19 avril 2012

[François Vercelletto - Ouest France] Les intégristes prêts à se réconcilier avec Rome

SOURCE - François Vercelletto - Ouest France - 19 avril 2012

Repères 
Réintégration ? Les intégristes n'ont jamais été aussi près de revenir dans le giron de l'Église catholique. La Fraternité Saint-Pie-X vient de répondre au « Préambule doctrinal » qui lui avait été soumis par le Saint-Siège en septembre 2011. Le porte-parole du Vatican, le père Lombardi, a jugé, hier, que cette réponse « constitue un pas en avant, une évolution encourageante par rapport aux réponses précédentes qui n'étaient pas apparues suffisantes ». Ce document va maintenant être examiné par la Congrégation pour la doctrine de la foi, avant d'être soumis au pape. La décision finale, qui appartient à Benoît XVI, sera connue d'ici à « quelques semaines ». De son côté, la Fraternité explique qu'« il s'agit d'une étape et non d'une conclusion ».

Que dit le texte ? Seule la version finale sera rendue publique. Ce Préambule contiendrait la profession de foi exigée de ceux qui exercent une charge dans l'Église. Mais il laisserait « ouvertes à une légitime discussion, l'étude et l'explication théologique d'expressions ou de formulations présentes dans les documents du Concile Vatican II ». Au terme de cet accord, la Fraternité Saint-Pie-X pourrait également bénéficier du statut très souple de « prélature personnelle », qui la rattacherait directement au pape.

D'où venait le désaccord ? Il trouve son origine dans le Concile Vatican II (1962-1965). Une frange de catholiques, emmenés par Mgr Marcel Lefebvre, s'est s'opposée avec virulence aux évolutions de l'Église, en particulier sur la liberté de conscience, l'oecuménisme, le dialogue avec les autres religions et les rites liturgiques. Lorsque Mgr Lefebvre ordonne quatre évêques sans l'accord du pape, en juin 1988, il se sépare de fait de l'Église catholique et provoque un schisme.

Rapprochement ? Joseph Ratzinger ne s'est jamais résolu à cette division. Élu pape, il va multiplier les gestes en direction des « brebis égarées ». En 2007, il va libéraliser l'usage du rite tridentin, la « messe en latin ». En janvier 2009, il va lever l'excommunication des quatre évêques lefebvristes, dont Mgr Williamson, connu pour ses propos négationnistes, et mener ensuite d'intenses négociations qui sont en passe d'aboutir aujourd'hui.

Pourquoi cette détermination ? Le chef de l'Église catholique n'est en rien « intégriste », mais il s'est fixé comme objectif de rassembler tous ceux qui se disent catholiques. Bien que convaincu de la pertinence de Vatican II, Benoît XVI a souffert de ce qu'il considère comme des « dérives post-conciliaires ». Il est également très attaché à la beauté de la liturgie traditionnelle. Enfin, il sait que la Fraternité, avec environ 150 prêtres en France, compte aussi de nombreux séminaristes.

Quel avenir ? Se replacer sous l'autorité romaine ne fait pas l'unanimité chez les intégristes. Les plus extrémistes ne suivront pas. Les autres rêvent de continuer leur croisade contre les « erreurs » du Concile à l'intérieur de l'institution. De quoi inquiéter les « enfants de Vatican II ». Et ce, alors que l'Église se trouve confrontée, dans le même temps, à de vastes mouvements de contestation de son aile progressiste, particulièrement en Allemagne et en Autriche.

François Vercelletto