7 janvier 2005

[Petrus - Le Forum Catholique] Autosatisfaction

SOURCE - Petrus - Le Forum Catholique - 7 janvier 2005

"La FSSPX étant en somme le véhicule de la résistance doctrinale et liturgique auxx nouveautés conciliaires, il est manifeste que ses prêtres doivent quelques part avoir une nature de battant, quitte à ce que cela entraîne des frictions importantes à l'interne comme nous l'avons vu dans la crise de Bordeaux. Les mous, les tièdes, les indécis, les chercheurs de comfort facile, en voyant que ce n'est pas leur place, invoqueront toutes une série de raisons plutôt controuvées pour justifier leur départ, en général de nature papolâtre, lesquelles feront les délices des individus chargés d'alimenter les sites invoqués plus haut" nous écrit PGM. 
 
Voilà le type même de l'autosatisfaction lefebvriste dans toute sa splendeur: la FSSPX est "le véhicule de résistance doctrinale et liturgique aux nouveautés conciliaires". Véhicule qui en tous cas a plusieurs roues crevées actuellement et le moteur en panne. Quant à la résistance doctrinale, j'ai déjà longuement expliqué ce qu'il fallait en penser. Quant au qualificatif de papolâtre, volontairement péjoratif, il désigne en fait les papistes c'est-à-dire ceux qui pensent qu'il faut obéir à la personne que l'on reconnaît publiquement comme le vicaire du Christ en matière de foi, de moeurs, de discipline et de gouvernement (Vatican I). Or, qu'est-ce qu'un catholique qui n'est pas papiste? Un objet non identifié.

Quant à dire que tous les prêtres de la FSSPX sont des "battants", si cela était le cas, cela se saurait. C'est vrai incontestablement pour des abbés Laguérie, Tanoüarn, Aulagnier. Peut-on le dire sérieusement d'un abbé de Cacqueray, d'un Mgr Fellay ou d'un Mgr Tissier?

Quant au couplet sur "les mous, les tièdes, les indécis, les chercheurs de confort facile" qui n'auraient pas leur place à la FSSPX, permettez-moi d'en rire. Outre qu'une position ne doit pas être jugée au fait qu'elle soit molle ou dure mais au fait qu'elle soit vraie ou fausse, je trouve au contraire que quelqu'un qui veut son confort est très bien à la FSSPX. Il y a l'argent qui coule à flots (des dizaines de millions de francs de dons, de legs, d'héritages divers débloqués par le gouvernement en 2000), un logement très confortable dans des prieurés pour tous les prêtres, très souvent des soeurs ou de bonnes dames pour leur faire le repas et leur servir à manger des repas tout sauf frugaux, le chauffage, de belles voitures que des smicards ne pourraient sûrement pas s'offrir, des chapelles en pagaille, des offrandes de messe en cascade, des quêtes abondantes (les fidèles, surtout âgés, étant généralement très généreux, peut-être croyant ainsi s'acheter le Ciel), je ne vois pas sincèrement où est l'héroïsme. Franchement, au point de vue du confort, il n'y a pas mieux que prêtre de la FSSPX. Pensez au prêtre conciliaire (dont encore une fois je n'approuve nullement la position mais il faut quand même être honnête), qui doit faire face le plus souvent, surtout à la campagne, à des églises désertées, des quêtes minuscules, des cures peu ou mal chauffées, très souvent personne pour lui servir les repas ou lui tenir compagnie (alors que dans les prieurés de la FSSPX il y a généralement plusieurs prêtres qui cohabitent), des fidèles souvent dépourvus de piété, vous croyez vraiment que c'est plus confortable? Idem pour les prêtres Ecclesia Dei qui doivent se coltiner leurs confrères du nouveau rite et parfois leurs fidèles, qui ont des comptes à rendre à des évêques qui souvent les détestent ou, à tout le moins, s'en méfient ou au mieux sont indifférents. Vous m'objecterez qu'ils l'ont bien voulu ainsi en se "ralliant". Certes, j'en suis d'accord avec vous, mais objectivement l'on ne peut pas dire que leur situation est confortable. En tous cas, beaucoup moins que celle des prêtres estampillés FSSPX. Et que dire des prêtres indépendants sans ressources? 
 
