vient d'y exécuter un otage allemand. L’île est classée «territoire déconseillé» par les services diplomatiques français. 
     
Cette gestion autoritaire des troupes n’est pas nouvelle. Le chemin de Mgr Fellay est jonché du corps de ses opposants internes qu’il exile aux quatre coins du monde, quand il ne les renvoie pas purement et simplement comme Mgr Richard Williamson.
     
Le Supérieur de la Fraternité Saint-Pie X, malgré ses multiples actes d’allégeance au Vatican, vient de prendre une douche froide. Le 27 juin le “cardinal” Müller lui a fait part de la décision “unanime” de la Commission Ecclesia Dei, avec l’approbation de François : il n’y aura pas de régularisation sans une adhésion pleine et entière au concile Vatican II. Chaque membre de la Fraternité Saint-Pie X devra : 1° faire profession de foi dans la forme de 1988, 2° accepter explicitement les enseignements du Concile Vatican II et de la période post-conciliaire, 3° reconnaître, non seulement la validité, mais aussi la légitimité de la nouvelle messe et des sacrements de Vatican II. Visiblement embarrassée, la Fraternité Saint-Pie X tarde à communiquer. 
     
Le 29 juin, prenant la parole devant ses prêtres après le déjeuner des ordinations à Ecône, Mgr Fellay a parlé de «coup de massue» et fait part de sa déception : «C’est comme dans le jeu de l’oie. On était presque arrivé au but, et nous sommes tombés sur la case : retour à la case départ. Voilà que tout est par terre, il faut tout recommencer à zéro.»
     
Tout ça pour ça? L’oie doit se méfier des renards. Ce nouvel épisode minable montre combien Mgr Fellay est aveuglé. A-t-il vraiment cru que la Fraternité Saint-Pie X pourrait réintégrer l’église conciliaire de François sans avoir à adhérer à Vatican II? Depuis près de 20 ans Mgr Fellay travaille à un accord “pratique” avec Rome. Il rêve d’une « prélature personnelle»: une Fraternité Saint-Pie X directement rattachée à François, jouissant d’une juridiction officielle tout en restant sur ses positions dogmatiques. Cet accord “pratique” est un leurre. La réaction brutale du “cardinal” Müller ramène Mgr Fellay à la réalité. Elle intervient après de longues années de négociations plus ou moins secrètes et en dit long sur les compromissions de Menzingen pendant ce jeu de l’oie...
     
Mgr Fellay n’a plus la confiance de ses prêtres ni celle des fidèles. Désormais il est rabroué par Rome. Son mandat arrive à échéance l’an prochain. Qu’il se retire et fasse pénitence.
     
Pierre LABAT.