10 mars 2006

Réflexions sur le texte de Mgr Willamson du mois de mars 2006 : « le dogme de la foi »
Abbé Paul Aulagnier - Flash Info - 10 mars 2006 - http://la.revue.item.free.fr/
Je prends connaissance à l’instant de ce texte de Mgr Williamson : « Le Dogme de la Foi - Réflexions. Mars 2006 »
Il est très intéressant –bien meilleur que son interview à Minute du 8 mars 2006 - et je pense très juste. Il met le doigt sur le drame que connaît l’Eglise. Ce drame c’est l’intrusion  du modernisme dans l’esprit de nombreux catholiques, de clercs et  même de prélats, et tout particulièrement dans l’esprit et certains  textes du présent Concile du Vatican II et même en certains actes des derniers papes. (par exemple ; Assise 1986). Or le modernisme se définit essentiellement par ce qu’on appelle « l’immanence vitale ». En théologie c’est l’affirmation du « subjectivisme de la foi » que l’on pourrait décrire par cette expression : « à chacun sa vérité ». C’est l’homme qui se fait sa propre vérité, il se fait comme Dieu.
C’est ce qu’affirme très justement Mgr Williamson dans cette phrase :
« La crise est épouvantable parce que ces catholiques peuvent se rassurer qu’en acceptant eux-mêmes tout dogme particulier de la foi catholique, ils sont catholiques sans problème — surtout s’ils sont avec le Pape ! Mais il y a un problème gravissime, car dès qu’ils croient avec le Concile que tout homme a effectivement droit à sa propre croyance, ils minent en général tout et chacun de ces dogmes particuliers qu’ils pensent accepter. Qu’ils s’en rendent compte ou non, ils ont remplacé la religion de la vérité de Dieu avec la religion de la liberté de l’homme, car c’est au fond de leurs croyances qu’ils mettent la liberté religieuse. Pas apparemment, mais réellement, ils mettent l’homme à la place de Dieu ».
Cette phrase est l’essentiel de la réflexion de Mgr Williamson. Elle est au cœur de sa pensée. Elle est la raison de son  attitude pratique. Elle explique son refus de tout « accord » ou « normalisation » avec Rome. C’est important.
Cette phrase est juste. Elle reflète bien, elle dit bien la vraie doctrine de l’Eglise. C’est bien l’enseignement du Magistère de l’Eglise confirmé par tant et tant de documents, d’encycliques, de discours des papes du 19éme siècle et  du 20ème  siècle. C’est bien ce que Mgr Lefebvre nous a enseigné dans la fidélité au magistère de l’Eglise.  Mgr Williamson y reste lui-même parfaitement fidèle. Je m’en réjouis. J’ai personnellement toujours communié à cette pensée. Voilà ce qui m’a fait suivre Mgr Lefebvre déjà en 1969.
Le malheur c’est que Mgr Williamson s’isole, s’enferme dans sa propre pensée, sa « tour d’ivoire », qu’il ne lit rien de ce qui vient de Rome ou que, lorsqu’il y porte une petite attention c’est avec « mépris », ce qui ne lui donne pas l’objectivité nécessaire. Il suffit de voir l’interprétation qu’il donne du discours de Benoît XVI du 22 décembre 2006 dans son interview donnée à Minute. …C’est inouï.  Je le lui ai dit. Je lui ai téléphoné à la Réjà pour cela, tout récemment encore. J’ai été même très solennel  - comme si je pouvais l’être, bref ! - je lui ai dit au nom de Mgr Lefebvre, « Mgr Lefebvre vous reprocherait de ne pas vous tenir au courant de ce qui vient de Rome.  Mgr Lefebvre était toujours celui qui nous apprenait les choses de Rome, de Paul VI, des dicastères romains…Il faut se tenir au courant. C’est indispensable.
Oui, il ne se tient pas au courant.
Et c’est un grand malheur.
