30 août 2007





Non au retour du missel de Pie V
30 août 2007 - groupes-jonas.com - Jean Proust
L'évêque consulte son diocèse avant de décider des dispositions nécessaires au bien du Diocèse de Blois. - Un prêtre donne son point de vue. Réaction au MOTU PROPRIO de Benoit XVI sur la réintroduction du missel de Pie V - à la demande du Père M. de Germiny, évêque de Blois, aux prêtres, diacres, religieux et laics de son diocèse.
Par Jean Proust, délégué diocésain à l'Apostolat des laïcs et modérateur au secteur paroissial de Villerbon au diocèse de Blois

Je ne suis pas favorable à voir appliquer, dans le diocèse et de manière générale en France, les formules anciennes du Missel dit de Pie V, qui sont peut-être très vénérables, mais qui deviendront davantage des facteurs de divisions, de rivalités, d'oppositions de classes sociales... que de complémentarité des spiritualités, des cultures et des manifestations de la foi et de la convivialité communautaitre.
Pourquoi a-t-on fait Vatican II, un Aggiornamento salué par le monde entier qui a fait tomber de nombreuses barrières entre l'Église et le monde, après avoir été débattu pendant des années et adopté à une quasi unanimité, si c'est pour en briser l'élan et couper les chemins d'ouverture ? Le Concile de Trente a mis 200 ans à devenir la règle de l'Église (doctrine, organisation...). On peut toujours trouver que l'ancien avait telle ou telle caractéristique qui correspondait mieux à la sensibilité, au style de vie, à la conception sociale de « notre famille », de « notre classe sociale », aussi respectable soit-elle ; mais l'Église se doit d'être de son temps dans ce qui est son vocabulaire, ses concepts, ses modes d'expression communautaires, dans les modes de communication d'aujourd'hui, tout en favorisant des spiritualités diversifiées (franciscaines, jésuites, contemplatives, actives...).Qu'il y ait des personnes de sensibilité plus portée à voir ce qui se faisait dans le passé, je le respecte, mais je ne pense pas que ce soit servir l'Église du Christ que d'officialiser dans le culte officiel, même si on le dit semi-public, ouvert à x, y , ... à tout le monde, des liturgies dont la langue devient le symbole d'un rejet de 100 ans d'ouverture de l'Église au monde pour qu'elle y porte et y célèbre le message et le mystère d'amour aux petits, dans leur langue ( j'ajouterais dans leur culture si je parlais pour les chrétientés d'Afrique, d'Amérique, d'Asie...).
On parle de construire l'unité à travers la diversité, on le voit dans nos paroisses à travers les appartenances à des milieux sociaux, professionnels, culturels diverses, mais s'il s'agit d'une classe sociale, un monde politique, un style académique, une symbolique moyenâgeuse dont on voit bien qu'elle se fonde sur une conception de l'Église qui a entraîné des drames au 19ème et au 20ème siècles (quand les papes disaient que l'Église avait perdu la classe ouvrière et d'autres pans de la société, la réalité symbolique de la langue n'y était pas totalement étrangère).
Il y a dans la discipline actuelle un certain nombre de possibilités de faire de grandes célébrations en utilisant quelques morceaux de latin, comme langue commune (même si, en Allemagne, je prie mieux avec des chorals de Bach en allemand qu'avec une prière eucharistique en latin que ni les allemands ni les français ne comprennent). Réaliser au niveau local, dans un diocèse, un secteur, une paroisse, pour une sensibilité sociologique bien située dans le passé, une diversité de langue et de rite, je pense que c'est DIVISER le peuple chrétien quand nous disons vouloir « l'unité ».Dans le directoire des Évêques de France à Lourdes 2006, on demande de bâtir des communautés catéchétiques et missionnaires, témoins de foi et d'espérance. On s'y attelle de toutes manières... et « maintenant » la communauté que l'on s'efforce de fortifier, va se disperser, se diviser en fonction de choix affectifs fondés en large partie sur des atavismes d'un autre âge. Il est possible de laisser un mode d'expression diversifié dans le domaine privé, mais ne divisons pas nos communautés paroissiales et diocésaines qui ont, plus que jamais, besoin de vivre une seule foi, un seul Dieu, une seule Eucharistie, y compris dans la référence de la langue et des textes établis par l'Église de ce temps.La volonté de voir des communautés séparées revenir est une intention louable, mais ne va-t-on pas voir l'évasion de chrétiens dans des groupes marginaux, le départ d'une nouvelle partie, d'un nouveau pan de l'Église tomber dans l'incompréhension, l'indifférence (et souvent parmi les plus actifs dans la construction d'un monde de justice et de fraternité, vivant une option préférentielle pour les petits, les paumés, les marginalisés ... ; dans le Loir et Cher, en France et dans le monde.
Va-t-on voir se multiplier ce qui se passe en Afrique noire, dans une contexte plutôt protestant ou évangéliste – ce dont souffrent les églises protestantes elles-mêmes : on n'est pas d'accord avec un petit groupe ou avec le pasteur, alors on va se créer une nouvelle église, avec un leader qui devient vite le veau d'or de la communauté ? Dans l'Église catholique, qui bénéficie d'une plus grande unité, on peut utiliser des dévotions particulières (litanies, textes, chants, adoration du Saint Sacrement, chapelet...), mais utilisons les textes liturgiques d'aujourd'hui dans la langue d'aujourd'hui.
NB. Il aurait sans doute fallu faire un texte plus construit, avec une analyse historique, sociologique, théologique et spirituelle plus détaillée ; des théologiens, des pasteurs, des exégètes s'y emploient. Modestement je pense qu'a travers ce problème que je juge d'un autre âge, au lieu d'avancer, on se place, sous prétexte de "charité", en dehors de la Vérité et du véritable Amour qui ne peut faire fi des exigences, d'une Église qui se veut, selon la prière du Christ lui-même, non uniforme, mais UNE dans son expression de Foi et de Confession publique dans un lieu donné : « un diocèse », « un pays ».
Au service du diocèse y compris pour ces problèmes de rites et de langage catéchétiques et liturgiques
Jean Proust - 12 08 07
 

29 août 2007

[AFP] Le patriarche orthodoxe russe Alexis II salue le retour de la messe en latin

AFP - 29 août 2007

ROME, 29 août 2007 (AFP) - Le patriarche orthodoxe russe Alexis II salue le retour de la messe en latin

La libéralisation par le pape Benoît XVI de la messe en latin est un événement "positif", a estimé le patriarche orthodoxe russe Alexis II dans une interview au quotidien italien Il Giornale de mercredi.

Après avoir salué "le retour et la valorisation de l'ancienne tradition liturgique", le chef de la plus importante église orthodoxe ajoute : "nous tenons énormément à la tradition. Sans la défense fidèle de la tradition liturgique, l'Eglise orthodoxe russe n'aurait pas été en mesure de résister à l'époque des persécutions des années 1920-1930", une allusion à l'ère communiste en Russie.

Interrogé par Il Giornale sur les rapports toujours tendus entre le Vatican et le Patriarcat russe, Alexis II répond que "le pape Benoît XVI a affirmé à plusieurs reprises vouloir s'employer à favoriser le dialogue et la collaboration avec l'église orthodoxe et cela est positif".

Sur l'éventualité d'une rencontre - envisagée mais jamais concrétisée - entre le patriarche de Moscou et le pape, Alexis II juge qu'une "telle rencontre (avec Benoît XVI) doit être bien préparée et ne doit absolument pas risquer de se réduire à une occasion de prendre quelques photographies ou de se montrer ensemble devant les caméras".

jflm/kd/bds

28 août 2007





La vie spirituelle au coeur de la crise de l'Église
Après le Motu Proprio, le combat de la Fraternité Sacerdotale Saint-Pie X au service de l'Eglise
28 août 2007 - Abbé Régis de Cacqueray, Supérieur du District de France - laportelatine.org
« Si nous n’avions pleine confiance dans la promesse remarquable que Notre-Seigneur a faite de bâtir son Eglise sur un fondement si solide que les portes de l’enfer ne pourront jamais prévaloir contre elle, dans ce temps où elle est attaquée de toutes parts par tant d’ennemis, et battue en brèche sur tant de points, nous aurions raison de craindre de la voir succomber. » Catéchisme du Concile de Trente.
Il nous est reproché de parler trop souvent de la crise de l’Eglise, de ses enjeux et du combat doctrinal et pas suffisamment de la vie spirituelle. Nous sommes effectivement préoccupés de devoir défendre la foi contre l’hérésie pour que la vie spirituelle demeure encore possible. Et nous craignons en réalité que l’objection que l’on nous fait provienne de l’idée que la vie spirituelle, pour pouvoir s’épanouir, doit se tenir éloignée des combats générés par la crise de l’Eglise. Or  nous pensons que « la paix de Monseigneur Forester » est factice et nous voudrions montrer comment la sanctification des âmes ne peut, au contraire, continuer à bien se faire qu’en plein cœur de la bataille pour la défense de l’Eglise. Je souhaite d’abord rappeler que celles qui se trouvent présentes sur la terre, en un temps où l’Enfer semble s’y déverser entièrement, reçoivent de Dieu les grâces proportionnées à une situation si difficile (I). Et que c’est la crise elle-même qui est devenue en réalité pour elles le grand moyen de l’élévation vers Dieu (II). Je terminerai par quelques applications à la situation d’aujourd’hui (III).

