22/04/2008 Les intégristes refusent toujours un accord avec Rome
Malgré la main tendue par le pape l'an passé en       libéralisant l'ancien Missel, le successeur de Mgr Lefebvre dénonce       "l'illusion" d'espérer un accord tant que Vatican II ne sera       pas totalement remis en cause       
Il n’y aura pas d’accord de sitôt entre la Fraternité Saint-Pie        X, héritière de Mgr Marcel Lefebvre, et l’Église catholique. Mgr        Bernard Fellay, son actuel supérieur, l’affirme publiquement dans une        lettre rédigée en Suisse le 14 avril et diffusée, dimanche 20 avril, à        l’attention des « amis et bienfaiteurs » de la FSPX.
Rien, pas même le motu proprio Summorum Pontificum (signé par Benoît        XVI en juillet et entré en application le 14 septembre 2007) facilitant        l’usage du Missel tridentin, pourtant considéré comme un geste de        bienveillance en direction des traditionalistes et intégristes, n’est        à même d’infléchir la position lefebvriste. Mgr Fellay reproche même        à « quelques-uns » de ses amis de s’être « laissé prendre à ce        jeu d’illusions ».
L’illusion, pour lui, serait de penser que l’Église catholique est        en train de revenir sur les orientations fondamentales exprimées par        Vatican II. « Le motu proprio qui introduit une espérance de changement        vers le mieux au niveau liturgique, écrit Mgr Fellay, n’est pas        accompagné par des mesures logiquement corrélatives dans les autres        domaines de la vie de l’Église. Tous les changements introduits au        Concile et dans les réformes post-conciliaires que nous dénonçons,        parce que l’Église les a précisément déjà condamnés, sont confirmés.» 
"Résistance parfois farouche d’épiscopats entiers"
Conclusion        du responsable intégriste : « La Fraternité Saint Pie X ne peut pas        “signer d’accord”. Elle se réjouit franchement de la volonté        papale de réintroduire le rite ancien et vénérable de la sainte Messe,        mais découvre aussi la résistance parfois farouche d’épiscopats        entiers. Sans désespérer, sans impatience, nous constatons que le temps        d’un accord n’est pas encore venu. »
Celui qui fut ordonné par Mgr Lefebvre en désobéissance ouverte avec        le pape (ce qui provoqua le schisme) confirme son refus d’aller plus        loin, mais demande toujours à Rome « l’annulation du décret        d’excommunication de 1988 ».
C’est donc une fin de non-recevoir que vient d’exprimer la        Fraternité Saint-Pie X, moins d’un an après la publication du motu        proprio. Comme Mgr Fellay l’indique dans sa lettre, beaucoup, à Rome        comme dans les milieux traditionalistes (partisans de l’ancien Missel        restés ou revenus en communion avec le Saint-Siège), espéraient que la        publication de ce document de Benoît XVI contribuerait à apaiser cette        crise et, pourquoi pas, à résorber le schisme.
Il n’en est rien. Cette prise de position de Mgr Fellay – qui        marque une nouvelle étape dans le contentieux – a du moins le mérite        de sortir d’une ambiguïté : ce n’est pas tant la liturgie, aspect le        plus visible, qui fâche le monde intégriste, que le noyau théologique        de Vatican II.
De ce point de vue, la liste des récriminations de deux pages exprimées        dans cette lettre par Mgr Fellay ne laisse aucune perspective de        solutions. « Rien n’a changé, insiste-t-il, dans la volonté de Rome        de poursuivre les orientations conciliaires, malgré quarante années de        crise » : (…) « un mode de présence de l’Église dans le monde,        beaucoup plus horizontal », la dénomination classique de “fausses        religions” a complètement disparu du vocabulaire ecclésiastique » ;        « l’Église catholique s’engage officiellement à ne pas convertir        les “orthodoxes” et “les juifs” ; « le dogme “hors de l’Église        pas de salut” (…) a connu une réinterprétation »… Vingt ans après        1988, la rupture n’est pas près d’être surmontée.
Jean-Marie GUÉNOIS
