La confession de la foi
« Sans la foi, il est impossible de plaire à Dieu. » He. 11, 6
« En cette Foi, je veux vivre et mourir. » François Villon
Mais pourquoi donc, chers amis et bienfaiteurs de la Fraternité, tant tenir à notre foi ? Au point d’espérer que nous serions capables, s’il le fallait, de mourir tout de suite avec nos enfants, à l’instar de l’admirable mère de ces sept frères dont le livre des Maccabées nous décrit le martyre, plutôt que de penser qu’ils pourraient nous survivre, hors d’elle, sur la terre ! Pourquoi nous entêtons-nous à ne rien vouloir concéder de notre Credo, à ne pas vouloir changer un iota de nos rites ? Pourquoi, toujours en raison de notre foi, en être aujourd’hui réduits au statut de bannis, aux yeux de l’Eglise ? Pourquoi nous être opposés jusqu’au pape lui-même, au motif de notre foi ? Il vient de venir en France et nous ne sommes même pas allés assister à sa messe, la messe qu’il célèbre, la nouvelle messe.
Pourquoi, les uns et les autres, avons-nous été attirés par cette Fraternité Saint-Pie X et pourquoi nous sommes-nous retrouvés sous ses ailes ? Pourquoi avoir choisi, pour les uns, de devenir prêtres, frères ou religieuses en son sein, pour les autres de fréquenter désormais ses chapelles, pour tous de s’en remettre à son enseignement et à son action de suppléance dans la crise de l’Eglise ?
Comment est-il possible, lorsque l’on appartient à des familles de tradition catholique immémoriale, dont chaque génération ne s’était jamais appliquée qu’à croire avec la même piété ce qui était cru par la précédente, d’en arriver à notre situation d’aujourd’hui ?
Nous le concédons volontiers à tous ceux que cet aveu pourrait intéresser : une telle opiniâtreté est ou de Dieu ou du démon !
Nous avons conscience de ne pas être meilleurs que les autres. Et nous pensons que, si ceux qui nous entourent avaient reçu autant de grâces que nous, ils en auraient certes fait un bien meilleur usage ! Nous devons bien prendre garde de ne pas oublier les malédictions de Notre- Seigneur envers les villes de Corozaïn et de Bethsaïda :
« Malheur à toi Corozaïn ! Malheur à toi, Bethsaïda ! Car si mes miracles qui ont été faits au milieu de vous avaient été faits dans Tyr et dans Sidon, depuis longtemps elles auraient fait pénitence, revêtues d’un sac et assises dans la cendre. » Lc 10, 13.
Cependant, nous ne voudrions justement pas encore ajouter, à toutes nos misères et à toutes nos insuffisances, celle de douter maintenant de notre foi et de ne plus vouloir en être les propagateurs sur cette terre. Et c’est en raison de la détresse où elle se trouve que nous nous faisons un devoir d’inviter chacun, ceux qui n’ont pas la foi ou ceux qui l’ont perdue, à s’interroger et à réfléchir, et ceux qui l’ont gardée, à s’y affermir davantage et à se convertir plus profondément pour qu’elle ne leur soit pas subtilisée par l’hérésie et la confusion des idées.
Nous en sommes arrivés là où nous en sommes parce qu’avant toute autre chose, nous croyons fermement à toutes les vérités que Jésus-Christ nous a révélées et nous a enseignées par son Eglise, et qu’au préalable, nous croyons non moins fermement que Jésus-Christ est vraiment Dieu Lui-même, deuxième Personne de la Sainte Trinité, qui s’est incarnée et a vécu parmi nous. Nous croyons que l’Eglise, fondée par Lui, est la seule véritable et que toutes les hérésies et autres prétendues « religions » sont inspirées ou fabriquées par le démon : « Il n’y a qu’un nom dans lequel il nous soit donné d’être sauvés. » Act. 4, 12
Bien que conscients de notre incapacité foncière à prendre la mesure de ce fait historique admirable et incompréhensible de l’Incarnation de Dieu, et de la pauvreté de l’énonciation que nous pouvons seulement en risquer avec nos mots inadaptés, nous avons la certitude qu’il s’est bel et bien réalisé et nous savons que toute recherche loyale au sujet des fondements de la foi catholique amène ceux qui s’y livrent avec sincérité à découvrir l’accumulation inouïe des signes certains que le Christ a donnés de sa messianité et de sa divinité. « O Dieu », lui dit David : « Vous avez revêtu vos témoignages d’un excès de crédibilité. » Ps. 92, 5.
