Pour le supérieur général de la Fraternité       Saint-Pie X, «le temps d'un accord n'est pas encore venu».       
La possibilité d'une régularisation des relations entre Rome et Ecône       s'éloigne à nouveau. L'on pensait pourtant que la publication par Benoît       XVI du Motu Proprio qui libéralise l'ancienne messe pourrait débloquer       les relations entre Rome et les fils spirituels de Mgr Marcel Lefebvre.       D'autant plus que le dialogue avait été renoué en été 2005. Le supérieur       général de la Fraternité sacerdotale Saint-Pie X, le Valaisan Bernard       Fellay, avait alors rencontré le pape dans un climat que les deux parties       avaient qualifié de nouveau. Décision avait ainsi été prise de poser       les jalons pour résoudre progressivement les problèmes de fond. Mais dix       mois après le geste du pape envers les tenants de l'ancienne liturgie, la       réponse d'Ecône, qui dit ne pas pouvoir signer d'accord, montre que la réconciliation       n'est pas pour demain, ni sans doute pour après-demain.
Ecône sur ses positions
Un accord entre traditionalistes et Rome n'est plus à l'ordre du jour.       Dans sa Lettre aux amis et bienfaiteurs du 14 avril, qu'a d'ailleurs citée       lundi Rhône FM, Mgr Bernard Fellay, le No 1 au sein du mouvement d'Ecône,       a en effet écrit sans ambiguïté: «La Fraternité Saint-Pie X se réjouit       franchement de la volonté papale de réintroduire le rite ancien et vénérable       de la sainte Messe, mais découvre aussi la résistance parfois farouche       d'épiscopats entiers. Sans désespérer, sans impatience, nous constatons       que le temps d'un accord n'est pas encore venu. Cela ne nous empêche pas       de continuer d'espérer, de continuer le chemin défini dès l'an 2000.       Mais il serait très imprudent et précipité de se lancer inconsidérément       dans la poursuite d'un accord pratique qui ne serait pas fondé sur les       principes fondamentaux de l'Eglise, tout spécialement sur la foi.»
En fait, Ecône ne veut pas laisser du temps au temps, mais attend carrément       de Rome un changement d'orientation, ce qui apparaît peu indiqué en l'état       pour trouver un terrain d'entente... Mgr Bernard Fellay s'explique ainsi:       «Le Motu Proprio qui introduit une espérance de changement vers le mieux       au niveau liturgique n'est pas accompagné par des mesures logiquement       corrélatives dans les autres domaines de la vie de l'Eglise. Tous les       changements introduits au Concile et dans les réformes post-conciliaires       que nous dénonçons, parce que l'Eglise les a précisément déjà       condamnés, sont confirmés. Il faut conclure que rien n'a changé dans la       volonté de Rome de poursuivre les orientations conciliaires, malgré       quarante années de crise, malgré les couvents dépeuplés, les presbytères       abandonnés, les églises vides. Les universités catholiques persistent       dans leurs divagations, l'enseignement du catéchisme reste une inconnue       alors que l'école catholique n'existe plus comme spécifiquement       catholique: c'est devenu une espèce éteinte... Voici pourquoi la       Fraternité Saint-Pie X ne peut pas signer d'accord.»
Une chance perdue
Pourtant, avec Benoît XVI, se présente pour Ecône une chance       historique de tourner la page de la confrontation. Le pape actuel connaît       et comprend en effet fort bien les mouvements traditionalistes. Alors       qu'il était encore cardinal, Joseph Ratzinger avait en effet déjà trouvé       un accord avec Mgr Lefebvre pour réconcilier la Fraternité Saint Pie X       avec Rome. Le cardinal avait rencontré plusieurs fois Mgr Lefebvre et un       protocole d'accord sous la forme d'une déclaration en cinq points avait même       été signé par les deux parties le 5 mai 1988. A quelles conditions? Mgr       Lefebvre nous avait alors déclaré lors d'une interview: «Nous       reconnaissons le Concile (réd.: Vatican II) interprété à la lumière       de la tradition, mais Rome accepte le principe de la discussion sur       certains points qui nous semblent difficilement conciliables avec la       tradition.» Mais finalement tout avait capoté à cause de l'absence de       date donnée par Rome pour l'ordination d'un évêque membre de la       Fraternité traditionaliste. Un accord sur le plan doctrinal et       disciplinaire avait pourtant été trouvé. Rome laissait Ecône faire       l'expérience de la tradition, pour reprendre une expression chère à Mgr       Lefebvre.
Aujourd'hui, Ecône semble fermer une nouvelle fois la porte à un       rapprochement. Sans réaliser qu'un autre Joseph Ratzinger ne se présentera       sans doute pas...
