A la mi-juillet 2018 sera désigné le nouveau supérieur général de la Fraternité sacerdotale Saint-Pie X (FFSPX). Le Suisse Bernard Fellay, ordonné en 1988 par Mgr Marcel Lefebvre en est déjà deux mandats à la tête de la Fraternité. Sera-t-il élu pour un troisième ?
En 1988, lorsque Mgr Marcel
Lefebvre, en rupture avec Rome, voulut assurer sa succession, il ordonna quatre
évêques à Ecône en Valais. Ce geste marqua la rupture avec Rome et provoqua
l’excommunication de la Fraternité sacerdotale Saint Pie X (FSSPX). Parmi les
évêques consacrés par Mgr Lefebvre, le plus jeune était âgé de 30 ans à peine:
c’était le Valaisan Bernard Fellay. Cette ordination épiscopale s’était faite
contre la volonté du pape et fut donc sanctionnée par Rome.
Bernard Fellay était le plus doué
sur le plan linguistique et le plus intelligent des quatre nouveaux évêques
traditionalistes. Logiquement, en 1994, trois ans après la mort de Mgr
Lefebvre, il fut donc élu supérieur général de la FSSPX, qui a continué à
croître sur tous les continents malgré l’excommunication. Depuis, il a dirigé
la Fraternité pour deux mandats de 12 ans, soit 24 ans au total. Reste à voir
si le Chapitre général l’élira comme supérieur une troisième fois à la
mi-juillet. Le jeu est ouvert.
Un bilan impressionnant
Le nombre de prêtres actifs et
futurs prêtres est passé, sous la houlette de Mgr Fellay, à plus de 600 prêtres
et plus de 200 séminaristes dans le monde. L’évêque valaisan a fait plusieurs
concessions aux papes successifs depuis qu’il est entré à la basilique
Saint-Pierre de Rome, lors de l’Année sainte 2000, durant un pèlerinage
spectaculaire avec des centaines de partisans. Il a commencé de se rapprocher
progressivement de Rome.
Le pape Benoît XVI était celui
dont il se sentait le plus proche: en 2007, le pontife allemand a accepté à
nouveau la célébration de la messe tridentine en latin dans le monde entier, et
en 2009, il a levé l’excommunication à la demande de Mgr Fellay.
Depuis lors, le statut
ecclésiastique de la FSSPX se situe dans une zone grise, entre séparation et
réunification. Le pape François a encore atténué cette frontière en permettant
aux prêtres de la Fraternité d’administrer le sacrement de la confession et d’assister
aux mariages catholiques. En même temps, toutefois, le fossé s’est encore
creusé en matière de la théologie dogmatique et morale.
Pourtant, le projet de l’Eglise
romaine d’admettre à la communion les catholiques divorcés et remariés ou les
conjoints protestants de catholiques, comme récemment proposé en Allemagne,
montrent une fois encore, du point de vue de Mgr Fellay et de ses amis, les
“faux chemins” que l’Eglise catholique a pris en s’adaptant à la modernité et
au “néo-protestantisme”.
Accusations contre Rome
Lorsque Mgr Fellay critique ces
développements, il le fait rarement en grondant. Il laisse ce soin à des
confrères plus orientés vers la polémique. Le Suisse préfère persévérer et
défendre sa vision des choses: pour lui, ce n’est pas la FSSPX qui s’est
éloignée de l’Eglise romaine, mais Rome qui, depuis le concile Vatican II
(1962-1965), s’est de plus en plus éloignée de sa propre doctrine et de sa
tradition séculaire.
C’est pour cette raison que Mgr
Fellay a cosigné une “correction fraternelle” avec de nombreux théologiens et
intellectuels plus ou moins éminents en septembre 2017. Dans cet avertissement
public, le pape François est appelé à révoquer les hérésies présumées liées à
la communion en faveur des personnes divorcées remariées.
Reconnaissance du pape
Dans l’exposé de ses motifs, Mgr
Fellay explique: “Par chaque fibre de notre être, nous sommes connectés à Rome,
qui est la mère et la maîtresse. Nous ne serions plus romains si nous rejetions
ses 2000 ans d’enseignement. Bien au contraire. Nous deviendrions alors, nous
aussi, les artisans de sa destruction, avec une situation morale dangereusement
basée sur une théologie ramollie”.
En dépit de divergences
théologiques croissantes, Mgr Fellay tient à la reconnaissance du pape. Un pape
dont l’effigie est également affichée au siège central de la Fraternité. Ainsi,
le supérieur général démarque fortement ses troupes des traditionalistes les
plus extrêmes. Entre temps, ces derniers ont créé, sous l’impulsion de l’ancien
de la FSSPX l’évêque Richard Williamson une “communauté sacerdotale Marcel
Lefebvre“ avec la participation de ses propres évêques, excommuniés.