Remplis de cette conviction dont l’objet même fait perdre toute consistance à toute autre à ses côtés, il apparaît à l’évidence que Notre Seigneur Jésus-Christ étant venu sur la terre, aucune vie ne peut plus désormais être envisagée, pensée et vécue hors de Lui, et que seuls ses exemples et sa doctrine constituent, à jamais, l’infaillible vérité et le doux joug sauveur auxquels doivent se soumettre tous les hommes. Même, ceux-ci n’auraient-ils pas dû, depuis cet avènement, passer le meilleur de leur existence terrestre à rester saisis d’admiration et d’adoration à cette unique pensée que Dieu, dans son ineffable condescendance, est venu habiter parmi eux et s’est fait « semblable à eux en tout sauf le péché » ? He. 4, 15. Après son passage ici-bas et la révélation de ses mystères, n’aurions-nous pas dû ne plus laisser d’autre douce occupation à notre Dieu que celle de devoir, de son Ciel de gloire, sans cesse diligenter de nouveaux anges pour arracher à leur contemplation les hommes qui n’auraient plus rien fait, sinon d’y vivre abîmés, tels les Apôtres au jour de l’Ascension ?
Et pourtant, une fois cité ce saisissement que cause le dévoilement de Dieu devant nos yeux de chair, nous ne connaissons ensuite, sur la terre, aucun plus grand sujet d’étonnement que celui-là : nous autres hommes, après l’Incarnation, nous nous sommes montrés capables de continuer à vivre ici-bas comme nous vivons, c’est-à-dire à peu près comme si Dieu n’y était jamais descendu, et même, pire encore, en nous dressant insolemment contre sa venue et contre son salut. Comment, mais comment donc est-il possible qu’une telle infinie bonté de Dieu soit devenue si méconnue des hommes et si méprisée d’eux ? La charité s’est refroidie à travers les siècles. Reste-t-il encore aujourd’hui des âmes en qui résonne la plainte du Saint-Esprit : « Il est venu chez les siens et les siens ne l’ont pas reçu. » ?Jn 1,11. Comment est-il possible, Seigneur, que vous ayez invité les hommes à découvrir et à parcourir sur vos traces ces sentiers intérieurs d’une beauté si intense - « Le sentier des justes est semblable à une clarté qui va sans cesse croissant jusqu’à la splendeur du plein jour. » (Prov. 4, 18) - et que ces profondeurs de la foi et de l’amour demeurent tellement ignorées ? Pauvres générations qui ne croient plus en la vérité et ont perdu jusqu’à l’idée des trésors infinis que recèle la foi.
Car nous-mêmes, lorsque nous croyons croire, que croyons-nous vraiment ? Croyons-nous fermement, comme aux vérités les plus précieuses, à tous les dogmes de notre Foi ? Les croyons-nous parce que c’est Jésus-Christ qui nous les a révélés ; que Jésus-Christ est Dieu et qu’Il ne peut ni se tromper ni nous tromper ? Croyons-nous au point de n’être préoccupés de rien, sur cette terre, davantage que d’augmenter notre foi et de la transmettre sans corruption ?
Croyons-nous que nos enfants et nous-mêmes ne pourrons en aucune manière être sauvés hors de cette foi ? Que, si par malheur, nous la perdions ou qu’elle se corrompait en nous et que nous parvenions dans cet état à l’heure de notre jugement, nous tomberions alors certainement en enfer pour toute l’éternité ? Qu’il est parfaitement vain - et c’est là l’une de ces duperies du modernisme qui a malheureusement trouvé sa fortune jusque dans nos rangs- d’imaginer une charité qui pourrait exister sans la foi car, comme l’a fort bien exprimé Monseigneur Gay : « L’amour est le terme de la foi, son dernier acte et sa couronne » ?
