A propos du “Motu proprio” Summorum Pontificum
Quelques questions à Mgr Fellay — Où en est le Motu proprio depuis le 14 septembre ?
— Les échos que j’en ai pour l’instant sont plutôt négatifs, certains évêques cherchant manifestement à en limiter l’application. Il y a là une certaine ironie, dans la mesure où ils agissent un peu comme si le Motu proprio créait un désordre parce qu’il n’y a plus désormais besoin de leur demander la permission de célébrer les sacrements selon le rite traditionnel. Il y a là une opposition objective avec la magnanimité dont le Pape a voulu faire preuve. — Ce Motu proprio n’en demeure pas moins, selon vous, positif ?
— Effectivement, la cause de notre joie réside dans l’affirmation selon laquelle la messe de saint Pie V n’a jamais été abrogée. Ce qui comporte une foule d’implications. A commencer par le fait que, puisqu’elle a continué d’exister, elle a toujours été la loi universelle de l’Eglise. La réforme conciliaire n’a donc pas été capable de remplacer l’ancienne messe, même si, d’une certaine façon, elle a été mise au ban. — Cela signifie-t-il donc que la crise est terminée ?
— Pas du tout ! Nous avons désormais la mission d’aider à réintroduire ce rite. Nombre de prêtres nous demandent de leur apprendre à la célébrer. Et leurs témoignages peuvent se résumer par ce propos d’un prélat romain : « Le prêtre ne peut pas trouver son identité dans la nouvelle messe. » Il y faudra, bien sûr, beaucoup de temps. — N’y a-t-il pas un paradoxe d’affirmer, avec le ton d’une connivence affectueuse pour le Pape, que ce Motu proprio constitue un indéniable pas en avant, et que vous attendez beaucoup dans la suite, et de dire, dans le même temps, que cela sera long – sans doute sur plusieurs générations ?
— Non ! parce que, dans toute médaille, il y a deux faces. D’une part, la possibilité de remèdes pratiques immédiats ; de l’autre, la paix de l’Eglise par la résolution de la crise à sa racine qui est doctrinale. La situation présente est très contrastée. Pour que ce soit complet, il faut envisager les deux faces. Mais, selon l’interlocuteur, vous semblez présenter plutôt un aspect ou un autre…
— Il s’agit de voir où se trouve l’interlocuteur, de l’atteindre là où il est. Vis-à-vis de nos fidèles, j’essaye de donner la ligne juste, de corriger les erreurs. Mon souci, est de leur donner, et de leur faire garder, l’esprit catholique. C’est-à-dire un attachement sans faille à la foi, et, à un autre niveau, l’attachement à l’Eglise. — Mais vous avez affirmé, devant certains journalistes, attendre « beaucoup plus » du mouvement donné par le Pape depuis le Motu proprio.
— Lorsque je dis cela, j’envisage la possibilité, relativement prochaine, de trouver des remèdes pratiques. Mais, quand je dis aux fidèles qu’il y faudra sans doute plusieurs générations, je veux parler de la paix retrouvée dans l’Eglise par la solution de la crise doctrinale. Si on veut combiner les deux points, les deux faces de la médaille, cela signifie que les remèdes pratiques arriveront bien avant la fin de la crise.
Mais, même pour ce premier point, il faudra que les conditions nécessaires soient réunies. Il y a, bien sûr, la messe, telle que nous venons de la retrouver dans le Motu proprio. Le retrait du décret d’excommunication, qui ne semble guère poser de problème. Mais, tout d’abord, que l’on arrête de nous faire avaler du poison, en ce qui concerne la foi, le dogme. C’est toujours la première, la principale condition. Propos recueillis par Olivier Figueras
Article extrait du n° 6471 de Présent, du Samedi 24 novembre 2007 |