Une messe « extraordinaire » ? Une messe normale !
En
préambule à cette célébration, qui vient de s’achever à Saint-Pierre,
le cardinal Cañizares avait donc expliqué au vaticaniste Andrea
Tornielli, en pesant ses mots : « C’est une manière de faire comprendre que l’usage du missel de 1962 est normal ».
Pour qui connaît le fonctionnement de la Curie romaine, un tel acte du
Préfet de la Congrégation pour le Culte divin dans la Basilique du Pape,
ne pouvait qu’être, d’une manière ou d’une autre, inspiré, comme l’indique le message du pape, en français, lu en début de cérémonie.
A 14h30, la longue procession des
confréries, des clercs et des fidèles, partie de San Salvatore, de
l’autre côté du Tibre, ayant traversé le pont Saint-Ange, après avoir
remonté toute la via della Conciliazione, passait les portes de la
Basilique vaticane, pour rejoindre la foule des fidèles qui attendaient
déjà à l’intérieur. Et à 15h, visiblement rayonnant, le Préfet du Culte
divin commençait la messe pontificale sous la Chaire de Saint-Pierre,
devant une assistance d’environ 2 à 3 000 personnes autour de la Chaire
de Saint-Pierre, sans compter la foule derrière les barrières et d’un
très nombreux clergé séculier et religieux. Comme dans les autres
cérémonies de ce pèlerinage Summorum Pontificum, un des points
les plus frappants aura été la présence massive de prêtres diocésains et
de séminaristes, issus des diverses Universités pontificales, où venus
pour l’occasion de France, des États-Unis, Angleterre, etc.
Parmi les prélats romains assistant à la
cérémonie (Mgr Perl, Mgr Pozzo, qui vient d’être nommer archevêque ce
matin, Mgr Agostini, cérémoniaire pontificale, etc.), la présence la
plus remarquable était celle, quasi officielle, de la Commission
Ecclesia Dei, avec son Vice-Président, Mgr Di Noia, entouré de ses
collaborateurs et présidant les membres du clergé. Le Rev De Andrade,
membre de la même Commission, a dirigé impeccablement la cérémonie, aidé
d’un prêtre diocésain, le Rev Cuneo. Le prêtre assistant était Mgr
Ferrer, Vice-Secrétaire de la Congrégation pour le Culte divin, le
diacre, le Rev Barker, vicaire de la paroisse personnelle romaine vouée à
la liturgie traditionnelle, le sous-diacre, le Rev Reginal-Marie de la
Fraternité Saint-Vincent-Ferrier, les autres ministres étant pris parmi
les séminaristes des collèges romains ou les clergés diocésains.
Tout visait à faire entendre que, parti
d’une situation de « privilège » concédé, on est désormais en chemin –
même si on est encore très loin du but – vers une situation normale, l’extraordinaire
d’hier devant s’intégrer peu à peu, pas à pas, dans les paroisses, dans
les diocèses, dans les mouvements de jeunesse, dans l’ensemble de la
vie de l’Église.
C’est ce que le cardinal Cañizares
lui-même a souligné à la fin de son homélie (très spirituelle), brodant
sur un thème qui lui est cher : le Motu Proprio, c’est la pacification
de l’Église avec elle-même, c’est-à-dire avec sa tradition, dont l’axe
est le culte romain traditionnel. Lorsque le « Ministre de la Liturgie »
de Benoît XVI évoque avec beaucoup de finesse l’« illumination » que la
constitution Sacrosanctum Concilium doit apporter à l’une et
l’autre forme du rite romain, cela ne revient-il pas à dire que si hier,
le Concile était expliqué par la liturgie de Paul VI, il peut tout
aussi bien se relire aujourd’hui à l’aide – pour ne pas dire au filtre – de la liturgie dite de Saint-Pie-V?
L’émotion qui étreignait les assistants à
la messe de ce 3 novembre participait de la conscience de voir
s’ébranler cette révolution copernicienne. Le cardinal a repris les buts
du pèlerinage : action de grâce et de soutien à l’intention du
Saint-Père, communion « affectueuse » du peuple Summorum Pontificum avec
le Père Commun.
Annonce de la célébration du Pape qui scellera ce passage de la messe « extraordinaire » à la messe normale ?