Croyons-nous qu’il ne suffit pas d’avoir la foi mais qu’il est également nécessaire de la confesser et de la confesser d’autant plus ardemment qu’elle est partout décriée, déconsidérée et tenue pour rien ? Que Notre-Seigneur, dans l’Evangile, n’a de cesse que de presser en réalité davantage tous ceux auxquels Il s’adresse pour les exhorter à augmenter leur foi : « Pourquoi n’avons-nous pas pu chasser ce démon ? Jésus leur dit : “A cause de votre peu de foi. Je vous le dis, en vérité, si vous aviez une foi grosse comme un grain de sénevé, vous diriez à cette montagne : Transporte-toi d’ici là, et elle s’y transporterait. Rien ne vous serait impossible. ” » Mt. 17, 18-19. La foi est donc susceptible de plus et de moins dans les âmes et aucun d’entre nous, au motif qu’il l’a déjà, ne se trouve pour autant quitte à l’égard de cette vertu.
Les esprits modernes sont enclins à mépriser la docilité avec laquelle les catholiques de tant de siècles ont continué à se courber devant les mêmes dogmes. Ils se disent persuadés que cette seule permanence de foi suffit à démontrer leur fanatisme. Ils n’ont accepté de décolérer de ce spectacle qu’en raison du soulagement que leur a procuré l’émergence d’une génération catholique enfin intelligente, après toutes ces autres si longtemps demeurées prisonnières de l’obscurantisme et de l’asservissement où les tenait l’Eglise. Leur moindre sévérité envers son actuelle hiérarchie est la récompense justement octroyée pour sa rupture d’avec la Tradition.
Nous n’avons aucun mal à reconnaître que nous nous sentons réellement aux antipodes de ce modernisme et nous avouons mériter amplement tout le mépris dont nous honorent ses ténors. Notre esprit, nous le retrouvons, à l’identique, en celui que Ronsard, confronté aux malheurs déclenchés par l’hérésie du protestantisme, a consigné en ces vers de sa « Remontrance au peuple de France » :
« Mais l’Evangile saint du Sauveur Jésus-Christ
M’a fermement gravé une foi dans l’esprit
Que je ne veux changer dans une autre nouvelle,
Et, dussé-je endurer une mort très cruelle,
De tant de nouveautés je ne suis curieux :
Il me plaît d’imiter le train de mes aïeux ;
Je crois qu’en Paradis ils vivent à leur aise,
Encor qu’ils n’aient suivi ni Calvin ni de Bèze. »
Ainsi donc, quoi qu’il en soit du jugement de nos contemporains, nous croyons, nous continuons à croire à tous les articles de notre foi catholique et qu’elle doit toujours demeurer. Nous la voyons partout en train de s’éroder, de se perdre et de déchoir et nous ne voulons pas que celle de nos âmes subisse le même sort. Nous ne demandons rien d’autre que la grâce de ne jamais abandonner notre foi et de pouvoir la transmettre à nos enfants dans toute son intégrité. Nous prions pour que nos enfants, à leur tour, y persévèrent et puissent la communiquer en héritage - pareillement inchangée - à leurs enfants, et qu’il en soit toujours ainsi. Nous voulons de tout notre coeur, et par la grâce de Dieu, encore répandre cette foi jusqu’aux extrémités de la terre et la rendre à tous ceux qui l’ont perdue. Nous croyons ce que nos pères ont toujours cru et que personne ne peut nous demander de ne plus croire.
Nous tenons à notre foi plus qu’à tous les biens de la terre, bien plus qu’à notre vie et qu’à celle de nos enfants. Nous avons dû quitter nos paroisses pour ne pas risquer de la voir corrompue par une liturgie et une prédication désormais convoyeuses d’un autre christianisme, évidé du Sacrifice et de la Croix. C’est volontairement que nous sommes descendus vers nos sous-sols et vers nos catacombes, parce que nous ne voulions pas changer de religion et mourir dans une foi autre que celle qui nous avait été léguée.
