La résolution de la crise lefebvriste restera l'un des actes majeurs du pontificat de Benoît XVI.
La levée de l'excommunication des évêques ordonnés en 1988 par Mgr Marcel Lefebvre sera une étape capitale sur le chemin de la résolution du schisme. L'excommunication signifie l'exclusion de la communion de l'Église catholique. Il n'y a pas beaucoup plus grave pour un évêque puisqu'il n'est plus, dès lors, considéré comme catholique dans ce qu'il professe et dans son action pastorale. Techniquement l'excommunication prive du droit de recevoir ou de donner les sacrements.
Exprimé sous la forme d'un décret signé par le pape, l'Église «n'excommunie» pas au sens actif, mais constate des faits par lesquels le responsable s'est exclu de lui-même, de la communion. Une façon de dire que l'Église refuse de pousser vers la sortie.
La nuance ne change rien à la suite, une rupture, un schisme (bien que ce terme fut lui aussi contesté dans ce cas) et la création d'un groupe parallèle à l'Église. Il y en a eu de nombreux dans le passé, mais ce qu'il est convenu d'appeler «le schisme lefebvriste» représente un cas unique dans l'histoire moderne de l'Église catholique. Une plaie ouverte aussi pour Jean-Paul II et le cardinal Ratzinger, devenu Benoît XVI, qui avait été chargé, dès 1988, de trouver une issue en tant que préfet de la congrégation pour la Doctrine de la foi.
La résolution de cette crise aura donc inévitablement un caractère historique et restera comme l'un des actes majeurs - mais très controvers -, du pontificat de Benoît XVI.
Reste les conséquences. Tout d'abord pour les intéressés qui sont, au premier chef, les quatre évêques ordonnés par Mgr Lefebvre : Mgr Bernard Fellay, actuel supérieur de la Fraternité Saint Pie X, un autre Français, Bernard Tissier de Mallerais, l'Argentin Alfonso de Galarreta ainsi que le Britannique Richard Williamson.
À ce titre, le Saint-Siège insiste aujourd'hui sur une interprétation du droit canonique qui limite l'excommunication à ces seuls évêques. Mais le conseil pontifical pour l'interprétation des textes législatifs avait précisé, en 1997, que l'excommunication frappait tous ceux qui «adhèrent formellement» à ce mouvement.
Dans le monde on estime que 200 000 personnes vivent leur foi catholique dans la mouvance de «la tradition». Près de la moitié, environ 80 000 - selon des sources proches de ces milieux, il n'existe pas d'autres études -, habitent en France. Les autres résident essentiellement en Allemagne et aux États-Unis. Cette mouvance se divise en deux familles, les «lefebvristes» ou «intégristes» - ils comptent 500 prêtres - et les «traditionalistes» (qui suivent la messe en latin mais ont quitté Mgr Lefebvre après l'ordination des évêques.) En France, ils sont respectivement 35 000 et 45 000.
La perspective de la levée de l'excommunication, annoncée en pleine semaine de prière pour l'unité des chrétiens, et qui implique la réintégration de cette famille ecclésiale dans la communion catholique reste une étape décisive. Mais elle ne résout pas un différend doctrinal majeur à propos du concile Vatican II. Mgr Lefebvre, outre la nouvelle liturgie, lui reprochait l'ouverture au monde et le dialogue avec les autres religions. Des points et un concile sur lesquels Rome refuse de transiger.