8 mars 2006

« Le dogme de la foi » - Réflexions, Mars 2006
Mgr Williamson (La Reja - 8 mars 2006)
« Le dogme de la foi » — n’est-ce pas une expression un peu étrange ? Pourtant elle est de Notre Dame, et elle va droit au cœur de cette crise de l’Église qui nous afflige tous, et toujours plus !
L’expression peut sembler étrange, parce que la foi catholique contient plusieurs dogmes, et pas seulement un. Selon notre façon normale de parler, chaque article de la foi catholique constitue un dogme, comme chaque définition solennelle de l’Église en fixe un autre. Alors comment peut-on parler du « dogme de la foi » au singulier ?
Le contexte où Notre Dame utilisa cette expression est d’un grand intérêt. C’est à Fatima en 1917 qu’elle dit à Sœur Lucie entre la deuxième et troisième partie du Secret : « Au Portugal se conservera toujours le dogme de la foi ». Or, la deuxième partie du Secret est connue de tout le monde. C’est là où Notre Dame avertit le monde qu’il fallait consacrer la Russie à son Cœur Immaculé et faire réparation par la Communion des premiers samedis du mois, sinon des châtiments graves s’abattraient sur l’humanité.
Par contre la troisième partie du Secret de Fatima, ce « Troisième Secret » dont tout le monde catholique attendait la publication par l’Église en l’année fixée pour cela par Notre Dame, 1960, n’a toujours pas été révélée (le supposé « Troisième Secret de Fatima » rendu public par Rome en 2000 est sûrement autre chose que le texte attendu en 1960). Mais les meilleurs experts de Fatima considèrent que les paroles « Au Portugal se conservera toujours le dogme de la foi », constituent de fait le début du vrai Troisième Secret, parce que Sœur Lucie y ajouta une fois par écrit « etc. », comme si elle avait voulu signaler que c’est là qu’il fallait insérer la suite du Troisième Secret.
C’est hautement vraisemblable, et voilà tout l’intérêt de cette expression un peu étrange utilisée par Notre Dame. Car, disent ces experts, si le Troisième Secret n’a jamais été révélé par Rome, n’est-ce pas parce qu’il annonce la crise de l’Église déclenchée (sinon voulue) par les innovateurs de Vatican II qui n’entendaient pas se faire condamner d’avance par la Mère de Dieu ? Alors ceux-ci ont tu son secret en 1960 pour lancer leur Concile en 1962. En effet, dire qu’au Portugal se conservera « le dogme de la foi », n’est-ce pas suggérer qu’il se perdra ailleurs ?
Dès lors, Notre Dame a pu choisir cette expression pour annoncer en résumé toute la crise de ces 40 ans dans le désert conciliaire. En effet ! Car ce qui caractérise cette crise et fait qu’elle est la plus épouvantable de toute l’histoire de l’Église, n’est-ce pas que grand nombre de catholiques, même s’ils n’ont pas encore perdu la foi — Dieu le sait — ont certainement perdu le sens du caractère dogmatique de la foi ? Peut-être croient-ils encore en tout article de la foi catholique, mais ils ne croient plus que ces articles et cette foi condamnent tout ce qui les contredit, c’est-à-dire toutes les erreurs de toutes les autres religions du monde. Et peut-on mieux résumer la condition de tels catholiques qu’en disant qu’ils ont perdu le dogme de la foi ?
La crise est épouvantable parce que ces catholiques peuvent se rassurer qu’en acceptant eux-mêmes tout dogme particulier de la foi catholique, ils sont catholiques sans problème — surtout s’ils sont avec le Pape ! Mais il y a un problème gravissime, car dès qu’ils croient avec le Concile que tout homme a effectivement droit à sa propre croyance, ils minent en général tout et chacun de ces dogmes particuliers qu’ils pensent accepter. Qu’ils s’en rendent compte ou non, ils ont remplacé la religion de la vérité de Dieu avec la religion de la liberté de l’homme, car c’est au fond de leurs croyances qu’ils mettent la liberté religieuse. Pas apparemment, mais réellement, ils mettent l’homme à la place de Dieu.
C’est pour cela que j’ai dit au Cardinal Castrillón, lorsqu’il a très gentiment invité les évêques de la Fraternité St. Pie X à déjeuner avec lui le 11 août 2000, « Eminence, nous avons deux religions différentes ». Au Cardinal de répondre plus tard, mais typiquement, « Mais vous et moi, nous croyons en le même Jésus Christ, la même Eucharistie, la même Église ! »
Eminence, oui et non, mais surtout non ! Je recours toujours au même exemple : — un mathématicien qui croit que deux et deux peuvent faire quatre ou cinq, a-t-il la même arithmétique que celui qui croit qu’ils ne peuvent faire qu’exclusivement quatre ? Sûrement pas ! L’arithmétique du premier a beau ne pas exclure la vérité (comme son Eminence n’exclut pas l’Eucharistie, etc.), car dès qu’elle n’exclut pas l’erreur non plus elle mine la vérité. Par contre, l’arithmétique vraie exclut absolument toute erreur qui ne corresponde pas à la réalité.
De même la vraie foi catholique exclut et condamne toutes les erreurs de toutes les autres religions, en particulier cette erreur de la liberté religieuse qui nie toute vérité objective pour établir la religion de l’homme.
Eminence, nous sommes bel et bien en présence de deux religions. La religion vraiment catholique a toujours engendré des martyrs de la vérité, parce que les vrais catholiques condamnent les erreurs du monde. Par contre la religion libérale qui n’est qu’en apparence catholique, n’engendre jamais de tels martyrs parce qu’elle laisse le monde tranquille dans ses erreurs.
Reine des Martyrs, priez pour nous !