30 juin 2006

Lex orandi - par Gérard Leclerc
France Catholique n°3031 du 30 juin - www.france-catholique.fr
Benoît XVI s’apprêterait à prendre des décisions en faveur d’une réforme de la réforme de la liturgie ! Certains s’en réjouissent, d’autres s’en lamentent. Faute de données précises sur les intentions concrètes du Saint-Père, il nous est possible d’en comprendre l’esprit, puisqu’il s’est lui-même exprimé plusieurs fois sur le sujet et puisque le cardinal Ratzinger, avant Benoît XVI, n’a pas été avare d’explications et de mises au point sur la réforme liturgique qui a suivi Vatican II. Si le Pape intervient aujourd’hui sur le sujet, ce n’est évidemment pas pour ouvrir un nouveau conflit à l’intérieur de l’Eglise et ranimer les querelles qui ont opposé depuis un demi-siècle progressistes et traditionalistes. Le système médiatique n’a que trop de complaisance à orchestrer les oppositions qui offrent des correspondances d’ordre politique, pour mieux estomper les questions sérieuses, celles qui concernent la foi de l’Eglise. Or lorsqu’on parle liturgie, c’est d’abord la foi qui est en cause, conformément à l’ancien adage : lex orandi, lex credendi. Il y a donc lieu de relativiser toute sensibilité politique, idéologique voire esthétique au profit d’un recentrage sur l’essentiel. Et c’est de ce point de vue que doivent être comprises et accueillies, par exemple, les éventuelles mesures de Rome en faveur d’une réconciliation avec la mouvance dite traditionaliste. Un théologien comme Yves Congar - pourtant marqué par sa réputation œcuménique et réformiste - n’hésitait pas à reconnaître un aspect légitime à certaines demandes émanant de l’opposition au Concile. Il admettait sans réserve qu’on soit attaché à la messe de saint Pie V, à condition que ce soit sans rejet pour la messe dite de Paul VI. Le cardinal Ratzinger est allé encore plus loin en reconnaissant qu’il y avait eu des dérives graves, d’ailleurs étrangères à la constitution conciliaire sur la liturgie, et qu’il convenait de prêter une attention soutenue à certaines plaintes et à certaines objections.
On ne peut prendre à la légère, par exemple, la question de l’orientation de la liturgie tournée vers le soleil levant, qui désigne symboliquement le Christ ressuscité. On s’est beaucoup moqué de Claudel s’insurgeant contre “la messe à l’envers”. Mais il est certain que s’il y a détournement de signification grave, avec une assemblée qui se recentre sur elle-même pour oublier que la liturgie est ouverture au mystère de Dieu, la déviation est gravissime. Il nous semble que la nouvelle disposition de la cathédrale de Paris, qui est présente dans les belles retransmissions de KTO, devrait amplement donner matière à réflexion. Désormais, toute l’attention se trouvent attirée vers la grande croix dorée qui se trouve au fond du chœur de la cathédrale. Ainsi est mise en valeur l’orientation de l’action liturgique qui attire l’assemblée et les célébrants au-delà d’eux-mêmes, pour qu’ils entrent dans la dynamique du mystère de Dieu.