19 mai 2012

[Dom Romain - cath.ch] FSSPX, on joue les prolongations. Mais peut-être avec un nouvel arbitre…

SOURCE - Dom Romain - cath.ch - 19 mai 2012

« Cité du Vatican, 16 mai 2012 (VIS). En début d'après-midi, la Salle de Presse du Saint-Siège a diffusé le communiqué suivant:
"Comme cela a été indiqué par la presse, aujourd'hui s'est tenue la session ordinaire de la Congrégation pour la doctrine de la foi, au cours de laquelle a notamment été discutée la question Fraternité St. Pie X.

A l'examen de la réponse de Mgr. Bernard Fellay, parvenue le 17 avril, ont été formulées certaines observations qui seront prise en compte lors des prochaines discussions entre le Saint-Siège et la Fraternité St. Pie X.

Etant donnée la position par eux prise, les cas des trois autres évêques de la Fraternité devront être traités séparément et individuellement" ».
Le communiqué de presse qui a suivi la réunion de la commission de la congrégation pour la doctrine de la foi est lapidaire : Les discussions continuent, mais chacun des évêques devra être traité séparément et individuellement; c’est une nouveauté et elle n’a rien d’étonnant.
La FSSPX
Mgr Fellay reste donc bien le personnage clé du dialogue avec Rome. Les « observations » dont parle le communiqué ne sont pas étonnantes. Après une non réponse et une réponse insatisfaisante, la dernière mouture proposée par le Supérieur Général a certainement fait l’objet d’une discussion. Comme le disait Mgr Juan Ignacio Arrieta, secrétaire du Conseil pontifical pour l’interprétation des textes législatifs, «on a pu éclaircir les problèmes doctrinaux même s’il n’est pas facile de mettre tout cela sur papier ». Il est évident aussi que les évêques et cardinaux sont très sensibles aux critiques incessantes des lefebvristes sur la « nouvelle messe », l’œcuménisme, la liberté religieuse, le concile en général et le pape dans certaines de ses activités pastorales.
 
Ce n’est certainement pas des questions de foi, mais bien plus un état d’esprit. Si l’Eglise reconnaît la Fraternité, il faut aussi que la fraternité reconnaisse l’Eglise, pas seulement dans la personne du Saint Père, mais aussi dans la réalité propre à chaque diocèse. De plus, la reconnaissance canonique implique que l’Eglise devra assumer des propos et des attitudes qui, dans la FSSPX, ne sont pas toujours « tissés dans la dentelle », et c’est un euphémisme. Mais ils n’ont pas le monopole de ce genre d’attitude (cf. l’encarté ci-dessous N°1).
 
On se souvient d’une lettre mémorable du cardinal Castrillon Hoyos à Mgr Fellay en 2002, suite à des échanges entre le Saint-Siège et la Fraternité. Le Cardinal se plaint amèrement de certaines déclarations publiques de Mgr Fellay et de membres de la Fraternité. La lecture de ce document semble montrer un changement de ton chez le Supérieur Général, surtout si on lit la lettre adressée aux trois évêques. A la proposition d’envisager une réconciliation pour Pâques 2001, Mgr Fellay est surpris et fait remarquer qu’«à l’intérieur de la Fraternité Saint-Pie X quelques problèmes surgiraient». Est-ce les mêmes « problèmes » que l’on retrouve aujourd’hui ? (cf. l’encarté ci-dessous N°2)
Les 3 évêques
Le « retour de manivelle » ne s’est pas fait attendre pour les trois évêques qui tentent de s’opposer à un accord avec Rome. Après une lettre très ferme de Mgr Fellay, la commission lui emboîte le pas. Ainsi donc chacun des signataires devra s’expliquer personnellement au sujet de sa relation avec le Magistère actuel de l’Eglise. L’Eglise prend très au sérieux la lettre rédigée par Tissier de Mallerais, Galarreta et Williamson. Ce qu’ils ont à dire, qu’ils le disent à Rome et qu’ils en assument les conséquences canoniques pour leur situation ecclésiale et au sein de la Fraternité. Le Supérieur Général avait bien indiqué que l’heure n’est plus aux tergiversations et que Le Saint Père désire clarifier la situation du mouvement fondé par Mgr Lefebvre. Sortant du bois juste avant une possible signature, les trois compères essaient d’entraîner à leur suite la Fraternité, remettant en cause le Supérieur et son Conseil.
 
On parle souvent de Mgr Williamson et de la tempête médiatique qu’il déclencha lors de la levée des excommunications. Mais on oublie un peu vite Mgr Tisier de Mallerais. C’est lui qui conduisit la délégation de la FSSPX lors des entretiens avec la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, il est aussi l’auteur d’un livre intitullé : "L'étrange Théologie de Benoît XVI. Herméneutique de continuité ou rupture?" (septembre 2010), un livre dans lequel il ne ménage pas ses critiques à l'égard de la théologie du pape actuel (cf. la recension de Massimo Introvigne), il faut croire que ses réflexions n’ont pas convaincu lors du dialogue avec Rome. Mais on vient de lui donner une seconde chance...
 
Pour ce qui de Mgr Williamson, son choix est fait. Il termine son dernier message hebdomadaire en disant : « De même qu’une branche saine greffée sur un arbre Conciliaire malade, la Fraternité se serait inévitablement laissée contaminer par la maladie Conciliaire. D’aucune façon une simple branche ne saurait guérir cette infection mortelle qui est répandue dans toute l’Église Conciliaire. » (Mgr Richard Williamson, newsletter du19 mai 2012.) MàJ 20 mai 20h00 pour ce paragraphe
Les prolongations
La prochaine étape décisive pourrait être le chapitre général de la FSSPX prévu en juillet prochain. Les capitulants pourront alors se prononcer clairement sur le désir et les conditions d’un accord avec Rome, peut-être en prenant connaissance du protocole prévu. Cette étape sera décisive pour l’actuel Supérieur Général, qui pourra alors compter ses troupes, et pour les trois autres évêques qui pourront proposer leur propre solution à la «question romaine». Solution qui semble être «"Nous sommes l’Eglises" et ce n’est pas une excommunication qui nous fait peur».
 
L’arbitre des négociations pourrait cependant changer. Le jour même de la réunion de la Commission, VIS donnait l’information suivante : « 16 mai 2012. Le Saint-Père a reçu ce matin en audience Mgr. Gerhard Ludwig Müller, Evêque de Ratisbonne ». Mgr Müller est lui-même membre de la commission, depuis 2007, et son nom a été souvent cité pour succéder à l’actuel Préfet, le cardinal Levada, qui aspire à la retraite. Peut-être que le Saint-Père espérait une conlusion de l’affaire d’Ecône avant le départ du Cardinal Levada, mais, si comme le dit le P. Lombardi, « Il serait prématuré de dire quand cela se terminera », il est probable que le changement à la tête de la CDF se fasse prochainement.

Toujours est-il que le vendredi 18 mai le Préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi a rencontré lui aussi le Saint-Père, à l'occasion de la réunion hebdomadaire. Et c’est lui qui, ayant écouté l’avis des uns et des autres, prendra la décision qu’il juge bonne pour le bien de l’Eglise et, à n'en pas douter, de la Fraternité.

Dom Romain