(I) - Première partie
Monseigneur Lefebvre nous a prévenus le jour des consécrations épiscopales que son œuvre spirituelle s’apparentait à une opération de survie. Nous avons bien compris le sens de cette expression : le sacerdoce catholique se trouvait en péril de mort tant qu'un véritable épiscopat catholique n'était pas pérennisé. Ce sont bien les quatre évêques sacrés par lui qui ont sorti l’Eglise de ce danger et, depuis, qui ont tellement contribué à la prolongation de la vie catholique ici-bas. Nous sommes bien des rescapés, qui doivent s’estimer heureux d’avoir échappé à la mort par la grâce de Dieu, alors que tellement de catholiques sont demeurés étendus sur les champs de bataille du combat spirituel.
Cette réalité de la guerre peut surprendre et peiner certaines âmes qui objecteront que notre religion ne peut être empreinte que de la paix et de l'amour divin. C'est pourtant bien  une véritable persécution que nous avons subie, ces dernières décennies, de la part des autorités ecclésiastiques. Elles nous ont fermé les églises, interdit pendant longtemps la célébration de la messe dans les sanctuaires des lieux de pèlerinages et elles maintiennent cet interdit pour certains d’entre eux jusqu’à maintenant. Nous devons subir des sanctions que même les ennemis de l'Église n'avaient plus à supporter alors que notre seul désir n’était que de vivre selon notre foi et unis au Siège de Pierre. Cette guerre que nous n’avons pas choisie ; nous n’avons pas voulu la mener avec d’autres armes que celles que nous avait confiées Notre Seigneur, celles de la Foi, de l’Espérance et de la Charité. Aujourd'hui, en présence du délabrement de « l’Eglise conciliaire », nous ne regrettons pas notre résistance car nous avons conscience de lui devoir notre survie spirituelle et la transmission de la Foi à nos enfants.
Mais notre position de survivants de ce naufrage ne doit-elle pas nous rendre modestes ? Quelles peuvent être nos espérances surnaturelles lorsque tout se trouve détruit et ravagé de fond en comble et que tout nous projette sans cesse hors de Dieu ? N’est-il pas illusoire d’imaginer, quand on a frôlé la mort et qu’elle nous talonne, une vie intérieure profonde et soucieuse d’union à Dieu ? Nous demeurons parqués sur des terrains permanents d’affrontement et réduits aux urgences de la guerre spirituelle. Comment pourrions-nous, en de telles conditions, ambitionner de gravir les sommets  de l’amour divin où sont parvenues les âmes saintes des générations précédentes ? Il s’agit de parer au plus pressé et de commencer donc par conserver la Foi et de continuer à la transmettre : n’est-ce pas déjà beaucoup ?
 Et, en même temps, nous éprouvons un violent serrement de cœur. Alors que nous aurions tant besoin de nous délasser de nos efforts de résistance par la contemplation des beautés célestes, elle serait devenue presque inaccessible à nos âmes avant tout anxieuses d’échapper à la contamination des erreurs ? Nous aurions voulu, vivant de nos vérités saintes et habités par nos trois Personnes adorées, nous perdre dans la prière et goûter les préludes de la Vision Béatifique mais nous voilà aussitôt poursuivis par la réalité implacable du combat, partout présente, partout prégnante. Comment donc concilier cette intimité croissante à laquelle nous invite notre Dieu et à laquelle nous aspirons, avec un monde qui lui est obstinément contraire ? Est-il vraiment possible, quand il faut tant résister, de trouver aussi la paix divine ?
Car voilà quarante ans que nos générations vivent en guerre. Beaucoup d’entre nous n’ont jamais connu qu’elle et meurent ou mourront  sans avoir vu le rétablissement de la paix de l’Eglise. Le Bon Dieu semble attendre de nous que nous passions notre existence à batailler. Bien sûr, nous ne sommes pas les premiers à connaître cette vie de combat et nous savons que le catholique, par vocation, est soldat du Christ. Mais notre combat est revêtu du caractère infiniment douloureux de l’agonie de l’Eglise à laquelle nous assistons et du rejet apparent où Elle se trouve de l’offrande que nous faisons de nous-mêmes pour Elle. Nous ne voulons que la servir, nous ne voulons qu’être les plus aimants de ses fils et Elle paraît repousser nos sacrifices et notre affection. Or voilà qu’à cette première épreuve, qui suffit à nous toucher jusqu’au plus profond de nous-mêmes, viendrait encore s’en ajouter une seconde, désespérante celle-là, qui consisterait en une sorte d’inaptitude radicale à nous élever  vers  Dieu,  cantonnés à ne pratiquer que les seuls gestes élémentaires de survie spirituelle ?
Nous ne pensons pas qu’il puisse en être ainsi. Dieu nous a fait le don de la liberté et Il ne s’en est pas repenti. Et c’est lorsque semblent s’accumuler les obstacles à notre cheminement spirituel qu’Il multiplie d’autant les grâces pour soutenir nos âmes éprouvées. Malgré toute la misère du monde, malgré la dénaturation presque totale de la vérité et l’abaissement consécutif de la spiritualité, Il demeure aussi altéré de nos âmes  que sur le Calvaire. Il nous est infiniment attentif et ne cesse de nous regarder et de creuser de mystérieux sentiers pour que nous puissions Le rejoindre. Si nous sommes embarrassés de la crise, Lui s’en joue : « Celui qui habite dans les cieux se rira d’eux, le Seigneur s’en moquera. » Ps. II,4  Et sa puissance n’est nullement rendue incertaine par son ampleur et sa complexité : « Tu les briseras avec un sceptre de fer ; comme un vase de potier, tu les mettras en pièces. » Ps. II, 8
A ces heures les plus poignantes de notre guerre, l’agonisant de Gethsémani, qui a tant souffert de l’assoupissement de ses amis le laissant seul dans la nuit, aurait-Il le cœur à nous rendre la pareille et à se retirer avec ennui des âmes meurtries de mener un combat pour lui seul ? Il demeure là, infiniment compatissant et tendre au fond de nous-mêmes, nous devenant  d’autant plus intime que les abandons humains se font plus nombreux et plus tragiques. A rebours de l’homme, qui ne sait pas ce que sont ses amis devenus à l’heure de l’adversité, Dieu ne se fait jamais aussi proche qu’à ces moments-là.
C’est de Dieu dont nous parlons. Il révèle sa puissance aux hommes en cela qu’Il fait de l’atrocité du combat dans lequel ils se trouvent plongés et qui devrait les laisser hébétés et inertes,  la porte par laquelle Il entre en eux pour les veiller ou veiller avec eux, petite flamme qui ne s’éteint pas, même quand tout a vacillé. Nous qui sommes faits pour jouir de la paix éternelle, trouverions-nous Dieu ailleurs autant qu’en ces épousailles généreuses des plus forts combats entrepris pour sa gloire ? Le rencontrerions-nous ainsi même dans les plus merveilleux silences que réalisent en elles les âmes du fond des tabernacles ? Les bruits de la  guerre finissent par devenir tellement assourdissants que l’on n’entend plus ni rien ni personne- miracle du combat chrétien- et que l’on devient alors merveilleusement apte, au milieu des assauts les plus violents, à écouter celui qui nous parle sans aucun bruit.
En conséquence, ce n’est pas parce que nous vivons en un siècle où tout semble s’être ligué pour la disparition de notre religion et que nous devons sans cesse nous garder de la contagion néo-moderniste, que nous ne pouvons plus espérer gravir les sommets de la vie chrétienne. Pour qui veut ne pas périr, il est impératif de ne pas se résigner à vouloir seulement survivre. Il faut conserver la volonté de vivre et de vivre pleinement. Notre Dieu veut  pour nous ce qu’Il a toujours voulu pour  ceux qui nous ont précédés dans la  Foi : nous permettre de vivre de Lui et  nous élancer de toute notre âme vers Lui, avec autant de vigueur que nos anciens. Il ne lui plaît  pas, parce que nous nous trouvons en un siècle où tout est sali, où tout est avili, que nos âmes se résignent à être également un peu sales, à croire la pureté chimérique et la grâce elle-même essoufflée à fabriquer encore de la sainteté.
Sa puissance éclate au contraire en cela qu’Il se sert du concours des forces de dissolution elles-mêmes pour provoquer le sursaut et l’élévation des âmes chrétiennes. Leur résistance leur devient le moyen providentiel pour échapper à la tiédeur qui les menaçait. Et si elle exhale sans doute un goût de poudre à canon, il n’empêche qu’une sève spirituelle surabondante, et qui ne demande qu’à les vivifier, est bien réservée aux âmes éprouvées.

