SOURCE - Credidimus Caritati - via Fideliter - 12 mai 2013
Le vingt-cinquième anniversaire des sacres épiscopaux d'Ecône approche. Les semaines qui ont précédées cette cérémonie ont été marquées par des échanges entre le Saint-Siège et la Fraternité Saint-Pie X. Dans l'une de ses lettres, le fondateur de cette dernière expose au pape Jean-Paul II l'absolue nécessité d'obtenir un épiscopat pleinement catholique et traditionnel et explique donc l'esprit qui l'anime dans la préparation de cette cérémonie.
Le vingt-cinquième anniversaire des sacres épiscopaux d'Ecône approche. Les semaines qui ont précédées cette cérémonie ont été marquées par des échanges entre le Saint-Siège et la Fraternité Saint-Pie X. Dans l'une de ses lettres, le fondateur de cette dernière expose au pape Jean-Paul II l'absolue nécessité d'obtenir un épiscopat pleinement catholique et traditionnel et explique donc l'esprit qui l'anime dans la préparation de cette cérémonie.
Écône, le 20 mai 1988,
Très Saint Père,
Tandis qu’une certaine espérance se levait, au sujet d’une solution possible du problème de la Fraternité, après la signature du protocole, voici qu’une grave difficulté surgit à l’occasion de l’épiscopat accordé à la Fraternité pour me succéder dans ma fonction épiscopale.
Il apparaît clairement que cet épiscopat est pour le Saint-Siège une source d’appréhensions et de soucis pour les motifs suivants :
En premier lieu cet épiscopat est superflu, après la reconnaissance légale de la Fraternité comme société de droit pontifical, le Supérieur général pouvant donner des lettres dimissoriales à un évêque de son choix.
En seconde lieu, cet épiscopat peut apparaître comme une certaine réprobation des évêques actuellement en fonction, et indisposera les évêques à l’égard du Saint-Siège.
Enfin, cet épiscopat peut éventuellement créer des difficultés dans les diocèses à l’occasion de l’apostolat auprès des fidèles.
Ce sont, sans doute, ces appréhensions qui provoquent des délais, des réponses évasives de la part du Saint-Siège, depuis plus d’un an, et qui m’obligent moralement à mettre un terme à cette attente, après avoir insisté à plusieurs reprises sur l’urgente nécessité pour la continuation et le développement de l’œuvre d’avoir plusieurs évêques.
Le 30 juin m’apparaît désormais comme la date ultime pour réaliser cette succession. La Providence semble avoir préparé cette date. Les accords sont signés, les noms des candidats sont proposés. Si le cardinal Ratzinger a un emploi du temps trop chargé pour préparé les mandats, le cardinal Gagnon pourrait peut-être s’en charger.
Très Saint-Père, veuillez mettre un terme à ce douloureux problème des prêtres, des fidèles et de votre serviteur qui, en gardant la Tradition, n’ont eu d’autre désir que de servir l’Église, le pape et sauver leurs âmes.
Permettez que j’ajoute quelques considérations sur le renouveau de l’Église obtenu par le moyen de la Fraternité et l’épiscopat qui lui serait accordé.
La presse en rapportant les incidents de Vienne en Autriche et de Coire en Suisse à propos des nominations épiscopales fait allusion à un changement d’orientation de la part du Saint-Siège dans le choix des évêques. C’est un heureux présage, mais les réactions manifestent que ces évêques auront d’énormes difficultés dans la réalisation de leur apostolat et qu’ils seront obligés de manifester leur adhésion à l’esprit moderne par l’œcuménisme, le charismatisme, afin de calmer les esprits.
Leurs séminaires, même s’ils observent une certaine discipline et une plus grande piété, seront imbus de cet esprit moderne et contribueront difficilement au vrai renouveau de l’Église.
Le renouveau ne peut désormais se réaliser que par des évêques libres de faire revivre la foi et la vertu chrétienne par les moyens que Notre Seigneur a confiés à son Église pour la sanctification des prêtres et des fidèles. Seul un milieu entièrement dégagé des erreurs modernes et des mœurs modernes peut permettre ce renouveau. Ce milieu, c’est le milieu qu’ont visité le cardinal Gagnon et Monseigneur Perl, milieu formé de familles profondément chrétiennes, ayant de nombreux enfants, et d’où proviennent de nombreuses et excellentes vocations.
Le développement de ce milieu rénové, encouragé par vos décisions, Très Saint Père, restaurera les diocèses par les contacts avec les évêques et le clergé. Certains évêques nous confieront la formation de leurs séminaristes et ainsi, avec la grâce de Dieu, l'Église retrouvera une nouvelle jeunesse et transformera la société païenne en société chrétienne.
Vous comprendrez facilement pourquoi un seul évêque ne saurait suffire dans un champ d’apostolat aussi vaste.
Si je me permets de soumettre ces considérations à votre jugement, c’est dans le plus profond désir de vous venir en aide pour solutionner ces graves problèmes que vous efforcez de résoudre au cours de vos voyages apostoliques.
Daignez agréer, Très Saint Père, l’expression de mes sentiments les plus respectueux et filiaux en Jésus et Marie.
Marcel Lefebvre
Archevêque, évêque émérite de Tulle
Fondateur de la Fraternité S.-Pie X
Lettre parue dans Fideliter hors série - 29-30 juin 1988, pp. 45-47.