Car il se trouve qu’il dit la même chose que Benoît XVI aujourd’hui. Il dénonce ce que Benoît XVI dénonce et dans les mêmes termes. Ainsi la différence qu’il affirme entre Benoît XVI et lui,  sur le formel de la crise de l’Eglise, sur les « deux religions » qui s’opposent fondamentalement,  est tout à fait fausse, sans fondement, erronée. L’opposition qu’il désire maintenir avec Rome, le refus qu’il oppose aujourd’hui à tout accord, à toute reconnaissance et normalisation de la FSSPX avec Rome est sans fondement, sans raison. C’est grave ! Gravissime.
Mgr Williamson dit bien – c’est même la conclusion de son argumentation qui me semble, encore une fois très juste - que l’homme est au cœur de tout, qu’il est la mesure et la fin de tout, en un mot qu’il se fait Dieu :
« Qu’ils(les catholiques)  s’en rendent compte ou non, ils ont remplacé la religion de la vérité de Dieu avec la religion de la liberté de l’homme, car c’est au fond de leurs croyances qu’ils mettent la liberté religieuse. Pas apparemment, mais réellement, ils mettent l’homme à la place de Dieu ».
En ce sens, la « religion conciliaire » est bien une  autre religion. Pour la foi catholique : Dieu est au coeur de tout, le principe et la fin de toutes choses. Il est la mesure de toute chose et la grandeur de l’homme c’est d’épouser la vérité de Dieu qu’il peut connaître par la raison et mieux encore par la foi et que nous propose l’Eglise, « l’arche » de la vérité et du salut.   C’est ce que Mgr Williamson veut dire quand il parle de « deux religions ». Elles sont opposées, elles s’affrontent…Cet affrontement fait la crise que connaît l’Eglise depuis 40 ans, depuis même le début du 20éme siècle.
« Ils mettent l’homme à la place de Dieu ». Voilà la pensée de Mgr Williamson. Le constat est clair.
Or, aujourd’hui, Benoît XVI dit la même chose. Il ne l’a pas toujours dit…Voyez mon « Regard sur le monde du 9 mars 2006 ». Mais il le dit aujourd’hui. Voyez son discours du 8 décembre 2005. Il part du fameux texte de l’Apocalypse de saint Jean « du combat de la femme et du dragon »…et à cette lumière, il poursuit :
« L'homme ne veut pas recevoir de Dieu son existence et la plénitude de sa vie. Il veut puiser lui-même à l'arbre de la connaissance le pouvoir de façonner le monde, de se transformer en un dieu en s'élevant à Son niveau, et de vaincre avec ses propres forces la mort et les ténèbres. Il ne veut pas compter sur l'amour qui ne lui semble pas fiable; il compte uniquement sur la connaissance, dans la mesure où celle-ci confère le pouvoir. Plutôt que sur l'amour, il mise sur le pouvoir, avec lequel il veut prendre en main de manière autonome sa propre vie. Et en agissant ainsi, il se fie au mensonge plutôt qu'à la vérité et cela fait sombrer sa vie dans le vide, dans la mort. L'amour n'est pas une dépendance, mais un don qui nous fait vivre. La liberté d'un être humain est la liberté d'un être limité et elle est donc elle-même limitée. Nous ne pouvons la posséder que comme liberté partagée, dans la communion des libertés: ce n'est que si nous vivons d'une juste manière, l'un avec l'autre et l'un pour l'autre, que la liberté peut se développer. Nous vivons d'une juste manière, si nous vivons selon la vérité de notre être, c'est-à-dire selon la volonté de Dieu. Car la volonté de Dieu ne constitue pas pour l'homme une loi imposée de l'extérieur qui le force, mais la mesure intrinsèque de sa nature, une mesure qui est inscrite en lui et fait de lui l'image de Dieu, et donc une créature libre. Si nous vivons contre l'amour et contre la vérité - contre Dieu -, alors nous nous détruisons réciproquement et nous détruisons le monde. Alors nous ne trouvons pas la vie, mais nous faisons le jeu de la mort. Tout cela est raconté à travers des images immortelles dans l'histoire de la chute originelle et de l'homme chassé du Paradis terrestre ».
