SOURCE - Romano Libero - Golias - 7 juin 2010
Les analyses, au demeurant claires et argumentées, de Mgr Brunero Gherardini, chanoine de la basilique Saint Pierre de Rome, professeur retraité de l’université du Latran, spécialiste de l’oecuménisme, aujourd’hui octogénaire, sont assez peu connues du public francophone. A tort.
Né en 1925, ce Toscan au verbe tranchant et aux positions dures est l’un des derniers héritiers de l’école romaine de théologie (représentée au moment du Concile par le cardinal Pietro Parente et Mgr Antonio Piolanti). Ne cachant pas ses sympathies pour la Fraternité Saint Pie X, postulateur de la cause du Pape Pie IX, Gherardini n’est pas n’importe qui. Il exprime, sans l’aspect caricatural de certains traditionalistes français, une vision des choses que l’on peut qualifier d’ultra-traditionnelle et qui peut évidemment pour une large part être adoptée par les intégristes.
Au-delà de la question de la réforme liturgique Mgr Gherardini pose le problème de l’autorité du concile Vatican II. A cette époque, encore jeune prêtre du diocèse de Prato, Don Brunero conseillait le vieux cardinal Giuseppe Pizzardo, préfet de l’alors congrégation des séminaires et des universités, un homme de la vieille garde.
La Paix liturgique, l’un des sites tradis les plus intéressants, rend compte avec intelligence des positions actuelles de Gherardini sur le sujet le plus délicat des échanges entre le Vatican et les lefebvristes « La valeur magistérielle de Vatican II ».
Ce que propose en fait Gherardini, comme le Note La Paix liturgique, c’est la position de la minorité conciliaire au cours de Vatican, II, en retrait par rapport aux outrances de ceux qui par la suite contestèrent le Concile mais offrant sans aucun doute la variante la plus fixiste de cette "herméneutique de la continuité" que recommande Benoît XVI pour interpréter Vatican II dans son très important discours à la Curie romaine du 22 décembre 2005. Comme le fait La Paix liturgique on pourrait dénommer cette interprétation herméneutique de Tradition.
La thèse clairement exprimée par Mgr Gherardini est celle d’une différence de degré d’autorité au sein du corpus conciliaire entre des affirmations de portées différentes. De façon globale, estime, Mgr Gherardini : « Il s’agit d’un Concile qui, par principe, a exclu la formulation de nouvelles doctrines dogmatiques. […] L’enseignement [de Vatican II] ne peut être dit infaillible et irréformable que là où se trouve un enseignement défini précédemment ». Autrement dit, sur les points controversés comme celui du droit à la liberté religieuse, l’autorité la plus forte du Magistère de l’Eglise n’est pas engagée. Les positions avancées peuvent donc être discutées et contestées dans le cadre même de la plus stricte fidélité au Magistère.
Le Concile Vatican peut donc être qualifié de "pastoral" : c’est-à-dire n’énonçant pas de nouveau dogme, de nouvelles doctrines à accueillir obligatoirement. Cette absence de "volonté de définir" dispense le catholique d’une adhésion obligatoire à tout ce qu’enseigne Vatican II. Une conclusion qui ne peut que ravir les intégristes lefebvristes. Ils n’ont pas besoin d’adhérer au Concile Vatican II ! Les pouparlers doctrinaux - actuellement en cours - deviennent presque optionnels.
La position de Mgr Gherardini justifie des corrections éventuelles des textes conciliaires. Par exemple sur des sujets comme la liberté religieuse, l’oecuménisme et le dialogue interreligieux.
Gherardini va plus loin que les conservateurs en général et sans doute que Joseph Ratzinger en particulier. Selon ces derniers il s’agit sans doute de réfuter certaines interprétations du Concile, jugées déviantes, mais sans réticence envers "le vrai Concile". Certes, le cardinal Ratzinger tenait à dire que le dernier Concile ne "devait pas être interprété comme un superdogme". Mais dans son fameux livre "entretien sur la foi" il critiquait les intégristes qui n’acceptaient pas le Concile. Sa position reste substantiellement celle de Jean Paul II selon laquelle il faut défendre le Concile mais rien que le Concile. Et non pas des lectures déviantes. Mais sans réticence sur un enseignement présenté - au moins implicitement - comme faisant autorité. La "nouveauté" (si l’on peut employer un tel mot) de la position de Mgr Gherardini est la mise en cause, partielle et prudente certes, mais néanmoins réelle et nette, du Concile lui-même et non pas seulement d’interprétations présentées comme fausses ! Ce qui rapproche clairement sa position de celle de Mgr Lefebvre. Ou du moins d’un Marcel Lefebvre avant son durcissement et sans sa rhétorique politique.
On mesure l’importance du côté tradi des positions de Gherardini. Une justification par la théologie romaine des choix de Mgr Lefebvre. En substance et sans la coloration extrémiste propre à une certaine tradition française. De quoi fonder une sacrée restauration...
