SOURCE - Ennemond - Le Forum Catholique - 7 novembre 2015
Sans doute, plaçons-nous trop hâtivement le pape régnant au milieu de notre échiquier français : Puisqu’il favorise des idées progressistes, il ne pourrait vouloir que du mal aux milieux conservateurs et traditionalistes. La preuve en serait le limogeage du cardinal Burke et la persécution des Franciscains de l’Immaculée. Mais dans cette logique implacable, l’archevêque de Buenos Aires aurait dû laisser partir les séminaristes de la FSSPX de la Reja qui étaient expulsés par le gouvernement à la suite de l’affaire Williamson ; le pape Bergoglio aurait dû concéder aux évêques italiens que le Motu Proprio était une brève et clémente parenthèse qu’il refermait désormais ; il aurait logiquement dû renvoyer le cardinal Sarah en Guinée et son grand cérémoniaire sur la côte ligure ; quant à la Fraternité Saint-Pierre ou l’Institut du Christ-Roi, il ne devrait en rester que des miettes. La réalité est que François est avant tout un jésuite argentin, parlant des pauvres à longueur de journée, redoublant d’exemples pour décrire la lutte entre le bien et le mal. On n’est pas forcément sur la longueur d’onde de l’épiscopat français recruté dans le clergé parisien, chérissant les paroisses de l’Ouest francilien et nourrissant une aversion quasiment « traditionnelle » pour la messe de Saint-Pie V. Les lignes sont tout autres.
Sans doute, plaçons-nous trop hâtivement le pape régnant au milieu de notre échiquier français : Puisqu’il favorise des idées progressistes, il ne pourrait vouloir que du mal aux milieux conservateurs et traditionalistes. La preuve en serait le limogeage du cardinal Burke et la persécution des Franciscains de l’Immaculée. Mais dans cette logique implacable, l’archevêque de Buenos Aires aurait dû laisser partir les séminaristes de la FSSPX de la Reja qui étaient expulsés par le gouvernement à la suite de l’affaire Williamson ; le pape Bergoglio aurait dû concéder aux évêques italiens que le Motu Proprio était une brève et clémente parenthèse qu’il refermait désormais ; il aurait logiquement dû renvoyer le cardinal Sarah en Guinée et son grand cérémoniaire sur la côte ligure ; quant à la Fraternité Saint-Pierre ou l’Institut du Christ-Roi, il ne devrait en rester que des miettes. La réalité est que François est avant tout un jésuite argentin, parlant des pauvres à longueur de journée, redoublant d’exemples pour décrire la lutte entre le bien et le mal. On n’est pas forcément sur la longueur d’onde de l’épiscopat français recruté dans le clergé parisien, chérissant les paroisses de l’Ouest francilien et nourrissant une aversion quasiment « traditionnelle » pour la messe de Saint-Pie V. Les lignes sont tout autres.
Le pontife a beau être autoritaire à la façon péroniste, il n’en demeure pas moins le pasteur de l’Église universelle, et donc, forcément, il est tenté de réunir les différentes tendances de la barque qui lui a été confiée pour, au soir de sa vie, montrer qu’il a su réunir le plus grand nombre de brebis. Combien même il ne se sent pas de proximité avec la liturgie qu’il a connue enfant, la dynamique traditionnelle ne dépend plus de François. Elle s’est activée depuis la fin du pontificat de Jean-Paul II, s’est renforcée sous Benoît XVI et leur successeur ne peut se permettre de faire l’impasse sur ce mouvement, d’autant plus que, depuis les errements des cardinaux Kasper et Lehmann, les milieux conservateurs sont résolus à voir la Fraternité régularisée ne serait-ce que pouvoir bénéficier d’appuis solides et déterminés. Les épisodes de l’archevêque de Ferrare confiant une messe à un prêtre de la FSSPX ou encore du pape validant les confessions de tous ses confères ont montré la résignation des prélats progressistes qui avaient littéralement hurlé au moment du Motu Proprio. De guerre lasse, ils se taisent après avoir convenu que même un pape qu’ils considèrent issu de leurs rangs se croit obligé de régler le différend canonique.
Quant à François, il aime avant tout surprendre. Il est à la cantine de Sainte-Marthe quand on le croit dans les palais apostoliques. Il se trouve dans un magasin de lunettes de Rome lorsqu’on le pense dans sa chambre de Sainte-Marthe. Il est évident que nul ne l’aurait imaginé réglant d’un trait de crayon la question des confessions de la Fraternité. D’autant plus qu’il ne déteste par cette dernière. Il apprécie sa capacité à « mouiller la chemise », à aller au contact des réalités en Amérique, en Afrique ou en Asie. Et puis, le caractère trempé de son fondateur, broussard qui ne comptait pas ses boutons dans la glace, et qui disait ce qu’il pensait dans l’Église l’enchante au plus haut point même s’il ne partage pas ses convictions. C’est sans doute pour cette raison que ses relations avec la Fraternité en Argentine n’étaient pas mauvaises et qu’il a lu (et relu) la biographie écrite par Mgr Tissier de Mallerais.
Car le fait que François ait libéré la parole dans l’Église est peut-être un élément qu’on perd de vue mais qui par voie de conséquence a radicalement changé la position de la Fraternité en son sein, bien que celle-ci n’ait pas changé d’un iota. Ce qui était discordant chez elle passe presqu’en arrière-plan quand ce sont des cardinaux qui tapent du poing sur la table au synode. Même sur ce forum, les fidèles attachés à la Fraternité n’ont plus, semble-t-il, le monopole des réserves émises à l’endroit du pontife régnant. Et les plus progressistes ne peuvent plus rien contre les faits : Hier la Fraternité était condamnée parce qu’elle célébrait une liturgie interdite et qu’elle émettait des critiques publiques de la hiérarchie de l’Église. Aujourd’hui, la même liturgie est célébrée par beaucoup, même dans les milieux diocésains. Et la critique ouverte est devenue monnaie courante sous François. Ces réalités lui rendent d’autant plus facile la tâche de régulariser l’œuvre fondée par Mgr Lefebvre. Dès lors, la seule façon pour ceux qui refusent par principe l’idée de régularisation n’est plus de se contenter d’exprimer des réserves ou des critiques mais de corser le discours en conspuant à temps et à contretemps.