SOURCE - Pierre de Bellerive - Nouvelles de France - 26 juin 2012
« Bis repetita placent », dirait-on. Alors que les négociations semblaient terminées, que tout le monde s’attendait à ce qu’un document scellant la réconciliation soit signé par Mgr Fellay le 13 juin dernier, un nouvel épisode vient de se dérouler.
« Bis repetita placent », dirait-on. Alors que les négociations semblaient terminées, que tout le monde s’attendait à ce qu’un document scellant la réconciliation soit signé par Mgr Fellay le 13 juin dernier, un nouvel épisode vient de se dérouler.
Dans les milieux bien informés, on savait que Rome souhaitait
conclure la réconciliation avec la Fraternité Saint Pie X avant l’été et
plus précisément avant les ordinations sacerdotales qui auront lieu à
Econe le 29 juin prochain. Un accord était programmé au début du mois de
mai, puis à la Pentecôte et enfin dans la première quinzaine de juin.
Alors que Mgr Fellay, Supérieur général de la Fraternité Saint Pie X
avait remis, le 15 avril dernier, un texte qui, d’un point de vue
doctrinal, semblait satisfaire les exigences romaines, tout le monde croyait que le retour à la pleine communion des fidèles de Mgr Lefebvre était acquis. Toutefois, en matière ecclésiale comme ailleurs, il est sage de ne pas vendre la peau de l’ours avant de l’avoir tué. On se souvient que déjà, en 1988, le Cardinal Ratzinger avait réussi à faire signer un protocole d’accord à Mgr Lefèbvre avant que celui-ci ne revienne sur sa décision. Quelles sont les raisons qui ont
conduit à cette situation ?
Trois évêques qui se désolidarisent :
Alors que le Supérieur général Mgr Fellay est considéré comme étant
favorable aux accords entre Rome et la FSSPX, ce n’est pas le cas des
trois autres
évêques ordonnés par Mgr Lefebvre. Ceux-ci ont exprimés leurs
divergences avec Mgr Fellay dans une lettre privée qui a été diffusée
sur la toile. « N’engagez pas la Fraternité dans un accord purement pratique »,
avaient-ils alors écrit. Les conséquences de cette publication ne se
sont pas faites attendre. Si celle-ci a conforté Rome dans l’idée que
Mgr Fellay signerait un accord, elle a néanmoins eu pour effet de
différer la signature d’un accord initialement programmé aux alentours
de la Pentecôte et de permettre à Rome de traiter « séparément et individuellement », la situation des trois autres évêques.
Mgr Fellay trop confiant :
Peut-être trop confiant dans l’idée que le retour à la pleine
communion n’offrait pas d’obstacles si délicats, Mgr Fellay a notamment
déclaré dans un entretien à DICI « que Rome ne fait plus d’une acceptation totale de Vatican II une condition pour la solution canonique. ».
Une déclaration qui, semble-t-il, n’a pas été du goût de ceux qui
craignent que le concile Vatican II puisse être remis en question, voir
rejeté par la FSSPX. Le résultat a été que le 13 juin dernier, le Cardinal Levada, préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, a remis à Mgr
Fellay un projet de prélature personnelle (structure canonique envisagée
pour la réintégration de la FSSPX) qui ne semble pas poser de problèmes
d’une part et un texte qui a été « amendé » et qui reprend une partie
de la réponse aux questions doctrinales fournie par Mgr Fellay le 15
avril dernier d’autre part. Alors que les vaticanistes estimaient en
masse que le Supérieur général de la FSSPX venait au palais du
Saint-Office pour conclure l’accord, celui-ci est reparti en demandant
un nouveau délai de réflexion afin d’étudier les nouvelles dispositions
prévues par Rome.
Le 25 juin, une lettre « confidentielle et interne », diffusée sur
internet et que nous reproduisons [sur le site de NDF - NdeTN], a été envoyée par la
Maison généralice de la FSSPX aux supérieurs de districts des séminaires
et des maisons autonomes de la Fraternité. Celle-ci indique que le
nouveau document proposé par le Cardinal Levada à Mgr Fellay est « clairement inacceptable » et que le supérieur de la FSSPX « ne pourrait pas le signer ».
C’est donc la réunion du prochain chapitre général de la Fraternité en
juillet prochain qui permettra de faire le point sur ces discussions qui
semblent n’en point finir.
Mgr Williamson sanctionné :
Depuis, plusieurs mois déjà et en raison d’informations qui avaient
fuité sur la toile, le grand public savait que Mgr Williamson était, du
fait de ses prises de position publiques, sous le coup d’une sanction
canonique. Celle-ci-vient d’être prononcée par Mgr Fellay en vertu du
Code de droit canonique qui dispose que celui « qui excite
publiquement ses sujets à la contestation ou à la haine contre le Siège
Apostolique ou l’Ordinaire à cause d’un acte du pouvoir ou du ministère
ecclésiastique, ou bien qui incite les sujets à leur désobéir, sera puni
d’interdit ou d’autres justes peines. » L’évêque britannique a donc été « privé de l’office capitulant » et il lui a été« défendu de se rendre à Écone pour les ordinations ».
Il ne sera donc pas possible pour lui de s’ingérer dans le chapitre
général qui discutera des propositions émanant de Rome. Par ailleurs
dans cette lettre, Mgr Fellay annonce qu’il diffère l’ordination de
prêtres des membres de communautés proches de la FSSPX (capucins de
Morgon, dominicains d’Avrillé) qui sont réputés comme étant plus
hostiles aux accords.
L’unité favorisée par le Saint-Père :
Ce climat, extrêmement tendu, est le fruit de 30 ans de méfiance de part et d’autre bien que de nombreux prélats soient très bien disposés à l’endroit de cette réconciliation.
Une méfiance que le Saint-Père essaie de tempérer. Celui qui semble
faire du « dossier Saint Pie X » une affaire personnelle, a posé de
nombreux actes en faveur de la Tradition. Il a reçu Mgr Fellay dès son
avènement en 2005, libéralisé l’usage du rite de Saint Pie V dans les
célébrations liturgiques en 2007, levé les excommunications frappant les
quatre évêques en 2009 et souhaité que le concile Vatican II soit
considéré « dans une herméneutique de continuité ». Une idée somme toute proche de celle de Mgr Lefebvre qui demandait que le concile fut interprété « à la lumière de la Tradition ».
Malgré les rebondissements, la suite logique de cette affaire voudrait
que l’accord que le Cardinal Ratzinger n’a pas pu conclure avec Mgr
Lefebvre soit conclu par le Pape Benoît XVI qui aura bien mérité de son surnom de « Pape de l’unité ».