(II) - Deuxième partie
Il s’agit, pour commencer, d’une obstination farouche à défendre, à conserver, à transmettre la Foi. C’est pour qu’elle ne périsse pas que nous menons cette lutte acharnée ; pour qu’elle soit encore communiquée aux générations qui nous suivront, pour que nous-mêmes et nos enfants, nous ne nous laissions pas ensevelir, à notre tour, par cette déchéance abominable qui voudrait asservir tous les hommes ; pour que l’héritage de deux millénaires de Tradition Catholique ne disparaisse pas en fumée parce que nos âmes auront été trop futiles en face du grand devoir où elles se trouvaient de le transmettre à leur tour.
Nos générations portent la responsabilité historique de communiquer le trésor reçu de Dieu quand tout se ligue pour l’interruption définitive de cette transmission. En prendre vraiment conscience et en mesurer les conséquences suffit aujourd’hui à nous permettre d’endurer volontiers, prêtres et fidèles, des conditions inconfortables d’existence et nous rendre prêts à accepter tous les sacrifices.
Et ce sont précisément ces circonstances si difficiles que nous vivons qui nous redisent sans cesse le prix que vaut réellement la préservation du trésor de notre Foi. Qu’il s’agisse des kilomètres à parcourir pour trouver une messe le dimanche, du montant de la scolarité des enfants, des divisions graves qui se sont produites au sein de nos familles ou des épithètes que l’on brandit  pour désigner notre résistance ; tout conspire merveilleusement à nous rappeler que nous consentons tous ces maux pour un bien infini.
Toute hérésie, par les attaques qu’elle dirige contre un dogme, engendre chez les catholiques les plus aimants de leur Foi, un mouvement instinctif à se grouper autour de lui pour le défendre et les amènent ainsi à l’approfondir et à s’en nourrir. Il en résulte que les orientations spirituelles des âmes se trouvent nécessairement sous l’influence des luttes menées par l’Eglise contre les erreurs du temps. Leur sanctification ne s’opère pas dans une sorte d’isolement spirituel de l’époque où elles vivent mais dans un engagement intérieur, souvent très douloureux, à s’unir profondément aux mouvements les plus intimes de la défense de l’Eglise et de sa vie militante. Et ce n’est qu’au prix de l’acceptation d’une telle posture que les âmes s’élèvent.
N’est-ce pas encore cette crise qui nous a contraints à reprendre notre catéchisme et à  approfondir les vérités que nous aurions sinon survolées ? L’inquiétude provoquée par les nouveautés dans l’enseignement dispensé par les prêtres nous a obligés à réfléchir, à scruter notre Foi. L’œcuménisme et les appauvrissements de la nouvelle liturgie nous ont portés à mieux  apprécier, par contraste, combien la messe de toujours était nourrissante et savoureuse. Il a jailli du triste spectacle de l’immense misère spirituelle, tout un renouveau de la générosité des âmes qui a suscité des vocations expiatrices pour la chute des consacrés et pour les apostasies sans nombre qui se sont produites. Et toujours, en toile de fond, la compassion provoquée par l’affaiblissement et l’humiliation de notre Mère, l’Eglise.
La crise nous contraint à nous hisser à un niveau de pensées et de sentiments qui, naturellement, nous dépasse : c’est ainsi que nous ne cessons pas de croire à la divinité de l’Eglise quand tout nous laisse penser qu’Elle ne se relèvera pas des coups reçus de ses chefs ; que nous n’avons de cesse de prier pour le pape et pour les évêques alors que nous subissons de si grandes injustices de leur part. Que notre attachement à la foi nous est reproché comme un signe certain de manque de charité lorsque la charité est condamnée à disparaître si la foi n’est plus transmise.  Bien que nous demeurions tellement éloignés de l’héroïsme que demandent de telles circonstances, nous sommes comme acculés par le Bon Dieu à produire ces actes difficiles et répétés de foi, d’espérance et de charité.
Et cependant, comme nous devons veiller sur nous-mêmes car un sentiment trompeur d’invulnérabilité cherche à s’insinuer dans nos cœurs ! Nous ne sommes pas loin de nous dire parfois comme Pierre : « Quand même tous seraient scandalisés à votre sujet, moi je ne serai jamais scandalisé » (Mt XXVI ,33) .Nous sommes en effet demeurés fidèles à la Foi de toujours, même au sein de la tourmente conciliaire. Nous avons supporté, et nous supportons jusqu’à présent, d’avoir été bannis des églises et considérés comme des parias par la hiérarchie : « Officiellement, nous sommes considérés comme des désobéissants, comme des gens qui ne se soumettent pas à ce courant libéral. C’est vrai. Nous ne nous soumettons pas à ce courant libéral et alors nous sommes poursuivis. Et cette situation est vraiment pénible. » (Monseigneur Lefebvre, le 21 XII 1984). Nous avons erré de grange en garage et de garage en grenier pour ne jamais accepter cette nouvelle messe qui a tari le flot de la transmission de la Foi. Les quelques clochers que nous avons reconquis l’ont été de haute lutte. Notre vie, jusqu’à aujourd’hui, n’a été qu’une guerre continuelle pour ne pas nous laisser dérober ces trésors spirituels, les seuls auxquels nous tenons vraiment.
Et nous pouvons donc penser, en raison de cette très longue résistance tissue (1) de tant de sacrifices, que nous nous trouvons comme à l’abri de glisser et de tomber à notre tour ; qu’il est donc possible, sans risque réel et parce que nous avons toujours maintenu le combat, de  nous octroyer certaines facilités que des évolutions de la crise rendent aujourd’hui possibles ; que notre expérience de cette guerre spirituelle, seul bain connu de notre âme depuis toujours ou depuis si longtemps, nous garantit d’être toujours fidèles ; que nous avons été de bons soldats courageux et que le Motu Proprio annonce pour bientôt ce moment heureux où il sera enfin reconnu que nous avons eu raison de faire les choix qui ont été les nôtres.
Mais nous ne sommes pas invulnérables. La crise dans l’Eglise évolue, devient plus complexe, prend des tournures nouvelles. Le Motu Proprio du pape Benoît XVI constitue une étape qui va certes compter pour la libération de la messe et pour la respiration du Corps Mystique. Mais il doit être clair, justement pour ne pas se perdre après avoir tenu si longtemps, que cet acte du pape ne résout pas la crise.
Il ne la résout pas puisqu’il considère les deux messes comme des formes toutes deux valables d’un même rite : « Il n’est pas convenable de parler de ces deux versions du Missel Romain comme s’il s’agissait de « deux Rites ». Il s’agit plutôt d’un double usage de l’unique et même rite. » (Lettre qui accompagne le Motu Proprio de Benoît XVI aux évêques). Non seulement il estime qu’ « il n’y a aucune contradiction entre l’une et l’autre édition du Missale Romanum » mais il prévient aussi que « L’exclusion totale du nouveau rite ne serait pas cohérente avec la reconnaissance de sa valeur et de sa sainteté. » De telles affirmations montrent suffisamment que le Motu Proprio ne peut être considéré autrement que comme une étape objectivement franchie d’un processus dont le terme -qui ne doit être autre que le retour à la seule vraie messe- n’est, quant à lui, pas désiré. Il en résulte un climat de confusion où la reprise de l’ancienne messe risque de ne signifier que rarement un retour à la bonne doctrine.
Cette situation qui suit le Motu Proprio nous oblige donc, plus que jamais, à comprendre que la ruine de l’Eglise ne tient pas uniquement à la question liturgique. Aussi importante qu’elle soit, elle demeure seconde par rapport à la vérité théologique dont elle n’est qu’une traduction. La méconnaissance de la défense de la Foi ou l’opinion qu’il s’agit là de problèmes éloignés ne concernant qu’une poignée d’intellectuels, laisserait alors accroire que la crise de l’Eglise est désormais terminée et remplie la glorieuse mission de la Fraternité saint Pie X.
A ce moment de notre combat, la crise agit donc de nouveau comme un signe de contradiction. Pour comprendre le combat de la Fraternité, il est devenu impérieux de ne plus ignorer la teneur de cette mésentente doctrinale cruciale qui l’oppose à  Rome. Elle seule permet d’adhérer réellement à son refus d’une « réconciliation » qui aurait été conclue avant  que la vérité ait recouvré tous ses droits. « Il y en a qui seraient prêts à sacrifier le combat de la Foi en disant : Rentrons d’abord dans l’Eglise ! Faisons tout pour rentrer dans le cadre officiel, public de l’Eglise. Taisons notre problème dogmatique. Taisons notre combat. Ne parlons plus de la malice de la messe. Fermons la bouche, ne disons plus rien. Ne soyons pas opposés à cela. Ne disons plus rien sur les questions de la liberté religieuse, des Droits de l’Homme, de l’œcuménisme. Taisons-nous, taisons-nous, et puis comme cela nous pourrons rentrer dans le cadre de l’Eglise et, une fois que nous serons à l’intérieur de l’Eglise, vous allez voir, on va pouvoir combattre, on va pouvoir faire ceci, on va pouvoir faire cela…C’est absolument faux ! On ne rentre pas dans un cadre, et sous des supérieurs, en disant que l’on va tout bousculer lorsqu’on sera dedans alors qu’ils ont tout en mains pour nous juguler ! Ils ont toute l’autorité » (Monseigneur Lefebvre, le 21 XII 1984).
La lecture des livres de Monseigneur Lefebvre et des régulières mises au point de Monseigneur Fellay s’avère ici indispensable pour arriver à bien mesurer l’étendue et la gravité des questions  posées. Pour faire court, je dirai qu’il n’y a aucun « accord » envisageable tant que les principes au nom desquels ont été acceptés les réunions interreligieuses d’Assise, le baiser d’un pape au Coran, les différentes visites dans les mosquées et les synagogues telles qu’elles se sont déroulées, la bénédiction d’un autre pape par un rabbin n’auront pas été relégués aux oubliettes de l’Eglise. Or ces scandales qui  n’ont cessé de se succéder les uns après les autres trouvent les fondements de leur justification théologique dans les textes du Concile.
Le Motu Proprio nous oblige finalement, encore plus qu’avant, à nous situer au cœur du débat : Vatican II, par son décret sur la liberté religieuse en particulier, a décidé le découronnement de Notre-Seigneur Jésus-Christ. Monseigneur Lefebvre, lui au contraire, a donné comme titre à son livre le plus important : Ils l’ont découronné. Ces deux positions sont irréconciliables l’une avec l’autre. Et nous avons sous nos yeux, dans nos pays, si nous avons du mal à  percevoir la perversité de ces nouveaux principes, l’illustration manifeste de la déchéance qui a suivi le divorce -consacré par le Concile- de nos institutions politiques avec l’Eglise.
C’est pourquoi, avant même d’être celui de la messe, le combat de la Fraternité est celui des droits divins de Notre-Seigneur : elle revendique qu’ils soient de nouveau reconnus et proclamés : « Alors cette guerre qui s’est faite à l’intérieur de l’Eglise continue. Il ne faut pas croire que c’est fini. Il ne faut pas croire parce que nous assistons à quelques mesures et quelques rappels qui sont plus conformes à l’esprit traditionnel que le combat est terminé ! Ce combat de la Foi, dans lequel nous avons été pris, nous a fait prendre comme décision de ne pas accepter les réformes post-conciliaires, parce qu’elles sont faites dans cet esprit œcuménique et libéral. Et donc, tout ce qui est fait dans cet esprit du libéralisme, condamné par les papes, ne peut pas être accepté, parce que c’est contraire à notre Foi, contraire au bien de l’Eglise, contraire au salut des âmes et contraire à la vie humaine, sociale et chrétienne, à la vie de la société. » Monseigneur Lefebvre, le 21 XII  1984.
Et, si je suis parvenu à m’expliquer, un nouveau jaillissement spirituel se produira donc, plus magnifique que jamais, de ce que nos âmes, amoureuses de l’honneur méprisé de Notre-Seigneur, se seront postées sur les créneaux de la défense de son Règne. Elles ne s’élèveront et ne peuvent s’élever que dans cette seule mesure où elles se refusent à être situées ailleurs qu’au plein cœur d’un combat de positions qui, seule en retour leur fournit la garantie de se trouver au cœur de l’Eglise.
En conséquence, il doit être également évident, pour tous ceux qui savent quelle est la bataille de Monseigneur Lefebvre, que la justice la plus élémentaire  interdit de nouer «  des accords » si la mémoire de celui à qui nous devons tout - autant qu’il est possible de tout devoir à un homme - n’a pas été lavée des injustices et des peines subies. L’existence même de la commission Ecclesia Dei, dressée sur la condamnation de nos évêques, qui regroupe ceux «  qui ont abandonné le mouvement de Monseigneur Lefebvre" (interview du cardinal Castrillón Hoyos, 6 VIII 2007) se trouve viciée dès l’origine. Accepter d’en être est une gifle à la mémoire d’une personne qui nous est sacrée. Ce n’est point là  affaire de susceptibilité. Chacun peut comprendre que nous serions, tout au contraire, des fils bien indignes et bien ingrats, et que nous pêcherions gravement contre l’honneur et contre la piété filiale, si nous admettions une régularisation canonique de notre situation sans plus nous soucier de notre fondateur. L'origine même de cette commission pontificale, comme sa dénomination invitant textuellement les fidèles à s'affranchir du combat des seuls évêques qui ont osé se lever pour défendre la doctrine traditionnelle, nous est odieuse et suffit à la discréditer à nos yeux.

(III) - Troisième partie
A suivre

Abbé Régis de Cacqueray ,
Spérieur du District de France.
Suresnes, le 28 août 2007.
(1) [NDLR de LPL] « Tissue » : tissé, tissu. La forme tissé, ée, s’emploie au sens propre : une fine étoffe tissée de soie et de lin. – La forme tissu, ue s’emploie au sens figuré : Une relation infidèle des faits, toute tissue d’erreurs et d’inventions.
 