Plutôt que de comparaître devant Dieu, alors que nous aurions méprisé sa parole et vécu sans elle, nous estimerions bien préférable de retourner dans le néant. La terrible parole de Notre-Seigneur à propos de Judas s’impose à nos âmes : « Il eût mieux valu pour cet homme qu’il ne fût jamais né. » Mt. 26, 24. Que l’on admette, en conséquence, lorsque se présente à nous comme un apparent dilemme entre foi et obéissance, que nous ne le comprenons même plus, tant nous savons que rien, et l’obéissance moins que toute autre chose, ne subsiste sans la foi. Oui, une injonction d’obéir qui affaiblirait la foi ne serait qu’une trahison, s’y soumettre une lâcheté !
C’est pourquoi nous ne connaissons aucun errement, sinon celui où conduit la perte ou la diminution de la foi, aucune quête, sinon celle qui y mène ou y ramène. L’on a voulu nous chuchoter qu’elle était encore présente dans telle paroisse, que tel institut (autorisé) la transmettait toujours à ses membres. Et cependant, comment pouvions-nous ne pas remarquer, lorsque éclataient, à la face de toute l’Eglise, ces immenses scandales qui ravalaient notre foi à ne plus être qu’un « honorable sentiment religieux » au milieu de tant d’autres « non moins honorables », que leur foi n’était plus suffisamment courageuse et vigoureuse pour protester, pour s’indigner, pour être capable de parler : « J’ai cru, c’est pourquoi j’ai parlé. » ? II Cor. 4, 13. Comment aurions-nous donc pu rechercher autre chose que cette foi confessée ? Saint Paul écrit encore: si « la foi qu’on a au cœur mène à la justice », il n’est, pour conduire au salut que « la confession qu’on a aux lèvres. » Rom. 10, 10.
Non, nous ne pouvions pas nous satisfaire de jouer aux devinettes pour savoir dans quels cœurs ou dans quelles sacristies elle se trouvait encore gardée ; ce n’était pas seulement cela qui nous importait. Ce dont nous avions besoin, ce qu’il nous fallait impérieusement trouver, c’est qu’elle soit encore quelque part, non pas enfouie ou chuchotée, mais professée, proclamée, confessée. Et c’est finalement parce que nous avons placé la préservation et la transmission de la foi au-dessus de toutes choses que nous nous sommes retrouvés là où sa confession demeurait pleine et entière, dans le lignage de Monseigneur Lefebvre et de sa Fraternité.
Nous n’y sommes allés qu’au moment où nous avons compris que, si la foi survivait certainement ailleurs, elle ne se trouvait véritablement confessée que là. Ce n’est pas notre faute s’il s’est mystérieusement manifesté qu’il n’y avait plus guère que ces proscrits et ces excommuniés à oser encore la confession du message de Notre Seigneur Jésus-Christ. Nous n’y pouvions rien, nous nous bornions à le constater. Mais rien ni personne n’aurait pu nous détourner de nous rendre chez ces exclus, puisque se confirmait chez eux la quasi-exclusivité de la confession de la foi.
Les excommunications ? Il est vrai que c’est à pâlir et à mourir de devoir suivre des évêques « frappés d’excommunication ». Et à ne considérer que la terrible sentence, nous nous serions certainement égarés. Mais il est justement réservé à cette lumière de la foi de juger de cette condamnation.
L’on nous rétorquera peut-être qu’il est théoriquement possible à des schismatiques de conserver la foi, et l’on nous demandera alors, non sans malice, si, pour conserver cette foi, nous serions prêts à devenir schismatiques. Mais nous ne voyons pas que l’on puisse aller au schisme, en réalité, sans verser rapidement dans l’hérésie par le rejet où l’on se place du Primat Pontifical. Notre Fraternité n’a jamais mangé de ce pain-là. Se révolter contre le pape, fonder une autre « Eglise » sont significatifs d’une telle dépravation du sens catholique que la profondeur de l’adhésion à la foi les repousse avec horreur !