Mais à la vérité, le confort, c'est tout ce que recherche le piédiste: il a ses écoles pour mettre ses enfants (nombreux si possible car il faut faire beaucoup de petits lefebvristes qui vont recatholiciser la France, quelle blague!), ses chapelles, ses camps scouts, ses chorales, ses maisons de retraite, ses séminaires, ses revues et bulletins qui distillent la bonne parole fellaysienne et s'envoient gracieusement, quasiment à chaque numéro, beaucoup de coups d'encensoir (on n'est jamais mieux servi que par soi-même, il est vrai). Mais le lefebvriste vit dans un cocon, dans un monde clos, dans un univers virtuel où l'on se nomme curé (de Saint-Nicolas, de saint-Eloi) sans jamais avoir été nommé par aucun évêque résidentiel, où l'on crée des chapelles, des prieurés, où l'on sacre des évêques sans demander l'autorisation ni prévenir une autorité que l'on reconnaît publiquement comme légitime et suprême. La FSSPX a formé une véritable contre-Eglise, une contre-société avec les associations et congrégations qui lui sont liées. N'est-on pas heureux entre nous? D'ailleurs, on est les meilleurs. Que dis-je? on est les seuls. Les autres, tous les autres, sont des vendus, des mous, des tièdes, des crottes. Nous, on est bien, on est des purs. D'ailleurs, la preuve qu'on est béni de Dieu, ce sont nos réussites terrestres. Les 95% de nos garçons et filles qui ont le bac dans nos écoles (et pour beaucoup avec mention, mazette! De vrais petits génies comme le montre surabondamment leur capacité à argumenter sur le FC), nos chapelles qui se remplissent, notre extension miraculeuse sur les cinq continents (on va recatholiciser non seulement la France et l'Europe mais le monde, on vous dit, c'est t'y pas beau, tout ça,), nos revues qui se multiplient, nos prêtres qui sont de plus en plus nombreux et qui sont de vrais combattants de Dieu (pour gagner du temps on pourrait les canoniser de leur vivant, c'est plus simple) et puis nous avons notre guide infaillible à nous, notre boussole, notre idole, notre gourou: Mgr Marcel Lefebvre himself. Du béton, cet homme-là. Un évêque de fer, c'est comme ça qu'on l'appelle chez nous. Et inspiré par le Saint-Esprit et la Sainte Vierge. Ben si, c'est lui qui l'a dit, le jour des sacres: à Quito la Sainte Vierge a révélé qu'un évêque sauverait l'Eglise au XXe siècle. Si, si, c'était Marcellus, puisqu'on vous le dit.
C'est beau l'humilité. Merci à la FSSPX et à ses ardents soutiens de nous en donner de magnifiques exemples à chaque instant. C'est sûr: tous les saints, tous les réformateurs, tous les confesseurs de la foi ont toujours agi comme cela, s'adressant eux-mêmes des couronnes de fleurs, méprisant les autres.
Oui, de tels discours sont à vomir.

Il me souvient que lorsque j'avais été un court moment au MJCF, on nous avait passé un film sur les guerres de Vendée. Et après sa diffusion, l'animateur du MJ nous avait expliqué que le MJCF et la FSSPX poursuivaient le même combat que les Vendéens. Notre combat est le leur et le leur est le nôtre disait avec assurance ce jeune homme bien formaté (et qui a donc dû grimper haut au sein de l'organisation). C'est beau et émouvant, n'est-il pas? De quoi avoir les larmes aux yeux, non? 
 
Quand on pense que les Vendéens ont été massacrés par dizaines et dizaines de milliers par les colonnes infernales pour avoir voulu défendre leur foi, leur Dieu et leur Roi, que leur obéissance au pape les avait conduit à soutenir en masse les prêtres réfractaires (fidèles à Rome), comment peut-on prétendre se mettre au même niveau que ses martyrs, surtout quand on jouit du confort matériel et spirituel? Jamais depuis la création de la FSSPX un seul de ses prêtres n'est mort martyr pour sa foi. Ce n'est pas forcément de leur faute. L'occasion ne s'est sans doute pas présentée mais davantage d'humilité, de discrétion et de bon sens ne seraient vraiment pas trop demander. 
 
Et après tout cela, vous ne pensez que le Bon Dieu serait en droit d'envoyer un châtiment sur la FSSPX? Il me semble que la crise actuelle s'explique pourtant aisément. Et d'ailleurs dans cette crise l'orgueil semble assez équitablement partagé entre les deux camps. Mais comme le dit le psaume 113: "ils ont des yeux et ne voient pas, des oreilles et n'entendent pas". 
 
Petrus.