1 juin 2007





Accords pratiques ?
1er juin 2007 - Abbé Philippe Laguérie - institutdubonpasteur.org
Cher monsieur Allingry,
On me demande sans arrêt (vous en particulier) de juger de la position de la Fraternité saint Pie X. Je n’ai plus aucune autorité à parler en son nom. Et je suis suffisamment contrarié quand elle veut définir la position de l’I.B.P. pour n’avoir pas à me mêler de définir la sienne.
Mais j’ai toujours pensé, depuis mes articles du "Chardonnet", de "Pacte" et du "Mascaret" (qu’on s’y reporte) que demander aux autorités romaines des discussions doctrinales préalables à tout accord est une gageure, une provocation, un manque total de sens pratique. Bref, une insolence qui cache une volonté inavouable de ne pas vouloir (ou de ne pas pouvoir) aboutir. Et voici mes raisons.
On ne discute pas avec Rome. Un point c’est tout. Si quelque chose heurte violemment la Foi Catholique : on hurle de détresse, comme Mgr Lefebvre l’a fait. C’est tout ce qu’on peut faire. Mais une discussion, fût-elle doctrinale, suppose l’égalité des partis, ce qui n’est jamais le cas quand on entreprend de "discuter" avec le Siège Romain et son titulaire : le Pape. Pour qui se prend-t-on ? Je discute volontiers avec mes amis, avec mes collaborateurs, mes confrères. Je ne discute pas avec des inférieurs, des enfants, des élèves : je les enseigne. Et s’il arrivait que ce fût moi qui eusse tort contre eux, je ne discuterai pas pour autant. On a de l’honneur ou on n’en a pas.
D’autant, c’est anecdotique direz-vous, qu’on ne peut pas proposer des discussions doctrinales quand on les a refusées précédemment. Il faut d’abord savoir si c’est une vraie raison ou un alibi destiné à repousser l’échéance, que tous savent inéluctable, d’une négociation pratique. Laquelle, par contre, exige absolument qu’on reste intègre et droit dans ses bottes !
D’où l’on voit que le problème d’un accord avec les autorités ne réside pas du tout dans les fameux présupposés. Sans aucun doute, ils sont excellents dans la mesure où ils incluent une vision globale de la crise générale de l’Eglise où la nouvelle messe et les doctrines de Vatican II ont une part majeure. On se souviendra quand même, pour mémoire, que ceux qui les ont proposés d’abord à la Fraternité s’appellent Mgr Riffan (alors abbé) et notre vaillant membre de l’Institut, l’abbé Aulagnier. Mais la question n’est pas là.
Des présupposés, avec Rome, restent des suppliques pour le bien commun. On peut, très légitimement, estimer devoir attendre pour conclure un accord pratique avec l’Autorité que les conditions soient meilleures. J’ai toujours respecté ce choix des autorités de la FSSPX et seul son chef peut en décider. Je continuerai de respecter ce choix, même si, et surtout, il apparaissait cornélien. En 1988 j’aurais suivi Mgr Lefebvre, et tous mes confrères aussi, dans son accord avec le Cal Ratzinger.
Mais qu’on l’appuie, s’il vous plaît, sur des bases cohérentes. Il s’agit de déterminer le temps et les circonstances qui permettront de vivre, en restant tels que dans la Foi et la pratique, en "bonne paix" avec les Autorités. Ce qui représente un bien majeur. C’est la décision typique du chef qui doit déterminer le bien commun de sa charge. Le reste n’est que laïus. J’avoue avoir été aidé puissamment par la Providence, qui a décidé Elle-même de mes choix. Mais vouloir "convertir" Rome avant est d’une insolence et d’une légèreté telle que les saints de l’Eglise, qui ont eu plus que nous à souffrir de la méchanceté des clercs, doivent se retourner dans leurs tombes !
Ma conclusion est simple et constante : il n’y a d’accords que pratiques, lesquels sont au jugement du chef (qui peut avoir raison ou tort !). Tout le reste n’est qu’ échappatoire.