21 octobre 2006

Traditionnelle vraiment ?
21 octobre 2006 - Christian Terras, Romano Libero - Golias golias.ouvaton.org
L’ancien missel était trop marqué par une théologie inhumaine et peut-être païenne du sacrifice, en tout cas pré-évangélique. Traditionnelle vraiment ?
La messe selon le rit de Saint Pie V est quelquefois qualifiée de l’épithète "traditionnelle". Les intégristes de la fraternité Saint Pie X ne cessent d’ailleurs de se gargariser de cet adjectif pour justifier leurs préférences. Mgr Marcel Lefebvre parlait même de la "messe de toujours". Le sens de l’histoire n’a jamais été son fort. EN réalité, les livres liturgiques ne font que codifier une évolution vivante, marquée souvent au départ par le tatonnement et l’improvisation. De fait, dans les premiers temps de l’Eglise, le célébrant ne lisait pas une prière eucharistique sur un missel mais inventait. Cette créativité liturgique n’a peut-être pas toujours porté les fruits escomptés. Par contre, sur le fond, cette libération par rapport au texte lu et par rapport au strict respect des rubriques constitue un gage de...vraie fidélité à l’intention des origines ; donc à la tradition.
Les historiens du culte sont généralement d’avis que les livres liturgiques actuels sont plus riches et plus traditionnels que le fameux missel de 1962 sur lequel se polarisent les intégristes. Surtout, en bonne théologie, ces textes parviennent à un meilleur point d’équilibre entre différents aspects, revalorisant la dimension d’assemblée participative, de communion et de repas. L’image du Dieu de majesté, courroucé et sévère, devant lequel l’homme s’écrase, ainsi véhiculé par les textes et les rites est-il si conforme que cela au Dieu de l’Evangile ?
Il se pourrait bien que les intégristes cultivent une notion idéologique et fausse de la notion de tradition, identifiée bien à tort avec certzains accents intransigeants à certaines périodes données. Au fond, ils se plaisent à faire le tri, à retenir les éléments qui leur conviennent (ce qu’ils font grief aux "modernistes" de faire !). Paul VI lui-même en 1976 reprochait à Mgr Lefebvre une notion erronée de la tradition. Par la suite, le défunt cardinal Pierre Eyt, archevêque de Bordeaux n’eut de cesse de mettre en lumière les nombreuses déviances de la vision intégriste. Si des catholiques présentent une vision frelatée de la tradition, il s’agit bien de ceux qui l’enferment dans le lit de Procuste de leur propre étroitesse mentale.
Golias dénonce à juste titre l’intention idéologique fanatique et intolérante dont la référence à la messe est d’abord un drapeau. Par ailleurs, nos "traditionalistes" seraient également bien inspirés de changer de nom. Ce qu’ils défendent, idole dérisoire de leur scérose d’esprit, n’a rien de la vraie tradition, laquelle en fait est une marche incertaine et fraternelle, souvent itinérance sur une ligne de crête, à la suite de Jésus et au fil des âges.