Mais qui ne voit que c’est la même doctrine enseignée que celle de Mgr Williamson dans son texte du mois de mars 2006. Ce que Mgr Williamson dit, le pape le dit presque avec les mêmes mots.
« L'homme ne veut pas recevoir de Dieu son existence et la plénitude de sa vie. Il veut puiser lui-même à l'arbre de la connaissance le pouvoir de façonner le monde, de se transformer en un dieu en s'élevant à Son niveau, et de vaincre avec ses propres forces la mort et les ténèbres. Il ne veut pas compter sur l'amour qui ne lui semble pas fiable; il compte uniquement sur la connaissance, dans la mesure où celle-ci confère le pouvoir. Plutôt que sur l'amour, il mise sur le pouvoir, avec lequel il veut prendre en main de manière autonome sa propre vie.
Jean-Paul II, déjà, dans sa Lettre apostolique « Ecclesia in Europa » disait, sous l’influence du Cardinal Ratzinger,  lui aussi,  la même chose :
À la racine de la perte de l'espérance ( en Europe)  se trouve la tentative de faire prévaloir une anthropologie sans Dieu et sans le Christ. Cette manière de penser a conduit à considérer l'homme comme « le centre absolu de la réalité, lui faisant occuper faussement la place de Dieu. On oublie alors que ce n'est pas l'homme qui fait Dieu, mais Dieu qui fait l'homme. L'oubli de Dieu a conduit à l'abandon de l'homme », et c'est pourquoi, « dans ce contexte, il n'est pas surprenant que se soient largement développés le nihilisme en philosophie, le relativisme en gnoséologie et en morale, et le pragmatisme, voire un hédonisme cynique, dans la manière d'aborder la vie quotidienne ». La culture européenne donne l'impression d'une « apostasie silencieuse » de la part de l'homme comblé qui vit comme si Dieu n'existait pas.
Dans une telle perspective prennent corps les tentatives, renouvelées tout récemment encore, de présenter la culture européenne en faisant abstraction de l'apport du christianisme qui a marqué son développement historique et sa diffusion universelle. Nous sommes là devant l'apparition d'une nouvelle culture, pour une large part influencée par les médias, dont les caractéristiques et le contenu sont souvent contraires à l'Évangile et à la dignité de la personne humaine. De cette culture fait partie aussi un agnosticisme religieux toujours plus répandu, lié à un relativisme moral et juridique plus profond, qui prend racine dans la perte de la vérité de l'homme comme fondement des droits inaliénables de chacun. Les signes de la disparition de l'espérance se manifestent parfois à travers des formes préoccupantes de ce que l'on peut appeler une « culture de mort ».
Mais c’est la même pensée qu’exprime Mgr Williamson. C’est la même pensée. Qui ne le voit.
Et voilà le drame aujourd’hui de Mgr Williamson : Il continue à condamner tout accord avec Rome, toute normalisation de la FSSPX avec Rome, toute collaboration avec Rome comme le souhaitait Mgr Lefebvre même au plus fort de la crise modernisme avec la réunion d’Assise en 1986, 1988, alors qu’il soutient les mêmes choses que Rome et le pape Benoît XVI. Oui ! Sur le formel de la crise, ils ont le même langage. Et Mgr Williamson ne s’en rend même pas compte…parce qu’il s’enferme dans sa propre pensée…Il faut absolument que ces amis lui ouvrent les yeux avant qu’il ne soit trop tard.
Nous sommes dans une situation difficile. Si la FSSPX se sort de cette difficile situation, ce sera la preuve qu’elle a été vraiment voulue de Dieu et que Mgr Lefebvre est un intercesseur puissant.
C’est ce que je crois toujours et ce que je croirai encore malgré toutes les difficultés que j’ai personnellement rencontrées de ses  autorités présentes.