SOURCE - Josée Legault - Le Journal de Montréal - 11 janvier 2019
On parle beaucoup du voile islamique comme symbole de fondamentalisme religieux et d’inégalité des femmes. Tellement qu’on en a oublié les catholiques intégristes.
On parle beaucoup du voile islamique comme symbole de fondamentalisme religieux et d’inégalité des femmes. Tellement qu’on en a oublié les catholiques intégristes.
Bien cachés dans notre angle mort collectif, laïcs ou prêtres, ces intégristes sont de toutes origines. Ils ont leurs lobbys. Ils ont l’appui ouvert ou tacite du haut clergé. Ils ont leurs émissions de radio. Certains siègent même à des conseils de parents d’écoles pourtant déconfessionnalisées.
Leur but : propager les dogmes catholiques, dont l’opposition à l’avortement, à l’homosexualité et à l’égalité des femmes. Cette fois-ci, l’offensive entre à l’école. La Presse rapporte qu’un « manuel » spécial est offert aux parents « inquiets » du retour d’une éducation minimale à la sexualité.
Il est rédigé par un médecin catholique et l’abbé Robert Gendreau de l’archevêché de Montréal – tous deux connus pour leur catholicisme intransigeant. Ce « manuel » propose carrément aux parents de retirer leur enfant de la classe. Question de leur donner eux-mêmes, à la maison, une éducation sexuelle conforme aux préceptes catholiques.
Symbole de liberté
On en perd son latin, mais on ne devrait guère en être surpris. Armées de leurs dogmes respectifs, toutes les grandes religions cherchent à contrôler la sexualité de leurs fidèles, symbole de liberté. Et celle des femmes, tout particulièrement. Avec ce petit « manuel », des intégristes catholiques tentent maintenant de contrôler ce qu’en apprendront certains enfants.
Face aux réactions publiques courroucées, l’archevêché a fini par prendre ses distances du « manuel ». Il l’avait pourtant publicisé. Cela dit, le vrai problème demeure. Soit l’influence que tentent encore d’exercer des fondamentalistes jusque dans les écoles.
Cette histoire ne va pas sans rappeler les débats acrimonieux qui, en Ontario, entourent aussi l’éducation à la sexualité. Des parents rigoristes, toutes religions confondues, rejettent la version modernisée présentée par l’ancien gouvernement libéral. Résultat : le premier ministre ultraconservateur Doug Ford s’est engagé à la révoquer.
Encore récemment, même au Québec, Le Journal rapportait que des directeurs d’école font face à des parents « agressifs » exigeant de retirer leurs enfants des futures « plages » d’éducation sexuelle de quelques heures à peine par année.
Désastre social
Depuis l’annulation des cours d’éducation sexuelle dans les années 2000, c’est le porno qui, violent et dégradant pour les femmes, « enseigne » la sexualité aux enfants et aux ados. C’est un désastre. Le retour de l’éducation sexuelle, même timide, en est un premier contrepoids essentiel.
Comprenons-nous bien. Cette histoire n’a rien à voir avec la « foi » ou la « liberté de conscience ». Laquelle, comme il se doit, est protégée par nos chartes. Ce « manuel » – et son invitation tordue aux parents catholiques zélés à sortir leurs enfants de leur classe – est une entreprise intégriste délibérée visant à les priver d’une partie vitale de leur éducation.
Disons-le clairement. Tant que les femmes seront exclues de la prêtrise, les dogmes catholiques resteront ce qu’ils sont : misogynes et homophobes. Des prêtres pédophiles continueront aussi à sévir à travers le monde. L’ensemble de l’œuvre enlève toute crédibilité à l’Église en matière de sexualité humaine et d’égalité des droits.