14 septembre 2007





Merci Très Saint Père!
14 septembre 2007 - barroux.org
Vendredi 14 septembre 2007
Exaltation de la Sainte Croix


MERCI, TRÈS SAINT-PÈRE !
C’est dans un esprit filial que nous recevons le Motu proprio Summorum Pontificum cura. Nous ne sommes pas habilités, ni les évêques ni personne d’ailleurs, à donner de bonnes ou de mauvaises notes aux documents émanant du souverain pontife. Nous sommes en revanche dans le devoir de recevoir ce document et d’essayer d’en comprendre les enjeux. Il serait simpliste de croire que la décision du pape fût une pure séduction vis-à-vis de la Fraternité Saint-Pie X, même si son coeur (et le nôtre tout autant) désire ardemment des accords. Mais l’enjeu est plus vaste. Il s’agit avant tout de chasser l’esprit de rupture qui, tel une fumée de Satan, a investi une partie non négligeable de l’Église. On pourrait comparer – non sans quelque exagération, bien sûr – l’action du Saint-Père à un grand exorcisme fait de prières et de gestes. Cet esprit mauvais qu’il faut chasser est celui de rupture. C’est la théorie selon laquelle il y a une discontinuité entre l’Église anté-conciliaire et l’Église post-conciliaire. Le bon esprit est celui de la continuité ou plutôt, pour reprendre les termes de Benoît XVI, celui de la réforme, c’est-à-dire de la fidélité à la Tradition dans le dynamisme dont le principe a été donné par Jean XXIII : « Il est nécessaire que cette doctrine certaine et immuable, qui doit être fidèlement respectée, soit approfondie et présentée d’une façon qui corresponde aux exigences de notre temps » (Discours d’ouverture du concile, 11 octobre 1962). Le Saint-Père s’attaque donc à cet esprit mauvais. D’abord par des discours qui sont comme des prières rituelles. Nous avons tous en mémoire celui qu’il prononça à la Curie romaine le 22 décembre 2005, et dans lequel il décrit la situation de l’Église, situation qui ressemble à celle d’un possédé. « Le cri rauque de ceux qui, en raison de la discorde, se dressent les uns contre les autres, les bavardages incompréhensibles, le bruit confus des clameurs ininterrompues a désormais rempli presque toute l’Église en faussant, par excès ou par défaut, la juste doctrine de la foi » : cette description est celle que saint Basile faisait de l’Église en 341, après le concile de Nicée. Rien de nouveau sous le soleil. Dans ce discours, Benoît XVI condamne sans appel l’esprit de rupture et lui écrase la tête en en dénonçant les principes et les principaux agents que sont les médias et les théologiens modernistes.
Autre texte important : la mise au point en date du 10 juillet dernier de la Congrégation pour la doctrine de la foi au sujet d’un point de doctrine (le fameux subsistit in).
Songeons enfin à un autre texte très vigoureux : la conférence du cardinal Arinze, préfet de la Congrégation pour le culte divin et la discipline des sacrements, pour les 50 ans de l’Institut supérieur de liturgie de Paris. Ce discours est un grave avertissement contre l’entreprise d’innovation perpétuelle et d’abus qui a pénétré le fonctionnement de cet institut officiel de l’Église. Il est évident que l’esprit de rupture s’est introduit dans l’Église d’autant plus facilement que les bouleversements de la liturgie ont laissé croire que l’on changeait de foi. Ce qui, dans le culte, était sacro-saint et obligatoire, est devenu progressivement complètement interdit. Et ce qui était interdit est devenu obligatoire.
Après les discours vient le tour des gestes, comme dans un exorcisme. Le Motu proprio redonnant à tous les prêtres et aux groupes stables de fidèles l’usage de l’édition typique de 1962 du missel romain est la preuve qu’il n’y a pas de rupture dans l’histoire de l’Église. Le Saint-Père va loin dans cette continuité puisqu’il affirme qu’il n’y a qu’un seul rite sous deux formes. Benoît XVI colmate la brèche.
Pour finir, il faut se poser la question de l’intérêt de garder le missel de 1962 si vraiment il y a continuité. Pourquoi ne pourrait-on pas vivre les valeurs du missel 62 dans celui de 69 ? C’est la question que nous ont posée des évêques. La réponse est assez simple. Sans toucher à la question grave des abus dont souffrent encore trop de fidèles ni à celle de la réforme de la réforme qui devrait redonner au culte une plus grande sacralité et des signes plus forts de foi envers la présence réelle, il est indéniable qu’il y a une différence d’approche théologique entre les deux missels. Le Père Cassingena-Trévedy, dans son livre Te igitur (Ad solem, 2007), résume de façon positive cette différence : l’un, de tradition grégorienne, est la liturgie du « ciel sur la terre », « un ciel qui s’impose à la terre dans sa radicale et somptueuse altérité » ; l’autre, de tradition plus augustinienne, est la liturgie du « ciel pour la terre » avec le souci, parfois exagéré dit-il, de l’adaptation au monde. L’un exprime plus la hiérarchie de l’Église ; l’autre exprime davantage son caractère de communion fraternelle. C’est pourquoi nous préférons le missel de 62, préférence motivée par des aspects théologiques et inscrite dans nos Déclarations.
Maintenant que la continuité de l’Église avec son passé est plus claire, prions pour que l’unité au sein de l’Église puisse se faire dans la charité. Ainsi soit-il !
+ F. Louis-Marie, o. s. b.
abbé