SOURCE - Vincent Pelligrini - Le Nouvelliste - 18 avril 2012
Selon un vaticaniste, Mgr Fellay, le supérieur de la Fraternité Saint-Pie X (Ecône), aurait signé un accord avec Rome.
Mgr Fellay, le supérieur de la Fraternité Saint-Pie X, aurait signé un accord avec le Vatican. La nouvelle est tombée hier matin sur le site Meta-Blog: «Pas tout à fait minuit, ce 17 avril, alors que le pape est au lendemain de son anniversaire, la nouvelle tombe dans «La Stampa», sous la plume d'Andrea Tornielli, l'un des vaticanistes les plus sérieux : Mgr Fellay a signé le préambule que lui propose Benoît XVI, "avec quelques modifications non substantielles".»
Si cette nouvelle s’avère exacte, elle signifie que le mouvement d’Ecône est sur le point d’être réhabilité et de retrouver un statut officiel dans l’Eglise. Les commentateurs penchent pour une prélature personnelle qui ferait dépendre Ecône directement de Rome. Cette réconciliation serait une sorte de miracle obtenu par le pape avec l’aide du supérieur de la Fraternité Saint-Pie X, le Valaisan Bernard Fellay, l’un des quatre évêques d’Ecône dont l’excommunication a été levée en 2009 par le pape en signe de bonne volonté dans le dialogue.
Deux ans de discussions
C’est en 2005 que l’atmosphère entre Rome et Ecône est sortie de la glaciation. En 2007, le pape donne un premier signal fort en réhabilitant l’ancienne messe latine baptisée «forme extraordinaire» du rite romain, la nouvelle messe restant la «forme ordinaire». Puis, en 2009, c’est la levée par le pape des excommunications contre les quatre évêques d’Ecône afin d’entrer en dialogue approfondi avec la Fraternité Saint-Pie X dans un climat de confiance mutuelle. Les discussions Rome-Ecône ont duré deux ans et huit rencontres.
Mais les traditionalistes n’ont finalement pas voulu signer le préambule doctrinal proposé par Rome à cause du Concile Vatican II dont ils rejettent la liberté religieuse, la collégialité et l’œcuménisme. Tout semblait perdu. Mais le pape est revenu à la charge car il voulait coûte que coûte cette réconciliation qu’il avait failli réussir en 1988 déjà, lorsqu’il était préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi, en faisant signer à Mgr Lefebvre une déclaration portant notamment sur le texte du Concile Vatican II Lumen Gentium. Malheureusement, des blocages étaient ensuite intervenus au sujet de la nomination d’un évêque traditionaliste.
Emissaires discrets
Cette fois-ci, la condition était qu’Ecône signe un préambule doctrinal. Ces derniers temps, des émissaires ont discrètement travaillé entre Rome et Ecône pour arrondir les angles. Cela explique la signature courageuse de Mgr Fellay et de ses assistants qui ont une partie non négligeable de la Fraternité Saint-Pie X contre eux. Mgr Galaretta, l’un des quatre évêques d’Ecône, n’a par exemple pas fait mystère de son opposition à la signature du préambule doctrinal présenté par les experts du Vatican placés sous la houlette du cardinal Levada, préfet de la congrégation pour la doctrine de la foi.
L’heure de vérité
L’heure de vérité a sonné pour Ecône. Selon certains observateurs, un tiers des membres de la Fraternité Saint-Pie X sont opposés à un accord avec Rome en l’état, un tiers veulent cet accord et le dernier tiers, légaliste, suivra la décision du Supérieur général de signer. Mgr Williamson est hors course et mis de côté, tandis que Mgr Tissier de Mallerais est plutôt du côté des durs avec Mgr Galaretta. Si l’accord se fait, c’est grâce à l’initiative personnelle et au courage de Mgr Fellay, le quatrième évêque et le Supérieur d’Ecône.
Modèle canonique
Mais la signature du préambule doctrinal, si elle est confirmée, n’est qu’une étape. Il faudra sortir des cartons un modèle canonique officiel pour qu’Ecône entre dans le périmètre visible de l’Eglise. On sait que les traditionalistes d’Ecône ne veulent pas être sous l’autorité des évêques dont ils se sentent incompris. On évoque une solution semblable à celle donnée à l’Opus Dei qui ferait dépendre Ecône directement du pape.
Reste à voir aussi la réaction des troupes de Mgr Fellay. Le camp traditionaliste va-t-il se lézarder ou faire corps? Pour l’heure on est dans l’attente d’une confirmation officielle de la signature. La persévérance de Benoît XVI à trouver une solution est apparue dès le lendemain de son élection, en 2005, lorsqu’il disait son désir que toute l’Eglise soit Une. Il pensait sans doute déjà à ramener dans le bercail les traditionalistes malgré le risque d’une large réprobation des évêques officiels à cause de la liberté théologique donnée de critiquer certains points de Vatican II.
Par Vincent PELLIGRINI