25 août 2007





Pour l'amour de la Sainte Eglise, nous ne voulons pas de cette paix.
25 août 2007 - Abbé Guépin - virgo-maria.org
POUR L'AMOUR DE LA SAINTE EGLISE, NOUS NE VOULONS PAS DE CETTE PAIX
La loyauté qu'exige le service de la Vérité nous contraint de dire et d'affirmer sans détour : «Nous ne voulons pas de cette paix».
Le «Motu Proprio» de Benoît XVI proclame que la religion issue de Vatican II est celle de la majorité des catholiques «forme ordinaire», et que le Rite de St Pie V, «forme extraordinaire»..., a droit à une égale protection !
N'est-ce pas là, en réalité, proclamer l'équivalence de la Vérité et de l'erreur, du Saint Sacrifice de la Messe et de la messe de Luther ? La coexistence pacifique des deux rites est une injure faite à Notre Seigneur Jésus-Christ.
Cela est insupportable au regard du témoignage de la Foi. Il faut le redire à ceux qui l'ont oublié :
Le NOVUS ORDO MISSAE de Paul VI «s'éloigne de façon impressionnante, dans l'ensemble comme dans le détail, de la théologie catholique de la Sainte Messe, telle qu'elle a été formulée à la XXIIè session du Concile de Trente» (Lettre à Paul VI des Cardinaux Ottaviani et Bacci, 3 septembre 1969). Ce nouvel ordo présente toutes les caractéristiques d'une «messe de Luther» : prépondérance de la Parole, suppression de l'Offertoire (remplacé par une bénédiction juive), modification des paroles de la Consécration (transformée en récit historique) et désacralisation générale qui est une diminution-négation de la Foi en la Présence réelle.
Ce n'est donc pas une cohabitation que nous voulons, ce n'est pas la présence simultanée de deux rites : c'est la suppression totale d'un rite profondément protestant et le rétablissement de la Messe catholique latine et grégorienne selon le Missel Romain de Saint Pie V dans toutes ses prérogatives.
La doctrine de l'Eglise catholique nous dit que le prétendu «droit à la liberté religieuse» est une infamie, une manière d'apostasie. Il a été condamné par les Papes Pie VII, Grégoire XVI, Pie IX et Léon XIII ; il s'oppose à la Royauté sociale de Notre Seigneur Jésus Christ.
La doctrine nous dit encore que Vatican II enseigne une fausse conception de l'Incarnation de Notre-Seigneur : conception selon laquelle par la seule Incarnation Jésus-Christ est uni à tout homme. Voilà qui évacue la nécessité de la Rédemption (1), voilà qui est à l'origine d'une fausse conception de l'Eglise et de la folie de l'œcuménisme galopant qui dissout les restes de la foi catholique.
La mise en œuvre de Vatican II est éloquente !
- Le 30 novembre 2006, Benoît XVI visitait la Mosquée bleue d'Istanbul. A l'invitation de son hôte musulman, Mustafa Cagrici, il s'y recueillait quelques instants, les mains croisées sous la poitrine, tourné dans la direction de la Mecque. Il s'était auparavant déchaussé (et chaussé de babouches blanches) pour y pénétrer ! (St Pie V et Lépante...) . C'est cela, l'apostasie (2).
- Le 10 mai 2007, Benoît XVI, en visite au Brésil, s'est mis à genoux aux pieds du grand Rabbin de Sao Paulo pour demander la bénédiction d'un «grand frère dans la Foi» ! Imaginons un instant saint Pie V ou saint Pie X à genoux aux pieds du grand Rabbin ! Imaginons Notre-Seigneur Jésus-Christ à genoux aux pieds de Caïphe, demandant sa bénédiction ! Cela est impossible ! Un Pape ne peut pas faire cela ; il ne peut pas se prosterner devant la Synagogue de Satan. Ce qu'un Pape de l'Eglise catholique ne peut pas faire, Benoît XVI, à la suite de Jean Paul II, l'a fait... II faut le dire, le crier à ceux qui l'ont oublié !
- Nous sommes d'autant plus consternés d'apprendre que la Fraternité St Pie X exprime à Benoît XVI «sa vive gratitude» et chante le Te Deum à l'occasion de la publication de son «motu proprio» le 07.07.07. Mgr Fellay demande à nouveau le retrait du décret d'excommunication ?!... Pourtant, il y a quelques années, il avait fait publier un tract en couleurs, à des milliers d'exemplaires : «Nous ne sommes ni schismatique, ni excommunié !» et maintenant, il demande au Chef des Modernistes la levée de cette excommunication! C'est l'incohérence. Ou bien il est aveuglé, ou bien il a perdu la tête !
Nous nous en tenons aux propos de Mgr Lefebvre du 29 juin 1976 à Ecône : «Demain peut-être nous serons excommunié, eh bien j'en appelle à saint Pierre et saint Paul, et je considérerai cette excommunication comme un brevet de fidélité à l'Eglise Catholique Romaine». (Plus de 10 000 personnes ont applaudi.)
Ce «cadeau» est un cadeau empoisonné et nous n'en voulons pas. D'abord, nous n'avons pas besoin de «l'autorisation» du Chef des modernistes pour célébrer la Messe catholique. Nous nous en tenons à la Bulle de saint Pie V «Quo primum tempore» du 19 juillet 1570 : «...Afin que tous et en tous lieux adoptent et observent les traditions de la Sainte Eglise Romaine, Mère et Maîtresse de toutes les Eglises, faisons, pour les temps à venir et à perpétuité, défense que, dans toutes les églises du monde chrétien, la Messe soit chantée ou récitée autrement que selon la forme du Missel publié par Nous... Rien, jamais, ne devra lui être ajouté ou retranché, rien ne devra y être modifié... En outre, en vertu de l'Autorité Apostolique, par la teneur des présentes, concédons et donnons l'indult suivant, et cela même à perpétuité :
Que, désormais, pour chanter ou réciter la Messe en n'importe quelles églises, on puisse, sans aucune réserve, suivre ce même Missel, avec permission (donnée ici) et pouvoir d'en faire libre et licite usage, sans aucune espèce de scrupule ou sans qu'on puisse encourir aucunes peines, sentences et censures... Ainsi donc, qu'il ne soit à personne, absolument, permis d'enfreindre ou, par téméraire entreprise, contrevenir à la présente charte de Notre permission, statut, ordonnance, mandat, précepte, concession, indult, déclaration, volonté, décret et défense. Que s'il avait l'audace de l'attenter, qu'il sache qu'il encourra l'indignation du Dieu Tout Puissant, et des bienheureux Apôtres Pierre et Paul».
Contrairement à la volonté de saint Pie V, Benoît XVI met des réserves ; la Messe est «en liberté surveillée». On ne peut célébrer la messe que selon l'ordo de Jean XXIII publié en 1962. Avant 1962, c'est interdit ! A dix reprises, il insiste sur cette date qui est comme un seuil.
D'autre part, cette autorisation est donnée pour toute l'année, sauf pour le Triduum sacré ! (Art. 2). Il faudra donc que les «traditionalistes» célèbrent l'ordo de Paul VI le Jeudi Saint et la Veillée Pascale ! Quoi de plus normal, en effet, pour manifester pleinement leur «communion» avec leur «Saint Père» !
Tout ceci met providentiellement en évidence que témoigner de la Vérité n'est possible que dans l'absolue conformité à la Vérité. Et c'est pourquoi nous ne voulons pas de cette coexistence des deux rites dans les mêmes églises. Nous ne voulons pas de cette unité qui est contraire à la Vérité et contraire à la Sainteté de l'Eglise. Le résultat de cette confusion sera que les pratiques sacrilèges très répandues mais actuellement privées d'objet, auront demain toute leur odieuse portée eu égard à la Présence Réelle recouvrée. Et dans d'autres circonstances, les fidèles seront gravement trompés en assistant à des Messes célébrées par des «prêtres» qui ne sont pas Prêtres.
En toutes choses, rien n'égale la franchise ; et il faut dire sans détour qu'il n'existe au monde qu'une seule société qui possède la Vérité : c'est l'Eglise Catholique. Et cette société doit nécessairement être intolérante à l'égard du mal, de l'erreur des fausses religions et aujourd'hui à l'égard du modernisme. «La religion qui vient du ciel est vérité, et elle est intolérante envers les fausses doctrines. C'est la condition de toute vérité d'être intolérante ; mais la vérité religieuse étant la plus absolue et la plus importante de toutes les vérités, est par conséquent aussi la plus intolérante et la plus exclusive.
Rien n'est exclusif comme l'unité. Or, entendez la parole de Saint Paul : Un Dieu, une Foi, une Eglise. Je l'avoue, il n'y a pas là de subtilité, c'est l'intolérance, l'exclusion la plus positive, la plus franche. Et encore, Jésus Christ a envoyé Ses Apôtres prêcher toutes les nations, c'est-à-dire, renverser toutes les religions existantes pour établir l'unique religion catholique par toute la terre». (Cardinal Pie).
La secte de Vatican II agit à l'opposé de l'enseignement de Notre Seigneur Jésus-Christ. Le Cardinal Pie, combattant le libéralisme du XIXè, annonçait par avance la situation dramatique que nous subissons : «Que de consciences seraient tranquilles, le jour où l'Eglise Catholique donnerait le baiser fraternel à toutes les sectes ses rivales !» C'est ce que Benoît XVI met en œuvre après J.P.II : il participe au culte juif, musulman, protestant, et se garde bien de prêcher Notre Seigneur Jésus-Christ aux ennemis de Notre-Seigneur Jésus-Christ !
Nous refusons donc la paix proposée par Benoît XVI ; et en cela nous mettons en œuvre l'enseignement de notre divin Maître : «Nul ne peut servir deux maîtres». Devant cette situation insoutenable en regard de la Foi, nous faisons nôtre l'affirmation du Cardinal Pie : «Nous sommes donc intolérants, exclusifs en matière de doctrine : nous en faisons profession ; nous en sommes fiers».
Pour l'amour de la vérité et par fidélité à la Sainte Eglise notre Mère : «Non possumus» : nous ne pouvons pas accepter cette paix.
Abbé Philippe GUEPIN
Prêtre réfractaire à la révolution de Vatican II
Août 2007, Chapelle du Christ-Roi, 98 rue d'Allonville, 44000 NANTES

1 Remise en question de l'existence des Limbes ; les petits enfants morts sans baptême vont tout droit au Ciel ! Ceci est en pleine contradiction avec l'enseignement de saint Thomas d'Aquin.
2 Un apostat n'appartient plus à l'Eglise Catholique. Comment quelqu'un qui n'appartient plus à la Sainte Eglise peut-il en être le Chef ?




Reconstruction
25 août 2007 - Mgr Richard Williamson - laportelatine.org
La Reja, le 25 août 2007
Le débat sur le récent Motu proprio du pape Benoît XVI continue  – je ne dirai pas à faire rage – mais certainement à soulever les passions. Le Motu proprio reconnaissait que le rite tridentin n'avait jamais été abrogé et donnait à tout prêtre catholique une certaine latitude pour le célébrer. 
Certains ont condamné le document à cause de son double langage et ont affirmé que ce n'était là qu'un leurre pour attirer les catholiques traditionalistes dans les sables mouvants de l'Église conciliaire.
Pour ce qui est du double langage, parfois en faveur du catholicisme, parfois en faveur du conciliarisme, il est hélas indéniable. Mais à quoi pouvions-nous nous attendre de la part de ce que nous pourions qualifier de  « pape dual  » ? Benoît XVI, comme Paul VI et Jean-Paul II avant lui, ne s'aperçoit pas qu'il croit en deux religions contradictoires simultanément. À moins d'un miracle, Benoît XVI pensera ainsi jusqu'à sa mort. Voilà qui est assez affligeant, mais pour autant que le Motu proprio soit concerné, tout cela est de peu de rapport.
Ce qui importe plutôt, à mon avis, c'est que le diable porte Pierre comme le dit si bien l'adage. Dans de nombreux pays, nous voyons que de nombreux prêtres catholiques et des laïcs – mais en général pas les évêques – redécouvrir le véritable rite de la messe , commander des missels, des DVD didactiques sur la sainte messe, des ornements liturgiques, etc ... J'entends déjà les objections des purs et durs ! Bien sûr, tout ne sera pas parfait du premier coup. Il y aura des fautes de latin, les rubriques ne seront pas parfaites et tout ça, mais pourquoi ne pas donner sa chance à la grâce de Dieu ?
Avec Dieu, le moindre bien va loin – et un prêtre catholique ne se refait pas en un jour !
Laissez-moi vous présenter un scénario; ce n'est pas infaillible, vous y croirez si bon vous semble. L'époque actuelle peut être comparée à celle de Noé, juste avant le déluge. Notre monde « idiot-visuel », maintenant répandu sur toute la planète, court à l'abyme. Dieu ne peut plus le laisser mener des millions d'âmes endormies en enfer.
Quand il s'effondrera, les catholiques en seront réduits à courir en tous sens à la recherche d'un prêtre pour la confession de leurs péchés. Il n'y aura pas assez de prêtres « liturgiquement parfaits » de la FSSPX disponibles. Donc, il est permis de penser que Dieu prépare un certain nombre de prêtres – connus de Lui seul – hors de la FSSPX pour ces jours dramatiques. Le Motu proprio, qui leur permet de renouer avec le rite véritable de la messe – au moins en privé – est une étape importante de cette préparation.
De tout notre coeur, prions pour de tels prêtres, et pour le pape. Kyrie Eleison.