Sous le faisceau lumineux de la foi qui éclaire nos intelligences, nous reconnaissons que c’est par cette admirable hiérarchie sacrée, au sommet de laquelle se trouve le pape, que la foi est conservée et transmise. Qu’il en a été toujours ainsi dans toute l’histoire de l’Eglise même s’il est arrivé que certains des maillons humains de cette hiérarchie se soient montrés défaillants. Qu’il ressort donc du sens catholique d’obéir à cette hiérarchie parce qu’elle est le canal de la transmission de la foi. Cependant, comment nierions-nous la réalité de l’heure présente ? Si non des paroles isolées, non des changements accidentels, non tel ou tel acte de faiblesse, mais des discours répétés et solennels, des signes ostensibles, des variations substantielles manifestent que cette hiérarchie, aujourd’hui, ne transmet plus la foi, nous ne pouvons pas nous voiler la face et nous réfugier derrière l’obéissance ! Obéir au risque de perdre la foi ? Personne n’a le droit de nous demander une chose pareille. L’obéissance est subordonnée à la foi et la foi nous donne non seulement le droit mais encore le devoir de nous tourner vers qui la communique encore.
Il ne nous appartient pas de juger de cette hiérarchie gravement fourvoyée. En revanche, et Dieu qui donne les grâces nous demandera des comptes pour cela, il nous faut impérativement ne rien négliger, nous, pour garder intact le dépôt sacré des vérités divines et le transmettre, autant qu’il dépend de nous, après nous et autour de nous. Elle est simplement arrivée, cette époque où se dresse cette nécessité décrite par saint Thomas d’Aquin : « La confession de la foi est un précepte positif. Or les préceptes positifs n’obligent pas à tout instant, encore qu’ils obligent tout le temps : ils obligent à l’endroit et au moment voulu, et suivant les autres circonstances voulues dans lesquelles doit se limiter un acte humain pour pouvoir être un acte de vertu. Ainsi donc confesser la foi n’est pas de nécessité de salut à tout moment ni en tout lieu ; mais il y a des moments et des endroits où c’est nécessaire : c’est quand par omission de cette confession on soustrairait à Dieu l’honneur qui lui est dû, ou bien au prochain l’utilité qu’on doit lui procurer. Par exemple, si quelqu’un, alors qu’on l’interroge sur la foi, se taisait, et qu’on pût croire par là ou qu’il n’a pas la foi ou que cette foi n’est pas vraie, ou que d’autres par son silence pussent être détournés de la foi. Dans ces sortes de cas, la confession de la foi est de nécessité de salut. »
Nous ne disons pas que les différents instituts et fraternités régularisés ne conservent plus cette foi. Nous ne disons pas non plus qu’ils la taisent en privé mais nous ne pouvons pas ignorer qu’ils ne s’opposent jamais publiquement aux terribles scandales destructeurs de la foi et qu’un certain nombre d’entre eux en deviennent peu à peu les défenseurs et les chantres.
Aucune voix ne s’est récemment élevée, par exemple, pour exprimer son indignation sur les funérailles scandaleuses dont a bénéficié Yves Saint-Laurent dans une église parisienne. Comment cela est-il possible ? Dans ce cas précis, c’est en raison de la peur, face à la réaction des évêques en particulier. Ces prêtres sont également écoeurés de l’invraisemblable traitement de faveur accordé à un homosexuel affiché, de la permission qui fut donnée à son compagnon de dépravation de faire l’éloge de leur vie commune dans l’église en présence du clergé. Cependant, s’ils protestaient, l’espoir d’obtenir de nouvelles églises s’estomperait, celui de conserver les églises qui leur ont déjà été accordées leur semblerait compromis.
