26 août 2014

[Jeff Ostrowski - Corpus Christi Watershed / Notions Romaines] Le triomphe improbable de la messe traditionnelle


SOURCE - Jeff Ostrowski - Corpus Christi Watershed / version française: Notions Romaines - 26 aout 2014

[Par M. Jeff Ostrowski]
«Car mes pensées ne sont pas vos pensées, et vos voies ne sont pas mes voies, –oracle de Yahweh. Autant les cieux sont élevés au-dessus de la terre, autant mes voies sont élevées au-dessus de vos voies et mes pensées au-dessus de vos pensées.» 
Isaïe 55 : 8-9 (Bible Crampon)
Les mots d’Isaïe sont très à point en ce qui concerne les discussions à propos du stupéfiant triomphe de la messe traditionnelle. Considérez la citation suivante du Père Brian W. Harrison. Bien que je ne sois pas toujours d’accord avec le Père Harrison, ses connaissances liturgiques ne sont remises en question par aucune personne sérieuse; malgré cela, voici ce qu’il écrivit le 26 mars 1995 :

«Évidemment, ce que tous les traditionalistes veulent vraiment c’est la complète égalité du statut de la vieille messe aux côtés du nouveau rite. Mais ceci, il me semble, est un rêve utopique. Cela n’arrivera tout simplement pas. Déjà, l’homme à la tête de la commission Ecclesia Dei, le cardinal Innocenti, a clairement signifié que selon lui les présents arrangements permettant l’ancienne messe ne devraient être considérés que comme temporaires avec en vue une “intégration” des catholiques traditionnalistes au sein du culte mainstream selon le rite romain latin – c’est-à-dire la pleine acceptation de la messe de Paul VI. Pas un seul des cardinaux avec une chance de devenir pape lors du prochain conclave n’a laissé croire à aucun moment qu’il accorderait la pleine égalité à la messe préconciliaire et, bien sûr, toute résolution en ce sens sera assurément impossible à implanter; cela provoquerait une rébellion au sein de la majorité des évêques du monde…»

Qui pourrait oublier les mots du Père Réginald Foster, un prêtre qui travailla pour quatre papes? Le 28 janvier 2007, quelques mois avant la promulgation de Summorum pontificum, le Père Foster déclara catégoriquement [i] que le pape Benoît XVI n’irait pas en ce sens :

«Il ne le fera pas. Il eut des problèmes avec Ratisbonne, et ensuite avec Varsovie; s’il le fait, tout l’enfer sera déchaîné.» Et le Père Foster d’ajouter : «C’est une messe inutile et toute la mentalité est stupide. Son idée est que les choses étaient meilleures avant. Cela fait paraître le Vatican comme médiéval.»

Le Père Harrison est un érudit respecté et le Père Foster a travaillé au Vatican pendant quatre décennies. Comment ce fait-il que les deux se soient complètement trompés?

Mes pensées ne sont pas vos pensées…

Le Père Harrison ajouta en 1995 qu’un document comme Summorum pontificum (qui arriva douze ans plus tard) représenterait un «rejet d’une constitution solennelle promulguée par le plus récent concile œcuménique de l’Église catholique». Toutefois, cette assertion ne peut être maintenue.
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TOUTE PERSONNE SÉRIEUSE qui a examiné les réformes liturgiques postconciliaires admettra que les changements allèrent bien au-delà de ce que les Pères conciliaires envisageaient. Les Pères donnèrent les principes, mais ne votèrent jamais ni ne donnèrent leur approbation, ni ne virent les changements faits par le Consilium une demi-décennie plus tard. Ces changements radicaux (mandatés nulle part dans les documents conciliaires) représentent un rejet de Vatican II.

Par exemple, Vatican II affirma qu’on «ne fera des innovations que si l’utilité de l’Église les exige vraiment et certainement». Toutefois, personne n’est capable de démontrer que de placer un tract avant le graduel lors du dimanche des Rameux était quelque chose de «vraiment» et certainement» requis. Le cardinal Antonelli, peut-être la plus grande sommité en la matière, a clairement dit que «la révision toute entière doit être conduite en accord avec la tradition de l’Église». Toutefois, personne n’a été capable de démontrer comment la création de prières eucharistiques totalement nouvelles s’accorde avec «la tradition de l’Église». Le cardinal Michael Browne avait averti les Pères que le latin disparaîtrait si l’on permettait le vernaculaire, et ces derniers éclatèrent d’un rire notoire à une telle affirmation; mais le latin fut illicitement abandonné. Les collectes ont été mutilées et des innovations, tel le psaume responsorial, furent ajoutées sans le moindre fondement historique. Des centaines d’exemples similaires pourraient être cités [ii].

Maintenant, considérons ce dont les liturgistes adorent débattre : si le prêtre devrait dire silencieusement toutes les prières, s’il devrait y avoir une plus grande sélection de passages des Écritures, si ajouter une première lecture était vraiment une «restauration», si c’est un problème que des prêtres agissent liturgiquement comme sous-diacres et ainsi de suite. Tous ces items sont si insignifiants quand l’on considère la musique séculière, banale, à l’eau de rose, pauvrement construite et parfois hérétique qui prévaut dans 95% des églises catholiques. Cela est le vrai REJET de Vatican II. Les nombreux abus liturgiques qui ont surgis après le Concile représentent aussi un REJET de Vatican II.Summorum pontificum n’est pas un REJET de Vatican II. SP permet à des catholiques de prier selon un rite ancien et suprêmement vénérable qui les aide à se rapprocher du Seigneur. Je n’ai jamais vu un document de Vatican II s’opposer à une telle chose.

***NOTES:

[i] Pour le moment, laissons de côté la pauvre compréhension qu’a le Père Foster du missel de 1962, son incompréhension des commentaires du pape Benoît XVI à Ratisbonne et Varsovie et ses idées idiotes à propos de toute la situation. Nous ne sommes qu’intéressés par le fait que le Père Foster s’était complètement trompé.

[ii] La liturgie postconciliaire n’est pas parfaite; il n’y a toutefois pas de raison de paniquer. Il n’y a jamais eu de «liturgie parfaite» dans l’Église entière. L’Église doit examiner, avec modération et honnêteté, les améliorations possibles à apporter.

Traduction: Notions romaines