Monseigneur Richard Williamson
 

24 août 2007





Quelques distinctions et nuances utiles (II)…
… pour nous préparer au 14 septembre 2007
24 août 2007 - Jean Madiran - Présent
La première partie de cet article a été diffusée ici.
Quelques distinctions et nuances utiles (II)
Pour nous préparer au 14 septembre
La contestation de principe élevée pendant trente-huit ans contre l’abusive interdiction de la messe traditionnelle n’est donc plus nécessaire depuis le Motu proprio du 7 juillet, qui va entrer en vigueur le 14 septembre.

Il y aura sans doute des difficultés d’application dans les diocèses les plus hostiles : c’est une autre question, qui n’est plus de principe et de droit, mais tout entière maintenant de mise en œuvre pratique.

Il y a l’autre contestation de principe. Elle concerne l’autre messe, qui désormais n’est plus que facultative. A son sujet, des critiques sévères ont été formulées, dès son apparition en 1969-1970, par le cardinal Ottaviani, le Père Calmel, les abbés Georges de Nantes et Raymond Dulac, et par Mgr Marcel Lefebvre à partir de 1971. Ces critiques contestaient que l’on puisse oser présenter la messe « nouvelle » comme très supérieure à l’« ancienne », comme beaucoup plus belle et comme mieux adaptée à séduire la modernité ! En outre, elles dénonçaient dans ses insuffisances un danger pour la foi. Il n’apparaît pas que ces objections aient été levées ou réfutées. Le P. Calmel estimait que la messe de Paul VI n‘était pas une création stable, mais qu’au contraire elle allait ouvrir les portes à une incontrôlable prolifération de fantaisies évolutives et révolutionnaires : ce qui est arrivé. Il ne semble pas que l’on ait depuis lors réussi à fermer ces portes. On aimerait qu’au lieu de soutenir la messe nouvelle par l‘éternel argument d’autorité, asséné sans explication, il y ait de vraies compétences théologiques et liturgiques qui fassent le point de la situation actuelle. Peut-être est-il trop tôt, les adjonctions, améliorations et corrections apportées à la messe de Paul VI n’en étant encore qu‘à leur tout début.

Ce que voit le simple laïc, c’est le célébrant toujours en représentation, tourné vers l’assistance au lieu de l‘être vers Dieu, et multipliant les bavardages de son cru ; ce sont ces églises paroissiales où, par le resserrement des bancs, on a rendu physiquement impossible de s’agenouiller ; c’est la communion toujours distribuée par n’importe qui, reçue debout et dans la main. Il n’est pas besoin d’une grande compétence liturgique ou théologique pour ne pas vouloir y participer.

Bien sûr, on voit aussi que quelque chose a tout de même heureusement commencé à bouger dans plusieurs diocèses, sous l’influence d’une génération de jeunes prêtres en recherche de davantage de solidité et de sacré ; et aussi dans le souvenir des critiques que le cardinal Ratzinger adressait aux divagations liturgiques. On constate une tendance à supprimer maintenant, dans les cérémonies, les gesticulations déplacées. Un état d’esprit favorable à la ratzingérienne « réforme de la réforme liturgique » se développe dans une partie de la hiérarchie. Cependant il ne paraît pas possible d’anticiper sur les résultats escomptés de cette réforme de la réforme, et de faire comme si les inconvénients de la messe de Paul VI n’existaient plus.

Il est facile de comprendre quel peut être l’embarras, voire le mécontentement, d‘évêques qui s‘étaient engagés à fond, en toute sincérité, dans le rejet absolu des liturgies, des catéchismes et des exégèses antéconciliaires.

Mais il y a eu aussi l’action d’un parti subversif, manipulateur et dominateur, bizarrement haineux, installé in sinu gremioque Ecclesiae. Et il l’est toujours.

JEAN MADIRAN

Article extrait du n° 6406 de Présent, du Vendredi 24 août 2007, p.1
 

23 août 2007

[Jean Madiran - Présent] Quelques distinctions et nuances utile… pour nous préparer au 14 septembre 2007

Jean Madiran - Présent - 23 août 2007

Pendant 38 ans, des réfractaires, prêtres et laïcs, ont gardé vivante une messe interdite depuis 1969 par la hiérarchie ecclésiastique.

Les réfractaires ont soutenu deux contestations, soit séparées soit conjointes, mais qu’il importe de distinguer pour ne pas confondre, si l’on veut comprendre où nous allons.

Quand Paul VI promulgue sa messe nouvelle, le 3 avril 1969, il n’apparaît pas clairement, tout d’abord, si elle est destinée à cohabiter avec la messe traditionnelle ou bien à la supprimer. Cela restera une question discutée, et incertaine, jusqu’en novembre.

Si bien que la contestation qui a été chronologiquement la première est celle qui critique publiquement la structure, les formules et l’esprit de la messe nouvelle. Ce fut principalement le Bref examen présenté à Paul VI par les cardinaux Ottaviani et Bacci, estimant que cette messe « s‘éloigne de façon impressionnante, dans l’ensemble comme dans le détail, de la théologie catholique » ; et ce fut la Déclaration du P. Calmel, assurant que ce nouveau missel, tel qu’il était rédigé, allait ouvrir les portes à une liturgie évolutive, dont la prolifération permanente deviendrait très rapidement incontrôlable.

Cette première contestation fut en outre accompagnée, suivie, développée par plusieurs travaux et ouvrages de laïcs, dont le livre de Louis Salleron intitulé La nouvelle messe.

Le 12 novembre 1969, une ordonnance de l‘épiscopat français, devançant et aggravant les décisions pontificales, rendait obligatoire, et obligatoirement en langue française, à partir du 1er janvier 1970, la messe nouvelle de Paul VI.

Une telle obligation impliquait donc l’interdiction non seulement de la messe traditionnelle, mais de tout latin liturgique.

Les réfractaires y répondirent par une seconde contestation, déclarant qu’un tel interdit était illégitime, juridiquement et moralement inexistant.

A partir de 1978, l’hostilité destructrice commença imperceptiblement à diminuer. La volonté d’interdire devenait peu à peu moins unanime dans la hiérarchie ecclésiastique. Ici ou là, la messe « ancienne » bénéficiait de quelques tolérances, voire de quelques autorisations. Mais c‘était le régime de l’autorisation préalable. Même largement accordée, ce qui fut rarement le cas, l’autorisation n‘était qu’une dérogation particulière ; elle impliquait le maintien en vigueur de l’interdiction.

C’est pourquoi cette seconde contestation a été prolongée et réitérée jusqu’au 7 juillet 2007.

Contester l’interdit relevait du sens commun. La coutume a force de loi. Elle ne peut être corrigée que dans ses exagérations, dérives ou pollutions éventuelles. Elle ne peut être supprimée que si elle est entièrement ou globalement mauvaise : hypothèse insoutenable pour la messe célébrée pendant des siècles et des siècles par les saints, par les papes, par les docteurs, par les confesseurs. Pourtant la volonté personnelle de Paul VI a bien été de la supprimer. Il serait à la fois imprudent et injuste de vouloir le dissimuler. Dans son allocution consistoriale du 24 mai 1976, il avait clairement précisé que la messe traditionnelle n‘était plus permise qu’« aux prêtres âgés ou malades célébrant sans assistance de fidèles », et que le nouveau missel avait été « promulgué pour prendre la place de l’ancien » ; à quoi il exigeait « une prompte soumission au nom de l’autorité suprême qui nous vient du Christ ». C'était un abus de pouvoir. Cette interdiction a vécu. Reste l’autre contestation, portant sur la nouvelle messe en elle-même. A demain.

JEAN MADIRAN

Article extrait du n° 6405 de Présent, du Jeudi 23 août 2007, p.1

18 août 2007

[Jeanne Smits - Présent] Deux nouveaux prêtres au Barroux

Jeanne Smits - Présent - 18 août 2007

Père Albéric, Père Robert… L’abbaye Sainte-Madeleine compte, depuis samedi, deux nouveaux moines-prêtres, ordonnés par l’évêque de Vannes, Mgr Raymond Centène. Est-il possible de rendre compte d’une cérémonie aussi émouvante, aussi simple, aussi solennelle, avec de simples mots humains ? Au risque de tomber dans le cliché : c’était le ciel sur la terre. Mais comment exprimer autrement cette réalité si saisissante de Notre Seigneur appelant ses amis pour devenir d’autres Lui-même en se configurant à Lui ?
 
Le parfait ordonnancement liturgique, les mouvements hiératiques, mais sans aucune grandiloquence, la pureté du grégorien ornant la sobriété toute romane de la pierre de Provence, tout cela concourait à fixer l’attention sur l’essentiel : le Christ, représenté par son évêque tout tendu vers ces instants terribles où il allait conférer à deux jeunes moines le pouvoir d’offrir le Saint Sacrifice, de remettre ou de retenir les péchés.
 
Aussi le temps n’a-t-il pas semblé long, y compris pour les plus jeunes, parfois même les très jeunes enfants qui, dans une tranquillité quasi miraculeuse, ont suivi à leur façon les étapes si pédagogiques de l’ordination selon le rite traditionnel.
En viendront-ils à oublier un jour la longue prostration des ordinands pendant le chant solennel des litanies, qui rend presque palpable tout le sens de la communion des saints ? J’ose espérer que non, car elle dit tout du prêtre, enseignant qu’ils ont choisi de servir dans une parfaite docilité à Dieu et dans une humilité totale, et qu’à cause de cela le respect et la reconnaissance doivent l’entourer.
 
Prêtres ; mais aussi moines. Samedi, nous avons revécu le double attrait de cette tradition bénédictine : celui de la louange divine conçue comme l’unique raison de vivre, et aussi l’idée d’un ancrage dans les racines qui nous ont faits, nous autres « Européens ».
 
Nous aurons tous été très marqués, aussi, par le sermon de Mgr Centène. Ayant souligné à quel point nos paroisses françaises, ses paroisses, manquent de prêtres, combien notre monde qui s’enfonce dans le péché et le refus de Dieu aurait besoin d’hommes pour porter le Christ au peuple affamé et assoiffé, il a fait mine de se demander si l’ordination d’un moine lié par son vœu de stabilité, par sa vie en dehors du monde était bien « utile ».
Et de tourner son regard, et les nôtres, vers la Croix. Les bras en croix, le Christ ne pouvait plus bénir. La bouche désséchée par la soif de son agonie, il ne pouvait plus parler, il ne pouvait plus enseigner. Les pieds cloués sur la croix, il ne pouvait plus marcher pour porter la Bonne Nouvelle, comme il l’avait fait en Galilée. C’était pourtant le moment du sacrifice, le sommet de sa vie, le moment où, muet, immobile et souffrant, élevé de terre, il a attiré tout homme à lui.
 
C’est pourquoi Mgr Centène a voulu montrer que les moines-prêtres d’une abbaye bénédictine sont témoins de l’essentiel et, à ce titre, à travers ce qu’ils sont et non ce qu’ils font, des ferments d’évangélisation. Parce qu’ils nous relient à Dieu. Parce qu’ils sont « prêtres et hosties », à l’exemple de Celui auquel ils se conforment.

