SOURCE -Nicolas Senèze - La Croix - 15 janvier 2006
Mgr Bernard Fellay, supérieur général de la Fraternité Saint-Pie-X, a accueilli le discours du pape à la curie, prononcé le 22 décembre 2005, avec intérêt
Depuis la rencontre, le 29 août 2005 à Castel Gandolfo, entre Benoît XVI et Mgr Bernard Fellay, supérieur général de la Fraternité Saint-Pie-X, le dialogue continue entre Rome et les «lefebvristes». «Les discussions sont longues, mais elles sont probablement les plus fructueuses de celles que nous avons eues jusqu'ici», a déclaré vendredi 13 janvier à Paris Mgr Fellay, supérieur général de la Fraternité, aux journalistes de l'Association des journalistes d'information religieuse (Ajir).
Le chef de file intégriste, qui a rencontré le 15 décembre le cardinal Dario Castrillon Hoyos, président de la commission Ecclesia Dei, affirme même sentir du côté du Vatican une volonté de résoudre le problème le plus rapidement possible. «Rome veut aller vite, mais nous ne sommes pas aussi sûrs de vouloir aller aussi vite !», tempère toutefois Mgr Fellay, estimant que «si nous signions aujourd'hui, tous nos fidèles ne nous suivraient pas».
D'où la contestation, plus profondément, d'un certain nombre de points du concile Vatican II : liberté religieuse et acceptation de la laïcité de l'État, oecuménisme et possibilité pour les chrétiens d'exprimer avec des mots différents les mêmes vérités de foi, dialogue interreligieux et « esprit d'Assise »
C'est donc avec beaucoup d'intérêt que Mgr Fellay a accueilli le discours de Benoît XVI à la curie, le 22 décembre, dans lequel le pape opposait deux herméneutiques (interprétations) du Concile : d'une part « l'herméneutique de la discontinuité et de la rupture », d'autre part « l'herméneutique de la réforme, du renouvellement dans la continuité », qui a sa préférence (lire sur la-croix.com "Benoît XVI discute l'interprétation de Vatican II").
Dernier point qui satisfait les lefebvristes dans les discussions avec Rome : l'affirmation, par le cardinal Castrillon Hoyos, qu'il n'y aurait pas eu de «schisme» de la part de Mgr Lefebvre au sens formel - à la télévision italienne, il avait préféré parler d'«attitude schismatique». «On se dirige ainsi plus vers une "régularisation" de la Fraternité», se félicite Mgr Fellay, même si demeure en cause la question de la licéité des ordinations épiscopales de 1988 (1). «Pour Rome, il n'y avait pas d'"état de nécessité" qui aurait justifié ces ordinations», regrette Mgr Fellay.
Quelle forme aurait cette régularisation ? Ce pourrait être un statut d'autonomie, par exemple une administration apostolique personnelle comme celle créée en 2001 à Campos (Brésil) pour les fidèles de Mgr Antonio de Castro Mayer, autre évêque intégriste, co-consécrateur lors des ordinations illicites de 1988. « Je suis presque sûr qu'on nous l'accordera, confie Mgr Fellay. Même si nous ne voulons pas être des catholiques à part : l'ancienne messe, nous ne la demandons pas pour nous, mais pour tous. Mais peut-être faudra-t-il passer par cette étape transitoire. »
Nicolas SENEZE
(1) Le 30 juin, Mgr Marcel Lefebvre avait procédé, sans l'autorisation de Rome, à l'ordination de quatre évêques (dont Mgr Fellay), provoquant leur commune excommunication par ce fait même.
Mgr Bernard Fellay, supérieur général de la Fraternité Saint-Pie-X, a accueilli le discours du pape à la curie, prononcé le 22 décembre 2005, avec intérêt
Le chef de file intégriste, qui a rencontré le 15 décembre le cardinal Dario Castrillon Hoyos, président de la commission Ecclesia Dei, affirme même sentir du côté du Vatican une volonté de résoudre le problème le plus rapidement possible. «Rome veut aller vite, mais nous ne sommes pas aussi sûrs de vouloir aller aussi vite !», tempère toutefois Mgr Fellay, estimant que «si nous signions aujourd'hui, tous nos fidèles ne nous suivraient pas».
Contestation d'un certain nombre de points du concile Vatican IICe qui semble satisfaire le plus la Fraternité Saint-Pie-X, c'est la volonté de Rome d'aborder les questions de fond. « Il est important, pour nous, de résoudre les problèmes avant plutôt qu'après », explique Mgr Fellay. Premier d'entre eux : la réforme liturgique. Les intégristes refusent toujours la messe dite « de Paul VI », dont ils rejettent « le caractère oecuménique ». « On y a enlevé tout ce qui était spécifiquement catholique, juge Mgr Fellay. Mais, plus profondément, il y a la foi. La liturgie est l'expression d'une vision de la vie catholique : c'est cette vision qui est la question de fond. »
D'où la contestation, plus profondément, d'un certain nombre de points du concile Vatican II : liberté religieuse et acceptation de la laïcité de l'État, oecuménisme et possibilité pour les chrétiens d'exprimer avec des mots différents les mêmes vérités de foi, dialogue interreligieux et « esprit d'Assise »
C'est donc avec beaucoup d'intérêt que Mgr Fellay a accueilli le discours de Benoît XVI à la curie, le 22 décembre, dans lequel le pape opposait deux herméneutiques (interprétations) du Concile : d'une part « l'herméneutique de la discontinuité et de la rupture », d'autre part « l'herméneutique de la réforme, du renouvellement dans la continuité », qui a sa préférence (lire sur la-croix.com "Benoît XVI discute l'interprétation de Vatican II").
«On se dirige vers une "régularisation" de la Fraternit黫 C'est un texte capital, note Mgr Fellay. On voit bien que le Saint-Père essaie de mettre le Concile dans une nouvelle lumière. En même temps, il concède qu'il y a eu une rupture, au moins dans la présentation. » D'une manière générale, ce discours « réjouit » le supérieur général de la Fraternité. « Même si je pense qu'il ne va pas assez loin », nuance-t-il.
Dernier point qui satisfait les lefebvristes dans les discussions avec Rome : l'affirmation, par le cardinal Castrillon Hoyos, qu'il n'y aurait pas eu de «schisme» de la part de Mgr Lefebvre au sens formel - à la télévision italienne, il avait préféré parler d'«attitude schismatique». «On se dirige ainsi plus vers une "régularisation" de la Fraternité», se félicite Mgr Fellay, même si demeure en cause la question de la licéité des ordinations épiscopales de 1988 (1). «Pour Rome, il n'y avait pas d'"état de nécessité" qui aurait justifié ces ordinations», regrette Mgr Fellay.
Quelle forme aurait cette régularisation ? Ce pourrait être un statut d'autonomie, par exemple une administration apostolique personnelle comme celle créée en 2001 à Campos (Brésil) pour les fidèles de Mgr Antonio de Castro Mayer, autre évêque intégriste, co-consécrateur lors des ordinations illicites de 1988. « Je suis presque sûr qu'on nous l'accordera, confie Mgr Fellay. Même si nous ne voulons pas être des catholiques à part : l'ancienne messe, nous ne la demandons pas pour nous, mais pour tous. Mais peut-être faudra-t-il passer par cette étape transitoire. »
Nicolas SENEZE
(1) Le 30 juin, Mgr Marcel Lefebvre avait procédé, sans l'autorisation de Rome, à l'ordination de quatre évêques (dont Mgr Fellay), provoquant leur commune excommunication par ce fait même.