SOURCE - Abbé Pierre-Marie Gainche, fsspx - 5 février 2014
Il a sans doute existé de tout temps ou au moins aux époques de crise grave de la société une espèce d’humains qui n’ont au fond qu’un principe premier : la vie morale n’est possible qu’en se coupant le plus possible de tout ; qu’en se constituant en ghettos ou bastions hérissés de défenses et autant que possible autonomes, au spirituel comme au temporel ; qu’en faisant abstraction de la nature sociale de l’homme, de son appartenance normale à des sociétés civile et spirituelle, voire même à sa propre famille. Pourquoi ? Parce que tout le monde civil et spirituel serait tellement corrompu qu’il serait devenu absolument infréquentable et qu’il ne faudrait même plus chercher à directement (mais que par la prière et les sacrifices) le convertir, sous peine de mettre nécessairement et gravement son âme en danger.
Pour ne prendre un exemple que dans le passé relativement récent, celui des années 1980, n’est ce pas ce principe qui a (au moins implicitement) fait naître ce qu’on a appelé le « sedevacantisme » ? Lequel, non content de se couper totalement de Rome (corrompue dans sa foi), a fait un devoir de se couper aussi de tout prêtre traditionaliste qui n’est pas « non una cum », pour en arriver ensuite à se couper les uns des autres entre « sedevacantistes » pour l’on ne sait quelle autre futilité, au point qu’aujourd’hui, après à peine plus de 30 ans, bien malin qui peut dire combien de groupuscules autonomes constituent cette nébuleuse qui en est venu à ressembler, comme il se doit, à celle des sectes protestantes (plutôt tendance puritaine ou rigoriste), sinon à en faire finalement ou vraiment partie de fait!
C’est au fond un mal similaire qui a touché le monde de la Tradition groupé autour de la Fraternité St-Pie X et qui est en train en ce moment de faire en lui des ravages … Depuis quand ? Depuis probablement des années de façon très marginale ou latente. Et avec une rapidité d’expansion impressionnante, notamment depuis la généralisation relativement récente d’internet dans les foyers… Quel est-il, au juste, ce mal? Le principe énoncé plus haut ne repose pas sur une constatation objective, paisible et équilibrée de la raison mais sur du volontarisme ou plus précisément sur la crainte qui est une passion (non paisible par nature) ; et une passion devenue ici déchaînée car obsessionnelle, voire maladive, par rapport à toute influence venant de ce monde corrrompu. Elle a donc pour effet d’aveugler l’intelligence et de la rendre incapable de raisonner justement. Ainsi tous ses discours sonnent faux, exagérés, déconnectés du réel, sont des tissus de sophismes ou de contradictions dont elle ne se rend même plus compte. Et elle a aussi pour effet de rendre incapable de comprendre d’autres raisonnements que ceux qui émanent d’elle ou qui lui ressemblent. C’est donc peine perdue de s’efforcer de les démonter car l’intelligence est devenue comme un prisme qui déforme gravement tout ce qui passe par elle; et est donc vraiment incapable de le comprendre comme il faut. C’est un mal très profond et très persistant (non sans analogie avec le scrupule grave)!
Il est grand temps de réagir énergiquement au moins au niveau individuel et familial! Car force est de constater que, dans nos milieux certainement plus disposés que d’autres, le mal est aussi, à l’évidence, très contagieux, comme celui qui fait disparaître en peu de temps certaines espèces d’arbres ! C’est un véritable poison dont il faut donc se garder comme de la peste ; et il est d’autant plus dangereux qu’il émane de bouches qui sont ou se disent amies… Si l’on veut en être épargné, le seul vrai remède est donc le cordon, le couloir ou le vide sanitaire, en attendant que ce mal s’éloigne de la façon que la Providence voudra ! Il est donc urgent de ne plus aller sur certains sites internet (ou de se débarrasser même d’internet si l’on ne peut y résister…), de ne plus répondre à certains courriers (électroniques ou non), de ne plus même les lire, de ne plus fréquenter ces pauvres malades (en laissant ce soin aux « médecins » spécialistes ou aux personnes immunisées…), de ne plus se rendre dans des lieux de messe où l’on vous assènerait ce genre de discours empoisonnés (et qui plus est assommants !) etc.
C’est à la lumière de ce diagnostic pathologique qu’il faut comprendre le prétendu principe intangible, érigé en dogme de foi (alors qu’il n’est que circonstanciel ; ou prudentiel en fonction de circonstances précises mais par nature changeantes), de ces malades: « pas de réintégration officielle dans l’Eglise sans avoir d’abord résolu tous les désaccords graves sur la doctrine ». Il est évident qu’il procède du précédent, tout autant exagéré ou manquant de réalisme. Cette obsession maladive est, d’ailleurs, d’autant plus manifeste que cette réintégration semble bien loin d’être à l’ordre du jour depuis le nouveau pape !
Un autre symptôme de leur terrible mal est qu’ils sont tout sauf les hommes de principe qu’ils croient être. Puisque le premier de tous les principes est celui de non-contradiction : une chose ne peut pas en même temps et sous le même rapport être et ne pas être. Or ils disent ce qu’il faut faire et ils font exactement le contraire !
Par exemple, ils disent vouloir être « en paix avec tout le monde » (Ep. aux Romains) en tapant sur autrui d’un bout à l’autre de leur discours ; en cherchant à répandre le plus possible leur venin de la zizanie ; et en troublant ainsi le repos dominical des fidèles (en les privant de la sainte nourriture de l’évangile du jour) sans la moindre nécessité ou urgence objectives.
Ils disent être de farouches défenseurs du principe d’autorité en semant le trouble dans les esprits des fidèles quant à la grande estime qu’ils doivent avoir pour les vrais docteurs de la foi que sont leurs évêques ; en sapant l’autorité dans la Tradition ou en détruisant la confiance envers le sacerdoce, en général.
Ils disent « nul ne peut servir deux maîtres » (opposés et en même temps) et ils refusent de choisir (soi disant, sinon cela révèle une mentalité pacifiste ou œcuméniste ; ou prouve qu’ils n’ont depuis longtemps pour maîtres qu’eux-mêmes) leur camp ou leur maître.
En conclusion, ce sont plutôt eux-mêmes qui semblent devenus absolument infréquentables et qu’il ne faudrait peut être même plus chercher à directement (mais que par la prière et les sacrifices) convertir, sous peine de mettre nécessairement et gravement son âme en danger ?
Pierre-Marie Gainche + , le 5 février 2014