JEANNE SMITS

Article extrait du n° 6402 de Présent, du Samedi 18 août 2007




Motu proprio : la réaction de Dom Louis-Marie, Père abbé de l’abbaye Sainte-Madeleine
18 août 2007 - Présent
— Comment avez-vous reçu le Motu proprio « Summorum Pontificum » ?
— Avec une grande joie, bien sûr. Nous attendions ce document avec une certaine fébrilité depuis presque un an, désespérant parfois de sa promulgation. Pour nos anciens, c’est une sorte de reconnaissance du bien-fondé de leur attachement à la messe traditionnelle et à l’esprit promu par cette forme extraordinaire du rite romain. Mais il faut ajouter que notre attitude doit être avant tout filiale. C’est en fils aimants que nous recevons les décisions du Saint-Siège. Il est difficilement supportable d’entendre les uns et les autres donner de bonnes ou mauvaises notes aux documents émanant du Pape. Au sujet des réformes liturgiques, Dom Prou, abbé de Solesmes, avait rappelé à sa communauté que les désirs du Saint-Père étaient des ordres. C’est en fils que nous recevons ce Motu proprio et que nous regrettons l’attitude réservée ou hautaine adoptée par certains évêques et de nombreux fidèles de Mgr Lefebvre, lesquels ont salué ce document par un : « Peut mieux faire ».
— Comment voyez-vous maintenant l’évolution : dans une sorte de parallélisme entre les deux formes du rite romain ou dans une unité à laquelle il faudrait aboutir ?
— Quand on regarde l’histoire de l’Eglise, on constate deux tendances. La première est celle de l’unité du rite. Le Saint Père y fait une allusion en saluant le rôle des bénédictins dans l’unification du rite selon le désir du pape saint Grégoire le Grand. Il semble que ce soit aussi le désir de Benoît XVI selon la lettre écrite par lui, alors qu’il était encore cardinal, au Dr Barth (cf. la lettre Aletheia d’Yves Chiron). Pour cela, il faudra du temps et du travail dans les esprits et dans les livres. Un premier chantier serait de réduire les abus de part et d’autre, que l’on peut résumer selon le mot du philosophe Gustave Thibon : « Ne pas absolutiser ce qui est relatif et ne pas relativiser ce qui est absolu. »
La deuxième serait, d’une part, certaines retouches dans la « forme extraordinaire » comme, par exemple, l’adoption de nouvelles préfaces et des nouveaux saints, la possibilité des lectures en vernaculaire et l’application de quelques modifications de 1964 et 1965, comme Dom Gérard l’a fait pour nous et comme cela se faisait à Ecône jusqu’en 1982. D’autre part, dans la forme ordinaire du rite, une réforme de la réforme doit être promue, comprenant un plus large usage du latin, une plus grande sacralité dans les gestes, une plus grande précision, un plus grand respect des règles et surtout une manifestation plus nette de la foi en la présence réelle.
Il reste néanmoins un espace entre les deux formes du rite qui me semble difficile de réduire totalement. Pour résumer, je reprends l’expression du Père Cassingena-Trévedy qui présente le missel de 1962 comme celui du Ciel sur la terre, le Ciel qui s’impose à la terre, et celui de 1969 comme du Ciel pour la terre, avec un souci fondamental d’adaptation. De plus, l’un est très hiérarchisé (une « pièce montée ») et l’autre plus œcuménique (au sens catholique du terme). Si l’on veut retrouver une unité, il faudrait donc tout remanier, mais progressivement pour ne pas recommencer une révolution cérébrale et légaliste. Cela me semble néanmoins difficile. En revanche, je crois que l’unité du rite n’est pas une exigence pour l’Eglise.
La deuxième tendance que l’on constate dans l’histoire est celle de la pluralité des rites. Il suffit de penser à la vingtaine de rites orientaux et aux divers rites latins (de Braga, mozarabe, ambrosien, romano-lyonnais, dominicain). La forme extraordinaire du rite romain peut tout à fait coexister avec la forme ordinaire, avec cette mission propre et indispensable d’exprimer que, par la forme ordinaire, on ne veut rejeter ni le passé ni le sacré. Le Motu proprio interdit en quelque sorte de célébrer le nouveau rite dans un esprit de rupture avec l’ancien.
— Comment faut-il comprendre les mots « ordinaire » et « extraordinaire » qui qualifient les deux formes du rite romain ?
— On peut se référer à la notion de confesseur ordinaire et extraordinaire : dans la paroisse, le confesseur ordinaire est le curé, mais il est courant de faire appel à un confesseur extérieur, qu’on appelle « extraordinaire ». Cela ne veut pas dire que les « ordinaires » soient mauvais !
Le mot « extraordinaire », on peut quand même le comprendre au sens où le rite ancien est supérieur, plus exigeant aussi sur le plan pratique, spécialement pour ceux qui ne comprennent pas le latin. Dans aucun séminaire on n’apprend à célébrer selon le rite de Paul VI ; ici, au contraire, on met six mois à enseigner le rite traditionnel, six mois où nos ordinands disent des « messes blanches », tant il exige de respect et de précision dans les paroles et les gestes.
— Cette avancée sur la question liturgique ne semble pas suffisante à certains, qui mettent en avant la nécessité de poursuivre la réflexion critique sur Vatican II parfois jusqu’à prôner la méfiance sur le Motu proprio. Qu’en pensez-vous ?
— Le refus du fond de la doctrine de Vatican II et des principes de ses décisions disciplinaires est une prémisse fausse, incompatible avec la doctrine catholique concernant l’assistance du Saint-Esprit à son Eglise. Du faux, il peut suivre n’importe quoi, même si on raisonne rigoureusement. Si, du côté « progressiste », le coup de maître de Satan a souvent été de faire avaler à beaucoup de fidèles sous le prétexte d’obéir, et d’accepter le concile, des abus que le concile n’avait nullement cautionnés, il a aussi été, du côté « traditionaliste », sous le prétexte de fidélité à la Tradition, de faire avaler à certains des discours, des prises de position et des actes absolument contraires à toute la Tradition divine et apostolique.
— Le Pape suggère et souhaite que les nouveaux saints puissent être intégrés dans le calendrier traditionnel. Que cela vous inspire-t-il ? Et pour ce qui est du « dimanche de la Miséricorde », comment pourrait-il trouver sa place dans l’ordonnancement du temporal ?
— Il est normal d’intégrer les nouvelles fêtes de saints dans le calendrier : cela s’est toujours fait dans l’Eglise. Entre saint Pie V et Pie IX, cent nouveaux saints sont entrés au calendrier, et entre Pie IX et Jean XXIII, encore cent autres environ. Pour ne rien dire des changements de degrés et parfois de dates de leurs fêtes.
Quant au dimanche de la Miséricorde, il a lieu le dimanche in albis. Il ne semble pas (sauf erreur de ma part) que sa célébration liturgique oblige le remplacement des textes de la liturgie dominicale du jour. Cela fait quelques années que nous célébrons ce dimanche de la Miséricorde au monastère avec les textes du dimanche in albis qui conviennent très bien.
Nous avons déjà mené un travail sur le sanctoral à la suite des rencontres de Fontgombault, y compris sur le bréviaire. Pour l’heure c’est un travail sans autorité, pas encore utilisé. A Campos, Mgr Rifan a déjà intégré de nouveaux saints et bienheureux.
— Le Motu proprio ne constitue-t-il pas un appel à faire développer l’étude du latin, du grégorien, de la liturgie… pour faire mieux comprendre les splendeurs de la liturgie traditionnelle ?
— Selon le nouveau Code de droit canonique (can. 928), la messe peut être célébrée en latin, ou dans une traduction approuvée. Chaque prêtre a donc le droit de célébrer en latin même le nouveau rite. Cela, beaucoup l’ignorent, même parmi les évêques. Le vernaculaire a été imposé comme norme universelle par un abus de pouvoir, non conforme aux décisions du Saint-Siège concernant le nouvel Ordo. Malheureusement, Paul VI a fermé les yeux et parlé, et agi comme si le vernaculaire était devenu la règle en dehors des monastères. N’était-ce pas transformer un fait accompli en apparence de droit ? Ainsi, lorsqu’on parle de messe en latin, de nos jours, presque plus personne ne songe à la messe de Paul VI. Ce qui tend à conforter l’idée – erronée – que le latin est l’apanage de la messe de saint Pie V.
De toute façon, l’étude du latin est une nécessité pour rester en contact avec notre passé, et donc avec tous les textes (chrétiens ou païens) écrits dans cette langue admirable, et il faut donc l’encourager pour des raisons beaucoup plus vastes. Il est inacceptable qu’il existe en France des séminaires où, contrairement au droit (can. 249), le latin n’est plus enseigné.
Quant au grégorien, de soi, il n’est pas non plus réservé à la messe de saint Pie V, et l’exhortation apostolique Sacramentum caritatis, qui concerne de soi le nouveau rite, rappelle l’importance du grégorien. D’autre part, la messe de saint Pie V n’avait pas toujours été célébrée en grégorien : c’était saint Pie X qui avait redonné son droit de cité à cette monodie sobre et contemplative, au sein des polyphonies baroques plus ou moins exubérantes, pour ne rien dire des musiques dépourvues du sens du sacré qui pullulaient (et pullulent de nouveau, sous une forme encore pire), sans d’ailleurs interdire la polyphonie sacrée.
L’étude de la liturgie a son importance, mais je voudrais déclarer à certains « traditionalistes » que la liturgie ne se limite pas à une spiritualité des rubriques jusqu’au baiser des burettes, et à certains liturgistes promoteurs du nouveau rite, que la liturgie ne comprend pas seulement l’étude de l’histoire de la liturgie et la réduction de celle-ci à des reconstructions professorales en chambre à partir de quelques données écrites de l’Antiquité chrétienne et du Moyen Age. De plus, la liturgie n’est pas principalement objet d’étude (bien que l’étude des rubriques et celle de l’histoire de la liturgie soient toutes deux indispensables), la liturgie est action du Christ et de toute l’Eglise. C’est donc un drame dans lequel on se coule, et auquel on conforme sa manière de penser. La Règle de saint Benoît ne nous dit-elle pas de son côté : « Psalmodions de telle sorte que notre esprit concorde avec notre voix. » Les textes lus, et les gestes accomplis doivent modeler, sculpter notre vie intérieure, par le biais des vérités qu’elles véhiculent souvent sous forme symbolique ou poétique. Ne desséchons pas notre étude de la liturgie par des attitudes trop cérébrales, mais imprégnons-nous des textes et des attitudes pour élever notre esprit jusqu’à Dieu et nous disposer à recevoir sa charité dans ses sacrements.

Propos recueillis par Jeanne Smits et Olivier Figueras
Article extrait du n° 6402 de Présent, du Samedi 18 août 2007

[John Daly - Le Forum Catholique] A quand la justice pour l'abbé Jean Siegel?