Les analyses, au demeurant claires et argumentées, de Mgr Brunero Gherardini, chanoine de la basilique Saint Pierre de Rome, professeur retraité de l’université du Latran, spécialiste de l’oecuménisme, aujourd’hui octogénaire, sont assez peu connues du public francophone. A tort.
Né en 1925, ce Toscan au verbe tranchant et aux positions dures est l’un des derniers héritiers de l’école romaine de théologie (représentée au moment du Concile par le cardinal Pietro Parente et Mgr Antonio Piolanti). Ne cachant pas ses sympathies pour la Fraternité Saint Pie X, postulateur de la cause du Pape Pie IX, Gherardini n’est pas n’importe qui. Il exprime, sans l’aspect caricatural de certains traditionalistes français, une vision des choses que l’on peut qualifier d’ultra-traditionnelle et qui peut évidemment pour une large part être adoptée par les intégristes.
Au-delà de la question de la réforme liturgique Mgr Gherardini pose le problème de l’autorité du concile Vatican II. A cette époque, encore jeune prêtre du diocèse de Prato, Don Brunero conseillait le vieux cardinal Giuseppe Pizzardo, préfet de l’alors congrégation des séminaires et des universités, un homme de la vieille garde.
La Paix liturgique, l’un des sites tradis les plus intéressants, rend compte avec intelligence des positions actuelles de Gherardini sur le sujet le plus délicat des échanges entre le Vatican et les lefebvristes « La valeur magistérielle de Vatican II ».
Ce que propose en fait Gherardini, comme le Note La Paix liturgique, c’est la position de la minorité conciliaire au cours de Vatican, II, en retrait par rapport aux outrances de ceux qui par la suite contestèrent le Concile mais offrant sans aucun doute la variante la plus fixiste de cette "herméneutique de la continuité" que recommande Benoît XVI pour interpréter Vatican II dans son très important discours à la Curie romaine du 22 décembre 2005. Comme le fait La Paix liturgique on pourrait dénommer cette interprétation herméneutique de Tradition.
La thèse clairement exprimée par Mgr Gherardini est celle d’une différence de degré d’autorité au sein du corpus conciliaire entre des affirmations de portées différentes. De façon globale, estime, Mgr Gherardini : « Il s’agit d’un Concile qui, par principe, a exclu la formulation de nouvelles doctrines dogmatiques. […] L’enseignement [de Vatican II] ne peut être dit infaillible et irréformable que là où se trouve un enseignement défini précédemment ». Autrement dit, sur les points controversés comme celui du droit à la liberté religieuse, l’autorité la plus forte du Magistère de l’Eglise n’est pas engagée. Les positions avancées peuvent donc être discutées et contestées dans le cadre même de la plus stricte fidélité au Magistère.
Le Concile Vatican peut donc être qualifié de "pastoral" : c’est-à-dire n’énonçant pas de nouveau dogme, de nouvelles doctrines à accueillir obligatoirement. Cette absence de "volonté de définir" dispense le catholique d’une adhésion obligatoire à tout ce qu’enseigne Vatican II. Une conclusion qui ne peut que ravir les intégristes lefebvristes. Ils n’ont pas besoin d’adhérer au Concile Vatican II ! Les pouparlers doctrinaux - actuellement en cours - deviennent presque optionnels.
La position de Mgr Gherardini justifie des corrections éventuelles des textes conciliaires. Par exemple sur des sujets comme la liberté religieuse, l’oecuménisme et le dialogue interreligieux.
Gherardini va plus loin que les conservateurs en général et sans doute que Joseph Ratzinger en particulier. Selon ces derniers il s’agit sans doute de réfuter certaines interprétations du Concile, jugées déviantes, mais sans réticence envers "le vrai Concile". Certes, le cardinal Ratzinger tenait à dire que le dernier Concile ne "devait pas être interprété comme un superdogme". Mais dans son fameux livre "entretien sur la foi" il critiquait les intégristes qui n’acceptaient pas le Concile. Sa position reste substantiellement celle de Jean Paul II selon laquelle il faut défendre le Concile mais rien que le Concile. Et non pas des lectures déviantes. Mais sans réticence sur un enseignement présenté - au moins implicitement - comme faisant autorité. La "nouveauté" (si l’on peut employer un tel mot) de la position de Mgr Gherardini est la mise en cause, partielle et prudente certes, mais néanmoins réelle et nette, du Concile lui-même et non pas seulement d’interprétations présentées comme fausses ! Ce qui rapproche clairement sa position de celle de Mgr Lefebvre. Ou du moins d’un Marcel Lefebvre avant son durcissement et sans sa rhétorique politique.
On mesure l’importance du côté tradi des positions de Gherardini. Une justification par la théologie romaine des choix de Mgr Lefebvre. En substance et sans la coloration extrémiste propre à une certaine tradition française. De quoi fonder une sacrée restauration...