Mais les scandales oecuménistes venus de Rome et des derniers papes eux-mêmes sont encore bien pires que cette cérémonie. C’est la foi elle-même qui, au plus haut niveau de l’Eglise, se trouve humiliée et corrompue. Le devoir de s’y opposer en est infiniment grave, en proportion du mal qui est fait. Or, qui proteste encore aujourd’hui contre l’abandon des droits de Notre Seigneur Jésus-Christ et de son règne sur les sociétés, contre l’apologie de la laïcité positive sur laquelle ont convergé les discours du pape Benoît XVI et du président de la République française, le 12 septembre dernier ? Si nous avons salué le courage du pape à avoir publié son motu proprio, nous considérerions comme un mensonge que de décrire son action comme étant celle d’un pape « traditionaliste dans son coeur », qui chercherait insensiblement à ramener les esprits à l’intégrité de la foi !
Qui s’oppose au principe injurieux et blasphématoire pour le seul vrai Dieu de l’égalité des droits des religions ? Comment est-il devenu possible que le Supérieur d’un institut récemment créé en soit lui-même maintenant arrivé à affirmer sur les ondes (le 13 septembre 2008 sur RTL) être entièrement d’accord, d’un point de vue religieux, avec le principe que les musulmans puissent vivre « leur religion » à égalité avec toutes les autres religions ? Il va même jusqu’à prendre le soin de préciser qu’il interprète la question posée par le journaliste qui l’interroge comme une question religieuse et il souligne que c’est bien de ce point de vue religieux qu’il se trouve en accord avec le principe d’accorder les mêmes droits à la religion de Jésus-Christ et à celle de Mahomet !
Nous ne jugeons personne. Cependant, nous écrivons ces choses pour démontrer pourquoi nous mettons en garde contre l’enseignement, la prédication de prêtres qui, dans la réalité, ne sont pas libres. La vérité, sans que l’on puisse donner une seule exception, est qu’aucun des instituts et des prêtres qui ont été normalisés par Rome n’a réellement conservé sa liberté de parole.
Ne nous endormons donc pas maintenant, chers amis et bienfaiteurs, nous qui, il y a quelque deux, trois ou presque quatre dizaines d’années, avons pris cette décision de fuir nos paroisses pour ne pas changer de religion, et justement pour garder notre foi. Mais également, vous, plus jeunes, qui, ayant désormais compris le réflexe de survie spirituelle de vos parents, avez marché sur leurs traces. Et vous enfin, chers amis revenus ou convertis, qui n’avez mystérieusement trouvé ou retrouvé le chemin de l’Eglise qu’au travers du dédale de ses ruines.
Ne nous endormons pas, pour ne pas périr à notre tour, après avoir été sauvés du naufrage de notre religion, non par nos mérites mais par la grâce de Dieu. Demandons la grâce de ne pas succomber maintenant à cet insidieux assoupissement et à ce subtil enlisement qui nous entraînent, de la profession nette et claire de notre Credo et de la détestation de l’hérésie, à ce christianisme vague des textes du concile Vatican II et à ce flirt avec les fausses religions. C’est parce que nous ne voulons pas encore compromettre ce qu’il reste de foi et de confession de foi sur la terre et que nous nous refusons à cet accord seulement pratique avec Rome.
Au fur et à mesure que la foi s’affaiblit partout sur la terre et dans les âmes et que sa confession n’existe plus, comprenons d’autant plus notre devoir pressant de la transmettre et de la proclamer contre l’apostasie galopante.
C’est dans cette même foi et dans cette même confession, dans cette même prière et dans ce même combat que nous devons demeurer unis contre toutes les forces de l’Enfer : « Demeurons fermes dans la Foi que nous professons jusqu’à la fin. » Hebr. 13,14
Courage, persévérons, élevons nos cœurs et n’ayons comme seule passion que de transmettre la foi autour de nous ! « La foi : voici la victoire qui a le dessus sur le monde. » I Jo 5, 4.
Chantons la divine prière du Rosaire : à la fin, le Cœur Immaculé de la très sainte Vierge Marie triomphera.
Abbé Régis de Cacqueray +, Supérieur du District de France