SOURCE - John Daly - Le Forum Catholique - 18 août 2007

Le 8 juillet 1977 Mgr Arthur Elchinger de Strasbourg a formellement enjoint à M. l’abbé Jean Siegel, Curé de Thal, de cesser de célébrer la messe traditionnelle. Celui-ci ne démordant pas, le 6 octobre 1977, sans respecter les formes canoniques, Mgr Elchinger a déclaré l’abbé Siegel suspens et privé de sa cure. L’abbé Siegel pourtant ne bouge pas. L’évêque arrange qu’un huissier intervienne pour le sortir du presbytère. Faute d’un droit de passage sur un terrain privé, l’huissier ne peut intervenir. L’abbé Siegel reste en place. Il continue comme d’habitude de desservir sa paroisse et de dire comme d’habitude la messe traditionnelle (agrémentée d’un sermon en allemand et en français) dans sa petite église. Ne pouvant s’en débarrasser physiquement, Mgr Elchinger réussit charitablement à obtenir que l’abbé Siegel soit privé du traitement versé aux curés par l’état en Alsace. Le 18 août 1978 l’abbé Siegel s’inscrit à l’ANPE et l’Aurore le déclare « premier prêtre chômeur de France ». En 1998 Mgr Elchinger s’en va de ce monde pour recevoir dans l’éternité la récompense due à ses mérites. Quant à l’abbé Siegel, en 2007 il est toujours en possession de son église et de son presbytère, ayant exercé les fonctions de curé sans interruption, sans NOM, sans concession au modernisme, depuis 1955. (Est-ce un record ?)

Pourquoi est-ce que je vous raconte cette petite histoire si similaire à tant d’autres qui foisonnent dans les tristes annales de l’Église Conciliaire ? C’est très simple. Il est maintenant officiellement avoué que l’abbé Siegel avait raison contre Mgr Elchinger : la messe traditionnelle n’a jamais été abrogée. Ceci étant, à quand le rétablissement officiel de l’abbé Siegel et quel sera le montant des dommages intérêts qui lui ont dus?

16 août 2007

[AFP] Mgr Barbarin : "L'Eglise vit un grand changement"

AFP - 16 août 2007

PARIS, 16 août 2007 (AFP) - Mgr Barbarin : "L'Eglise vit un grand changement" "L'Eglise vit un grand changement", elle "bouge tout le temps", estime le cardinal Philippe Barbarin, archevêque de Lyon, dans une interview au Journal de Saône-et-Loire, publiée jeudi.

Interrogé sur la désaffection du public pour l'Eglise, le Primat des Gaules répond que "L'Église vit un grand changement. Il est clair que dans le tissu rural, dans les villages, et dans bien des quartiers de villes ou de banlieues, la présence de l'Église s'effondre. Mais il existe un renouveau en de nombreux endroits : communautés nouvelles, paroisses de grandes villes, Foyers de charité, monastères. L'Église bouge tout le temps, elle est toujours en train de se réformer".

Pour le cardinal, "il faut parler juste, dire en toute clarté la vérité de l'Homme. Le bonheur est indissociable de la vie spirituelle. Il ne peut pas résider seulement dans le confort matériel et la réussite professionnelle".

Interrogé sur le retour de la messe en latin comme possible facteur de division au sein de l'Eglise, il estime que "le retour du latin s'est déjà fait dans la bouche des jeunes à Taizé ou à Lourdes et non pas par le motu proprio de Benoît XVI. Dans les rassemblements, les chants en latin ont trouvé une place depuis quelques années. Pouvoir dire quelques prières et chanter des chants dans une même langue, c'est bien".

"Concrètement, je ne pense pas que cela changera grand-chose dans nos paroisses, mais mon espérance, c'est qu'une bonne proportion de traditionalistes se dise +On revient à la maison, puisque le Pape nous lance un appel !+. Cela fait 40 ans qu'ils sont en marge ou dehors, tout de même ! Je souhaite que nous redevenions un seul troupeau, à la suite du Seul Pasteur !", ajoute le cardinal Barbarin.

L'archevêque de Lyon doit clôturer jeudi le forum des jeunes, organisé à Paray-le-Monial (Saône-et-Loire) par la communauté de l'Emmanuel, auquel participent 5.000 jeunes.

Ce forum est marqué notamment par le départ en mission des volontaires du Fidesco (foi et développement), l'ONG fondée par la communauté de l'Emmanuel. Ils sont 53 à partir cette année, pour au moins deux ans, la plupart d'entre eux en Afrique, avec une mission à la fois concrète (santé, éducation, agriculture) et spirituelle. Selon la Communauté de l'Emmanuel, il y a actuellement 140 volontaires du Fidesco dans le monde.

15 août 2007





Où en sommes-nous après le motu proprio ?
15 août 2007 - Éditorial du n° 75 de “Miles” (Bulletin des Chevaliers de Notre-Dame) - Jean Pierre le Roy - mise en ligne par amissfs.com
Où en sommes-nous après le motu proprio ? Le motu proprio Summorum Pontificum est certainement un événement.

Précisons tout de même qu’il n’aurait probablement jamais vu le jour si Mgr Lefebvre était resté dans sa paisible retraite au fond d’une chambrette romaine, au lieu de fonder Écône et d’aller à la rescousse du Sacerdoce catholique, et d’une grande par- tie de la doctrine de l’Église transmise depuis les Apôtres, et qui faisaient naufrage.

Il est également intéressant de remarquer que le Souverain Pontife ne “libéralise” pas seulement la Messe tridentine, mais aussi les sacrements selon leur forme traditionnelle, et le bréviaire lui-même.

Certains se demandent peut-être : Alors où en sommes-nous ? Que devons-nous faire ? Mgr Fellay a d’avance répondu tout dernièrement à ces questions. C’était à l’occasion de son Jubilé sacerdotal le 27 juin dernier. Il nous a dit : Même si nous avons le motu proprio, «la guerre n’est pas terminée» !

D’une part, il est vrai que l’application du motu proprio ne sera pas facile, car beaucoup de membres du clergé y sont encore fermement opposés, et ils pourront, à juste raison, indiquer que ceux qui s’appuient sur Summorum Pontificum pour célébrer la Messe de toujours, doivent, comme son auteur, aussi reconnaître le N.O.M. et Vatican II.

D’autre part, ceux des fidèles qui ne voient pas plus loin que la Messe du dimanche, penseront peutêtre qu’ils n’ont désormais plus de raison d’aller dans les centres de Messe de la Fraternité. En cela ils trahiraient – probablement sans s’en rendre compte : l’ignorance peut être mortelle ! – la pensée de Mgr Lefebvre, qui a expliqué à maintes reprises :

«Voilà ce qui fait notre opposition, et c’est pourquoi l’on ne peut pas s’entendre. Ce n’est pas d’abord la question de la messe, car la messe est justement une des conséquences du fait que l’on a voulu se rapprocher du protestantisme, et donc transformer le culte, les sacrements, le catéchisme, etc. »

«La vraie opposition fondamentale est le Règne de Notre-Seigneur Jésus-Christ. Opportet Illum regnare, nous dit saint Paul. Notre Seigneur est venu pour régner. Eux disent non, nous disons oui, avec tous les papes.» (1)

En effet, ces prêtres, qui diront la Messe tridentine en dehors des centres de Messe de la Tradition ne pourront en aucun cas prêcher contre la Liberté religieuse, la Laïcité de l’État, l’OEcuménisme, la Collégialité et autres notions perverses répandues à la suite de Vatican II.

Enfin, il faut bien reconnaître que le Motu Proprio lui-même contient un certain nombre d’ambiguïtés qui peuvent devenir de véritables embûches. Il s’agit – c’est incontestable – d’un effort pour sortir de l’impasse. Le tout est de savoir : «Sortir dans quel sens ?». L’avenir nous dira s’il s’agit d’un sincère retour aux critères traditionnels de la liturgie ou au contraire d’un miroir aux alouettes pour mieux attirer les «tradis» et les faire entrer dans le giron de «l’Église conciliaire». La grande bonne volonté du Pape ou son habileté machiavélique, diront certains, l’ont obligé à naviguer entre Charybde et Scylla. Quelle est la part de la diplomatie ? Parmi ces contradictions, il faut sans doute relever les suivantes :

Droits restaurés en partie seulement : ce rétablissement de facto de la Messe est partiel seulement, puisque la Messe traditionnelle doit co-exister avec la Messe de Paul VI. Qui plus est, la Messe de Paul VI est présentée dans le Motu Proprio comme «l’expression ordinaire de la lex orandi de l’Église catholique de rite latin», tandis que «le Missel romain promulgué par S. Pie V et réédité par le B. Jean XXIII doit être considéré comme l’expression extraordinaire de la même lex orandi de l’Église et être honoré en raison de son usage vénérable et antique» (2). Le rite ancien est honoré, mais il n’a le droit qu’à un strapontin.

Or, c’est l’inverse qui est exact. En effet, si, comme le confirme Benoît XVI, la Messe traditionnelle n’a jamais été abrogée, elle a la même force juridique qu’en 1969, c’est dire qu’elle reste selon Quo Primum :

la Loi générale et universelle de l’Église, une Coutume immémoriale, un Privilège inaliénable, et la Messe de Paul VI, elle, est en fait un rite introduit, si on peut dire, comme une dérogation à la loi universelle, c’est-à-dire, dans le langage moderne, comme un rite justement... «extraordinaire».

A moins que décidément l’on ne parle argot à Rome et que cela signifie que le rite de Paul VI est vachement «ordinaire», c’est à dire terre-à-terre, naturel, tandis que le rite traditionnel est vraiment «extraordinaire», surnaturel, source ineffable de vie divine !

L’effet zoo : Cette «expression extraordinaire» de la liturgie semble être une concession faite à des fidèles un peu particuliers (c’est ce que Mgr Fellay appelait le danger d’être rangé dans le «zoo» des animaux «extraordinaires» justement : «Le curé peut aussi autoriser aux fidèles ou au prêtre qui le demandent, la célébration sous cette forme extraordinaire dans des cas particuliers comme des mariages, des obsèques ou des célébrations occasionnelles, par exemple des pèlerinages.» (3)

Piège liturgique : «Ces deux expressions de la lex orandi de l’Église n’induisent aucune division de la lex credendi de l’Église; ce sont en effet deux mises en oeuvre de l’unique rite romain», dit Summorum Pontificum. On peut d’abord mettre en doute qu’il s’agisse d’une seul et même rite :

«Cette idée de sacrifice expiatoire s’estompe et disparaît dans ce nouveau rite, qui a été voulu nouveau par Paul VI. Il l’a dit lui-même : ‘Nous abandon- nons l’ancien rite pour faire un nouveau rite.’» (4).

Mais en outre cela oblige celui qui s’appuiera sur ce Motu Proprio pour célébrer la Messe traditionnelle, à reconnaître par le fait même le N.O.M. que Benoît XVI y présente de manière parallèle comme d’au moins aussi bon aloi.

Un carcan : Et par conséquent, il ne pourra, comme nous l’avons dit plus haut, ni prêcher contre les erreurs de Vatican II, ni contre les graves déficiences du N.O.M., le Pape se refusant à reconnaître la rupture liturgique et doctrinale accomplie à l’occasion de Vatican II. Mgr Fellay précise à juste titre :

«Cette négation d’une rupture causée par le dernier concile – déjà manifestée dans le discours à la curie du 22 décembre 2005 – montre combien l’enjeu du débat entre Rome et la Fraternité Sacerdotale Saint-Pie X est essentiellement doctrinal. C’est pourquoi il faut que l’indéniable avancée liturgique opérée par le Motu Proprio soit prolongée – après le retrait du décret d’excommunication – par des discussions théologiques.»

Dans la mesure où les supérieurs de la Fraternité en resteront aux étapes prévues, comme Mgr Fellay l’a encore rappelé récemment, nous pouvons être à peu près assurés que le déraillement annoncé par certains n’aura pas lieu :

1.- D’abord, la libéralisation totale de la Messe de St Pie V et la levée des sanctions canoniques visant nos Évêques, tout au moins aux yeux du public, car ces sanctions n’ont aucune valeur juridique, tout comme on ne peut rétablir dans ses droits une Messe qui n’a jamais été abrogée.

2.- Ensuite, discussion théologique sur les points fondamentaux de divergence entre Vatican II et le Magistère traditionnel de l’Église.

3.- Et enfin, mais enfin seulement, négociation canonique à propos du statut de la FSSPX et des congrégations religieuses qui ont suivi Mgr Lefebvre.

Vouloir négocier sans avoir d’abord réglé les problèmes doctrinaux serait suicidaire. Mgr Fellay l’a lui-même répété bien des fois.

Mgr Lefebvre nous donne un avant-goût de ce que pourraient être ces discussions doctrinales, après les deux préalables et avant toute négociation canonique sur le statut de la Fraternité (in Fideliter n° 66, septembre – octobre 1988) :

«Nous n’avons pas la même façon de concevoir la réconciliation. Le cardinal Ratzinger la voit dans le sens de nous réduire, de nous ramener à Vatican II. Nous, nous la voyons comme un retour de Rome à la Tradition. On ne s’entend pas. C’est un dialogue de sourds. Je ne peux pas beaucoup parler d’avenir, car le mien est derrière moi. Mais si je vis encore un peu, et en supposant que d’ici à un certain temps Rome fasse un appel, qu’on veuille nous revoir, reprendre langue, à ce moment-là, c’est moi qui poserai les conditions.

«Je n’accepterai plus d’être dans la situation où nous nous sommes trouvés lors des colloques. C’est fini. Je poserai la question au plan doctrinal : “Est-ce que vous êtes d’accord avec les grandes encycliques de tous les papes qui vous ont précédés ? Est-ce que vous êtes d’accord avec Quanta Cura de Pie IX, Immortale Dei, Libertas de Leon XIII, Pascendi de Pie X, Quas Primas de Pie XI, Humani generis de Pie XII ? Est-ce que vous êtes en pleine communion avec ces papes et avec leurs affirmations ? Est-ce que vous acceptez encore le serment anti-moderniste ? Est-ce que vous êtes pour le règne social de Notre Seigneur Jésus-Christ ?

«Si vous n’acceptez pas la doctrine de vos prédécesseurs, il est inutile de parler. Tant que vous n’aurez pas accepté de réformer le Concile, en considérant la doctrine de ces papes qui vous ont précé dés, il n’y a pas de dialogue possible. C’est inutile. Les positions seraient ainsi plus claires. Ce n’est pas une petite chose qui nous oppose. Il ne suffit pas qu’on nous dise : ‘Vous pouvez dire la messe ancien- ne, mais il faut accepter cela [le Concile]’. Non, ce n’est pas que cela [la messe] qui nous oppose, c’est la doctrine. C’est clair.» Et Monseigneur de donner un exemple alors tout brûlant :

«C’est ce qui est grave chez dom Gérard et c’est ce qui l’a perdu. Dom Gérard n’a toujours vu que la liturgie et la vie monastique. Il ne voit pas clairement les problèmes théologiques du Concile, de la liberté religieuse. Il ne voit pas la malice de ces erreurs. Il n’a jamais été très soucieux de cela. Ce qui le touchait, c’était la réforme liturgique, la réforme des monastères bénédictins. Il est parti de Tournay en disant : ‘je ne peux pas accepter cela’. Alors, il a reformé une communauté de moines avec la liturgie, dans la pensée bénédictine. Très bien, c’était magnifique.

«Mais je pense qu’il n’a pas suffisamment mesuré que ces reformes qui l’avaient amené à quitter son monastère étaient la conséquence des erreurs qui sont dans le Concile. Pourvu qu’on lui accorde ce qu’il cherchait, cet esprit monastique et la liturgie traditionnelle, il a ce qu’il veut et le reste lui est indifférent. Mais il tombe dans un piège, car les autres n’ont rien cédé sur ces faux principes. C’est dommage, car cela fait tout de même soixante moines, dont une vingtaine de prêtres, et trente moniales. Il y a presque une centaine de jeunes qui sont là, complètement désemparés et dont les familles sont inquiètes ou même divisées. C’est désastreux.»

Pour dîner avec les diplomates romains, il faut une longue cuiller... Prions donc pour le Clergé et les responsables de la Tradition.

Jean Pierre le Roy

1) L’Église infiltrée par le Modernisme, le ver est dans le fruit, Le fondement de notre position, p. 70 (c’est nous qui soulignons).
2) Art. 1.
3) Art. 5. § 3.
4) Mgr Lefebvre, conférence spirituelle, Écône, 27 septembre 1986, citée par M. l’abbé Troadec in La Messe de toujours, Clovis, 2005, p. 328. En effet, par exemple dans l’audience générale du 26 novembre 1969, Paul VI emploie lui-même 6 fois l’expression de « nouveau rite ». Texte italien dans l’Osservatore Romano du 27 novembre 1969. Traduction, titre et sous-titres de la DC.


[Abbé Pierpaolo Maria Petrucci, fsspx] Libéralisation de la messe traditionnelle

SOURCE - Abbé Pierpaolo Maria Petrucci, fsspx - Prieur-doyen de Nantes - août 2007

Après plusieurs mois d’attente, le pape Benoît XVI proclame enfin solennellement par un motu proprio (décret pris de sa propre initiative) que la messe dite de saint Pie V n’a jamais été interdite.

Tout prêtre peut la célébrer et faire usage des livres liturgiques publiés en 1962 par le pape Jean XXIII.

Dans cet éditorial je me contenterai de faire quelques remarques sur ce motu proprio et sur la lettre qui l’accompagne. (1)
La messe traditionnelle est rétablie dans ses droits
Pendant plus de quarante ans, pour appliquer les réformes du Concile Vatican II, la hiérarchie ecclésiastique s’est efforcée de détruire la messe catholique, en transformant, dans un esprit œcuménique, le Sacrifice de la nouvelle alliance en un simple mémorial de la dernière cène. Dans le même temps, on n’a pas hésité à persécuter au nom de l’obéissance à l’Église tous ceux qui, prêtres ou laïcs, restaient attachés à la messe traditionnelle !

Vouloir nous faire désobéir à Dieu au nom de l’obéissance : voilà ce que Monseigneur Lefebvre appelait « le coup de maître de Satan ». Ce faux argument a poussé de nombreux catholiques à accepter des changements qu’ils sentaient contraires à leur foi et a empêché beaucoup d’âmes de rejoindre le combat de la tradition. Le Pape lui-même, dans le motu proprio Summorum Pontificum, a enfin reconnu qu’il s’agissait d’un sophisme, que la messe traditionnelle n’avait jamais été interdite et que tout prêtre pouvait la célébrer en toute conscience, sans avoir à solliciter d’autorisation.
Se réclamer de l’obéissance contre la foi est un abus de pouvoir.
Retenons cet aveu implicite qui confirme notre bon droit dans la lutte pour la messe traditionnelle et nous encourage à continuer le combat contre toutes les erreurs qui ont été à l’origine de la nouvelle liturgie.

A cette occasion il ne faut pas oublier que, si la messe a retrouvé ses droits dans l’Église, c’est grâce à la résistance d’âmes courageuses, qui se sont battues contre vents et marées, à la suite de Monseigneur Lefebvre, et ont souffert d’être traitées comme des parias par les hommes d’Eglise, alors qu’elles défendaient justement la foi de l’Eglise leur mère.
Le combat continue
Dans son motu proprio, en rétablissant la messe traditionnelle dans sa dignité, le Pape la met cependant sur un pied d’égalité avec le nouveau rite, comme si tous deux méritaient la même estime et la même vénération. Simultanément, dans la lettre aux évêques qui accompagne le motu proprio, Benoît XVI affirme que ce document ne veut en rien « amenuiser l’autorité du Concile Vatican II ».

Or, si nous nous sommes battus contre la nouvelle messe, c’est pour des raisons de foi puisque, comme le disaient les cardinaux Bacci et Ottaviani, elle « s’éloigne de façon impressionnante (…) de la théologie catholique de la sainte messe, telle qu’elle a été formulée à la douzième session du Concile de Trente ».(2) Cette nouvelle messe n’est que la transposition liturgique des théories œcuméniques prônées par le dernier concile.

Nous devons donc encore nous opposer avec persévérance aux principes délétères qui ont essayé de supprimer la messe catholique et empêchent la mission divine de l’Église pour la conversion des âmes.

Il faut continuer à proclamer que le poison de l’œcuménisme, tendant à mettre sur un pied d’égalité toutes les religions, menace le corps mystique de Jésus-Christ. De même, la dignité de l’homme et ses pseudo-droits issus de la Révolution française sont contraires aux droits de Dieu. L’Etat a des devoirs vis-à-vis de Dieu et de la religion révélée, il n’a pas le droit d’être laïque et athée.
Fidélité aux œuvres de tradition
Ce combat, nous pourrons le mener par une fidélité encore plus profonde à toutes les œuvres qui luttent vraiment pour la tradition de l’Église.

Je ne parle pas de celles qui n’ont qu’un attachement sentimental à la messe traditionnelle, au latin et à la liturgie… et qui s’en contentent. Communautés dont la Rome conciliaire a voulu se servir (et se servira peut-être encore) pour diviser les traditionalistes, et les amener à accepter les erreurs du concile, en créant des espèces de «réserves indiennes» de rite traditionnel, dans le panthéon œcuméniste des religions.

Je parle au contraire des œuvres de la tradition qui osent proclamer haut et fort leur opposition aux erreurs modernes que les papes avaient condamnées mais qui ont pénétré dans l’Église lors du dernier concile. Toutes ces œuvres dont les membres ont compris que le combat de la messe n’est qu’une partie du combat de la foi, qui n’ont pas peur d’être traités de désobéissants, voire frappés de censures ecclésiastiques… invalides, comme la fausse obéissance dont elles se réclament.

Tel est le meilleur service que nous pourrons rendre à l’Église et au Pape : par notre fidélité à la Tradition, aider Benoît XVI à vaincre toutes les pressions qui peuvent s’exercer sur lui (comme on l’a vu pour le motu proprio) afin qu’il redonne à l’Eglise sa doctrine intégrale.

Abbé Pierpaolo Maria Petrucci , prieur-doyen de Nantes
----------
Notes

(1). Pour une analyse détaillée, vous pouvez consulter le texte de M. l’Abbé Duverger, publié sur le site de la Porte Latine. Ce texte, le dossier de DICI contenant tous les documents et la cassette de la conférence explicative que M. l’abbé Petrucci a tenue à Nantes le 13 juillet peuvent également être commandés au Prieuré. (10 € port compris).

(2). Cardinaux Ottaviani et Bacci, Bref examen critique du Nouvel ordo missae, lettre introductive du 3 septembre 1969.